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12 juin 2009

TAF, 12 juin 2009, B-2152/2008 (d)

sic! 5/2010, p. 348-352, « Tarif AS Radio (Swissperform) » ; medialex 3/2009, p. 176-177 (rés.) ; gestion collective, approbation des tarifs, autonomie des sociétés de gestion, obligation de collaborer, équité du tarif, division du tarif, tarifs séparés, Tarif A Radio, Tarif AS Radio, SWISSPERFORM, Internet, simulcasting, inopportunité, pouvoir de cognition, pouvoir d’appréciation, novae, unité de la procédure ; art. 49 lit. c PA, art. 35 LDA, art. 47 al. 1 LDA, art. 59 al. 1 LDA.

La procédure de recours devant le TAF contre les décisions de la CAF se distingue de l'ancienne procédure de recours devant le TF, en vigueur jusqu'à la fin de l'année 2006. Désormais, devant le TAF, le recourant peut invoquer l'inopportunité (art. 49 lit. c PA). Le pouvoir de cognition du TAF est ainsi entier et les vrais « novae » (« tatsächliche Noven ») sont admissibles (c. 2.1). À l'instar de la CAF, le TAF doit toutefois respecter une certaine autonomie des sociétés de gestion dans l'établissement des tarifs. Le TAF doit en outre faire preuve d'une certaine retenue dans l'examen des décisions de l'autorité spécialisée et indépendante que constitue la CAF (c. 2.2). Le TAF doit par ailleurs respecter le principe de l'unité de la procédure (c. 2.2 in limine). Dans la procédure d'approbation des tarifs, tant devant la CAF que devant le TAF, le degré de l'obligation de collaborer des sociétés de gestion et des associations représentatives des utilisateurs est plus élevé que dans une procédure administrative ordinaire, étant donné qu'elles négocient en principe les tarifs entre elles (c. 2.3). L'autonomie dont jouissent les sociétés de gestion dans l'établissement des tarifs n'empêche pas la CAF, dans l'examen de l'équité du tarif (art. 59 al. 1 LDA), de se pencher sur des questions formelles telles que la division du recouvrement des rémunérations en plusieurs tarifs (c. 3.1). Par analogie avec l'art. 47 al. 1 LDA et par mesure de simplification, il est dans l'intérêt des utilisateurs d'exiger que les formes d'utilisation connexes sur le plan économique fassent l'objet d'un même tarif et soient réglées selon les mêmes critères (c. 3.1). En l'espèce, sur la base des faits portés à la connaissance de la CAF par les parties à la procédure, il est soutenable de considérer qu'il n'y a pas de raison d'établir des tarifs séparés (pour les utilisations prévues par l'art. 35 LDA) — l'un pour la diffusion classique (Tarif A Radio) et l'autre pour la diffusion sur Internet (simulcasting notamment) (Tarif AS Radio). Vu l'obligation de collaborer des parties, SWISSPERFORM doit supporter les conséquences du fait que SRG SSR idée suisse n'a pas fourni des éléments qui auraient permis de justifier l'établissement de deux tarifs séparés (c. 3.3). La présente décision n'empêche pas SWISSPERFORM de soumettre les mêmes questions à la CAF dans une nouvelle procédure au cours de laquelle l'état de fait pourrait être complété par les parties (c. 3.3 in fine).

29 février 2008

TAF, 29 février 2008, B-5342/2007 (f)

sic! 10/2008, p. 738 (rés.), « Whale / wally (fig.) » ; usage de la marque, vêtements, preuve, catalogue, t-shirt, Internet, liste de revendeurs, Suisse, usage sérieux, novae, procédure d’opposition, recours ; art. 11 LPM, art. 12 LPM, art. 32 LPM.

Bien qu’il puisse objectivement être attendu de l’opposant qu’il produise, dans le cadre de la procédure d’opposition devant l’IPI, les documents nécessaires pour rendre vraisemblable (art. 32 LPM [c. 6]) l’usage de sa marque, des novae peuvent être pris en considération dans la procédure de recours dans la mesure où ils servent à éliminer des ambiguïtés et à préciser les faits relatifs à l’usage (c. 7). En relation avec des catalogues, un t-shirt bleu roi portant deux étiquettes est à même de prouver l’utilisation de la marque opposante « WHALE » en lien avec des vêtements (classe 25) durant la période de contrôle (c. 7.1). Tel n’est en revanche pas le cas d’un catalogue 2007 (car la période de contrôle s’achève le 22 décembre 2006) (c. 7.2), d’un extrait du site Internet de la recourante daté d’après la fin de la période de contrôle (et qui ne permet pas de démontrer que le site a été consulté par des consommateurs suisses et que des achats y ont été effectués) (c. 7.3), d’une liste de 427 revendeurs de vêtements (non datée et sur laquelle la marque opposante n’est pas représentée) (c. 7.4), d’extraits de sites Internet de boutiques (offrant des produits de la marque opposante) datés d’après la fin de la période de contrôle (et qui ne permettent pas de démontrer que les sites ont été consultés par des consommateurs suisses et que des achats y ont été effectués) (c. 7.5, 7.6 et 7.8), d’un extrait du site Internet d’un magasin en ligne (offrant un t-shirt de la marque opposante) daté d’après la fin de la période de contrôle (et qui ne permet pas de démontrer que le site a été consulté par des consommateurs suisses et que des commandes y ont effectivement été passées) (c. 7.7), d’un extrait du site Internet de la recourante daté du 5 décembre 2006 (mais qui ne permet pas de démontrer que le site a été consulté par des consommateurs suisses et que des achats y ont été effectués) (c. 7.9) et d’une liste de revendeurs datée du 5 décembre 2006 (sur laquelle la marque opposante n’est pas représentée) (c. 7.9). Parmi les catalogues (portant la marque opposante) produits par la recourante, seuls les catalogues 2001 et 2005 – qui s’adressent spécifiquement à des revendeurs suisses – sont aptes à démontrer l’usage de la marque opposante sur le territoire suisse durant la période de contrôle (c. 7.10). Les seules (trois [c. 7.1 et 7.10] sur quatorze) pièces qui rendent, dans une certaine mesure, probable l’utilisation de la marque opposante pour des vêtements durant la période de contrôle sont, dans leur ensemble, particulièrement ténues quant à leur aptitude à rendre crédible l’usage de la marque en relation avec des produits de masse bon marché. Elles ne contiennent notamment aucun indice sur l’existence de ventes réelles et régulières (c. 7.11). Force est donc de constater que la recourante n’a pas été à même de rendre vraisemblable un usage commercial régulier, c’est-à-dire un usage (art. 11-12 LPM [c. 5-5.1]) sérieux (c. 5 et 5.2) de sa marque en Suisse (c. 7.11).

wally (fig.)
wally (fig.)

26 septembre 2008

TAF, 26 septembre 2008, B-246/2008 (d)

sic! 1/2009, p. 38 (rés.), « Red Bull / Dancing Bull » ; usage de la marque, Suisse, vodka, preuve, vraisemblance, liste de prix, facture, novae, recours, frais de procédure, renvoi de l'affaire ; art. 11 LPM, art. 12 LPM, art. 32 LPM.

