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« Tarif commun 4e 2010-2011 » ; gestion collective, copie privée, usage privé, comparaison avec l'étranger, support propre à l'enregistrement d'œuvres, appareils multifonctionnels, support utilisé à des fins professionnelles, exonération pour les copies réalisées à partir de sources légales en ligne, tarifs des sociétés de gestion, tarif commun 4e, supplément sur la redevance, effet rétroactif, équité du tarif, calcul de la redevance, rabais tarifaire, négociation des tarifs, moyens de preuve nouveaux, témoin, traités internationaux, triple test, smartphone ; art. 14 PA, art. 19 LDA, art. 19 al. 3bis LDA, art. 20 al. 3 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA, art. 83 al. 2 LDA, art. 9 ODau.

La situation juridique en Suisse concernant une redevance sur les smartphones est difficilement comparable aux différentes réglementations dans les pays d'Europe. Pour cette raison, la CAF renonce à entreprendre en l'espèce une comparaison avec l'étranger, comme elle l'avait fait de manière exceptionnelle dans la procédure concernant le tarif commun 4 (décision de la CAF du 21.12.1993, ch. II/d) (c. 19). En raison du texte de l'art. 20 al. 3 LDA, la CAF considère que la redevance sur les supports vierges s'appliquent aux supports propres à l'enregistrement d'œuvres, indépendamment de tout aspect quantitatif. Selon la jurisprudence du TF, sont assujettis à la redevance les supports qui, d'après leur destination et leurs propriétés d'enregistrement et de lecture, se prêtent à l'enregistrement d'œuvres protégées et sont vraisemblablement utilisés à cette fin (cf. ATF 133 II 263 [N 27, vol. 2007-2011], c. 7.2.2). Les smartphones sont utilisés principalement pour téléphoner et envoyer des SMS et ils permettent aussi de photographier, filmer, accéder à Internet, etc. Néanmoins, même si les supports ne servent pas principalement à reproduire des œuvres protégées, ils peuvent aussi être assujettis à la redevance, puisqu'il est démontré que les smartphones sont non seulement appropriés pour la copie des œuvres, mais également utilisés à cette fin avec une grande vraisemblance et dans une mesure importante (c. 6). La multifonctionnalité des smartphones est toutefois à prendre en considération dans le cadre du calcul de la redevance (contrôle de l'équité du tarif). Selon le TF, le fait que le droit suisse ne connaisse pas la redevance sur les appareils n'est pas un obstacle à l'introduction d'une redevance sur les supports intégrés dans des appareils principalement destinés à la reproduction d'œuvres sonores et audiovisuels (cf. ATF 133 II 275, c. 7.3.1). Mais on ne peut pas en tirer la conclusion inverse qu'une telle redevance serait exclue si le support est intégré dans un appareil qui n'a pas pour fonction principale la reproduction de musique (c. 6). Il n'y a pas de smartphones utilisés exclusivement à des fins privées ou, au contraire, exclusivement à des fins professionnelles. En tout cas, un tarif forfaitaire ne permet pas de distinguer selon que l'acheteur entend ou non utiliser l'appareil comme téléphone musical (c. 9). D'après l'arrêt Padawan de la Cour de justice de l'Union européenne (C-467/08), la simple capacité des appareils à réaliser des copies suffit à justifier l'application de la redevance pour la copie privée, à la condition que lesdits appareils aient été mis à la disposition des personnes physiques en tant qu'utilisateurs privés (c. 56). Il n'est cependant pas exclu de réduire la redevance pour tenir des utilisations de l'appareil effectuées à des fins professionnelles (c. 9). Pour interpréter l'art. 19 al. 3bis LDA, la jurisprudence du TF rendue en 2007 (cf. ATF 133 II 263 [N 27, vol. 2007-2011], c. 10.2) n'est pas forcément pertinente, puisque cette disposition est entrée en vigueur postérieurement (c. 15); de plus, le cas des smartphones diffère de celui des lecteurs MP3, en ce sens que les œuvres peuvent être téléchargées directement à partir d'Internet dans le premier cas, ce qui est rare dans le second. Sur la base d'une interprétation littérale de