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05 février 2014

TF, 5 février 2014, 4A_444/2013 (d)

sic! 6/2014, p. 367-372, « G5 » ; principe de l’inscription au registre, libellé officiel de la Classification de Nice, Classification de Nice, classe de produits ou services, liste des produits et des services, terme générique, usage antérieur, administration des preuves, devoir d’interpellation du tribunal, compléments alimentaires, produits pharmaceutiques, silicium organique, G5 ; art. 11 al. 1 LPM, art. 14 LPM, art. 28 al. 2 lit. c LPM, art. 11 OPM, art. 56 CPC, art. 4 al. 1 lit. a LPTh, art. 22 ODAlOUs.

En vertu du principe de l’inscription au registre, lorsqu’une marque est enregistrée à l’aide du libellé officiel d’une classe de produits ou services de la Classification de Nice, la liste des produits et des services désignés ne peut pas être automatiquement étendue à tous les produits ou services qui seraient ultérieurement inclus dans ladite classe ou dans la nouvelle version de son libellé officiel. A fortiori, cette extension automatique ne peut pas être accordée pour des produits ou services, qui bien que listés dans une autre classe de la Classification de Nice, existaient déjà sur le marché au moment du dépôt de la demande d’enregistrement (c. 5.4.1). Les compléments alimentaires ne peuvent pas être subsumés sous le terme générique de « produits pharmaceutiques ». Cela résulte tant de la comparaison des définitions légales des compléments alimentaires (art. 22 de l’Ordonnance du DFI sur les aliments spéciaux) et des produits thérapeutiques (art. 4 al. 1 lit. a de la LPTh), que de considérations économiques. Il n’est pas évident que les fabricants de compléments alimentaires proposent également des produits thérapeutiques, et inversement. Finalement, le fait que les compléments alimentaires aient été ajoutés au libellé officiel de la classe 5 dans la 10e version de la Classification de Nice, démontre que ces produits n’étaient pas subsumés dans le terme générique de « produits pharmaceutiques » (c. 5.4.2). La requérante n’était pas représentée par un avocat devant l’autorité précédente. Cependant, elle possède des connaissances en droit des marques et avait déjà l’expérience d’une procédure similaire. Ainsi, lorsqu’elle se contente de produire quelques factures afin de démontrer l’usage antérieur de sa marque au sens de l’article 14 LPM, en mentionnant que « plusieurs milliers d’autres factures peuvent être déposés si nécessaire », elle ne s’acquitte pas correctement de son obligation d’administration des preuves et ne peut donc pas se prévaloir d’une violation du devoir d’interpellation du tribunal (article 56 CPC), au motif que ce dernier n’a pas requis la production des « milliers d’autres factures ». Au contraire, en agissant de la sorte, le tribunal aurait violé son obligation d’impartialité et le principe d’égalité de traitement des parties (c. 6.3.5). Le recours est rejeté (c. 7). [AC].

14 janvier 2014

HG ZH, 14 janvier 2014, HE130197 (d) (mes. prov.)

ZR 113/2014, p. 109-113 ; usage de la marque, similarité des produits et services, catégorie générale de produits ou services, terme générique, vraisemblance, preuve de l’usage d’une marque, usage à titre de marque, usage sérieux, transfert de la marque, moyens de preuves, date de dépôt, abus de droit, meuble, lits, literie ; art. 12 LPM.