En vertu de l'art. 32 LPM, il appartient à l'opposant de rendre vraisemblable l'usage de sa marque, non pas à l'IPI. Il est possible d'apporter de nouveaux éléments de preuve dans le cadre de la procédure de recours (c. 2). En l'espèce, les nouvelles preuves (listes de prix et factures établissant la vente à des détaillants suisses, durant la période de cinq ans, de plusieurs centaines de bouteilles de vodka munies de la marque) rendent suffisamment vraisemblable l'usage de la marque et conduisent à l'admission du recours (c. 3). L'opposant doit toutefois supporter la moitié des frais de la procédure de recours, car il n'a produit ces preuves décisives qu'au stade du recours (c. 4).

22 avril 2010

TAF, 22 avril 2010, B-580/2010 (f)

sic! 9/2010, p. 636 (rés.), « JeanMarie Farina (fig.) ; Jean Marie Farina Roger & Gallet (fig.) / Johann Maria Farina zur Madonna Köln Royal Echt Kölnischwasser (fig.) » ; usage de la marque, Roger & Gallet, mode, forme ne divergeant pas essentiellement de la marque, délai, motifs relatifs d’exclusion, novae, recours ; art. 11 al. 2 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 32 LPM, art. 22 al. 3 OPM.

Lorsque l'IPI rejette des oppositions en raison du fait que l'usage des marques opposantes n'a pas été rendu vraisemblable (art. 32 LPM), seule la question de image l'usage des marques peut être examinée par le TAF (à l'exclusion de la question — non traitée par l'IPI — de savoir s'il existe des motifs relatifs d'exclusion) (c. 1.2-1.3). La période de cinq ans (art. 12 al. 1 LPM) pendant laquelle l'usage de la marque antérieure doit être rendu vraisemblable (art. 32 LPM) est à compter rétroactivement depuis la date à laquelle le défaut d'usage est allégué (art. 22 al. 3 OPM) par le défendeur (c. 2). Des novae peuvent être pris en considération dans la procédure de recours s'ils servent à éliminer des ambiguïtés et à préciser les faits relatifs à l'usage (c. 5). Le marché de la mode est particulièrement dynamique et amène ses acteurs à adapter leurs marques. Les signes utilisés en l'espèce (cf. Fig. 154d) se distinguent toutefois trop des marques opposantes enregistrées — dont le cœur distinctif, à savoir Jean Marie Farina et Roger & Gallet, est clairement et fortement transformé — pour que leur usage puisse être assimilé à l'usage des marques enregistrées au sens de l'art. 11 al. 2 LPM (c. 5.2.1 et 5.2.3). La question du sérieux de l'usage peut ainsi rester ouverte (c. 3.2 et 5.2.3).

Fig. 154a – Jean Marie Farina (fig.) (opp. 1)
Fig. 154a – Jean Marie Farina (fig.) (opp. 1)
Fig. 154b – Jean Marie Farina Roger & Gallet (fig.) (opp. 2)
Fig. 154b – Jean Marie Farina Roger & Gallet (fig.) (opp. 2)
Fig. 154c – Johann Maria Farina zur Madonna Köln Royal Echt Kölnischwasser (fig.) (att.)
Fig. 154c – Johann Maria Farina zur Madonna Köln Royal Echt Kölnischwasser (fig.) (att.)
Fig. 154d – Formes utilisées (opp.)
Fig. 154d – Formes utilisées (opp.)

19 juillet 2010

TAF, 19 juillet 2010, B-892/2009 (d)

sic! 11/2010, p. 796 (rés.), « Heidiland / Heidi-Alpen » ; usage de la marque, bio, fromage, produits de luxe, forme ne divergeant pas essentiellement de la marque, brochure, étiquette, publicité, dégustation, livraison, vraisemblance, usage sérieux, usage par représentation, contrat de licence, indication de provenance, usage à titre de marque, délai, courrier, novae, témoin, recours ; art. 14 al. 1 lit. c PA, art. 11 al. 1, 2 et 3 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 32 LPM, art. 22 al. 3 OPM.

La période de cinq ans (art. 12 al. 1 LPM) pendant laquelle l’usage de la marque antérieure doit être rendu vraisemblable (art. 32 LPM) est à compter rétroactivement depuis la date à laquelle le défaut d’usage est allégué par le défendeur dans sa première réponse de la procédure d’opposition (art. 22 al. 3 OPM) et non pas depuis la date (antérieure) à laquelle le défaut d’usage est allégué par le (futur) défendeur dans un courrier au (futur) opposant (c. 3.4-3.5). Des novae peuvent être produits dans une procédure de recours devant le TAF contre une décision concernant une opposition (c. 4.2). Les adjonctions étant de nature descriptive, les formes « HEIDILAND Käse », « Bio VK Heidiland Käse », « Bio- Heidilandkäse » et « Heidiland Bio Käse » ne divergent pas essentiellement de la marque « HEIDILAND » au sens de l’art. 11 al. 2 LPM (c. 5.2). Des brochures et des étiquettes permettent de rendre vraisemblable l’usage – au sens de l’art. 11 al. 3 LPM (c. 5.3) – par une preneuse de licence (c. 6.6) de la marque « HEIDILAND » pour du fromage (classe 29) (c. 6.8-6.9). Le fromage concerné n’étant ni un produit de luxe ni un produit de consommation courante, un usage de la marque (art. 11 al. 1 LPM) d’intensité moyenne doit être rendu vraisemblable sur une certaine durée (c. 5.1 et 6.9). Des publicités dans des brochures touristiques des années 2004 à 2007, deux dégustations de 3 jours en 2005 et une seule livraison de 567 kg (sur un total de livraisons annuelles prétendu de plus de 20 tonnes) à un intermédiaire fin 2007 ne suffisent pas à rendre vraisemblable un usage sérieux de la marque « HEIDILAND » pour ce fromage (c. 6.9). En outre, dans l’indication « Heidiland Bio Käse », le signe « HEIDILAND » est compris comme une indication de provenance et n’est dès lors pas utilisé comme marque (propre à distinguer les produits d’une entreprise) (c. 5.1 in fine et 6.10). À la différence de l’IPI en procédure d’opposition, le TAF peut entendre des témoins en procédure de recours (art. 14 al. 1 lit. c PA). Le TAF y renonce en l’espèce (c. 4.3 et 7).

24 juillet 2013

TFB, 24 juillet 2013, O2012_001 (d)

Droit à la délivrance du brevet, échange d'écritures, réplique, duplique, demande reconventionnelle, novæ, tardiveté ; art. 3 LBI, art. 229 al. 1 lit. a CPC, art. 229 al. 1 lit. d CPC.

La détermination de la demanderesse, se rapportant à la duplique de la défenderesse et déposée deux mois et demi après ladite duplique, est clairement tardive et doit donc être rejetée (c. 8). La question de savoir qui a réalisé une invention et à qui elle appartient est un point central faisant partie des fondements de la demande qui doit être abordé dans celle-ci, et non postérieurement dans la duplique (c. 8). Une fois l'échange d'écritures clos, les parties ne peuvent plus invoquer des faits ou des questions supplémentaires ou déposer de nouveaux moyens de preuve, à moins qu'il ne s'agisse de novæ au sens de l'art. 229 al. 1 CPC. [AC]

09 janvier 2015

KG LU, 9 janvier 2015, DOK 000 006 302 (d)

sic! 6/2015, p. 392-395, « Aquaterra Travel (fig.) » ; motifs relatifs d’exclusion, cercle des destinataires pertinent, risque de confusion admis, similarité des produits ou services, similarité des signes, marque combinée, action en interdiction, risque de récidive, moteur de recherche, Google AdWords, Internet, site Internet, réplique, novae, Afrique, agence de voyages, élément verbal, élément figuratif ; art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 55 al. 1 lit. a LPM, art. 229 CPC.