la norme, dont les résultats ne sont démentis ni par l'interprétation historique ni par l'interprétation téléologique, il faut admettre que l'art. 19 al. 3bis LDA n'exonère de redevance que les premières copies, c'est-à-dire celles réalisées au moment des téléchargements (c. 15). Ces dernières sont autorisées gratuitement par la loi et les fournisseurs en ligne ne peuvent pas les licencier, car ils ne détiennent pas les droits nécessaires (ni en vertu de la loi, ni en vertu de contrats). L'art. 19 al. 3bis LDA a pour fonction de rétablir l'équilibre entre le commerce en ligne et le commerce de supports physiques : celui qui achète un disque dans un magasin peut l'écouter sans devoir confectionner une copie supplémentaire; l'art. 19 al. 3bis LDA fait donc en sorte que l'utilisateur d'un magasin en ligne n'ait pas d'obligation du seul fait qu'il doit obligatoirement confectionner une copie pour bénéficier de l'œuvre (c. 15). Mais si le CD acheté en magasin est ensuite reproduit sur un support vierge, la redevance pour la copie privée est due. Il doit donc en aller de même en cas d'acquisition d'un exemplaire électronique. Par conséquent, l'art. 19 al. 3bis LDA ne peut pas exonérer d'autres copies que celles réalisées au moment du téléchargement (c. 15). Enfin, cette disposition n'impose qu'une déduction forfaitaire sur la redevance et ne donne aucun droit à un utilisateur individuel d'être libéré de celle-ci dans le cas où il reproduirait exclusivement des œuvres provenant de magasins en ligne légaux (c. 15). La pratique de remplacer l'entrée en vigueur rétroactive d'un tarif par un supplément sur les taux est due au fait que la redevance sur les supports vierges, en cas d'effet rétroactif, ne peut plus être répercutée dans le prix de vente des supports (c. 22). Toutefois, en l'espèce, un supplément conduirait à un doublement de la redevance, vu la longue durée de la procédure. D'après la jurisprudence du TF, l'effet rétroactif d'une réglementation n'est admissible que s'il est expressément ordonné ou s'il découle du sens de cette réglementation, s'il est limité dans le temps et justifié par des raisons pertinentes, s'il ne conduit pas à des inégalités de traitement choquantes et s'il ne porte pas atteinte à des droits acquis (cf. ATF 125 I 182 [N 27, vol. 2007-2011], c. 2.b.cc). L'art. 83 al. 2 LDA n'est applicable qu'aux rémunérations dues dès l'entrée en vigueur de la loi, pas à celles qui naissent ultérieurement (c. 22). Mais cette disposition n'exclut pas non plus un effet rétroactif en l'espèce. Son but est en effet d'éviter qu'il y ait une lacune entre l'entrée en vigueur de la loi et l'adoption du tarif, impliquant que les ayants droit ne soient pas rémunérés. Ce problème existe aussi en cas d'apparition d'une nouvelle utilisation d'œuvres et de prestations protégées (c. 22). La limitation dans le temps de l'effet rétroactif est liée à des impératifs de prévisibilité pour les personnes concernées. Comme la CAF avait approuvé une première fois le tarif litigieux le 18 mars 2010 et que le TAF, avant d'annuler cette décision, avait expressément signalé que les décomptes pourraient être dus après coup (mais dès l'entrée en vigueur prévue par la décision attaquée), les utilisateurs devaient compter avec un effet rétroactif d'au moins 18 mois (c. 22). Il y a en l'espèce des raisons pertinentes à cet effet rétroactif, car les ayants droit peuvent prétendre à être rémunérés pendant la durée de la procédure et parce que la méthode du supplément conduirait à un doublement de la redevance, laquelle serait supportée uniquement par d'autres consommateurs que ceux ayant copié des biens protégés avant l'adoption du tarif (c. 22). Compte tenu des circonstances, on pouvait exiger des producteurs et importateurs qu'ils constituent des provisions en vue d'un éventuel paiement ultérieur de la redevance et qu'ils augmentent préventivement leur prix. Ils auraient certes dû rembourser les consommateurs si le tarif n'avait finalement pas été adopté, mais cela n'aurait pas été impossible bien que lié à certaines difficultés (c. 