Les lits peuvent être subsumés sous le terme générique de meubles. En effet, pour le grand public, les lits font partie du mobilier et les grands distributeurs de meubles proposent des lits dans leur assortiment de meubles. De même, il faut admettre la similarité entre les lits, d'une part, et les articles de literie, d'autre part. Là aussi, les établissements qui font commerce de lits proposent également tout l’équipement nécessaire en matière de literie. Il peut même être considéré que certains articles sont déjà compris dans le terme générique lits, comme les matelas, les parures de lit ou les couvre-lits. Cet assortiment de produits constitue une prestation formant un tout cohérent (c. 8). Lorsque le non-usage d’une marque est invoqué, c’est le principe negativa non sunt probanda qui s’applique et par conséquent, les exigences quant à la vraisemblance du non-usage ne sont pas très élevées. Ainsi, le fait que la marque en question n’ait été prolongée que durant le délai de grâce, puis rapidement transférée à la demanderesse est un indice sérieux que la marque n’a pas fait l’objet d’un réel usage par son précédent titulaire. De même, la défenderesse aurait dû contester de manière substantielle l’allégation de la demanderesse, lorsque celle-ci argue qu’en tant que spécialiste de la branche, elle n’a jamais entendu parler de cette marque. En effet, la défenderesse aurait pu facilement obtenir des informations concernant l’usage de la marque auprès du tiers qui lui a cédé la marque. Le non-usage de la marque est donc rendu vraisemblable, alors que l’usage de la marque n’est pas prouvé (c. 9.1). Il est établi que la défenderesse a repris l’utilisation de la marque en question (sur des cartes de visite, des quittances, des rubans pour les cadeaux et des sachets plastiques) avant que la demanderesse n’invoque le non-usage de cette marque. La défenderesse a ainsi obtenu la restitution du droit à la marque avec effet à la date de la priorité d'origine, qui est antérieure à la date de priorité de l’enregistrement de la demanderesse (c. 9.3). En acquérant cette marque antérieure, puis en en reprenant l’usage rapidement, la défenderesse n’a commis aucun abus de droit. Ce d’autant plus qu’elle utilisait déjà cette marque en Allemagne et qu’elle a fait une offre raisonnable à la demanderesse (c. 9.4). La défenderesse possède un droit préférable à celui de la demanderesse (c. 10). La demande de mesures provisoires est rejetée (c. 11). [AC]

27 mars 2013

TAF, 27 mars 2013, B-259/2012 (d)

sic! 7-8/2013, p. 444 (rés.), « Focus / Abafocus » ; motifs relatifs d’exclusion, catégorie générale de produits ou services, terme générique, cercle des destinataires pertinent, degré d’attention moyen, similarité des produits ou services, marque verbale, signe descriptif, signe fantaisiste, force distinctive faible, force distinctive moyenne, similarité des signes, risque de confusion admis partiellement, informatique, programme d’ordinateur, support de données ; art. 3 al. 1 lit. c LPM.

Le dépôt de marque du recourant est formulé en termes génériques. Par conséquent, le cercle des destinataires à considérer dans le domaine informatique est très étendu et hétérogène. Il est composé de tous les utilisateurs de moyens informatiques, qu’ils soient des particuliers ou des professionnels. Les consommateurs font preuve d’un degré d’attention moyen (c. 3.2). Les services de développement de matériel informatique et de logiciels, proposés en classe 42 par la défenderesse, se trouvent dans une relation étroite et logique avec les produits de la classe 9 (« matériel informatique et logiciels ») offerts par la recourante. Ces produits et services sont similaires (c. 4.2). Le terme « focus » est descriptif pour du matériel informatique (c. 5.2), ainsi que pour des logiciels (c. 5.3), mais pas pour des supports de données magnétiques (c. 5.4). En conséquence, la marque « FOCUS » est faible pour le matériel informatique et les logiciels alors que le signe « AbaFocus », en raison de son caractère fantaisiste, jouit d’une force distinctive plus grande (c. 5.7). D’une part, considérant le caractère descriptif de la marque opposante pour le matériel informatique et les logiciels, ainsi que les différences en ce qui concerne le nombre de syllabes et le début des marques en présence, il n’y a pas de similarité entre les signes en présence. D’autre part, pour les supports de données magnétiques, la marque opposante jouit d’une force distinctive normale et, par conséquent, il faut admettre la similarité des signes (c. 6.1-6.2). Il existe un risque de confusion entre les signes pour les supports de données magnétiques (c. 7.1). Un tel risque de confusion doit être nié pour le matériel informatique et les logiciels (c. 7.2). Le recours est partiellement admis (c. 8). [AC]

09 avril 2013

TAF, 9 avril 2013, B-1686/2012 (d)

sic! 9/2013, p. 545 (rés.), « Camille Bloch mon chocolat suisse (fig.) / My swiss chocolate.ch (fig.) » ; liste des produits et services, motifs relatifs d’exclusion, identité des produits ou services, libellé officiel de la Classification de Nice, terme générique, usage, usage à titre de marque, confiserie, chocolat ; art. 3 al. 1 lit. a LPM, art. 11 al. 1 LPM, art. 12 al. 1 LPM.

