Asian
Development Bank, marque verbale, marque combinée, motif d’exclusion
absolu, signe contraire au droit en vigueur, usage antérieur, droit
dérivé d’un usage antérieur, droit
de poursuivre l’utilisation, droit
acquis, date de dépôt, modification
du dépôt, garantie
de la propriété, champ de protection ;
art. 6ter CUP, art. 26 Cst., art. 190 Cst., art. 2 lit. d LPM, art.
28 al. 2 LPM, art. 29 al. 1 LPM, art. 29 al. 2 LPM, art. 14 al. 3
LPAP, art. 35 LPAP, art. 4 LPNEONU, art. 5 LPNEONU, art. 6 LPNEONU.
La
publication dans la Feuille Fédérale du 12 mai 2009 du sigle
« ADB » pour « Banque Asiatique de Développement »
lui a conféré la protection de la loi fédérale concernant la
protection des noms et emblèmes de l’Organisation des Nations
Unies et d’autres organisations intergouvernementales (LPNEONU). La
marque litigieuse déposée comporte la suite de lettres « ADB »
et reprend ainsi un signe distinctif protégé. La déposante prétend
toutefois être au bénéfice du droit de continuer l’utilisation
de ce sigle en vertu de l’art. 5 LPNEONU auquel elle a eu recours
sous plusieurs formes depuis 1995 pour désigner son entreprise,
ainsi que comme marque pour ses produits et services (c. 2.3). La
protection conférée par la LPNEONU aux signes distinctifs des
organisations intergouvernementales va plus loin que celle minimale
exigée par l’art. 6ter CUP. Cela vaut aussi pour la réglementation
découlant de l’art. 5 LPNEONU (c. 3.1). Tant la LPM que la loi sur
la protection des armoiries suisses et autres signes publics
consacrent un droit dérivé d’un usage antérieur. Ainsi, l’art.
14 al. 1 LPM prévoit, sous la note marginale « restriction
concernant les signes utilisés antérieurement » que le
titulaire ne peut pas interdire à un tiers de poursuivre l’usage,
dans la même mesure que jusque-là, d’un signe que ce tiers
utilisait déjà avant le dépôt. Une partie de la doctrine en tout
cas considère que cette disposition n’autorise pas le bénéficiaire
d’un droit d’usage antérieur à enregistrer après coup le signe
qu’il utilisait préalablement sans l’avoir enregistré. A
l’inverse, l’art. 14 al. 3 LPAP comporte une exception spécifique
à l’interdiction d’enregistrement pour les signes pour lesquels
le Département fédéral de justice et de police a accordé le droit
de poursuivre l’usage en vertu de l’art. 35 LPAP. Cette
disposition est destinée à tenir compte des intérêts des
entreprises traditionnelles suisses et des associations qui utilisent
depuis de nombreuses années les armoiries suisses ou un signe qui
leur est similaire lorsque ces signes se sont imposés comme signes
distinctifs dans le public. Le droit limité de poursuivre l’usage
antérieur admis dans ces cas comporte la possibilité d’enregistrer
le signe comme marque. Le but de cette réglementation est aussi en
particulier d’améliorer la protection des signes correspondants à
l’étranger (c. 3.2). L’art. 5 LPNEONU prévoit que celui qui,
avant la publication de la protection d’un signe par la LPNEONU,
avait commencé à faire de bonne foi usage des noms, sigles,
armoiries, drapeaux et autres emblèmes protégés, pourra continuer
à en faire le même usage s’il n’en résulte aucun préjudice
pour l’organisation intergouvernementale intéressée. L’intérêt
public à la protection des signes distinctifs des organisations
intergouvernementales l’emporte sur l’intérêt privé du
titulaire du signe. L’art. 6 LPNEONU prévoit expressément que les
signes dont l’emploi est interdit en vertu de cette loi et les
signes susceptibles d’être confondus avec eux ne peuvent en
particulier pas être enregistrés comme marques. L’art. 5 LPNEONU
introduit uniquement un correctif permettant le respect des droits
acquis. Il ne saurait être déduit des art. 4 et 5 LPNEONU que
l’enregistrement d’une version modernisée et développée d’un
signe utilisé jusque-là en vertu d’un droit acquis devrait être
autorisé et ne saurait être refusé que s’il en résultait un
préjudice pour l’organisation intergouvernementale concernée (c.
3.2). Un motif d’empêchement absolu s’oppose à l’enregistrement
de la marque déposée (art. 2 lit. d LPM en lien avec l’art. 6
LPNEONU). Le législateur a pris en compte l’intérêt du
bénéficiaire d’un signe utilisé antérieurement dans le cadre de
l’art. 5 LPNEONU. Cette règlementation de la LPNEONU lie le
Tribunal fédéral au sens de l’art. 190 Cst. Il n’y pas là
d’atteinte disproportionnée à la garantie de la propriété (c.
3.3). Une marque est déposée dès que les pièces visées à l’art.
28 al. 2 LPM ont été remises à l’IPI (art. 29 al. 1 LPM). Si la
marque est remplacée ou modifiée de manière substantielle ou si la
liste des produits et services qu’elle désigne est étendue après
le dépôt, la date de dépôt est celle du jour où ces
modifications sont déposées (art. 29 al. 2 LPM) (c. 4.3). Seul ce
qui faisait déjà, ou aurait dû faire, l’objet de la procédure
de première instance peut être porté dans le cadre de la procédure
de recours devant le TAF. Il se peut que pendant la procédure
l’objet du litige se rétrécisse de telle façon qu’il en perde
son caractère litigieux, mais il ne peut pas fondamentalement
s’étendre ou changer de contenu. En concluant subsidiairement à
ce que l’enregistrement du signe intervienne comme marque verbale
pure, et plus comme marque combinée, verbale et figurative, comme
cela avait été demandé devant la première instance, la recourante
cherche à obtenir une nouvelle définition du champ de protection de
sa marque. Cette conclusion subsidiaire va ainsi au-delà des
modifications acceptables de l’objet même du litige. L’art. 29
al. 2 LPM ne confère d’ailleurs pas un tel droit à la recourante
(c. 4.4). Le recours est rejeté. [NT]