22). L'importance de ces dernières est moindre par rapport à l'importance de constituer des réserves pour assurer le paiement de la redevance. Enfin, un effet rétroactif ne conduirait à aucune inégalité choquante, ni à des distorsions de concurrence, si bien que cet effet rétroactif peut être prononcé (c. 22). La redevance pour la copie est calculée sur la base des coûts investis par le consommateur, donc du prix de vente du matériel de reproduction. À défaut d'autres indications, c'est le prix de vente des smartphones sans abonnement qui fait foi, et non le prix plus bas annoncé au consommateur lorsque ce dernier accompagne son achat de la conclusion d'un abonnement auprès d'un opérateur de téléphonie mobile (c. 12). Un calcul de la redevance basé sur les économies réalisées par les consommateurs grâce à la copie privée gratuite ne peut avoir qu'une fonction de contrôle du caractère équitable de la redevance basée sur les coûts (c. 18). En cas de nouveau tarif, un rabais d'introduction est admissible pour la première période de validité du tarif. Cependant, si le tarif entre en vigueur tardivement par rapport aux conclusions de sociétés de gestion, un supplément sur la redevance, compensant la période de non-encaissement, est possible également (c. 17 et 23). Lorsqu'une association d'utilisateurs ne veut plus participer aux négociations, les sociétés de gestion ne sont pas tenues de poursuivre ces négociations avec les autres associations (c. 3). Les parties doivent alléguer les faits et produire leurs preuves le plus tôt possible dans le cadre de la procédure. Exceptionnellement, elles peuvent encore actualiser leur dossier ultérieurement en cas de procédure de longue durée (c. 2). L'art. 14 PA ne permet l'audition de témoins que si l'état de fait ne peut pas être établi d'une autre manière. Depuis la création du TAF, cette disposition ne mentionne plus la CAF parmi les autorités qui peuvent ordonner une audition de témoins. Cette possibilité n'est pas non plus prévue par l'ODAu (c. 2). Lorsqu'une décision de la CAF est annulée par le TAF, la procédure est replacée dans l'état où elle se trouvait avant la décision. Les parties peuvent donc reprendre les conclusions que la CAF avaient rejetées et, cas échéant, les diminuer (c. 2). Les restrictions au droit de reproduction ne sont tolérées par le droit conventionnel international que si elles ne portent pas atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du détenteur du droit (art. 9 al. 2 CB, art. 13 ADPIC). Ce test dit des trois étapes doit être pris en compte en matière d'exceptions au droit de reproduction pour l'usage privé (c. 7). Le droit à rémunération de l'art. 20 al. 3 LDA assure la compatibilité du droit suisse avec le droit international. Il instaure en effet une compensation financière pour l'exception prévue par l'art. 19 al. 1 lit. a LDA. Restreindre la portée de cette compensation, seulement en raison de la multifonctionnalité des smartphones, serait contraire au droit international (c. 7). Le droit suisse n'interdit pas le téléchargement à partir de sources illégales. Les ayants droit n'ont aucun moyen de droit civil ou de droit pénal à son encontre. Mais en contrepartie, ils bénéficient d'une compensation par le biais de la redevance sur les supports vierges. On ne voit pas en quoi ce système serait contraire aux traités internationaux (c. 15). [VS]

03 janvier 2012

TAF, 3 janvier 2012, B-1769/2010 (d)

medialex 2/2012, p. 107-109 (rés.) « Tarif A télévision (Swissperform) » ; gestion collective, décision, approbation des tarifs, tarifs des sociétés de gestion, tarif A télévision, qualité pour recourir, effet rétroactif, pouvoir de cognition, autonomie des sociétés de gestion, tarifs séparés, obligation de collaborer, traités internationaux, applicabilité directe, droits voisins, support disponible sur le marché, intégration d'un enregistrement sonore dans un vidéogramme ; art. 19 CR, art. 2 lit. b WPPT, art. 5 Cst., art. 5 PA, art. 48 PA, art. 49 PA, art. 1 LDA, art. 33 LDA, art. 35 LDA, art. 46 LDA, art. 47 LDA, art. 74 al. 1 LDA, art. 9 al. 1 ODAu.

