03 juillet 2012

TF, 3 juillet 2012, 4A_20/2012 (d)

sic! 12/2012, p. 811-813, « Lego IV (3D) » ; motifs absolus d’exclusion, marque tridimensionnelle, signe tridimensionnel, forme géométrique simple, Lego, forme techniquement nécessaire, coûts de fabrication, signe alternatif, expertise, fardeau de la preuve, droit d’être entendu, compatibilité, secret de fabrication ou d’affaires ; art. 29 al. 2 Cst., art. 8 CC, art. 9 CC, art. 2 lit. b LPM.

Le Tribunal de commerce du canton de Zurich a confirmé la nullité des marques de forme de Lego sur la base d'un examen du caractère techniquement nécessaire d'une forme tridimensionnelle, au sens de l'art. 2 lit. b LPM, effectué dans le cadre d'une expertise ordonnée par ce tribunal sur demande du Tribunal fédéral qui lui avait renvoyé la cause pour qu'il soit vérifié s'il existait des formes alternatives (tant compatibles qu'incompatibles avec les formes Lego), aussi pratiques, aussi solides et dont les coûts de production ne seraient pas plus élevés que ceux des formes contestées comme marques. Le Tribunal de commerce de Zurich a fondé son jugement sur la constatation des experts que chaque variante s'éloignant des formes géométriques de Lego conduisait à des coûts d'outillage supplémentaires, plus faibles pour les formes compatibles (11 à 30 %) et plus élevés pour celles qui ne l'étaient pas (29 à 54 %). L'expertise avait permis de poser qu'au vu de la durée de vie moyenne des outillages, les surcoûts de fabrication les plus bas oscillaient entre 1,326 et 4,927 % pour les formes compatibles et se montaient jusqu'à 50 % pour celles qui ne l'étaient pas. Lorsque dans son appréciation des preuves, le tribunal retient comme établi, sur la base d'une expertise obtenue à grands frais, que toutes les formes alternatives s'accompagnent de coûts de fabrication supérieurs à ceux des briques Lego et que, par conséquent, celles-ci doivent être considérées comme techniquement nécessaires au sens de l'art. 2 lit. b LPM, le principe de la répartition du fardeau de la preuve devient sans objet. Le grief de sa prétendue violation ne saurait donc être retenu (c. 2). Une forme doit être considérée comme techniquement nécessaire au sens de l'art. 2 lit. b LPM si les autres possibilités existantes ne peuvent pas être imposées aux concurrents du déposant parce qu'elles sont moins pratiques, moins solides, ou parce qu'elles s'accompagnent de coûts de production plus élevés (c. 3.1). Comme le monopole lié à l'obtention d'une marque de forme peut être illimité dans le temps, il faut que les formes alternatives à disposition des concurrents du déposant ne s'accompagnent d'aucun désavantage pour eux. Même un coût de production légèrement plus élevé constitue déjà un désavantage qui ne peut leur être imposé, en particulier en vertu du principe de l'égalité dans la concurrence. Ainsi, des coûts de production supplémentaires de 1,326 à 4,927 % suffisent pour que le recours à des formes alternatives ne puisse être rendu obligatoire aux concurrents des briques Lego (c. 3.2). Lorsqu'elle a été invitée à le faire par le tribunal qui mène la procédure, la partie qui invoque ses secrets d'affaires pour refuser de transmettre des informations techniques à l'expert chargé de la réalisation d'une expertise dans le cadre de l'administration des preuves, ne peut se prévaloir d'une violation de son droit d'être entendu si les indications qu'elle donne ensuite sur ces questions dans sa détermination sur les résultats de l'administration de preuves sont considérées comme contradictoires et inacceptables par le tribunal au regard du principe de la bonne foi, et si ce dernier renonce à ordonner une nouvelle expertise demandée à ce stade seulement de la procédure sur ces mêmes questions (c. 4.3.2). [NT]