L’art. 229 CPC régit les conditions auxquelles les faits et moyens de preuve nouveaux sont admis aux débats principaux. Selon l’ATF 140 III 312, c. 6.3.2.3, la phase de l’allégation est close après un double échange d’écritures ou, comme en l’espèce, quand une partie a renoncé à son droit de réplique. Le fait que la plaignante ait renoncé à plaider une deuxième fois ne fait pas perdre aux défendeurs leur droit à s’exprimer une deuxième fois sans restriction et à apporter des novae (c. 3.1). La plaignante a déposé une marque combinée consistant en une image des contours du continent africain avec les mots « Aquaterra Travel ». La marque est employée en relation avec un site Internet dédié à l’organisation de voyages en Afrique (c. 6.1). Dans une campagne « Google AdWords », les défendeurs ont utilisé l’expression « Aquaterra Travel ». De ce fait, leur annonce apparaissait dans les premiers résultats suite à une recherche portant sur cette expression, et renvoyait à leur propre site. L’expression « Aquaterra Travel » apparaissait également dans leur annonce (c. 6.2). Le signe utilisé par les défendeurs est identique à la partie verbale de la marque combinée. L’élément verbal constitue l’élément essentiel de la marque, car une image représentant les contours de l’Afrique n’a pas en elle même une forte valeur de reconnaissance. Les deux signes sont donc similaires (c. 8.2.1). Les deux parties sont actives dans la même branche et dans le même segment de marché. Bien que les défendeurs limitent leurs prestations à Madagascar et que la demanderesse offre ses services dans toute l’Afrique, les deux parties offrent des services similaires (c. 8.2.2). Les arrangements offerts constituent des voyages spéciaux, qui impliquent en principe une planification et une prise de contact avec l’agence concernée et ne sont pas réservés sans réflexion. Cela dit, les cercles de destinataires sont très hétérogènes, et comprennent aussi des personnes inexpérimentées et inattentives. Une recherche peut aisément éveiller l’impression que le site des défendeurs est en relation avec l’offre de la plaignante, d’autant plus que l’annonce des défendeurs commence par l’expression « Aquaterra Travel », en caractères gras. Même si la personne consultant l’annonce remarque ses autres termes, il n’est pas exclu qu’elle puisse conclure à un lien avec la plaignante. Le risque de confusion doit donc être admis (c. 8.2.3). Les défendeurs ont ainsi violé le droit à la marque de la plaignante (c. 8.3). Bien qu’ils aient depuis supprimé leur campagne « Google Adwords » (c. 9.1), il existe un risque de récidive, puisqu’ils ont contesté à plusieurs reprises l’illicéité de leur comportement (c. 9.3). Comme le requiert la plaignante, il leur est dès lors fait interdiction d’utiliser à l’avenir le signe « Aquaterra Travel », sous n’importe quelle forme (c. 12). [SR]

Aquaterra Travel (fig.)
Aquaterra Travel (fig.)

05 mars 2014

HG AG, 5 mars 2014, HOR.2012.23 (d)

sic! 9/2014, p. 545-554, « Rollmate » ; conditions de la protection du design, novae, égouttoir mobile, principe de la rapidité de la procédure, principe de la bonne foi en procédure, qualité pour agir du preneur de licence, présomption de la nouveauté du design, présomption de l’originalité du design, présomption du droit de déposer un design, nullité d’un design, fardeau de la preuve, fait dirimant, représentation du design, étendue de la protection, originalité en droit des designs, nouveauté en droit des designs, impression générale, souvenir à court terme, caractère techniquement nécessaire, cercle des destinataires pertinents, degré d’attention accru, concurrence déloyale, concurrents, risque de confusion nié, numerus clausus des droits de propriété intellectuelle ; art. 8 CC, art. 1 LDes, art. 2 al. 1 LDes, art. 2 al. 3 LDes, art. 4 lit. a LDes, art. 4 lit. b LDes, art. 4 lit. c LDes, art. 8 LDes, art. 19 al. 1 lit. b LDes, art. 21 LDes, art. 35 al. 4 LDes, art. 3 al. 1 lit. d LCD, art. 3 al. 1 lit. e LCD, art. 9 al. 1 LCD, art. 52 CPC, art. 124 al. 1 CPC, art. 229 al. 1 lit. a CPC, art. 229 al. 1 lit. b CPC, art. 229 al. 2 CPC.