Les décisions de la CAF sont des décisions au sens de l'art. 5 al. 1 PA, qui peuvent faire l'objet d'un recours au TAF (c. 1.1). La SRG SSR, unique partenaire de négociation et unique personne obligée par le tarif, est destinataire de la décision d'approbation de ce tarif et est donc spécialement atteinte par celle-ci (c. 1.1). Elle a un intérêt digne de protection à sa modification, même si elle n'est pas une association d'utilisateurs au sens de l'art. 46 al. 2 LDA (c. 1.1). Lorsqu'un recours est déposé au TAF contre la décision d'approbation d'un tarif et qu'un effet suspensif est décrété, le tarif peut entrer en vigueur avec effet rétroactif s'il est approuvé par le TAF (c. 1.2). La CAF examine un tarif avec pleine cognition en veillant à sa conformité aux exigences légales, mais en respectant une certaine liberté de disposition et l'autonomie tarifaire des sociétés de gestion. Elle veille à trouver un équilibre des intérêts entre titulaires de droits et utilisateurs, qui serve la sécurité juridique. En cas de dispositions tarifaires approximatives ou d'inégalité de traitement, elle examine s'il faut empiéter sur l'autonomie tarifaire des sociétés de gestion. Des utilisations semblables d'un même cercle d'utilisateurs, ressortissant à la même société de gestion, doivent être réglées au sein d'un même tarif sauf s'il existe des raisons objectives pour créer plusieurs tarifs. Des utilisations non soumises à redevance d'après la loi doivent être exclues du tarif (c. 2.1). En matière tarifaire, la cognition du TAF n'est pas limitée. Il fait toutefois preuve d'une certaine retenue lorsque la CAF, en tant qu'autorité spécialisée, a examiné des questions complexes de droit de la gestion collective, lorsqu'elle a pesé les intérêts en présence ou lorsqu'elle a sauvegardé l'autonomie tarifaire des sociétés de gestion. Pour cette raison, le TAF n'examine en principe des formulations tarifaires qu'avec un effet cassatoire. Il ne peut les modifier lui-même qu'exceptionnellement (c. 2.2). En procédure tarifaire, les parties ont un devoir de collaboration. En cas de recours, elles doivent expliquer en détail pourquoi elles ne sont pas d'accord avec la décision de la CAF et prouver leurs allégations. La CAF ne doit s'écarter de l'état de fait allégué par les parties que si elle a des indices qu'il n'est pas correct. Si une partie manque à son devoir de collaboration, la CAF peut se baser uniquement sur les faits allégués par l'autre partie (c. 2.3). Les traités internationaux et le droit suisse forment un système unitaire, si bien que les premiers n'ont pas besoin d'être transposés en droit interne (c. 3.2). Un traité est directement applicable s'il contient des règles claires et suffisamment déterminées qui permettent une décision dans un cas concret, pas s'il s'adresse uniquement au législateur. Les WCT et WPPT ne sont que partiellement directement applicables, mais l'art. 15 WPPT dispose de cette qualité (c. 3.2). La notion de fixation, utilisée à l'art. 33 LDA, n'est pas liée à un support de données physique déterminé. Elle est un synonyme d'enregistrement, terme que l'on trouve aussi à l'art. 33 al. 2 lit. c LDA. En revanche, les mots phonogramme et vidéogramme employés par l'art. 35 LDA sont encore compris en relation avec des supports de données physiques. Mais ils n'impliquent pas une forme de publication particulière. La notion « disponible sur le marché » de l'art. 35 LDA doit être rapportée à la fixation plutôt qu'au support de données physique utilisé concrètement. Peu importe par conséquent que le support utilisé pour la diffusion ne soit pas disponible sur le marché si la fixation qu'il contient l'est quant à elle. L'interprétation de la loi doit tenir compte de l'évolution technique, si bien qu'il serait faux de réserver la notion « disponible sur le marché » aux seuls produits physiques. La fixation peut aussi être mise à disposition sur Internet à des fins de téléchargement gratuit ou payant (c. 5 et 6). L'intégration d'un enregistrement sonore dans un vidéogramme nécessite l'accord des titulaires de droits voisins sur cet enregistrement. Le droit voisin sur le vidéogramme s'étend ensuite aussi à la bande son (c. 7). [VS]

29 janvier 2013

TAF, 29 janvier 2013, B-3920/2011 (d)

sic! 6/2013, p. 352 (rés.), « Glass Fiber Net » ; liste des produits et des services, motifs absolus d’exclusion, motifs formels d’exclusion, classification de Nice, classe de produits ou services, effet rétroactif, égalité de traitement, bonne foi, protection de la confiance, signe descriptif, force distinctive faible, cercle des destinataires pertinent, vocabulaire de base anglais, besoin de libre disposition absolu ; AN, AN 1967, AN 1977, art. 6quinquies lit. B ch. 2 CUP, Notes explicatives de classes de la 8e et de la 9e édition de la classification de Nice, art. 8 al. 1 Cst., art. 9 Cst., art. 2 lit. a LPM, art. 11 OPM.

