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  • valeur
  • vénale réelle

13 septembre 2017

TF, 13 septembre 2017, 6B_984/2017 (f)

Falsification de marchandise, métier, valeur vénale réelle, quotité de la peine, valeur simulée, valeur vénale apparente, dol ; art. 155 ch. 1 CP, art. 155 ch. 2 CP.

Celui qui en vue de tromper autrui dans les relations d’affaires, aura fabriqué des marchandises dont la valeur vénale réelle est moindre que ne le font croire les apparences, notamment en contrefaisant ou en falsifiant ces marchandises, aura importé, pris en dépôt, ou mis en circulation de telles marchandises, sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire, pour autant que l’infraction ne tombe pas sous le coup d’une disposition prévoyant une peine plus sévère (art. 155 ch. 1 CP). En vertu de l’art. 155 ch. 2 CP, si l’auteur fait métier de tels actes, la peine est une peine privative de liberté de 5 ans au plus, ou une peine pécuniaire, pour autant que l’infraction ne tombe pas sous le coup d’une disposition prévoyant une peine plus sévère (c. 2.1). L’art. 155 CP réunit en une seule disposition les éléments constitutifs de la falsification de marchandises (art. 153 aCP), de la mise en circulation de marchandises falsifiées (art. 154 aCP) et de l’importation et de la prise en dépôt de marchandises falsifiées (art. 155 aCP). Le terme « fabriquer » (herstellen) remplace les verbes « contrefaire » (nachmachen) et « falsifier » (verfälschen). En ce qui concerne la punissabilité, peu importe donc que l’auteur falsifie une marchandise en modifiant l’original (falsification au sens étroit) ou en fabriquant une copie de toutes pièces à partir de matières premières sans origine particulière (contrefaçon). La nouvelle formulation met l’accent sur les apparences de la marchandise falsifiée qui laissent croire que sa valeur courante est supérieure à celle qu’elle a en réalité, et créent ainsi un risque de confusion sur le marché. A cet égard, la manière dont l’auteur parvient à simuler ces apparences trompeuses est sans importance. Il peut s’agir d’une modification de la substance, comme le fait d’ajouter de l’eau au lait ou de couper du vin. La tromperie peut aussi résider dans une modification de la présentation du produit, au moyen par exemple d’un emballage qui suggère une contenance beaucoup plus importante qu’elle ne l’est en réalité. En résumé, la notion de falsification s’apprécie non plus en fonction de la modification, mais bien de la différence entre la valeur réelle et la valeur simulée d’une marchandise. L’art. 155 CP entend garantir que l’acquéreur ne reçoive pas une marchandise qu’il n’aurait achetée qu’à un prix inférieur ou qu’il n’aurait pas achetée du tout si elle ne lui avait pas été présentée sous une apparence, une désignation ou un emballage trompeur. Il est dès lors capital de savoir si la valeur vénale réelle de la marchandise correspond à sa valeur vénale apparente. Il faut partir du principe que l’imitation, même la plus fidèle, d’un article de marque a une valeur inférieure à celle de l’original, dans la mesure où la copie est privée d’une caractéristique essentielle : celle, précisément, d’être un article de marque, bénéficiant le plus souvent d’avantages non négligeables tels que service après-vente, garantie ou vaste réseau de concessionnaires par exemple (c. 2.1). La jurisprudence admet dans de nombreuses infractions impliquant un dessein spécial que celui-ci peut être réalisé par dol éventuel (voir références citées). Il n’y a pas lieu de s’écarter de cette jurisprudence s’agissant de l’art. 155 CP. Le dessein de tromper autrui prévu par cette disposition peut être réalisé par dol éventuel (c. 2.5.1). L’auteur agit par métier lorsqu’il résulte du temps et des moyens qu’il consacre à ses agissements délictueux, de la fréquence des actes pendant une période déterminée, ainsi que des revenus envisagés ou obtenus qu’il exerce son activité coupable à la manière d’une profession, même accessoire. Il faut que l’auteur aspire à obtenir des revenus relativement réguliers représentant un apport notable au financement de son genre de vie et qu’il se soit ainsi, d’une certaine façon, installé dans la délinquance (voir références citées, c. 2.6.1). Au vu des produits en cause [produits de luxe], de leur nombre important, des faibles revenus du recourant, le revenu réalisé, respectivement escompté de la vente des contrefaçons litigieuses, permet de retenir la circonstance du métier (c. 2.6.3). Le recours est partiellement admis concernant la fixation de la quotité de la peine. [NT]