Selon la pratique suisse actuelle, l’enregistrement d’une marque à l’aide du libellé officiel ne porte que sur les produits et services désignés par ledit libellé officiel et les produits que cela implique de manière évidente. La question de savoir ce que les termes génériques recouvrent à l’évidence est une question d’interprétation pour laquelle l’autorité doit considérer l’usage et la date de dépôt (c. 2.4.3). La question d’une modification de cette pratique dans le sens d’une application plus généreuse, calquée sur la pratique européenne, peut rester ouverte en l’espèce (c. 2.5). Contrairement à ce que soutient le recourant, le chocolat, en tant que matière première de l’industrie alimentaire, ne peut pas être protégé par le terme générique de « cacao » provenant du libellé officiel de la classe 30 de la classification de Nice, car il s’agit in casu d’une boisson. Le chocolat en tant que matière première doit être protégé en classe 31 (c. 4.4). Cependant, le chocolat est couvert par le terme générique « confiserie », extrait du libellé officiel de la classe 30 (c. 4.6-4.9). La marque opposante « CAMILLE BLOCH MON CHOCOLAT SUISSE (fig.) » n’est par conséquent valablement utilisée que pour les produits de confiserie (c. 5.2). Le recours est admis et l’affaire renvoyée à l’IPI pour une nouvelle décision (c. 7.1). [AC]

12 juin 2013

TAF, 12 juin 2013, B-5543/2012 (d)

sic! 11/2013, p. 708-715, « six (fig.) / SIXX ; sixx (fig.) » ; usage de la marque, marque combinée, usage à titre de marque, usage par représentation, usage partiel, preuve de l’usage d’une marque, catégorie générale de produits ou services, terme générique, maxime de disposition, vraisemblance, usage sérieux, renvoi de l’affaire, facture, ticket de caisse, bijouterie, mode, lunettes ; art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 11 al. 1 LPM, art. 11 al. 2 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 12 al. 3 LPM.

La proximité entre la marque et le nom du titulaire sur une facture ou dans l’entête de lettre ne signifie pas nécessairement que l’usage à titre de marque fait défaut. Il convient d’analyser la structure des tickets de caisse et les informations détaillées relatives aux produits pour savoir si le signe peut être compris comme une indication de provenance commerciale. La marque ne doit pas systématiquement être apposée directement à côté de l’indication des produits (c. 7.1.2). Il n’est pas rédhibitoire que ce soit le nom d’un tiers et non celui du titulaire du signe qui apparaisse sur les tickets de caisse, si le titulaire peut démontrer que la marque est utilisée par ce tiers avec son consentement (c. 7.1.3). La recourante a rendu vraisemblable qu’elle est active dans le secteur de la mode et de la bijouterie. Son assortiment de produits dans cette branche comprend notamment, mais sans s’y limiter, des bagues, des colliers et des bracelets, ce qui est typique de la bijouterie et des bijoux de mode et constitue un usage valable pour toute cette catégorie (c. 7.1.6). La vente de lunettes de soleil ne permet pas d’attester d’un usage valable pour la catégorie générale de produits « lunettes » (c. 7.1.7). Les tickets de caisse qui établissent un usage à titre de marque pour d’autres produits en rapport avec la mode et la bijouterie, mais qui n’appartiennent pas aux classes de produits pour lesquelles le titulaire souhaite démontrer un usage à titre de marque, ne sont pas examinés, bien qu’une partie de ces produits soit visée par l’enregistrement de la recourante (c. 7.1.9). L’utilisation sur des tickets de caisse d’un seul élément d’une marque combinée ne constitue pas un usage à titre de marque (c. 7.3.2.). Des extraits du site Internet de la recourante, datés de la période du deuxième échange d’écritures devant l’autorité inférieure et donc après que l’exception du défaut d’usage a été levée, se situent hors de la période à considérer (c. 7.4.2). L’usage sérieux de la marque peut être retenu, étant donné que la recourante est propriétaire de plusieurs points de vente en Suisse et en Allemagne et qu’elle compte également des concessionnaires (c. 7.9). Le recours est partiellement admis et l’affaire est renvoyée à l’autorité inférieure pour l’examen des motifs relatifs d’exclusion concernant les produits dont l’usage à titre de marque a été prouvé (c. 8.1). [AC]