L’IPI souhaitait appliquer avec effet rétroactif la dixième édition de la classification de Nice à toutes les demandes d’enregistrement pendantes au moment de l’entrée en vigueur de cette nouvelle édition. Cette mesure ne répond ni à une nécessité d’ordre public ni à un intérêt public prépondérant et ne constitue pas un droit plus favorable pour les déposants. Par conséquent, il convient de rejeter l’effet rétroactif et d’appliquer la neuvième édition de la classification de Nice en vigueur au moment du dépôt de la demande d’enregistrement (c. 3.2). Le libellé de services informatiques « kostenloses Zurverfügungstellen und Vermieten von Zugriffsmöglichkeiten und Zugriffszeiten auf Computerdatenbanken mit Informationen (Informatikenstleistungen) » présenté à l’enregistrement en classe 42, ne fait pas partie, en tant que tel, de la liste alphabétique des entrées de la neuvième édition de la classification de Nice. Il peut cependant être rapproché d’un libellé de services informatiques en classe 38 (c. 3.3.1). L’étude des « Notes explicatives des listes de classes de la huitième et de la neuvième édition de la classification de Nice » démontre par ailleurs que les services informatiques appartiennent à la classe 38 (c. 3.3.2-3.4). Étant donné ce qui précède, c’est à juste titre que l’autorité inférieure a rejeté l’enregistrement sur la base de motifs de refus formels (c. 3.4). La recourante ne peut pas se plaindre d’une violation du principe de l’égalité de traitement sur la base de ses propres enregistrements de marques antérieurs (c. 4.3). Dans le cadre de l’échange d’écritures qui précède la décision de l’IPI, le déposant ne peut pas se prévaloir de la protection de la confiance en relation avec un renseignement, une promesse ou une assurance donnée par l’autorité (c. 5.3 et 5.5). De même, la recourante ne peut pas invoquer la protection de sa bonne foi sur la base d’un enregistrement survenu un an auparavant, pour les mêmes services et sous l’empire de la même édition de la classification de Nice (c. 5.4- 5.5). L’expression en anglais « Glass Fiber Net » appartient au vocabulaire de base et le sens de cette expression peut être compris des spécialistes comme des consommateurs moyens (c. 9.1). Le signe « GLASS FIBER NET » est descriptif des produits et services en classes 9, 35, 36, 38, 41, 42 et donc privé de force distinctive (c. 10.1-10.5). De plus, le signe « GLASS FIBERNET » décrit une technologie omniprésente et doit, par conséquent, rester à la libre disposition de tous les acteurs du domaine (c. 11.1). [AC]

Tarifs commun 4e 2014 et 2015-2016 ; gestion collective, tarif des sociétés de gestion, tarif 4e, effet rétroactif, question préalable, équité du tarif, égalité de traitement, transaction ; art. 45 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA, art. 9 al. 2 ODAu, art. 11 ODAu, art. 12 ODAu ; cf. N 46 (vol. 2007-2011 ; TAF, 21 février 2011, B-2346/2009 ; ATAF 2011/2; sic! 7-8/2011, p. 430–436, Public-Viewing-Tarif III ; medialex 2/2011, p. 114-116 (rés.) (Brem Ernst, Anmerkungen) et N 614 (vol. 2012-2013 ; TAF, 24 janvier 2013, B-6540/2012).

