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18 février 2015

TAF, 18 février 2015, B-5024/2013 (d)

sic! 6/2015, p. 396 (rés.), « Strela » ; motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, nom géographique, indication de provenance, lieu de fabrication, lieu de production, montagne, Strela, Strelapass, cercle des destinataires pertinent, degré d’attention légèrement accru ; art. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 1 LPM, art. 47 al. 2 LPM.

Le cercle des destinataires pertinent pour les produits listés en classe 14 « Métaux précieux et leurs alliages et produits en ces matières ou en plaqué non compris dans d’autres classes ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; Bracelets de montre, étuis de montre, accessoires de montre, non compris dans d’autres classes ; Boîtes de montres, non compris dans d’autres classes ; Horlogerie ; Bracelets de montre, étuis de montres, horloges et accessoires en cuir ; Bracelets de montre, étuis de montres, horloges et accessoires d’imitations de cuir », en classe 18 «Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes; peaux d’animaux; malles et valises ; parapluies et parasols ; cannes ; fouets et sellerie ; Sacs, portemonnaies, sacs à mains, sacs de voyage » et en classe 25 « Vêtements, chaussures, chapellerie ; Vestes en cuir, Pullover, T-Shirts ; Vestes et manteaux pour nourrissons, enfants, femmes et hommes » est composé d’un large public. Ces consommateurs font preuve d’un degré d’attention légèrement accru (c. 4). Le signe refusé à l’enregistrement « Strela » désigne un sommet des Alpes, dans la région du Strelapass (entre Davos et Arosa), dans le canton des Grisons. Ce signe est dépourvu de signification dans les quatre langues nationales ainsi qu’en anglais. Les significations en slovène et en russe ne sont pas pertinentes en l’espèce. Cependant, le terme « Strela » n’est pas une indication géographique directe, parce que cette région montagneuse ne peut pas être considérée par les destinataires comme un lieu de production ou de fabrication des produits revendiqués (c. 5). Contrairement à ce qu’affirme l’autorité précédente, la montagne Strela n’est pas assez connue pour que l’utilisation du terme « Strela » seul constitue une indication géographique indirecte pour la Suisse. D’autre part, le canton des Grisons n’est pas particulièrement connu pour ses produits relevant des classes 14, 18 et 25 (c. 5.2). Le signe « Strela » ne constitue donc pas une indication géographique et peut donc être également utilisé pour des produits qui ne sont pas manufacturés en Suisse. Le recours est admis et la marque doit être enregistrée (c. 6). [AC]

02 mars 2015

TAF, 2 mars 2015, B-3149/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe trompeur, indication de provenance, nom géographique, Cos, Kos, Grèce, lieu de fabrication, lieu de production, cercle des destinataires pertinent, enregistrement international, décision étrangère, force distinctive, besoin de libre disposition, recours admis ; art. 6quinquies lit. B CUP, art. 5 ch. 1 PAM, art. 22 ADPIC, art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM.