six (fig.) (opp.)
six (fig.) (opp.)
sixx (fig.) (att.)
sixx (fig.) (att.)

23 février 2012

TF, 23 février 2012, 4A_429/2011 et 4A_435/2011 (d)

sic! 7-8/2012, p. 457-464, « Yello / Yallo II » ; marque défensive, motifs absolus d’exclusion, usage de la marque, usage partiel, preuve, vraisemblance, terme générique, classification de Nice, catégorie générale de produits ou services, obligation de motiver ; art. 29 al. 2 Cst., art. 2 al. 2 CC, art. 8 CC, art. 2 lit. d LPM, art. 11 al. 2 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 12 al. 2 LPM ; cf. N 433 (vol. 2007-2011 ; ATF 136 III 102 ; sic! 6/2010, p. 436-438, « Yello / Yallo »).

L’absence d’intention d’utiliser la marque entraîne sa nullité, même si le délai de carence de l’art. 12 al. 1 LPM n’est pas arrivé à échéance (c. 3.2). Celui qui invoque un dépôt défensif comme motif de nullité doit prouver l’absence d’intention d’utiliser la marque. S’agissant d’un fait négatif et interne qui ne peut pas être prouvé de manière positive, la preuve abstraite d’une constellation typique des marques défensives suffit si la partie adverse n’a pas documenté ou au moins expliqué en quoi l’enregistrement contesté participe d’une stratégie non abusive (« fairness ») en matière de marque (c. 5.1). L’enregistrement d’un signe pour un large éventail de produits et services ne suffit pas à démontrer le caractère défensif du dépôt (c. 5.2.1). L’enregistrement d’un signe dans un pays ou l’activité du déposant est prohibée ne peut avoir pour objectif que d’empêcher les tiers d’utiliser ce signe dans le monde entier sans que cela s’accompagne de l’intention d’en faire usage (c. 5.2.3). Le réenregistrement d’un signe quasi-identique à un enregistrement antérieur pour un catalogue de produits et services semblable constitue un comportement défensif pour l’ensemble des produits et services revendiqués, et non uniquement pour ceux correspondant à l’activité principale du déposant (c. 5.3). On ne saurait déduire de l’utilisation d’une marque à l’étranger l’intention de l’utiliser en Suisse (c. 5.4). Lorsqu’un signe est enregistré sous un terme générique de la classification de Nice, mais qu’il n’est utilisé que pour certains des produits ou services revendiqués sous ce terme générique, il s’agit d’un usage partiel. Un tel usage partiel ne vaut pour l’ensemble des produits ou services désignés sous un terme générique de la classification de Nice que si les destinataires pertinents considèrent ces produits comme un assortiment logique pour un fabricant de la branche concernée, ou si ces produits sont typiquement utilisés pour désigner l’ensemble des produits couverts par le terme générique concerné (c. 9.1). En l’espèce, il n’est pas nécessaire d’examiner dans quelle mesure les produits ou services pour lesquels le signe « Yello » a été utilisé sont différents des autres produits ou services regroupés sous le terme générique déposé. En effet, faute d’avoir pu constater l’existence d’un usage partiel, l’autorité inférieure n’avait pas à examiner si un tel usage s’étendait également aux autres produits ou services couverts par les termes génériques sous lesquels le signe a été enregistré. Elle n’a donc pas enfreint l’obligation de motiver découlant de l’art. 29 al. 2 Cst. (c. 9.3). Les deux recours sont rejetés (c. 10). [JD]

