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14 mars 2014

TAF, 14 mars 2014, B-6540/2012 (d)

sic! 10/2014, p. 618-623, « Zusatztarif zumGT 3a », medialex 3/2014, p. 166-167, «Uhreberrechtsentschädigungen für Sendeempfang in Gästezimmern » ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarifs communs 3a complémentaire, tarifs séparés, question préalable, négociation des tarifs, devoir de négocier, traités internationaux, applicabilité directe, interprétation conforme au droit international, économie de procédure, droit d’être entendu, droit de retransmission, droit de faire voir ou entendre, chambres d’hôtes, usage privé ; art. 8 WCT, art. 5 al. 4 Cst., art. 29 Cst., art. 190 Cst., art. 1 al. 2 LDA, art. 10 al. 2 lit. e LDA, art. 10 al. 2 lit. f LDA, art. 19 al. 1 lit. a LDA, art. 22 al. 2 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 47 al. 1 LDA ; cf. N 802 (TAF, 8 juillet 2015, B-3865/2015).

Si la CAF entend modifier elle-même la proposition tarifaire des sociétés de gestion, elle doit accorder aux parties le droit d’être entendu (c. 2.2). Dans le domaine du droit d’auteur, en matière de droit à rémunération, les autorités doivent tenir compte du droit international public. Les traités internationaux et le droit interne font partie d’un système juridique uniforme, les particuliers ne pouvant se prévaloir des premiers que s’ils ont un caractère « self executing ». Tel est le cas lorsqu’un traité contient des normes claires et suffisamment déterminées permettant de trancher un cas particulier, pas lorsqu’il s’adresse au législateur en prescrivant comment une matière doit être réglementée (c. 3.2). En revanche, les tribunaux suisses n’ont pas à respecter la jurisprudence européenne, lorsqu’il y a des raisons objectives de consacrer une solution différente (c. 3.3). La LDA doit être interprétée de manière compatible avec les accords ADPIC (c. 3.4). Les garanties minimales découlant du droit d’être entendu englobent le droit à une orientation préalable, à pouvoir s’exprimer, à être écouté, à consulter le dossier et à recevoir une décision motivée. Les parties ont le droit de recevoir toutes les écritures déposées, qu’elles apportent ou non des éléments nouveaux ou importants, et de prendre position à leur sujet (c. 4.4.1). Une violation du droit d’être entendu peu importante peut exceptionnellement être réparée si la partie concernée a la possibilité de s’exprimer en procédure de recours. Même en cas de violations graves, il faut renoncer à un renvoi afin d’éviter le formalisme excessif et les retards inutiles. Mais la doctrine s’exprime majoritairement pour un renvoi en cas de telles violations graves du droit d’être entendu (c. 4.4.3). En l’espèce, la CAF a invité les sociétés de gestion à déposer un tarif totalement nouveau, qu’elle a approuvé sans en informer les parties adverses et le Préposé à la surveillance des prix, et sans requérir leur détermination. De plus, le tarif aurait dû entrer en vigueur dès avant la motivation écrite de la décision d’approbation (c. 5.1). Ces violations du droit d’être entendu sont graves, elles n’étaient pas justifiées par des impératifs de rapidité ou par des droits de tiers et n’étaient pas proportionnées. Elles ne peuvent être réparées en procédure de recours, car les parties lésées seraient privées d’une instance judiciaire. La décision doit donc être annulée (c. 5.4). En l’espèce, on peut se demander si le devoir de négocier au sens de l’art. 46 al. 2 LDA a été respecté, car les mêmes positions ont été répétées de fois en fois, sans entrer en matière sur les arguments des parties adverses. Mais la question peut rester ouverte, car le devoir de négocier a de toute manière été violé s’agissant du nouveau projet tarifaire déposé directement devant la CAF, ce qui était une raison supplémentaire pour que celle-ci requière la détermination des parties adverses (c. 6.2). Enfin, la CAF a négligé de demander l’avis du Préposé à la surveillance des prix sur ce nouveau projet (c. 6.3). Nonobstant le renvoi, pour des questions d’économie de procédure, il convient de trancher déjà les questions préalables de droit matériel et celle de savoir si des tarifs séparés sont possibles (c. 7.2 et 7.3). Le droit de retransmission de l’art. 10 al. 2 lit. e LDA n’est pas identique à celui que consacrait l’aLDA, dans la mesure il n’exige pas une communication publique. On ne peut donc pas déduire de l’ATF 119 II 62 (c. 3b) que la distribution d’un signal dans des chambres d’hôtes représenterait une retransmission (c. 8.5). Le droit de faire voir ou entendre une émission au sens de l’art. 10 al. 2 lit. f LDA implique qu’il n’y ait pas d’autres installations entre l’appareil de réception et le public, mis à part les amplificateurs et les haut-parleurs. Ce droit englobe tout ce qui ne représente pas un usage privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit a et b LDA. En d’autres