Les faits et moyens de preuves nouveaux ne peuvent plus être invoqués que de manière limitée après un second échange d’écritures. Ne sont alors procéduralement plus admissibles que les novae proprement dit (art. 229 al. 1 lit. a CPC) ou les novae improprement dit qui, en dépit de la diligence requise, ne pouvaient être invoqués plus tôt (art. 229 al. 1 lit. bCPC). Ces novae doivent dans tous les cas être invoqués immédiatement après leur découverte. Les conserver « en réserve » pendant des semaines ou des mois jusqu’à l’audience principale viole les principes du respect des règles de la bonne foi en procédure (art. 52CPC), ainsi que de la conduite rapide de la procédure au sens de l’art. 124 al. 1 CPC (c. 2.2). Invoquer comme en l’espèce des novae ou de faux novae plus de trois semaines après leur découverte est notoirement tardif (c. 2.3.2). En vertu de l’art. 35 al. 4 LDes, celui qui est au bénéfice d’une licence exclusive dispose de la qualité pour agir, indépendamment de l’inscription de la licence au registre, pour autant que le contrat de licence ne l’exclue pas explicitement. L’art. 35 al. 4 LDes confère ainsi au preneur de licence exclusif un droit d’agir général et indépendant. L’autorisation d’agir peut ensuite être limitée, matériellement, temporellement ou territorialement, par la portée de la licence (c. 3.2.1). Le tribunal considère qu’une confirmation écrite qu’une licence d’exploitation et de commercialisation du design enregistré « Rollmatte » pour la Suisse a été accordée au preneur de licence par le bénéficiaire de l’enregistrement de ce design, sans aucune restriction quant à la matière, ni quant au temps, constitue la preuve indirecte tant de l’existence d’un contrat de licence exclusive valant sans limitation pour l’ensemble du territoire de la Suisse, que de la qualité pour agir du preneur de licence (c. 3.2.2). La présomption de validité d’un design enregistré déduite de l’art. 21 LDes concerne les exigences de nouveauté et d’originalité du design, ainsi que celle se rapportant à la qualité pour le déposer. Cette présomption ne porte par contrepas sur le caractère techniquement nécessaire ou non du design, et il n’y a pas de raison d’en étendre le champ d’application au-delà de la lettre même de l’art. 21 LDes. Il devrait par conséquent revenir au titulaire du droit au design d’établir que les caractéristiques du design enregistré ne découlent pas exclusivement de sa fonction technique, au sens de l’art. 4 lit. c LDes. Comme toutefois il résulte d’une interprétation systématique de la LDes que le motif d’exclusion à l’enregistrement des caractéristiques techniquement nécessaires a été conçu par le législateur comme une exception à la protection qui ne doit être retenue que lorsque le caractère imposé par la technique d’un produit est établi, il s’agit d’un fait dirimant dont la preuve incombe à celui qui se prévaut de la nullité du design considéré (cons. 5.2). L’art. 4 lit. a LDes trouve application lorsque les illustrations déposées ne permettent pas de discerner clairement quel est l’objet de la protection ou lorsque la représentation qui en est donnée n’est pas suffisamment concrète. L’art. 19 al. 1 lit. b LDes ne précise pas quel doit être le contenu de la représentation du design que doit comporter le dépôt, dont il dit seulement qu’elle doit se prêter à la reproduction. Ce sont toutefois les représentations déposées qui constituent la base de la protection et leur choix est donc de grande importance, en particulier pour la détermination de l’étendue de la protection au sens de l’art. 8 LDes, et pour l’examen des conditions matérielles de la protection selon l’art. 2 LDes. N’est ainsi en particulier protégé que ce qui peut être reproduit sur la base de l’ensemble des représentations déposées ; et le titulaire d’un design ne peut pas se prévaloir dans la détermination du champ de protection de caractéristiques qui ne sont pas exprimées par les représentations déposées. De petites différences entre les illustrations ne portent pas à conséquence concernant l’existence même de l’enregistrement, mais sont prises en compte dans la détermination de l’étendue de la protection qu’elles contribuent le cas échéant à limiter en défaveur du déposant, dans la mesure où il convient alors d’ignorer les différences dans la détermination du champ de protection (c. 6.1.2 et c. 6.1.3). L’examen de l’exigence d’originalité de l’art. 2 al. 3 LDes constitue un examen élargi ou relatif de l’exigence de nouveauté, rendant l’examen séparé de cette dernière obsolète. Si l’exception d’absence d’originalité s’avérait infondée, celle se rapportant à l’absence de nouveauté le serait du même coup, l’absence d’originalité d’un design impliquant également son absence de nouveauté (c. 6.2.1.2). La Cour considère que l’acquéreur potentiel du produit, comme le professionnel d’ailleurs, sera attentif non seulement aux barreaux parallèles métalliques présents dans les deux objets, mais aussi à la terminaison de leurs extrémités dont la construction très différente marquera plus la mémoire que la présence de baguettes métalliques, l’utilisation de métal pour les ustensiles de cuisine étant peu frappante. Pour la Cour, la terminaison des côtés du dessous-de-plat détermine l’impression d’ensemble et génère une impression très technique avec ses différents maillons qui évoquent une chaîne de vélo et ressortent de manière proéminente en semblant opérer une coupure des baguettes, alors que celles-ci paraissent se prolonger jusqu’à l’extrémité des bords de l’égouttoir déroulant dans lesquels elles demeurent visibles en filigrane. Les deux produits étant d’une structure et d’une constitution largement différentes, le premier dessous-de-plat invoqué comme constituant une antériorité ne ruine pas l’originalité de l’égouttoir déroulant. Le deuxième dessous-de-plat examiné n’y réussit pas non plus, d’une part parce qu’il ne peut pas être roulé sur lui-même, ensuite parce qu’il est dépourvu d’éléments de liaison entre ses barres à leurs extrémités et que du fait des éléments métalliques utilisés et de la manière dont ils sont agencés, il frappe par son design minimaliste dont l’impression d’ensemble est marquée par des barreaux reposant sur deux éléments de liaison métallique également en forme de grille ouverte (c. 6.2.2.3). Le terme de « technique » doit être compris au sens large et englobe tous les aspects fonctionnels liés à l’utilisation d’un produit. Cela comprend les dispositions de forme qui découlent de l’utilisation conforme à sa destination, de l’emploi ou du maniement d’un produit sans qu’une liberté créatrice demeure, ou lorsqu’il n’existe aucune alternative de conception raisonnable pour atteindre le même effet technique. L’art. 4 lit. c LDes ne concerne ainsi que les cas dans lesquels aucune alternative de forme ne permet d’atteindre l’effet technique ou fonctionnel recherché et pour lesquels il n’existe donc qu’une seule forme d’exécution raisonnable (c. 6.3.2). Un égouttoir mobile doit bien remplir certaines caractéristiques techniques pour permettre à la fois l’écoulement de l’eau et la « portabilité » du dispositif. On peut se demander si le fait que l’égouttoir puisse se dérouler doit être ajouté à ces deux premières caractéristiques techniques dans la mesure où il s’agit seulement d’un élément nécessaire à la mobilité du tout, et pas à la qualité de l’égouttement. Comme toutefois l’enroulement du dispositif n’est qu’une manière d’en assurer le caractère mobile et qu’il en existe beaucoup d’autres, l’enroulement de l’égouttoir sur lui-même n’est pas un critère autonome à prendre en compte comme moyen technique d’assurer la mobilité de l’égouttoir, dans l’examen du caractère techniquement nécessaire du design. Dans le cas particulier du design dont la validité est attaquée, ni les baguettes parallèles dans leur milieu, ni leur dispositif de fixation aux extrémités ne sont dans leur apparence concrète exclusivement conditionnés par leur fonction technique. Les baguettes pourraient avoir d’autres formes (carrée, rectangulaire, ovale) permettant aussi bien l’égouttement que leur forme sphérique ; la distance entre les baguettes pourrait être différente. Elles pourraient aussi être de longueur différente avec des alternances, etc., et finalement le dispositif de fixation entre les baguettes pourrait aussi être conçu de manière complètement différente. Il existe ainsi, dans le cas d’espèce, une certaine liberté de création et des alternatives de forme qui permettraient d’obtenir le même effet fonctionnel recherché de disposer d’un égouttoir mobile déroulant (c. 6.3.3). Le caractère techniquement nécessaire du design de l’égouttoir n’est donc pas retenu. Le preneur de licence exclusive participe à la concurrence dans la mesure où il bénéfice des droits exclusifs d’utilisation et a la qualité pour agir au sens de l’art. 9 al. 1 LCD (c. 8.2.1). Cette légitimation active découle aussi de ce que les marchés visés par les deux produits sont les mêmes du point de vue matériel, temporel et géographique (c. 8.2.2). Les dispositions de la LCD s’appliquent indépendamment de celles du droit des biens immatériels et la théorie selon laquelle un acte ne tombant pas sous le coup d’un droit de propriété intellectuelle ne saurait devenir illicite du fait de la LCD « Umwegthese » a été abandonnée. Les prétentions fondées sur le droit du design et celles découlant de la LCD sont ainsi indépendantes et peuvent être allouées indépendamment l’une de l’autre, pour autant que leurs conditions d’application respectives soient satisfaites (c. 8.3). La différence visuelle importante que les deux designs présentent du point de vue de leur impression d’ensemble exclut tout risque de confusion entre eux au sens de la LCD également. Le choix du consommateur, s’il est guidé par l’esthétique des deux produits, exclut lui aussi tout risque de confusion, d’autant qu’on peut attendre de ce public cible, soucieux de l’esthétique de sa cuisine, un degré d’attention accru (c. 8.4.3). L’apposition de la marque de la défenderesse de manière bien visible sur ses produits est aussi de nature à lever tout risque de confusion éventuel (c. 8.4.3). [NT]

Chaîne de vélo
Chaîne de vélo
Dessous-de-plat
Dessous-de-plat
Égouttoir mobile
Égouttoir mobile

16 août 2017

HG BE, 16 août 2017, HG 15 100 (d)

« Blocage de sites internet illicites » ; action en cessation, blocage de sites internet, fournisseur d’accès, intérêt digne de protection, novae, droit d’auteur, précision des conclusions, qualité pour agir, qualité pour défendre, usage privé, piraterie ; art. 28 CC, art. 50 CO, art. 19 al. 1 lit. a LDA, art. 62 al. 1 LDA, art. 62 al. 3 LDA, art. 59 al. 2 lit. a CPC, art. 229 CPC.