25 mars 2019

TF, 25 mars 2019, 4A_590/2018 (d)

sic! 7-8/2019, p. 436-439, « Riverlake / RiverLake » ; raison de commerce, raison sociale, signe fantaisiste, néologisme, force distinctive moyenne, reprise d’une raison de commerce, terme générique, terme descriptif, droit de la personnalité, risque de confusion indirect, risque de confusion admis, impression générale, registre du commerce, droit au nom, usurpation, nom de domaine, transfert de nom de domaine, site Internet, anglais, Riverlake, RiverLake Capital AG, riverlake.com, transport maritime, finance, services financiers ; art. 29 al. 2 CC, art. 951 CO, art. 956 al. 2 CO.

Un prestataire logistique genevois, actif notamment dans le transport maritime de marchandises et ayant fait inscrire entre 1985 et 2011 quatre raisons de commerce contenant principalement le terme « Riverlake », a attaqué une entreprise zougoise, « RiverLake Capital AG », fournissant des services dans le domaine de la finance, suite à l’inscription en 2017 de sa raison de commerce dans le registre du commerce du canton de Zoug. Dans son jugement, l’instance précédente a interdit à la société zougoise d’utiliser l’élément « RiverLake » dans sa raison sociale, ainsi que dans les affaires en Suisse, notamment sur son site Internet, pour la désigner ou pour désigner ses services. Selon l’instance précédente, le terme « Riverlake », bien que composé de deux désignations génériques, constitue un néologisme. Elle considère qu’il s’agit d’un signe fantaisiste doté d’une force distinctive au moins moyenne, et que ni l’élément descriptif « Capital AG », ni l’utilisation d’un « L » majuscule dans la raison de commerce de la recourante ne lui permettent de se distinguer suffisamment nettement de la raison de commerce antérieure de la défenderesse, d’une manière qui permettrait d’exclure tout risque de confusion indirect (c. 2.2). Dans l’examen de l’existence d’un risque de confusion entre les raisons de commerce litigieuses, c’est à raison que l’instance cantonale s’est fondée sur l’impression d’ensemble produite sur le public, doté de connaissances moyennes de l’anglais. Elle n’a pas violé le droit fédéral en considérant que l’expression « Riverlake », considérée dans son ensemble, ne constitue pas une désignation descriptive, mais bien plutôt une désignation fantaisiste, certes dénuée d’originalité particulière. Contrairement à ce que soutient la recourante, et à l’inverse de ce qui prévaut en droit des marques, les raisons de commerce sont aussi protégées contre leur emploi par des entreprises actives dans d’autres branches. Par ses considérations, l’instance précédente n’a commis aucune violation de l’art. 951 CO, en lien avec l’art. 956 al. 2 CO (c. 2.3). Selon l’art. 29 al. 2 CC, celui qui est lésé par une usurpation de son nom peut intenter action pour la faire cesser. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l’usage du nom d’autrui porte atteinte à ses intérêts lorsque l’appropriation du nom entraîne un risque de confusion ou de tromperie ou que cette appropriation est de nature à susciter dans l’esprit du public, par une association d’idées, un rapprochement qui n’existe en réalité pas entre le titulaire du nom et le tiers qui l’usurpe sans droit. Le degré d’atteinte requis par la loi est réalisé lorsqu’une association d’idées implique le titulaire du nom dans des relations qu’il récuse et qu’il peut raisonnablement récuser. L’usurpation du nom d’autrui ne vise pas seulement l’utilisation de ce nom dans son entier, mais aussi la reprise de sa partie principale si cette reprise crée un risque de confusion (c. 3.1). Dans son mémoire de recours, la demanderesse ne démontre pas que l’instance inférieure ait commis une violation de l’art. 29 al. 2 CC (c. 3.2). La recourante, qui s’est vu ordonner par l’instance précédente de transférer à la défenderesse le nom de domaine www.riverlake.com dans les 30 jours suivant le prononcé du jugement, ne traite pas dans son mémoire des considérations de la décision attaquée. Elle affirme seulement que le domaine de premier niveau « .com » ne s’adresse pas seulement à la population suisse, et doit pouvoir continuer à être utilisé dans le monde entier. Comme l’explique à raison la défenderesse, les noms de domaine en « .com » peuvent être consultés depuis la Suisse, et atteignent donc aussi le public Suisse. L’atteinte produit des effets en Suisse. Le blocage d’un nom de domaine ne peut être limité ni territorialement, ni sur le fond. La recourante n’explique pas en quoi la décision de l’instance précédente serait disproportionnée, et ne met pas en cause le fondement de la prétention au transfert du nom de domaine (c. 4). Le recours est rejeté (c. 5). [SR]