Les ADPIC prévoient une règlementation minimale concernant la protection des indications de provenance. Les États membres sont libres de prévoir des règles plus développées en la matière. Le droit suisse des indications de provenance offre un niveau de protection bien plus élevé que celui des ADPIC. Il convient donc de trancher la question avant tout selon le droit suisse (c. 2.3). L’orthographe « Cos » pour désigner l’île grecque de Kos est courante en français et également correcte, bien que moins usitée, en anglais. À ce titre, le signe présenté à l’enregistrement constitue donc potentiellement une indication de provenance (c. 4.1). Le cercle des destinataires pertinent pour les produits revendiqués en classes 14, 18, 25 et 35 est composé des consommateurs moyens (c. 4.2). De multiples critères indiquent que l’île de Kos est connue des consommateurs moyens. Par conséquent, à ce titre également, le signe « COS » peut constituer une indication de provenance (c. 4.3). Contrairement à ce qu’affirme la recourante, il n’est pas objectivement impossible que l’île de Kos abrite une industrie d’où pourraient provenir les produits revendiqués. Par conséquent, le signe « COS » ne peut pas bénéficier d’un régime d’exception (c. 5). Les résultats de recherches internet démontrent qu’aucune signification particulière du terme « cos » ne s’impose incontestablement, mais ces mêmes résultats montrent que l’abréviation de la fonction cosinus prime (c. 6.2.2). Compte tenu des moyens de preuve déposés (chiffre d’affaires, coupures de presse, réseaux sociaux), il faut admettre qu’au moins une partie des consommateurs moyens connait la marque « COS » (c. 6.2.3). Dans le domaine de la mode, les consommateurs ont l’habitude de côtoyer des acronymes et des signes courts utilisés comme marque. La recourante est donc convaincante lorsqu’elle prétend que le signe « COS » sera perçu comme une indication de l’origine commerciale des produits revendiqués (c. 6.2.4). L’enregistrement de la marque dans plusieurs pays francophones est un indice supplémentaire qu’il ne s’agit pas ici d’une indication de provenance trompeuse (c. 6.2.5). La marque jouit d’une force distinctive suffisante et n’est pas trompeuse (c. 7). Comme la marque « COS » est enregistrée en Grèce, il n’existe pas de besoin de libre disposition pour ce signe en Suisse (c. 8). Le recours est admis, la marque « COS » doit être enregistrée (c. 9.2). [AC]

03 juillet 2015

TAF, 3 juillet 2015, B-6503/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, cercle des destinataires pertinent, spécialistes du domaine médical, nom géographique, indication de provenance, lieu de fabrication, lieu de production, imposition par l’usage, Luxor, Égypte, microscope ; art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 1 LPM.

Pour des « microscopes et appareils chirurgicaux pour la chirurgie ophtalmique », le cercle des destinataires est composé de médecins spécialisés dans la chirurgie oculaire (c. 4.1). Luxor est la septième plus grande ville d’Égypte, avec 400’000 à 600’000 habitants. Elle compte de nombreux monuments historiques, notamment le Temple de Luxor, listé au patrimoine mondial par l’UNESCO. L’Égypte, et Luxor en particulier, sont parmi les destinations préférées des touristes helvétiques. Luxor est donc compris comme une indication géographique par les destinataires. Ce d’autant, qu’il s’agit, dans le cas d’espèce, de personnes cultivées. Contrairement à l’avis de l’autorité précédente, Luxor n’est pas connue indirectement par le biais du Temple éponyme, mais bien en tant que ville. Il s’agit donc d’une indication géographique directe (c. 4.2). La recourante argue qu’en raison du niveau de formation et de spécialisation des destinataires, ceux-ci ne peuvent pas être trompés sur l’origine des produits. Il faut retenir que les connaissances pointues des destinataires ne portent pas sur le tissu économique égyptien et de Luxor en particulier. Quand bien même cela est invraisemblable, il n’est pas objectivement impossible que les produits revendiqués soient produits à Luxor (c. 5). L’élément « Lux » a une signification particulière pour les destinataires, mais le signe « LUXOR », considéré dans son ensemble, est clairement compris comme une indication de la provenance géographique. Il n’y a pas d’autres significations de ce signe suffisamment fortes pour paraître évidentes et s’imposer (c. 6-6.2). Lorsqu’il s’agit d’un signe trompeur, la notoriété acquise par la commercialisation du produit ne suffit pas, à elle seule, à écarter tout risque de tromperie. Pour démontrer qu’un signe a acquis une seconde signification (« secondary meaning ») par l’usage il faut, parmi différents indices, démontrer un usage de dix ans au moins (c. 7.2). La recourante a produit son chiffre d’affaires depuis 2011 – qui se monte à plusieurs millions pour la Suisse – ainsi que diverses publications ou brochures au sujet de son microscope. Cela prouve que le produit n’est pas inconnu des destinataires. Cependant, en matière de signes trompeurs, les critères sont plus élevés que pour les signes appartenant au domaine public. Par conséquent, ces moyens de preuve ne permettent pas de conclure que le signe « LUXOR » aurait acquis une seconde signification qui s’impose, pour les destinataires, par rapport l’indication géographique (c. 7.3). Le signe « LUXOR » ne bénéficie d’aucune exception dans le sens d’une signification symbolique, d’une autre signification prépondérante ou de l’imposition par l’usage (c. 7.4). Compte tenu du régime légal plus strict pour les signes trompeurs que pour les signes appartenant au domaine public, il faut admettre que c’est à raison que l’instance précédente a reconnu que le signe « LUXOR » serait compris comme une indication géographique de provenance par les destinataires (c. 8). Le recours est rejeté (c. 10.). [AC]