La demanderesse conclut à ce qu’il soit ordonné à la défenderesse, un fournisseur d’accès à Internet, de prendre  des mesures techniques appropriées empêchant ses clients d’accéder à divers sites, lesquels fournissent des liens vers d’autres sites qui mettent à disposition des films de manière illicite (c. 1 à 13). Elle a un intérêt digne de protection à la demande, au sens de l’art. 59 al. 2 lit. a CPC, même si les mesures de blocage pourraient être contournées et même si les films litigieux resteraient disponibles sur d’autres sites (c. 17.3). Il est douteux que les conclusions soient suffisamment précises, car la demanderesse mentionne trois mesures de blocage sans expliquer laquelle lui donnerait satisfaction. De plus, si les conclusions étaient reprises telles quelles dans le dispositif, la défenderesse ne saurait pas comment s’exécuter (c. 18.5). Des novas – aussi bien proprement dits qu’improprement dits – ne sont plus admissibles après la clôture des débats principaux, lorsque le jugement est en délibération (c. 22.3.4). Le droit suisse est applicable en l’espèce, puisque la demanderesse et la défenderesse ont leurs sièges et leurs activités en Suisse, cela même si les sites internet litigieux sont étrangers (c. 23). La demanderesse dispose de la légitimation active, car il y a suffisamment d’éléments pour admettre qu’elle est licenciée exclusive au sens de l’art 62 al. 3 LDA (c. 25.7.7). Lorsque l’auteur principal d’une violation du droit d’auteur agit grâce aux services d’un tiers, il se pose la question de la participation de ce dernier à l’acte illicite et de sa légitimation passive (c. 26.2). Cette question se résout d’après l’art. 50 al. 1 CO, et non d’après l’art. 28 CC. En effet, les droits d’utilisation selon la LDA ont essentiellement une nature patrimoniale, tandis que le droit de la personnalité a une signification psychologique et spirituelle. Les deux domaines ne sont donc pas comparables. De surcroît, une application de l’art. 50 al. 1 CO n’empêche pas une approche unitaire de la légitimation passive dans tous les domaines de la propriété intellectuelle (c. 26.3.4). Pour qu’il y ait une participation au sens de l’art. 50 al. 1 CO, il doit y avoir une violation du droit d’auteur par un tiers et une contribution juridiquement pertinente de la part du participant. De plus, la doctrine exige parfois la réalisation de certains éléments subjectifs concernant la conscience de participer à un acte illicite avec un tiers (c. 28). D’après le Conseil fédéral, les « déclarations communes » concernant le WCT excluent seulement que la fourniture d'installations techniques constitue un acte principal de communication au public au sens de l’art. 8 WCT ; elles n’empêchent pas la responsabilité en tant que participant secondaire (c. 29.1 et c. 29.2). Les conclusions de la demanderesse sont orientées vers le comportement des clients de la défenderesse, à savoir des internautes. Elles ne visent pas directement les personnes qui mettent les films à disposition sur Internet (c. 32.1.1). Or, les actes des internautes sont couverts par l’exception d’usage privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA et ne sont pas illicites. La première condition à laquelle la défenderesse pourrait se voir reprocher une participation au sens de l’art. 50 al. 1 CO n’est donc pas réalisée (c. 32.1.2 et c. 32.1.3). Au surplus, la défenderesse fournit un accès (automatique) à Internet. Elle intervient « en fin de chaîne » dans le processus de communication des œuvres et n’est pas très proche des actes illicites d’origine (c. 32.2.2). Sa prestation n’est pas apte à favoriser les infractions d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience générale de la vie. Elle n’est donc pas dans un rapport de causalité adéquate avec les actes illicites et n’apporte aucune contribution juridiquement pertinente à ceux-ci (c. 32.2.3). La défenderesse n’est ainsi pas légitimée passivement, si bien que la question de savoir si des éléments subjectifs sont nécessaires peut être laissée ouverte (c. 32.4). Même si la défenderesse disposait de la légitimation passive, les mesures de blocage demandées devraient satisfaire au principe de la proportionnalité, ce qui signifie qu’elles devraient être appropriées pour atteindre le but visé, qu’elles ne devraient pas aller au-delà de ce qui est nécessaire et qu’elles devraient être raisonnables compte tenu du rapport entre la fin et les moyens (c. 34). La première condition serait remplie, même si une partie des utilisateurs pouvaient contourner les mesures de blocage et même si les films continuaient à être disponibles sur d’autres sites internet (c. 34.1.3). En revanche, il serait douteux que la deuxième condition soit réalisée, car la demanderesse a investi de grands moyens pour agir contre la défenderesse, alors qu’elle s’est contentée de mesures limitées à l’encontre des auteurs principaux des violations (c. 34.2.3). La réalisation de la troisième condition serait également discutable car les blocages concerneraient aussi des films non visés par la demande, car l’accès à du contenu licite pourrait être bloqué collatéralement (« overblocking ») et car ces blocages pourraient avoir des effets techniques indésirables (c. 34.3.1). Le caractère raisonnable des mesures demandées serait douteux, car il faudrait au moins veiller à réduire au minimum le risque d’atteindre des tiers non concernés par le litige (c. 34.3.5). Enfin, le projet de révision de la LDA du 22 novembre 2017 prévoit divers nouveaux moyens de lutte contre le piratage, mais il a renoncé à instaurer des mesures de blocage à charge des fournisseurs d’accès (c. 36). La demande doit donc être rejetée. [VS]

22 octobre 2018

TAF, 22 octobre 2018, B-3812/2016 (d)

« Tarif A Fernsehen (Swissperform) » ; tarifs des sociétés de gestion, pouvoir de cognition de la CAF, pouvoir de cognition du TAF, arrêt de renvoi, force obligatoire, unité de la procédure, effet rétroactif, effet suspensif, pouvoir d’appréciation, renvoi de l’affaire, novae, synchronisation, droits voisins, phonogramme disponible sur le marché, vidéogramme disponible sur le marché, support disponible sur le marché, œuvre musicale non théâtrale, effet rétroactif, devoir de collaboration accru des parties en procédure tarifaire, règle du ballet, augmentation de redevance, augmentation du tarif ; art. 12 CR, art. 15 WPPT, art. 11 LDA, art. 22c LDA, art 24b LDA, art. 35 LDA, art. 38 LDA, art. 46 LDA, art. 59 LDA.