termes, il concerne la réception publique (c. 8.6). Ce qui est public en droit d’auteur n’est défini que pour le droit de divulgation (art. 9 al. 3 LDA) et qualifie un grand nombre de personnes ne constituant pas un cercle privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA. Cette notion est vague et doit être interprétée (c. 8.7). Pour déterminer ce qui était une communication publique dans le cadre du droit de retransmission de l’aLDA, le TF ne se basait pas sur le nombre d’abonnements, mais sur l’étendue territoriale du réseau. Aujourd’hui, le nombre d’abonnés est déterminant d’après l’art. 22 al. 2 LDA. (c. 8.7.2). Ce nombre, d’emblée, doit être restreint (c. 8.7.3). Quant à elle, la CJUE admet le caractère public d’une diffusion dans des chambres d’hôtel, parce qu’elle prend en compte aussi les personnes se trouvant dans d’autres endroits de l’hôtel et parce que les personnes qui occupent les chambres se succèdent rapidement. Contrairement à ce qui vaut en droit allemand, ce critère n’implique pas que les personnes qui se succèdent consultent la même œuvre (c. 8.7.4). Le droit de communiquer publiquement des émissions de l’art. 11bis al. 1 ch. 2 CB implique l’existence d’un nouveau public. Tel est le cas lorsque la communication intervient dans un but lucratif ou devant un cercle de personnes plus large que celui visé par l’auteur lorsqu’il a accordé son autorisation de diffusion (à l’organisme de radio ou de télévision) (c. 8.7.5). D’après l’art. 8 WCT, la communication est publique si le contenu est disponible pour chacun, de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement. Ce ne sont pas les différents accès qui sont déterminants, mais la mise à disposition effectuée au même moment pour tous. L’art. 8 WCT n’est toutefois pas applicable à la réception d’émissions (c. 8.7.6). Ce qui est public n’est donc pas défini uniformément en droit d’auteur et n’est pas apte à distinguer les utilisations libres et celles qui sont soumises à redevance (c. 8.7.6). L’opposé de l’usage public est l’usage privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA. Les personnes étroitement liées au sens de cette disposition ne doivent pas être réunies par hasard, leur nombre doit être restreint et il doit exister entre elles une communauté de destin. Tel est le cas entre les élèves d’un internat, entre les habitants d’un même logement ou d’une pension familiale, mais pas entre les clients d’un hôtel qui ne se connaissent que superficiellement et qui changent rapidement (c. 8.8.1). Les chambres d’un hôtel sont toutefois des lieux privés, sous réserve d’une appréciation économique ou de la reconnaissance d’un caractère public parce que les divers occupants se succèdent rapidement (c. 8.8.2). D’un point de vue économique, l’application de l’exception d’usage privé à des actes de nature commerciale peut sembler inadmissible. Cette argumentation est essentiellement fondée sur le texte de l’art. 22 aLDA. Mais même sous l’empire du nouveau droit, l’exception d’usage privé implique que l’utilisation ne procure aucune recette et ne porte pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre (c. 8.8.3). La jurisprudence du TF rendue en application de l’art. 22 aLDA a d’ailleurs été reprise pour interpréter la loi actuelle (c. 8.8.4). Un but lucratif de l’utilisateur d’œuvre est donc incompatible avec l’exception de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA (c. 8.9.2). En l’espèce, il faut se demander qui est l’utilisateur d’œuvres (c. 8.9.3). Les actes visés par l’art. 10 al. 2 lit. a-f LDA sont accomplis par des intermédiaires, et non par la personne qui bénéficie de l’œuvre. Ils se produisent avant la consommation de l’œuvre (c. 8.9.4). L’utilisateur d’œuvres dans des chambres d’hôtes n’est donc pas l’occupant de la chambre, mais l’intermédiaire, par exemple l’hôtelier (c. 8.9.6). Cette approche pourrait certes être remise en cause par la convergence des technologies, à savoir le fait que des émissions peuvent être reçues sur les propres appareils du client (tablettes, ordinateurs portables ou smartphones). On peut en effet se demander quel degré d’infrastructure l’hôtelier doit mettre à disposition pour être débiteur de redevances. La fourniture d’un réseau WLAN ne suffit pas. De plus, la perception d’une rémunération lorsqu’il n’y a pas de nouveau public peut paraît inopportune. Il appartient cependant au pouvoir politique d’adapter le droit au progrès technique (c. 8.10). La réception d’émissions dans des chambres d’hôtes est donc soumise à redevance (c. 8.11). Un tarif complémentaire est admissible lorsqu’il s’agit de compléter un tarif existant jusqu’à la fin de sa période de validité, que la situation juridique est incertaine et qu’un vide tarifaire menace. Le tarif complémentaire doit cependant être intégré dans le tarif principal à son échéance, afin que l’art. 47 LDA soit respecté (c. 9.2). [VS]