21 août 2015

TAF, 21 août 2015, B-3117/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, nom géographique, indication géographique, Allemagne, lieu de production, teuton, contenu significatif, cercle des destinataires pertinent, consommateur final, degré d’attention légèrement accru ; art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM ; cf. N 635 (TAF, 9 mai 2012, B-5658/2011 ; sic! 11/2012, p. 725 (rés.), « Frankonia (fig.) »).

Pour les produits revendiqués en classes 12, 18, 20 et 24, le cercle des destinataires pertinent est composé de spécialistes, d’intermédiaires, de détaillants et des consommateurs finaux, en particulier de parents avec des enfants en bas âge. Ces destinataires font preuve d’un degré d’attention légèrement accru (c. 4). Au contraire du signe « FRANKONIA » (cf. N 635, vol. 2012-2013), le signe « TEUTONIA » fait référence à un terme latin encore compris aujourd’hui (c. 5.1). L’élément « TEUTONIA » est utilisé dans différents contextes, comme indication de l’origine germanique (c. 5.2). Les mots allemands « Teutone », « teutonisch », « Teutonismus » et « Teutonengrill », aujourd’hui encore usités, dérivent du terme latin « Teutonia » (c. 5.3). Les mots français « teuton /- onne », « teutonique » et « teutons » relatifs à l’origine germanique sont référencés dans les dictionnaires français (c. 5.4). Les termes italiens « Tèutone », « teutònico » également relatifs à l’origine germanique sont référencés dans les dictionnaires italiens (c. 5.5). Lors d’une recherche sur internet pour les termes « teuto/teuton », les résultats obtenus en allemand, français et italien se rapportent tous à l’Allemagne, aux Allemands ou à la langue allemande (c. 5.6). Même si « Teutonia » comme mot latin désignant l’Allemagne n’est plus courant, les termes qui en sont dérivés restent encore aujourd’hui utilisés et leur signification en rapport avec l’Allemagne est comprise par le cercle des destinataires pertinent. L’Allemagne est connue par le cercle des destinataires pertinent comme un lieu de fabrication et de production. Le signe « TEUTONIA » sera donc compris par ces destinataires comme une indication de provenance et est trompeur pour des produits ne provenant pas d’Allemagne (c. 5.7). Le recours est rejeté (c. 6). [AC]

03 novembre 2016

TAF, 3 novembre 2016, B-2217/2014 (d)

sic! 4/2017, p. 209-216 , « Bond St. 22 London (fig.) » ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe trompeur, signe combiné, signe descriptif, cercle des destinataires pertinent, grand public, intermédiaires, spécialiste de la branche du tabac, degré d’attention moyen, nom géographique, Londres, Grande-Bretagne, Bond Street, indication de provenance, lieu de fabrication, lieu de production, vocabulaire anglais de base, bond, st., force distinctive faible, règle de l’expérience, établissement des faits, moyen de preuve, preuve, fardeau de la preuve, obligation de collaborer, droit d’être entendu, maxime inquisitoire, constatation des faits, droit à un procès équitable, fait négatif, procédure d’enregistrement, vraisemblance, secondary meaning, risque de tromperie, tabac, cigarette, recours rejeté ; art. 29 al. 1 Cst., art. 12 PA, art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 1 LPM, art. 47 al. 2 LPM.

bond-street-22.jpg

BOND ST. 22 LONDON (fig.