La requête d’approbation des tarifs a été présentée à la CAF en respectant le délai de 7 mois prévu par l’art. 9 al. 2 ODAu. Toutefois, les sociétés de gestion ont ensuite modifié les projets tarifaires sur la base d’une transaction qu’elles avaient conclue avec les associations d’utilisateurs parties à la procédure. Cela est acceptable, étant donné que les sociétés de gestion ont encore la possibilité de changer un projet de tarif lors de la séance de la CAF (au sens des art. 12 ss ODAu). De plus, l’art. 9 al. 2 ODAu est une prescription d’ordre, à laquelle il peut être dérogé dans des cas fondés, notamment lorsque les sociétés de gestion et les associations d’utilisateurs ont pu se mettre d’accord sur un tarif. Vu cet accord, l’arrêt du TAF du 24 janvier 2013 (cf. N 614, vol. 2012-2013) ne s’oppose pas à une entrée en vigueur anticipée ou rétroactive du tarif (c. 1). La transaction prévoit le paiement de montants forfaitaires par les membres des associations pour la période 2010 à 2014. Vu les difficultés d’un encaissement rétroactif, cette solution est judicieuse, praticable et plus facile à mettre en œuvre. Elle devrait concerner la grande majorité des producteurs et importateurs. Dans des cas particuliers, il n’est certes pas exclu que des non-membres d’associations doivent payer des montants plus élevés. Mais les difficultés d’un encaissement rétroactif pourraient conduire à devoir forfaitiser la redevance dans ces cas également. Pour cette raison, la solution trouvée est acceptable du point de vue de l’égalité de traitement prévue par l’art. 45 al. 2 LDA (c. 2). Comme les parties ont pu se mettre d’accord sur les montants de redevance et qu’elles renoncent à débattre des questions juridiques, respectivement qu’elles ont demandé la suspension des procédures en cours devant le TAF et qu’elles retireront leurs recours, la CAF n’est pas tenue d’examiner ces questions juridiques à titre préalable (c. 3). D’après sa pratique constante, la CAF considère que l’accord des personnes intéressées est un indice du caractère équitable d’un tarif. Si les principales associations d’utilisateurs donnent un tel accord, la CAF renonce à un examen détaillé du tarif basé sur les art. 59 et 60 LDA. Cette pratique se fonde sur un arrêt du TF du 7 mars 1986, selon lequel un accord des utilisateurs sur un tarif correspond à un contrat passé dans une situation de concurrence. Toutefois, le TAF est d’avis que cet accord ne restreint pas la cognition de la CAF (cf. N 46, vol. 2007-2011). Il est seulement un indice qu’une entente entre parties intéressées aurait aussi pu intervenir dans des rapports de concurrence. De sérieux indices allant en sens contraire doivent toutefois aussi être pris en compte (c. 4). Même si une erreur rédactionnelle doit être corrigée dans la formule de calcul des redevances prévue par le TC 4e 2015-2016, de tels indices en sens contraire n’existent pas en l’espèce. La valeur élevée à donner à l’accord obtenu découle aussi de l’art. 11 ODAu, selon lequel la CAF peut prendre sa décision par voie de circulation, sans audience, lorsque le tarif a été accepté par les associations représentatives d’utilisateurs (c. 5). [VS]

« Tarif commun 3a complémentaire » ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarif 3a complémentaire, décision sur recours, instructions impératives à l’autorité précédente, divertissement de fond ou d’ambiance, divertissement ciblé, équité du tarif, forfait, redevance de réception radio, redevance de réception TV, effet rétroactif, entrée en vigueur rétroactive, approbation des tarifs rétroactive, introduction d’une redevance, édition du dossier, effets de la décision d’approbation, hôtellerie, logement de vacances ; art. 26 al. 1 Cst., art. 61 al. 1 PA, art. 46 LDA, art. 47 LDA, art. 60 LDA, art. 83 al. 2 LDA, art. 68 LRTV ; cf. N 27 (vol. 2007-2011 ; TF, 19 juin 2007, ATF 133 II 263 ; sic! 10/2007, p. 722-735, « MP3-Player II » ; JdT 2007 I 146) ; N 601 (vol. 2012- 2013 ; CAF, 17 novembre 2011) ; N 603 (vol. 2012-2013 ; TAF, 3 janvier 2012, B-1769/2010 ; medialex 2/2012, p. 107-109 (rés.), « Tarif A télévision (Swissperform) ») ; N 609 (vol. 2012-2013 ; TF, 13 novembre 2012, 2C_580/2012 ; sic! 3/2013, p. 154-157, « GT 3a » ; medialex 1/2013, p. 49-50 ; N 611 (vol. 2012-2013 ; CAF, 30 novembre 2012) ; N 790 (TAF, 14 mars 2014, B-6540/2012 ; sic! 10/2014, p. 618-623, « Zusatztarif zumGT 3a ») , N 802 (TAF, 8 juillet 2015, B-3865/2015, « Tarif commun 3a complémentaire ») et N 1040 (TF,13 décembre 2017, 2C_685/2016, 2C_806/2016).