Lorsque le TAF a renvoyé antérieurement l’affaire à l’autorité précédente et qu’il y a un nouveau recours sur la nouvelle décision de cette dernière, aussi bien l’autorité précédente que le TAF sont liés par le dispositif de la décision de renvoi, lequel forme le cadre de la nouvelle procédure de recours (c. 1.2). Lorsque le renvoi portait sur un nouvel examen du montant de la redevance, les mesures à prendre pour éviter une augmentation abrupte et la date d’entrée en vigueur de la redevance font partie du cadre fixé par la décision de renvoi (c. 1.2 et 1.3). L’effet contraignant de celle-ci ne s’oppose pas à la prise en compte de novae, pour autant que le droit de procédure et le principe de l’unité de la procédure le permettent (c. 1.4). A supposer que l’obligation de paiement de la redevance soit reportée en raison de l’interdiction de l’effet rétroactif, c’est aussi l’entrée en vigueur de toutes les autres dispositions tarifaires qui devrait être retardée, y compris de celles en défaveur des ayants droit (c. 3.3). En l’espèce, le tarif a produit ses effets dès la date d’entrée en vigueur prévue, car les recours n’ont pas eu d’effet suspensif. En cas de redevance tarifaire trop basse, un recours serait rendu illusoire si la redevance ne pouvait pas être augmentée dès la date d’entrée en vigueur du tarif. De plus, les utilisations déjà entreprises seraient illicites si le tarif corrigé ne pouvait pas les couvrir, ce qui conduirait à des négociations sur les dommages-intérêts. En l’espèce, on est en présence d’un tarif qui est entré en vigueur à la date prévue, mais qui a été modifié suite à un recours. Le cas se distingue des affaires 2C_685/2016 et 2C_806/2016 tranchées par le TF, où un nouveau tarif devait entrer en vigueur pour la première fois à titre rétroactif. Il n’y a donc pas ici d’effet rétroactif non autorisé (c. 3.4). Les tarifs doivent faciliter les utilisations d’œuvres en instaurant une redevance homogène, prévisible et praticable dans l’intérêt des ayants droit et des utilisateurs. La CAF fixe son niveau en ayant pour but un équilibre objectif des intérêts entre les parties concernées, et en respectant l’autonomie tarifaire des sociétés de gestion. Un devoir de collaboration accru des parties les oblige à fournir les chiffres et statistiques permettant le contrôle de l’équité. Le TAF se prononce avec un plein pouvoir de cognition, mais il fait preuve de retenue là où la CAF, en tant qu’autorité judiciaire spécialisée indépendante, a traité de questions complexes concernant la gestion collective ou a pesé les intérêts en présence tout en respectant l’autonomie des sociétés de gestion. En fin de compte, cela revient à rechercher si la CAF a excédé son pouvoir d’appréciation ou en a abusé (c. 4.1). Un tarif est équitable lorsqu’il repose sur un équilibre approprié, semblable en substance à ce qui aurait découlé d’un accord entre les parties dans une situation de concurrence. Les difficultés d’application sont à prendre en compte. Des forfaits et des approximations sont admissibles pour mieux couvrir toutes les utilisations et améliorer la praticabilité. L’art. 12 CR et l’art. 15 WPPT ne donnent aucune garantie minimum valable dans tous les cas particuliers (c. 4.3). Le tarif concerne l’utilisation de phonogrammes disponibles sur le marché, sans considération d’une protection éventuelle sur les images. Il est donc compréhensible que la CAF n’ait pas différencié la redevance selon que les phonogrammes sont ou non synchronisés avec des images (c. 5.1). Une utilisation moins intensive des supports lorsqu’ils sont synchronisés n’est pas constatable. La règle du ballet, qui justifierait une diminution de 50% de la redevance, n’est donc pas applicable (c. 5.2). Il est compréhensible également que la CAF, lorsqu’elle s’oppose aux augmentations abruptes de redevance, ne prenne en compte que la charge tarifaire des utilisateurs, et non les montants à répartir aux ayants droit : cette charge détermine en effet les offres des utilisateurs sur le marché et le calcul de leurs prix, alors qu’elle n’a que peu d’influence sur les cachets que touchent les titulaires de droits voisins. Mais il est vrai que la CAF évite les augmentations abruptes unilatéralement en faveur des utilisateurs, alors qu’elle ne recherche pas à assurer la continuité des recettes tarifaires pour les ayants droit, par exemple en évitant des périodes sans tarif ou des retards dans l’approbation des tarifs pour des raisons de procédure. Ainsi, l’interdiction des augmentations abruptes (principe de la continuité) n’est pas un critère qui relève du contrôle de l’équité. Une partie de la doctrine le prétend, mais cela ne découle pas de la loi. Le TF a aussi plusieurs fois admis qu’une augmentation importante de la redevance était admissible en cas de changement dans les bases de calcul justifié objectivement, et qu’elle pouvait même démontrer que la redevance antérieure était trop basse. Ainsi, le principe de la continuité ne sert pas à distinguer une charge tarifaire équitable d’une charge inéquitable mais, en aval, au choix d’une solution préférable parmi plusieurs solutions tarifaires équitables. Il est alors permis d’y recourir et de le mettre en œuvre par un échelonnement annuel des taux tarifaires ou des montants maximaux à payer (c. 6.3). En l’espèce, le plafonnement des redevances ne peut pas être confirmé car le nouveau tarif se base sur un changement des bases de calcul justifié objectivement (c. 6.4.1), les forfaits avaient été payés précédemment expressément « sans valeur de précédent » (c. 6.4.2), depuis 2013 ils n’étaient versés qu’à titre d’acomptes (c. 6.4.3) et, enfin, parce que le plafonnement a été calculé par la CAF en fonction de l’intégralité des recettes tarifaires, alors qu’il a été appliqué uniquement sur la redevance due pour l’utilisation de supports synchronisés, ce qui défavorise les interprètes dont la prestation figure sur de tels supports (c. 6.4.4). L’introduction d’un système de calcul proportionnel à l’utilisation, vingt ans après l’entrée en vigueur de la LDA, plaide contre un échelonnement de l’augmentation, ce qui rend inutile un deuxième renvoi à l’autorité précédente (c. 6.5). [VS]

18 octobre 2017

TAF, 18 octobre 2017, B-3328/2015 (d)

sic! 4/2018, p. 201 (rés.), « Stingray │ Roamer Stingray » ; motifs relatifs d’exclusion, cercle des destinataires pertinent, grand public, consommateur final, degré d’attention moyen, similarité des produits ou services, reprise d’une marque antérieure, similarité des signes, similarité des signes sur le plan visuel, similarité des signes sur le plan sonore, similarité des signes sur le plan sémantique, force distinctive moyenne, besoin de libre disposition, usage de la marque, marque de série, risque de confusion admis, moyens de preuve nouveaux, novae, violation du droit d’être entendu, triplique, maxime d’office, effet de guérison du recours, abus de droit, abus du pouvoir d’appréciation, reformatio in peius vel melius, montres, mouvements, cadran, stingray, roamer, galuchat, recours rejeté ; art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 6 LPM, art. 31 al. 1 LPM.


Marque(s) attaqué(s)
Marque(s) opposante(s)

ROAMER STINGRAY

STINGRAY

Classe 14 : Tous produits horlogers, montres, mouvements de montres, boîte de montres, cadrans de montres et parties de montres.

Contenu de la décision

Produits faisant l’objet de l’opposition

Classe 14: Tous produits horlogers, montres, mouvements de montres, boîte de montres, cadrans de montres et parties de montres.

