« Tarif commun 12 » ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarif commun 12, recours obligatoire aux
sociétés de gestion, pouvoir de cognition, participation de tiers à la procédure
tarifaire, qualification juridique, question préalable, tarif contraignant pour les
tribunaux, Commission arbitrale fédérale, moyens de preuve nouveaux, allégué
tardif, grief irrecevable, télévision de rattrapage, usage privé, copie privée, triple
test, obligation de gérer, vide tarifaire, tarifs complémentaires, droits à rémunération
; art. 32 al. 2 PA, art. 19 al. 1 lit. a LDA, art. 19 al. 2 LDA, art. 19 al. 3 lit. a
LDA, art. 20 al. 2 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 al. 2 LDA.
La procédure d'élaboration des tarifs se déroule entre les sociétés de gestion et les associations représentatives des utilisateurs. Dans l'ATF 135 II 172, (c. 2.3.1 ; cf. N 42, vol. 2007-2011), la qualité de partie a été reconnue à des ayants droit parce que les sociétés de gestion voulaient exercer des droits dans des domaines où ces ayants droit étaient actifs jusque-là. En l'espèce, on ne se trouve pas dans la même situation: il s'agit de savoir si une nouvelle utilisation (la télévision de rattrapage), pour laquelle ni les ayants droit ni les sociétés de gestion ne sont encore intervenus, est soumise obligatoirement à la gestion collective (c. 2.2). Les sociétés de gestion ont tenu compte de la volonté de certains ayants droit en excluant la télévision de rattrapage du tarif commun 12. Ces ayants droit ne se trouvent donc pas dans une situation particulière par rapport aux autres ayants droit, si bien que leur participation à la procédure n'apparaît pas comme nécessaire (c. 2.3). Au surplus, la qualification juridique de la télévision de rattrapage est effectuée par la CAF à titre préjudiciel, uniquement pour déterminer sa compétence par rapport au tarif ; cette qualification ne lie pas les tribunaux ordinaires (c. 2.4). D'après l'art. 32 al. 2 LDA des allégués tardifs des parties sont admissibles s'ils paraissent décisifs. En l'espèce, les pièces complémentaires ont été produites avant l'audience, conformément à ce que la CAF a exigé dans des décisions antérieures. Elles sont donc admissibles. Il est toutefois surprenant que le montant des redevances soit critiqué seulement quelques jours avant l'audience, alors qu'il ne l'a pas été durant les négociations ou dans la réponse à la requête des sociétés de gestion. Cela pourrait avoir des conséquences lors de la répartition des frais de la procédure (c. 2.6). La télévision de rattrapage qualifie un service par lequel l'utilisateur donne l'ordre d'enregistrer non pas une œuvre, mais un ou plusieurs programmes de télévision. Les émissions sont ensuite enregistrées dans une mémoire centrale appartenant au prestataire de service. Selon les cas, le consommateur déclenche lui-même le processus de copie ou, pour des raisons techniques, il bénéficie d'un enregistrement réalisé suite à un ordre précédent d'un autre consommateur. Pendant une durée déterminée, le consommateur peut appeler et visionner les émissions figurant dans les programmes enregistrés (c. 4). La télévision de rattrapage relève de la copie privée au sens de l'art. 19 al. 1 lit. a LDA, réalisée grâce à un tiers au sens de l'art. 19 al. 2 LDA. Ce dernier doit payer une redevance d'après l'art. 20 al. 2 LDA. Il importe peu que le consommateur soit lui-même à l'origine du processus de copie ou qu'il bénéficie d'un enregistrement réalisé suite à l'ordre d'un autre consommateur. En revanche, le prestataire de service ne peut pas réaliser les copies à l'avance, sans qu'un consommateur les ait demandées (c. 8). La limite de l'art. 19 al. 3 lit. a LDA n'est pas applicable, car le programme ou l'émission enregistré est une suite d'œuvres ou d'autres éléments de programmes, et pas un exemplaire d'œuvre disponible sur le marché (c. 9). La qualification de copie privée est conforme au triple test prévu par les traités internationaux. En effet, comme la possibilité d'accéder aux émissions est limitée dans le temps, la dérogation au droit exclusif concerne certains cas spéciaux. De plus, la télévision de rattrapage ne porte pas atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre, vu que la vidéo à la demande (VoD), conformément au système des fenêtres d'exploitation, intervient après la période réservée aux cinémas, mais avant que l'œuvre soit diffusée en télévision. En outre, avec la télévision de rattrapage, l'accès à l'œuvre n'est possible que pendant une durée relativement courte. Enfin, les intérêts légitimes des ayants droit sont sauvegardés puisqu'ils bénéficient d'un droit à rémunération. Dans la pesée des intérêts, l'intérêt du public à bénéficier des émissions avec une certaine flexibilité temporelle l'emporte sur celui des ayants droit à la gestion individuelle (c. 11). [VS]