30 janvier 2018

TAF, 30 janvier 2018, B-6304/2016 (d)

Motifs d’exclusion absolus, besoin de libre disposition absolu, signe appartenant au domaine public, apple, degré d’attention moyen, degré d’attention faible, degré d’attention accru, degré d’attention légèrement accru, grand public, spécialiste de la bijouterie, notoriété, vocabulaire de base anglais, caractère distinctif originaire, caractère distinctif acquis par l’usage, signe banal, signe descriptif, terme générique, pomme, marque verbale, marque tridimentionnelle au sens stricte, forme, emballage, inscription au registre des marques, monopole, teneur symbolique, égalité de traitement ; art. 8 Cst., art. 2 lit. a LPM.

APPLE

Demande d’enregistrement N°51046/2014 « APPLE »


Liste des produits et services revendiqués

Classe 37 : Schmuckwaren; Uhren; Armbanduhren; Waren aus Edelmetallen oder da-mit plattiert; Manschettenknöpfe; Schlüsselringe; Stoppuhren; Anstecknadeln (Schmuckwaren) aus Edelmetall oder damit plattiert; Zierschmuck aus Edelmetall oder damit plattiert; Krawattennadeln aus Edelmetall oder damit plattiert; Krawattenhalter aus Edelmetall oder damit plattiert; Abzeichen aus Edelmetall oder damit plattiert; Armbänder aus Edelmetall oder damit plattiert; Halsketten aus Edelmetall oder damit plattiert; Medaillen aus Edelmetall oder damit plattiert; kurze Schlüsselanhänger und Verzierungen aus Edelmetall oder damit plattiert; Zierknöpfe aus Edelmetall oder damit plattiert; Schmuckklammern aus Edelmetall oder damit plattiert; Kästen aus Edelmetall oder damit plattiert; Schmuckverzierungen aus Edelmetall oder damit plattiert; Strass (Edelsteinimitation); Skulpturen aus Edelmetall oder damit plattierte Waren.


Classe 28 : Spielzeug, Spiele und Spielwaren; elektronisches Spielzeug, Spiele und Spielwaren; Musikspielzeug, -spiele und -spielwaren; Handkonsolen zum Spielen elektronischer Spiele; handbetätigte Computerspiele und Spielgeräte ausgenommen solche zur Verwendung mit einem externen Bildschirm oder Monitor; freistehende Videospielautomaten mit Display; elektronische Computerspiele ausgenommen solche zur Verwendung mit einem externen Bild-schirm oder Monitor; Geräte für elektronische Spiele ausgenommen solche zur Verwendung mit einem externen Bildschirm oder Monitor; Videospiele aus-genommen solche zur Verwendung mit einem externen Bildschirm oder Monitor; Unterhaltungsspielautomaten; Unterhaltungsspielautomaten mit Display; Spielzeugcomputer (nicht betriebsfähig); Spielzeugmobiltelefone (nicht betriebsfähig); elektronische Taschengeräte als Spielzeug; Spielzeugtongeräte; Spielzeugspieldosen; Spielzeugmusikinstrumente; Spielzeugrecorder zum Abspielen von Melodien und Kassetten; batteriebetriebenes Spielzeug; Spiel-geräte mit Videoausgang zur Verwendung mit einem externen Bildschirm oder Monitor; freistehende Spielautomaten mit Videoausgang; interaktives Computerspielzeug und Spiele; Spielkarten; Teile und Zubehör für die vorgenannten Waren.