Demande d’enregistrement N°52765/2012 BOND ST. 22 LONDON (fig.)


Demande d’enregistrement N°52765/2012 BOND ST. 22 LONDON (fig.)

Liste des produits et services revendiqués

Classe 34 : Tabac, brut ou manufacturé; produits du tabac, y compris cigares, cigarettes, cigarillos, tabac pour cigarettes à rouler soi-même, tabac pour pipe, tabac à chiquer, tabac à priser, kretek; snus; succédanés du tabac (à l'usage non médical); articles pour fumeurs, y compris papier à cigarettes et tubes, filtres pour cigarettes, boîtes pour tabac, étuis à cigarettes et cendriers, pipes, appareils de poche à rouler les cigarettes, briquets; allumettes.

Cercle des destinataires pertinent

Les destinataires pour les produits revendiqués sont les spécialistes du tabac et les intermédiaires de ce domaine, ainsi que les fumeurs âgés de 16 ans et plus. Les fumeurs font preuve d’un degré d’attention moyen lorsqu’ils achètent les produits revendiqués (c. 3.1).

Motif absolu d’exclusion examiné 

signe appartement au domaine public, art. 2 lit. a LPM ; signe propre à induire en erreur, art. 2 lit. c LPM.

Conclusion

Le terme anglais « BOND », signifiant « obligation » ou « caution » et l'abréviation « ST. », signifiant entre autres « rue », appartiennent tous deux au vocabulaire anglais de base. Londres compte plusieurs rues portant le nom de « Bond ». En 1847, le marchand de tabac Philip Morris ouvre son premier magasin au 22, rue Bond. A partir de 1854, il fabrique ses propres cigarettes, qu'il met en vente à la même adresse. Bond Street, dans le quartier londonien de Mayfair s'est forgé une réputation de rue commerçante coûteuse avec des boutiques élégantes proposant des marques exclusives, des bijoux, de l'art et des antiquités dans les segments du prestige et du luxe. Les parties s'accordent à reconnaître que Londres est connue du public concerné en tant que capitale du Royaume-Uni et de l'Angleterre (c. 3.2). En règle générale, les rectangles et les lignes sont considérés comme des traits faiblement individualisants, et appartiennent au domaine public. Le fait que ces mêmes formes géométriques simples soient utilisées pour présenter les produits du tabac n’y change rien. Il ne peut pas être considéré que la marque jouit d’un caractère distinctif original suffisant pour identifier les produits revendiqués, en raison du clair contenu géographique descriptif qu'elle contient et du manque d’originalité dans la représentation du signe (c. 3.4). Contrairement à ce qu’affirme la demanderesse, les règles d’expérience (Erfahrungssatz) en matière d’indications de provenance ne sont pas dépourvues de fondement légal. Elles découlent, d’une part, du choix du législateur de ne pas formuler positivement de critères de détermination d’une indication de provenance à l’art. 47 al. 1 LPM et, d’autre part, de la définition négative des indications de provenance de l’art. 47 al. 2 LPM. La conclusion qui en est tirée, selon laquelle les dénominations géographiques connues doivent être considérées comme des indications de provenance aussi longtemps que d’autres circonstances ne viennent pas exclure cette interprétation est conforme au concept normatif et à la ratio legis de l'article 47 LPM (c. 4.2). La demanderesse considère que l’application des règles d’expérience est insoutenable, car elles n’ont pas été confirmées empiriquement. Dans la mesure où la demanderesse cherche à invalider le recours des autorités judiciaires à « l’expérience générale de la vie », elle ne peut être suivie (c. 4.3). La demanderesse se plaint d’une violation du principe de la répartition du fardeau de la preuve (art. 8 CC) ainsi que d’une constatation incomplète des faits (art. 12 PA) et d’une violation de son droit à un procès équitable (art. 29 al. 1 Cst.). Selon elle, le recours aux règles d’expérience libère, d’une part, les autorités et les juges d’établir la preuve positive d'une compréhension en tant que lieu de provenance par les destinataires et, d'autre part, contraint la demanderesse à apporter la preuve d’un fait négatif, ce qui constitue une « froide inversion » du fardeau de la preuve (c. 4.4). La demanderesse néglige le fait que les règles d’expérience critiquées concernent principalement l'évaluation libre des indices, preuves indirectes et preuves à prima facie, et ne contiennent pas de règle sur la répartition de la charge de la preuve. Les faits internes – tels que la compréhension et les attentes présumées du public concerné – ne peuvent généralement pas être prouvés directement, mais seulement indirectement au moyen d’indices. Ces difficultés procédurales sont prises en compte dans la procédure d'enregistrement, dans la mesure où il suffit, grâce à l’exigence de preuve réduite, que