Cercle des destinataires pertinent et degré d’attention des consommateurs

Les produits revendiqués en classe 14 « montres sans bracelet » s’adressent au grand public, donc aux consommateurs finaux, qui font preuve d’un degré d’attention moyen (c. 6.2).

Identité/similarité des produits et services

Les « montres sans bracelet » revendiquées par la marque opposante en classe 14 constituent un terme générique englobant les « mouvements de montres, cadrans de montres » revendiqués par la marque attaquée. Les produits sont similaires (c. 7).

Similarité des signes

La marque opposante « Stingray » est entièrement reprise dans la marque attaquée « Roamer Stingray » (c. 8.1). L’élément « Stingray » demeure clairement reconnaissable, tant sur le plan visuel que sur le plan sonore (c. 8.2). Les mots anglais « stingray » et « roamer » ne font pas partie du vocabulaire anglais de base (c. 8.3.1-8.3.2). Si les destinataires ne comprennent pas la signification des mots anglais présents dans les marques examinées, celles-ci ne peuvent pas se distinguer pas une signification différente l’une de l’autre (c. 8.3.2).

Force distinctive des signes opposés

Force distinctive de la marque attaquée :


-

-



Force distinctive de la marque opposante et champ de protection



Puisque les consommateurs ne comprennent pas le sens du mot anglais « stingray », ils ne peuvent pas considérer la marque opposante comme une description de la matière dans laquelle les produits revendiqués pourraient être réalisés. La marque opposante « Stingray » n’appartient donc pas au domaine public, et jouit même d’une force distinctive normale (c. 9.1.2). Même si les destinataires comprenaient la signification du mot anglais « stingray », il leur faudrait un tel effort d’imagination et de réflexion pour arriver à la conclusion que des montres ou des parties de montres peuvent être composées de cette matière que ce terme ne serait toujours pas descriptif (c. 9.1.3). Compte tenu de ce qui précède, le mot anglais « stingray » n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition, ce d’autant plus que le terme spécifique en français « galuchat » peut également être utilisé (c. 9.2).


Risques de confusion admis ou rejetés / motifs

Il existe un risque de confusion entre les marques examinées (c. 10).


Divers

La défenderesse demande à ce que les nouveaux arguments et moyens de preuve présentés par la demanderesse dans son dernier échange d’écriture ne soient pas pris en considération, car il s’agirait de novae (c. 2.1-2.1.1). Le TAF considère qu’il ne s’agit pas de novae, car les passages incriminés répètent une position déjà défendue dans un précédent échange d’écritures, et les moyens de preuves concernent des marques potentiellement similaires déjà enregistrées. De plus, quand bien même il devrait s’agir de novae, celles-ci devraient être admises aussi longtemps qu’elles concernent l’objet du litige et sont pertinentes pour la décision à prendre (c. 2.1.2). La défenderesse se plaint également d’une violation de son droit d’être entendue, en raison du fait que l’autorité précédente n’aurait pas pris en considération sa triplique. S’il y a bien en l’espèce une violation de son droit à être entendue, elle se révèle peu déterminante, car la triplique se bornait à citer de nombreux passages ou à répéter expressis verbis les arguments développés dans la duplique (c. 4.2). Compte tenu de la maxime d’office qui prévaut pour la procédure d’opposition à l’enregistrement d’une marque, l’autorité précédente est bien habilitée à mener des recherches supplémentaires et à utiliser les éléments qui en résultaient pour motiver sa décision, et ce quand bien même les parties ont produit des argumentations et des moyens de preuve sur cette question. Par ailleurs, elle n’a pas à discuter de ces éléments supplémentaires avec les parties avant de les utiliser pour fonder sa décision. Au surplus, son argumentation n’est pas surprenante. Il n’y a donc pas de violation du droit d’être entendu sous cet angle (c 4.3). Étant donné que les violations du droit d’être entendu qui ont été constatées et celles qui sont évoquées, mais qui n’ont pas été tranchées de manière définitive, s’avèrent toutes légères et sans grande influence sur la décision attaquée, que les parties ont été entendues à ce sujet et que le TAF dispose d’un plein pouvoir de cognition sur ces questions, le recours déploie un effet de guérison sur la violation du droit d’être entendu (c. 4.4). La demanderesse soutient que l’instance précédente est tombée dans l'arbitraire ou a abusé de son pouvoir d’appréciation, car elle a refusé la protection de la marque pour les « mouvements de montres, cadrans de montres » tout en accordant simultanément la protection de la marque à tous les « produits horlogers, montres, parties de montres ». Or, « les mouvements de montres, cadrans de montres » peuvent être facilement subsumés sous les « produits horlogers, montres, parties de montres » qui ont été autorisés. À cet égard, il convient de reconnaître que l’instance précédente n’a pas rendu un verdict cohérent. Elle aurait dû utiliser des disclaimers pour les libellés officiels, afin d’exclure les produits qui peuvent être subsumés sous ces termes. Cette incohérence peut être considérée comme contraire au droit fédéral (c. 4.5). En résumé, on peut dire que le tribunal inférieur a effectivement violé le droit fédéral dans sa décision, bien qu’il ne s’agisse pas de violations graves. Dans la mesure où la procédure d'opposition en matière de marques sert principalement à faire respecter les intérêts privés des titulaires de marques et moins l'intérêt public, la décision de l’instance précédente ne viole pas le droit fédéral au point que l'application d'une reformatio in peius vel melius – demandée par la défenderesse – serait justifiée. Ainsi, l'intérêt de la demanderesse à maintenir la partie de la décision rendue qu'elle ne conteste pas prévaut (c. 4.6). La demanderesse prétend que l’élément « Roamer » de sa marque fait l’objet d’un usage intensif, de sorte qu’il jouit d’une force distinctive forte et qu’il ne peut donc pas y avoir de risque de confusion (c. 9.3). Étant donné que, dans les procédures d’opposition à l’enregistrement d’une marque, c’est la date de priorité de dépôt qui prévaut et non la date de priorité de l’usage, les moyens de preuves présentés ne sont pas pertinents (c. 9.3.1). La demanderesse tente de tirer profit pour sa marque attaquée de la règle jurisprudentielle d’une force distinctive accrue pour la marque opposante du fait de l’existence d’une marque de série. Cette jurisprudence relative à la marque opposante ne peut pas être appliquée par analogie à la marque attaquée. Cette logique ne peut pas être suivie pour la marque attaquée, car elle reviendrait à vider de sa substance le principe de la priorité du dépôt, puisque le titulaire d’une marque antérieure ne pourrait plus s’opposer avec succès à l’enregistrement d’une marque identique ou similaire postérieure du fait que celle-ci relèverait de la catégorie des marques de série (c. 9.3.2).

Conclusion : le signe attaqué est enregistré / refusé

Il existe un risque de confusion entre les marques examinées. La marque attaquée doit être refusée à l’enregistrement. Le recours est rejeté (c. 10). [AC]


06 août 2019

TF, 6 août 2019, 4A_70/2019 (d)

Nullité d’un brevet, limitation des revendications, procédure devant le TFB, fardeau de l’allégation, novae, moyens de preuve nouveaux, jugement partiel, jugement intermédiaire, pouvoir d’appréciation du juge instructeur ;art. 125 lit. a CPC, art. 222 al. 3 CPC, art. 229 al. 1 CPC, art. 236 CPC, art. 237 CPC.