« Tarif commun 4i » ; tarif des sociétés de gestion, équité du tarif, durée de validité du tarif, prolongation automatique, devoir de négocier, pouvoir de cognition de la CAF ; art. 19 LDA, art. 20 LDA, art. 40 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA.

Tandis que l’équité de la redevance se détermine d’après l’art. 60 LDA, les autres dispositions du tarif relèvent d’une libre appréciation de la CAF d’après l’art. 59 al. 1 LDA (c. 3). Sous l’angle du contrôle de l’équité, la CAF doit aussi examiner la charge diachronique du tarif pour les utilisateurs (c. 4). La CAF n’a pas de jurisprudence bien établie en ce qui concerne les clauses tarifaires prévoyant une prolongation automatique du tarif pour une durée illimitée. L’équité de la durée de validité du tarif doit être examinée de cas en cas, en fonction du système tarifaire, des faits qui l’ont déterminé et de leur caractère durable ou au contraire changeant (c. 4.2). En l’espèce, le tarif contient une clause selon laquelle il se prolonge automatiquement d’année en année, sauf résiliation donnée par une partie au moins une année à l’avance. La durée de validité initiale de deux ans pourrait donc rester lettre morte et le tarif pourrait se prolonger à l’infini, sans que la CAF puisse à nouveau vérifier son équité. Cela paraît problématique, d’autant que les parties au tarif se sont réservées d’étendre ce dernier à d’autres appareils permettant la copie privée (c. 4.3). Les tendances en matière de copie privée sont en constante évolution. En particulier, les appareils ont des capacités de stockage de plus en plus grandes, et les prix sont en baisse. Il n’est donc pas garanti que le tarif soit toujours équitable dans cinq ou dix ans. Le besoin de flexibilité et de prévisibilité à long terme des parties est certes légitime. Mais, dans un environnement en mutation, il est difficilement compatible avec le devoir de négocier des sociétés de gestion, prévu par l’art. 46 al. 2 LDA, et de faire approuver le tarif par la CAF comme exigé par les art. 40 et 46 al. 2 LDA. L’admissibilité d’une clause de prolongation automatique dépend des circonstances et il s’impose en l’espèce de limiter son effet dans le temps, afin que les sociétés de gestion et les associations d’utilisateurs examinent à l’échéance si le tarif correspond toujours aux circonstances (c. 4.4). Il y a un certain déséquilibre entre les parties, s’agissant de la possibilité de résiliation. Les sociétés de gestion sont spécialisées dans les questions de gestion collective, ce qui n’est pas le cas des utilisateurs. Tendanciellement, il n’est pas à exclure que les sociétés de gestion n’aient aucun intérêt à résilier le tarif. De leur côté, les utilisateurs, moins organisés, pourraient oublier de procéder à une telle résiliation dans les délais. Et, s’ils le font, ce sera à eux de démontrer que le tarif est devenu inéquitable si les sociétés de gestion veulent le prolonger (c. 4.5). La limitation dans le temps de la prolongation automatique obligera les parties, à l’échéance, à examiner si le tarif est encore actuel. En cas de réponse affirmative, une requête de prolongation pourra être adressée à la CAF selon une procédure relativement simple et peu coûteuse (c. 4.6). Cette démarche peut être exigée pour éviter le risque d’un tarif inéquitable. Le mécontentement des parties concernant l’actuelle procédure d’approbation tarifaire, soumise à un système de triple instance et impliquant des décisions de renvoi aux autorités inférieures, n’est pas une raison d’instaurer une clause de prolongation automatique illimitée contournant le devoir de négocier et de soumettre les tarifs à la CAF. Une telle clause n’est pas équitable au sens de l’art. 59 al. 1 LDA (c. 4.7). L’accord des parties ne restreint pas la cognition de la CAF. Toutefois, cette dernière ne modifie qu’avec retenue un tarif sur lequel les parties sont d’accord. Sinon personne n’aurait de raisons de faire des concessions dans les négociations tarifaires et de rechercher une solution de compromis. Cependant, en l’espèce, il ne s’agit pas de modifier une disposition matérielle du tarif, mais uniquement sa durée de validité. Le droit d’être entendu au sens de l’art. 59 al. 2 LDA a été respecté et les sociétés de gestion ont accepté que la CAF modifie elle-même le tarif si elle devait l’estimer inéquitable. La CAF décide donc de limiter la prolongation automatique d’année en année, au plus tard jusqu’à fin 2020. Ainsi, le tarif aura une durée maximale de quatre ans (c. 4.8). [VS]