le plaignant expose de manière crédible une ou plusieurs raisons de douter de l'exactitude des preuves recueillies par l’instance précédente lors de l’examen de demandes d’enregistrement de marques ou de ses conclusions. La demanderesse n’est ainsi tenue de fournir que des indications objectivement compréhensibles qui, avec un degré de probabilité suffisant (vraisemblance), permettent de conclure à l'existence des faits qu’elle allègue. L’allégation de la demanderesse selon laquelle la charge de la preuve est inversée est donc infondée (c. 4.4.1). Selon la demanderesse, la maxime inquisitoire énoncée à l'art. 12 PA exige que des éléments de preuve soient également recueillis pour étayer les présomptions qui sous-tendent la décision, si l'autorité n'a pas une connaissance fiable de certains événements ou de leurs causes et effets. La maxime inquisitoire ne modifie pas la répartition de la charge de la preuve. Selon la règle de la charge de la preuve de l'art. 8 CC, qui s'applique également en droit public, les conséquences d'un défaut de preuve sont à la charge de celui qui tire ses droits d'un fait qui n'a pas été prouvé ou qui n'a pas été justifié selon le niveau de preuve applicable. Le Tribunal administratif fédéral examine si la juridiction inférieure a recueilli et apprécié l'ensemble des éléments de preuve raisonnablement disponibles, dans la mesure où ils ne concernent pas des faits généralement notoires. Cet examen porte notamment sur les éléments de preuve qui montrent que le public cible associe la marque à une provenance géographique des produits et services. Cela n’exclut pas la preuve d’une perception différente par le public cible. Des données probantes appropriées peuvent à tout moment compléter ou corriger les règles d’expérience utilisées. Cela doit néanmoins être établi par la demanderesse, et elle supporte les conséquences de l'absence de preuve. L'application erronée des règles d’expérience est susceptible de contrôle judiciaire (c. 4.4.2). Au vu de ce qui précède, les griefs de violation des articles 29 al. 1 Cst., 12 PA et 8 CC s'avèrent infondés (c. 4.4.4). Selon la volonté expresse du législateur, les conceptions de qualité spéciale ou de valeur ajoutée ne sont pas pertinentes pour la détermination d'une attente du public cible quant à la provenance des produits et services revendiqués (c. 4.5.1). Dans ATF 132 III 770 « Colorado (fig.) », le Tribunal fédéral a examiné l'applicabilité des règles d’expérience indépendamment du concept de qualité, et a depuis confirmé cette pratique dans une jurisprudence constante. Il n’y a pas de raison sérieuse de modifier cette pratique (c. 4.5.2). Il est vrai qu'il existe des sites de production, de fabrication et de commerce moins chers que Londres ou la Grande-Bretagne. Toutefois, aucune impossibilité objective, au sens juridique du terme, au-delà de toute probabilité, ne peut être tirée d'un argument d'efficience économique (c. 5.1.1). La demanderesse soutient sans succès, à défaut d’avancer des arguments convaincants ou de produire des moyens de preuve que, sur le plan symbolique, le signe représente un certain mode de vie et une certaine attitude face à la vie (c. 5.2). De même, la demanderesse allègue sans le prouver que « BOND ST. 22 LONDON » remplit sa fonction d’identification d’une entreprise, puisqu’elle constitue une référence connue et comprise à l’origine de l’entreprise, qui est une marque culte de renommée mondiale (c. 5.3 et 5.3.1). Les moyens de preuve produits ne permettent pas de prouver l’établissement d’un secondary meaning (c. 5.3.2). S’il est vrai que de nombreux produits du tabac sont étiquetés avec des noms géographiques, l'hypothèse selon laquelle, en conséquence de cela, les clients ciblés reconnaissent une référence d’entreprise concrète dans le signe litigieux au lieu d’une indication d’origine n’est pas convaincante. Cet argument quantitatif suggère plutôt que l’origine géographique joue un rôle particulier en relation avec les produits de la classe 34 (c. 5.4.1). La marque « BOND ST. 22 LONDRES (fig.) » possède dans l’esprit du public concerné une signification claire d'indication de provenance pour la fabrication et la distribution en gros de produits du tabac, voire même de référence à la provenance des matières premières. En tant qu'indication directe de l'origine, la marque appartient donc au domaine public et n'est pas enregistrable. En ce qui concerne le caractère distinctif, la marque combinée ne possède pas le niveau de stylisation suffisant pour surmonter le caractère descriptif du signe (c. 7.1).En conséquence, il existe un risque de tromperie au sens de l'art. 2 let. c et des art. 47ss LPM (c. 7.2). Le recours est rejeté (c. 8). [AC]