En vertu de l’art. 61 al. 1 PA, une décision de renvoi du TAF est contraignante pour la CAF. Si le renvoi est effectué avec la formule « pour nouvelle décision dans le sens des considérants », le caractère impératif s’étend aux considérants. La CAF ne doit donc plus se prononcer sur la base légale du tarif et sur la possibilité d’établir un tarif séparé (c. 3). Dans le cadre de son arrêt du 14mars 2012 (recte : 2014) (cf. N 790), le TAF a estimé que l’utilisateur au sens du droit d’auteur, en cas de réception d’émissions dans des chambres d’hôtel, n’était pas le client,mais l’hôtelier. Il ne s’agit pas de simple divertissement de fond ou d’ambiance, mais de divertissement ciblé dûment choisi, ce qui pourrait plaider pour une utilisation plus intensive.Cependant, les émissions ne sont pas regardées longtemps et elles profitent à un plus petit nombre de personnes qu’en cas de diffusion dans un magasin, par exemple. Dans le cadre d’un tarif qui doit couvrir un grand nombre de situations, une réglementation forfaitaire est justifiée (c. 10). Une probable évolution technologique, qui rendrait désuète la réception d’émissions au moyen d’appareils radio / TV, n’a pas à être prise en compte pour juger de l’équité du tarif (c. 11). Ni la redevance selon l’art. 68 LRTV, ni les droits de retransmission payés par les câblodistributeurs n’empêchent un tarif de droits d’auteur et de droits voisins pour la réception d’émissions dans des chambres d’hôtel (c. 12). Dans le cadre d’un tarif forfaitaire, il n’est pas inéquitable que les exploitants de logements de vacances soient traités comme les hôteliers (c. 13). Un moyen de preuve concernant une question tranchée par le TAF (qui lie la CAF) n’est pas pertinent (c. 14). La question de l’entrée en vigueur du tarif, éventuellement rétroactive, relève du contrôle de l’équité (c. 16). Selon l’ATF 133 II 263 (cf. N 27, vol. 2007-2011, c. 11.2), l’entrée en vigueur rétroactive d’un tarif se décide au cas par cas, en fonction des circonstances de fait et de droit et des différents intérêts en présence. Il semble s’agir d’un examen sui generis, fondé sur d’autres critères que ceux concernant l’effet rétroactif dit « véritable » des actes administratifs, qui fait appel à deux éléments : d’une part la prévisibilité de l’obligation de payer, d’autre part le fait de pouvoir raisonnablement exiger des utilisateurs qu’ils provisionnent les montants litigieux. Les conditions de l’absence d’inégalités choquantes et de l’absence d’atteintes à des droits acquis sont également à observer, car elles valent dans tous les domaines du droit administratif. Le critère de la prévisibilité implique nécessairement une rétroactivité limitée dans le temps, à déterminer en fonction des circonstances du cas particulier. Enfin, le principe de la proportionnalité, fondamental en droit administratif, doit être respecté. Lorsque la CAF a approuvé un tarif, les utilisateurs doivent compter avec l’entrée en vigueur de ce tarif,même lorsque la décision d’approbation fait l’objet d’un recours avec effet suspensif. Sous l’empire de l’aLDA, l’entrée en vigueur et l’application rétroactives d’un tarif étaient exclues, car la loi ne consacrait que des droits exclusifs, si bien que les utilisations ne pouvaient pas être entreprises sans qu’un tarif soit applicable (c. 22). Aujourd’hui, l’art. 83 al. 2 LDA et la jurisprudence du TF dans l’affaire 2A. 142/173/174/1994 du 24 mars 1995 montrent que la procédure d’approbation