Selon la jurisprudence désormais constante, les parties bénéficient, tant en procédure ordinaire que simplifiée [mais pas en procédure sommaire] de la possibilité de s’exprimer par deux fois de manière non limitée sur la cause et notamment d’introduire de nouveaux faits dans la procédure. Elles n’ont plus ensuite la possibilité de présenter de nouveaux faits et de nouveaux moyens de preuve qu’aux conditions restrictives de l’art. 229 al. 1 CPC. Etant donné l’importance fondamentale du droit des novae en procédure civile, il est indispensable qu’il existe des règles générales claires et non équivoques permettant aux parties de déterminer de manière sûre jusqu’à quel point de la procédure elles sont admises à s’exprimer de manière non limitée sur la cause. Il n’est par conséquent pas possible que la clôture des échanges soit laissée à l’appréciation du Tribunal. La limitation de l’admissibilité de nouveaux faits et moyens de preuve ne peut en particulier pas être contournée par le fait que des débats d’instruction sont organisés dans le cadre desquels des novae additionnels pourraient être présentés sans limite. Le Juge instructeur a par contre la latitude de tenir une audience d’instruction à la seule fin de tenter une conciliation pour autant que celle-ci ne constitue pas une deuxième opportunité offerte aux parties d’alléguer sans limitation des nouveaux faits et moyens de preuve, et ceci sans que la clôture des échanges suive immédiatement (c. 2.3.1). Selon l’art. 125 lit. a CPC, le Tribunal peut, afin de simplifier la procédure, en particulier la limiter à certaines questions ou à certains points de droit. Suite à une telle limitation de la procédure, est rendu un jugement partiel (art. 236 CPC) respectivement un jugement intermédiaire au sens de l’art. 237 CPC. Une telle limitation peut être ordonnée par le Tribunal en particulier avec la fixation d’un délai pour le dépôt de la réponse (art. 222 al. 3 CPC). Demeure ouverte la question de savoir si une limitation de la procédure peut encore intervenir au moment de la fixation du délai pour le dépôt de la réplique. Dans le cas d’espèce en effet, le Juge instructeur n’a pas ordonné une limitation de la procédure en vue d’un jugement partiel ou intermédiaire sur la nullité du brevet à l’origine de la demande. Il a bien plutôt unilatéralement octroyé à la partie demanderesse la possibilité de prendre position avant l’audience d’instruction sur une partie des arguments de la réponse et d’y répliquer dans ce cadre en introduisant ainsi des novae non limités dans la procédure (c. 2.3.2). Si l’admissibilité d’une scission thématique de la réplique est discutée, outre le fait qu’il paraisse douteux qu’une telle manière de faire soit judicieuse, il est au moins nécessaire que la question débattue soit clairement délimitée du reste de la procédure, ce que l’intimée conteste de manière convaincante en ce qui concerne la question de la nullité du brevet en lien avec celle de sa violation. Une telle partition thématique de la cause ne doit en aucun cas amener à ce que la demanderesse puisse s’exprimer plus de deux fois de manière illimitée (c. 2.4). Dans le cas d’espèce, l’intimée a eu l’occasion de s’exprimer une première fois sur la cause de manière illimitée dans sa demande. Elle a eu la possibilité de le faire une deuxième fois dans une réplique limitée, selon ordonnance expresse de l’autorité précédente, à la question de la validité du brevet concerné. Enfin, l’intimée s’est exprimée une troisième fois, sans limitation à une thématique particulière, dans sa réplique complémentaire. L’intimée a ainsi bénéficié, par trois fois, de la possibilité d’alléguer de nouveaux faits et de proposer de nouveaux moyens de preuve, deux fois de manière thématiquement illimitée et une fois supplémentaire sur la question exclusive de la validité du brevet. Cela n’est pas conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle les parties ne bénéficient, en procédure ordinaire, que deux fois de la possibilité de s’exprimer sur la cause et d’introduire de nouveaux faits dans la procédure (c. 2.4.1). L’avis de l’autorité précédente selon laquelle, de par l’organisation thématique qui lui a été imposée, l’intimée ne se serait exprimée que deux fois sur chacun des deux thèmes (de la violation du brevet et de sa nullité) ne convainc pas. Il est en effet pleinement possible à la demanderesse d’annihiler, déjà au stade de la demande, les effets d’une éventuelle objection de nullité du brevet. Il n’est pas relevant qu’elle n’ait pas eu d’indication que la défenderesse soulèverait ce moyen de défense. Car la possibilité de s’exprimer librement dans la procédure et d’alléguer tous les faits et moyens de preuve quels qu’ils soient, se caractérise aussi justement par le fait qu’elle est donnée indépendamment de ce que la partie adverse ait suscité une prise de position ou une réaction particulière. Cela fait partie de l’essence même de la procédure (civile) que la demanderesse, au moment du dépôt de la demande – soit du point de vue du droit des novae au moment de la première possibilité qui lui est donnée de s’exprimer sans limitation – ne connaisse pas encore de manière sûre l’axe de défense de la partie défenderesse. Le fait que, comme l’indique l’autorité précédente, la problématique soit particulièrement aigue dans le cadre d’un procès pour violation de brevets du fait du grand nombre de brevets existants, n’y change rien. Comme déjà indiqué, l’existence de règles claires fondamentalement respectée par tous les tribunaux dans le cadre de l’application du CPC est d’une importance centrale du point de vue de la sécurité du droit. Une différenciation en fonction de la prévisibilité des exceptions, respectivement des objections de la partie adverse, nuirait grandement à la sécurité du droit, de sorte qu’une exception à la règle générale de la possibilité de ne s’exprimer que deux fois librement ne se justifie pas dans le domaine du droit des brevets. Que l’exception de nullité du brevet invoquée dans la demande pose de nouvelles questions en lien avec l’objet du litige n’est d’ailleurs pas fondamentalement différent de ce qui se passe lorsque l’exception de prescription est soulevée à l’encontre d’une prétention ou lorsqu’une autre prétention est invoquée en compensation. Lorsque des allégations nouvelles de ce type sont présentées dans la réponse, cela ne conduit pas à ce que la partie demanderesse puisse s’exprimer trois fois librement les concernant. En dépit de l’avis de l’autorité précédente, les particularités des litiges en matière de brevet ne justifient en conséquence pas son procédé (c. 2.4.2). L’autorité précédente a ainsi violé le droit fédéral en permettant à l’intimée, en tout cas pour ce qui est de la question de la validité du brevet, de proposer à trois reprises de manière illimitée des faits et moyens de preuve nouveaux et sur cette base de reformuler les revendications de son brevet, sans examiner si ces novae étaient exceptionnellement admissibles selon les conditions de l’art. 229 al. 1 CPC. Comme le Juge instructeur avait expressément attiré l’attention dans le cadre de l’audience d’instruction sur le fait que l’intimée avait déjà usé de son droit de s’exprimer librement pour la deuxième fois concernant la nullité du brevet dans sa réplique limitée, la question de la protection de la confiance ne se pose pas (c. 2.4.3). Le recours est admis et la cause renvoyée au TFB pour nouveau jugement au sens des considérants. [NT]

CPC (RS 272)

- Art. 222

-- al. 3

- Art. 237

- Art. 125

-- lit. a

- Art. 229

-- al. 1

-- al. 1

-- al. 1

- Art. 236