27 octobre 2016

TAF, 27 octobre 2016, B-2781/2014 (d)

sic! 4/2017, p. 218 (rés.), « CONCEPT+ » ; motifs absolus d’exclusion, signe contraire au droit en vigueur, signe propre à induire en erreur, cercle des destinataires pertinent, grand public, consommateur final, spécialiste du domaine de la médecine chirurgicale, spécialiste du domaine de la médecine dentaire, spécialiste du domaine médical, spécialiste du domaine pharmaceutique, degré d’attention faible, degré d’attention moyen, degré d’attention accru, croix, Croix-Rouge, croix suisse, revendication de couleur, risque de confusion admis, noms et emblèmes internationaux, indication de provenance, lieu de fabrication, lieu de production, significations multiples, appareils médicaux, instruments chirurgicaux, préparation pharmaceutique, produits diététiques, produits pour le soin du corps, produit de beauté, compléments alimentaires, boissons, papeterie, recours rejeté ; art. 2 lit. c LPM, art. 2 lit. d LPM, art. 1 al. 1 ch. 1 aLPAP, art. 1 al. 1 ch. 3 aLPAP, art. 7 al. 2 aLPENCR.

CONCEPT+

Demande d’enregistrement international N°1012062 « CONCEPT+ »


Liste des produits et services revendiqués

Classe 03 : Huiles et lotions à usage cosmétique (…) ; cosmétiques (…) ; savons ; produits de parfumerie ; lotions capillaires ; dentifrices ; (…)



Classe 05 : Préparations pharmaceutiques et hygiéniques ; préparations et substances médicamenteuses ; préparations hygiéniques à usage médical ; désinfectants ; (…) ; produits pour les soins de la bouche à usage médical ; (…) ; désodorisants pour vêtements ou matières textiles ; (…) ; préparations diététiques à usage médical ; aliments diététiques et compléments alimentaires autres qu'à usage médical (…) ; aliments pour bébés ; (…) ; préparations médicales pour l'amincissement, (…) ; fortifiants médicinaux ; médicaments antiallergiques ; (…) matériel pour pansements, trousses de premiers secours portatives (trousses médicales) ; (…) ; préparations pour le nettoyage et l'entretien des verres de contact ; (…)



Classe 10 : Appareils et instruments chirurgicaux, médicaux et dentaires ; articles orthopédiques ; (…)



Classe 16 : Papier et articles en papier, non compris dans d'autres classes, en particulier papier hygiénique et papier hygiénique humide.