Cercle des destinataires pertinent

Les montres ainsi que les bijoux revendiqués en classe 14 sont demandés par un large public qui examinent ces marchandises avec un degré d’attention moyen. Les milieux spécialisés feront preuve, eux d’un degré d’attention élevé. Les sculptures sont examinées avec un degré d’attention particulièrement élevé. Le restant des produits ou services revendiqués est examiné avec un degré d’attention faible à moyen. Le cercle des destinataires pertinents pour les jouets revendiqués en classe 28 est un large public représentant toutes les couches de la population, en particulier les enfants et les jeunes, de commerçants spécialisés ainsi que des constructeurs de jouets. Les produits et services revendiqués sont examinés avec un degré d’attention légèrement accru (c. 1.2.4).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Besoin de libre disposition absolu, art. 2 lit. a LPM.

Conclusion

L’instance précédente considère que le signe « APPLE » est compris par le cercle des destinataires pertinents comme « Apfel », et que dès lors ce signe est descriptif du contenu thématique ou de l’aspect des produits ou services revendiqués (c. G.). La recourante estime, du fait de sa notoriété que le cercle des destinataires pertinents comprendra le signe « APPLE » comme l’indication de la provenance industrielle des biens ou services revendiqués (c. 4.2). Lors de l’examen du caractère distinctif originaire, une éventuelle notoriété de la marque ne doit pas être prise en considération. En l’espèce, la requérante ne fait pas valoir un caractère distinctif acquis par l’usage. C’est donc à juste titre que l’instance précédente a associé le signe « APPLE » au vocabulaire de base anglais l’a traduit en « Apfel » (c. 4.4).


L’instance précédente a refusé l’enregistrement du signe « APPLE » au motif que la forme de pomme était déjà utilisée et par conséquent pas inattendue. Le motif de pomme est également usuel. Enfin, la pomme est une forme tridimensionnelle usuelle pour certains des produits et services revendiqués en classes 14 et 28.



Les signes qui décrivent un aspect possible des produits revendiqués ne sont protégeables qu’à la condition d’être distinctifs, soit qu’ils se distinguent suffisamment des formes usuelles et habituelles.



Les biens et services de la classe 14 sont acheté principalement pour leur esthétique. Les motifs possédant une forte symbolique sont particulièrement populaires. En l’espèce, le motif ou la forme de pomme, en tant que symbole de la vie éternelle, de la séduction ou de la fertilité ne sont pas inattendus.