« Tarif commun K » ; tarif des sociétés de gestion, équité du tarif, durée de validité du tarif, prolongation automatique, devoir de négocier, pouvoir de cognition de la CAF ; art. 40 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA ; cf. N 1067 (CAF, 8 décembre 2016)

Même motivation que CAF, 8 décembre 2016, « Tarif commun 4i » (N 1067). En l’espèce, le marché des concerts et des spectacles serait en évolution parce que les recettes des sociétés de gestion ont continuellement augmenté ces dernières années, comme les coûts des organisateurs. De plus, ces derniers ont émis des doutes sur le tarif. Ces facteurs justifieraient une limitation dans le temps de la prolongation automatique, pour que les parties examinent à l’échéance si le tarif correspond toujours aux circonstances (c. 4.4). [VS]

« Tarif commun 1 » ; tarif des sociétés de gestion, équité du tarif, durée de validité du tarif, prolongation automatique, devoir de négocier, pouvoir de cognition de la CAF ; art. 40 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA ; cf. N 1067 (CAF, 8 décembre 2016)

Même motivation que CAF, 8 décembre 2016, « Tarif commun 4i » (N 1067). En l’espèce, le marché de la retransmission serait en évolution parce que la part de la télévision dans les offres groupées est de moins en moins importante selon les utilisateurs. De plus, les réseaux doivent constamment être améliorés en raison des besoins accrus en bande passante dus à Internet et à la haute définition, ce qui a une incidence sur les prix des abonnements. Dans un environnement en mutation, il n’est pas exclu que les études sur lesquelles repose le tarif soient vite dépassées (c. 4.4). La doctrine s’est prononcée en faveur de tarifs avec une durée de validité ouverte surtout en raison de la problématique de l’entrée en vigueur rétroactive des nouveaux tarifs et pour éviter des périodes de vide tarifaire. Mais les tarifs de sociétés de gestion contiennent désormais des clauses empêchant un vide tarifaire tant qu’un nouveau tarif n’est pas encore entrée en vigueur. De plus, une prolongation automatique des tarifs n’occasionne pas forcément une économie de la procédure (c. 4.5). [VS]