Classe 29 : Aliments diététiques, autres qu'à usage médical (…)



Classe 30 : Café ; thé ; cacao ; sucre ; riz ; (…) ; pains; (…) ; aliments diététiques, autres qu'à usage médical (…)



Classe 32 : Eaux minérales et gazeuses et autres boissons sans alcool ; (…)

Cercle des destinataires pertinent

À l'exception des « appareils et instruments chirurgicaux, médicaux et dentaires » de la classe 10, les préparations pharmaceutiques des classes 5, 10 et 29 doivent d'abord et avant tout être considérées du point de vue du consommateur final, d'autant plus qu'elles sont finalement destinées au grand public. Dans le contexte des produits thérapeutiques, la compréhension des spécialistes est d'une importance secondaire, puisque le risque de confusion est généralement moindre chez les personnes ayant reçu une formation appropriée que chez les consommateurs finaux. Les « préparations pharmaceutiques et les produits diététiques à usage médical» sont achetés avec une attention accrue, car les consommateurs peuvent être exposés à des risques pour la santé s'ils achètent négligemment ce genre de produits. En revanche, les biens de consommation courante, tels que les produits de soins personnels et de beauté de la classe 3, les compléments alimentaires et diététiques et les boissons non alcoolisées des classes 30 et 32, ainsi que le papier et les articles en papier de la classe 16, qui sont également principalement destinés à un large public de consommateurs finaux, sont acquis avec un degré d’attention comparativement moins important (c. 6.2).

Motif absolu d’exclusion examiné 

signe propre à induire en erreur, art. 2 lit. c LPM ; signe contraire au droit en vigueur, art. 2 lit. d LPM.

Conclusion

Le signe en question présente toutes les caractéristiques d'une croix verticale à symétrie axiale et correspond donc dans ses traits caractéristiques à l'emblème protégé de la Croix-Rouge (c. 4.6). La demanderesse semble ignorer que, dans le cadre de l'examen visant à déterminer si l'emblème de la Croix-Rouge a été adopté ou imité, les dimensions des branches de la croix ne constituent pas un critère pertinent pour l'évaluation. Afin d'éviter d'éventuels contournements, le législateur s'est délibérément abstenu de définir avec précision les formes et couleurs, et a donc accordé une protection absolue à chaque croix rouge sur fond blanc, qu’elles qu’en soient les dimensions et nuances de couleur, ainsi qu’à chaque signe qui pourrait être confondu avec elle (c. 4.7.1). Contrairement à l’avis de la demanderesse, l’examen d’une croix présente dans un signe se fait indépendamment des autres éléments qui le composent. La protection absolue accordée ne serait pas efficace en pratique si le motif de refus pouvait simplement être contourné en incluant l'élément protégé dans une marque composée de plusieurs éléments (c. 4.7.2). La demanderesse a déposé la marque contestée sans revendication de couleur. Seule une revendication de couleur positive qui diffère nettement du contraste rouge et blanc typique du signe ou une revendication de couleur négative peut permettre d’éviter le motif absolu d’exclusion (c. 4.7.3). Il ne fait aucun doute que le « + » du signe « CONCEPT+ » diffère de la croix suisse en ce que les bras horizontaux et verticaux de la croix sont plus étroits et ne correspondent pas aux proportions de la croix suisse, selon lesquelles les bras sont chacun un sixième plus long que large. L’avis de la demanderesse selon lequel cette différence de superficie empêche tout risque de confusion ne peut pas être suivi. L'élément décisif pour répondre à la question de savoir si un signe peut être confondu avec la croix suisse est son utilisation dans la combinaison de couleurs typique des caractères (c. 5.3).En l'absence de revendication (positive ou négative) de couleur, un risque de confusion ne peut être exclu (c. 5.4). Une ou des autres significations du signe contesté ne viennent pas immédiatement à l’esprit. Les significations imaginables après un effort de réflexion ne figurent pas au premier plan (c. 6.4.2-6.4.3). Il existe bien un risque de confusion sur la provenance des marchandises revendiquées au sens des art. 2 lit. c et 47 al. 1 LPM (c. 6.4.4). C’est à raison que l’instance précédente a refusé l’enregistrement du signe « CONCEPT+ ». Mal fondé, le recours est rejeté (c. 7.4). [AC]