Les produits ou les services ayant un aspect particulier sont généralement commercialisés avec une indication à celui-ci. L’inscription d’un concept générique a pour conséquence de monopoliser également l’aspect en question. Le besoin de libre disposition n’est donc pas limité aux concepts qui désignent une forme typique ou caractéristique. Comme il n’existe pas de synonyme permettant de décrire une pomme, il existe bel et bien un besoin de libre disposition absolu (c. 5.1.1). Les indications relatives à la forme, l’emballage ou l’aspect ne sont pas protégeables si elles sont usuelles pour les produits et services revendiqués, ou s’il en résulte un avantage d’usage. Le lien entre la marque et la marchandise doit être reconnaissable sans effort mental particulier. L’effet bloquant d’une marque verbale qui renvoie à l’aspect de des produits ou services revendiqués est limité à l’usage du mot en question, et ne s’étend pas à l’utilisation de la forme ou de l’aspect décrit. Les indications relatives à l’emballage doivent être examinées avec plus d’attention afin de garantir que les emballages les moins compliqués techniquement ou les moins chers restent à la libre disposition des concurrents (c. 5.2.2). Les indications relatives à la forme, l’aspect ou l’emballage appartiennent au domaine public lorsque celles-ci sont usuelles en lien avec les produits et services revendiqués. C’est le rapport entre la marque et l’aspect qui doit être reconnaissable sans effort particulier (c. 5.2.3). L’arrêt « Milchbärchen » (cf. N 175, arrêt du TAF B-2054/2011) n’a pas conduit à un durcissement de la jurisprudence selon laquelle les signes indiquant la forme des marchandises appartiennent au domaine public dès lors que ce lien est possible et non inattendu. Une marque verbale ne peut pas être examinée comme une marque de forme. En effet, un signe verbal ne monopolise pas la forme elle-même. En effet, seuls les mots indiquant une forme usuelle appartiennent au domaine public (c. 5.2.4). La force distinctive d’une marque verbale ne dépend pas immédiatement de l’originalité de la forme décrite, et un signe ne doit pas être refusé immédiatement si la forme décrite n’est pas inattendue (c. 5.2.5). Les sites étrangers peuvent être utilisés afin de déterminer l’appartenance au domaine public d’un signe s’ils sont pertinents pour le cercle des destinataires pertinents en Suisse bien qu’il faille adopter un point de vue critique afin de tenir compte des particularités du marché suisse (c. 5.3.3). Les preuves apportées par l’instance inférieure, ainsi que le fait qu’une recherche sur internet montre peu de produits en forme de pomme ou utilisant un motif de pomme ne permet pas de conclure au caractère usuel du signe « APPLE » pour les marchandises en classe 14 telles que les montres, montres bracelet, etc. (c. 5.3.3). Concernant les bijoux en classe 14, et malgré le grand nombre de formes à disposition, les pièces ayant une symbolique importante occupent une place particulière. Les motifs liés à la beauté, la sensualité, la masculinité ou la féminité, la tradition ou la richesse sont particulièrement prisés. Les motifs liés à la nature, au sein desquels la pomme occupe une place particulière ont une symbolique très forte. La pomme, dans la culture eurasiatique symbolise la fertilité, la beauté, l’amour et l’immortalité en plus d’être dans la tradition chrétienne le fruit de la connaissance et de la tentation. Dans le domaine des bijoux, la pomme est ainsi régulièrement utilisée, si bien qu’en tant que forme ou que motif, la pomme est usuelle. Le signe « APPLE » sera compris par le cercle des destinataires pertinent sans effort particulier comme une indication de forme, et bien que la marque verbale ne monopolise pas la forme de pomme en elle-même, le signe doit être, en tant qu’indication de forme, laissé à la libre disposition (c. 5.4.1). Les bijoux revendiqués en classe 14 font partie du terme générique « edelmetallen oder plattiert ». La protection étant refusée dès lors que qu’il existe un motif d’exclusion pour une partie des produits ou services compris dans ce terme générique, l’inscription doit également être refusée pour « edelmetal » (c. 5.4.2) L’appartenance de la pomme au domaine public, ainsi que le signe « APPLE » décrivant cette forme est également valable pour les « spiele etc » de la classe 28. Il est cependant possible de se demander si le signe est descriptif également pour les marchandises définies par leur contenu (probablement un mot juste dans le thésaurus). La pomme, de par sa forme simple et sa fréquente utilisation est également un motif apprécié, en particulier pour les produits à destination des jeunes enfants. Le signe « APPLE » est donc compris comme une indication de contenu et appartient ainsi au domaine public. L’inscription est donc refusée également pour ces marchandises (6.4). Le TAF rappelle également qu’en droit des marques, la pratique liée à l’enregistrement est très casuistique, si bien que lorsqu’il s’agit de déceler une inégalité de traitement, de petites différences entre les signes comparés peuvent avoir une importance considérable (c. 7.2). Les signes construits d’une autre manière (Trois Pommes, Fast Fruit et Blooming Rose), ou les signes ayant une autre signification ne sont pas comparables du point de vue de l’égalité de traitement. Les signes enregistrés depuis plus de 8 ans non plus, dans la mesure où leur enregistrement ne correspond plus à la pratique actuelle (c. 7.3). Le fait qu’un signe soit enregistré à l’étranger ne permet pas de préjuger de l’imprescriptibilité d’un signe (c. 7.4). Le recours est donc partiellement admis, et le signe « APPLE » est enregistrable pour les produits revendiqués en classe 14. [YB]