04 octobre 2017

TAF, 4 octobre 2017, B-7230/2015 (f)

sic! 4/2018 « Cosmoparis » (rés.), p. 201 ; Motifs d’exclusion absolus, marque figurative, mode, signe appartenant au domaine public, consommateur moyen, degré d’attention moyen, spécialiste, degré d’attention accru, nom géographique, Paris, indication géographique, signe trompeur, indication de provenance, égalité de traitement, limitation de revendication, recours rejeté, lieu de production ; art. 8 al. 1 Cst., art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM.

COSMOPARIS

Enregistrement international n°1’133’939 « COSMOPARIS »


Enregistrement international n°1’133’939 « COSMOPARIS »

Liste des produits et services revendiqués

Liste des produits et services revendiqués :



Classe 18 : Sacs à main, Portefeuilles ;



Classe 25 : Chaussures pour hommes et pour femmes.

Cercle des destinataires pertinent

Les produits revendiqués s’adressent au consommateur moyen qui fait preuve d’un degré d’attention moyen, et aux spécialistes qui font preuve d’un degré d’attention accru (c. 6.2).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public, art. 2 lit. a LPM, signe trompeur, art. 2 lit. c LPM

Conclusion

Le signe « COSMOPARIS » est purement verbal. Composé de 4 syllabes, il n’a pas de signification propre, mais peut aisément être décomposé, comme le mot « cosmopolis » en un préfixe « COSMO » et un radical « PARIS » (c. 8.1-8.3.2). Sur le plan sémantique, l’élément « COSMO- » fait référence au cosmos (c. 8.4.1). Le radical « PARIS » peut faire référence au pluriel du mot « pari » ou à un nom de famille rare, mais c’est surtout la capitale de la France, et c’est cette signification qui sera retenue par le public pertinent (c. 8.5 et 8.10). La combinaison des éléments « COSMO » et « PARIS » n’a pas de signification particulière, mais le public y verra plus facilement une référence géographique au pluriel du mot « pari » (c. 8.6). L’élément « COSMO » n’est pas de nature à éclipser l’élément « PARIS » (c. 8.7.2-8.9). Celui-ci éveillera donc des attentes quant à la provenance géographique des produits pour les consommateurs (c. 8.7.4). La ville de Paris entretient un rapport très étroit avec la mode (c. 9.2), et son utilisation en tant que marque peut être trompeuse (c. 9.5). Certes, la mondialisation a pour effet de délocaliser les lieux de production des produits revendiqués vers l’Asie notamment, mais sans pour autant permettre d’écarter le fait que la mention d’un nom géographique soit habituellement comprise comme une indication de provenance (c. 10.2.2). Au surplus, la production de produits correspondant à ceux que revendique la recourante n’a pas cessé à Paris, et celle-ci entretient un lien particulier avec la mode (c. 10.2.3-10.2.4). Paris n’est pas un lieu inhabité (c. 10.3), n’est pas utilisé pour distinguer un modèle particulier (c. 10.4) et ne s’est pas imposé comme marque (c. 10.5), ni n’est entré dans le langage courant (c. 10.6). Aucune des exceptions à la règle d’expérience selon laquelle la mention d’un nom géographique est comprise comme une indication de provenance n’est réalisée (c. 10.7). La recourante invoque l’égalité de traitement, mais les marques qu’elle invoque sont revendiquées pour d’autres produits, et ne sont pas construites de la même manière, avec un préfixe et un radical (c. 11.3). Le recours est rejeté, c’est à juste titre que l’instance précédente a refusé l’enregistrement (c. 12), dans la mesure où la recourante n’est pas disposée à accepter de revendiquer sa marque uniquement pour des produits provenant de France (c. 9.4.1). [YB]