tarifaire ne doit pas conduire à des périodes d’utilisations sans redevances, cela aussi bien dans le domaine des droits exclusifs que dans celui des droits à rémunération. Sinon le droit de la gestion collective interférerait sur le droit d’auteur matériel, qui est couvert par la garantie de la propriété au sens de l’art. 26 al. 1 Cst. (c. 23). La CAF a déjà accepté l’entrée en vigueur rétroactive d’un tarif, par sa décision du 17 novembre 2011 (cf. N 601, vol. 2012-2013) (c. 25). La doctrine va dans le même sens (c. 26). Il faut distinguer l’approbation avec effet rétroactif d’un tarif en première instance et l’entrée en vigueur rétroactive d’un tarif suite à une procédure de recours. En l’espèce, cette procédure de recours concerne un tarif complémentaire, ayant pour but de compléter un tarif commun dont la durée est limitée à quelques années. Si l’on excluait l’entrée en vigueur rétroactive d’un tarif complémentaire suite à une procédure de recours (qui peut durer deux à trois ans), l’institution même des tarifs complémentaires pourrait devenir obsolète. La procédure d’approbation tarifaire (y compris les éventuels recours) ne doit pas être un moyen d’obtenir des périodes d’utilisation gratuites, sinon les recours deviendront la règle (et la gestion collective ira à l’encontre de ce que permet la gestion individuelle). De plus, les autorités ne doivent pas être livrées aux circonstances de chaque cas particulier pour déterminer si d’autres moyens que l’effet rétroactif (comme un supplément sur la redevance courante) sont admissibles ou non (c. 27). Depuis la première décision de la CAF (cf. N 611, vol. 2012-2013) les utilisateurs devaient compter avec l’introduction d’une redevance. Admettre une réalisation de la condition de prévisibilité seulement si un tarif antérieur existait déjà ne découle ni de l’art. 83 al. 2 LDA, ni de la jurisprudence, en particulier de l’arrêt du TAF du 3 janvier 2012 (cf.N 603, vol. 2012- 2013) (c. 28). D’autre part, on pouvait raisonnablement exiger des utilisateurs qu’ils provisionnent les montants litigieux,même si leurs associations avaient fait recours en contestant la base légale du tarif (c. 29). La longueur de la procédure n’est pas seulement imputable aux sociétés de gestion. Par sa prise de position concernant l’effet suspensif dans la procédure de recours, Hotellerie-suisse a montré qu’elle était consciente du risque que le tarif entre en vigueur rétroactivement (c. 30). Enfin, l’effet rétroactif ne cause pas d’inégalités choquantes ou de distorsions dans les rapports de concurrence, et il ne porte pas atteinte à des droits acquis.Compte tenu des circonstances de fait et de droit et des différents intérêts en présence, il est admissible que le tarif entre en vigueur au 1er janvier 2013. Le TAF a d’ailleurs déjà admis un effet rétroactif d’environ deux ans (cf. N 603, vol. 2012-2013) (c. 31). L’édition du dossier de la procédure de recours devant la CAF n’est pas recevable, car la requérante n’indique pas pour quelles questions concrètes elle entend se prévaloir de ce dossier. De plus, le TAF a probablement déjà retourné les pièces aux parties et il n’est pas sûr que la CAF ait les moyens juridiques d’exiger une telle édition (c. 33). Le TC 3a complémentaire est donc approuvé.Mais, comme les associations d’utilisateurs peuvent difficilement recourir sans disposer de la décision motivée par écrit, il convient de préciser que cette décision ne prendra effet qu’à l’échéance du délai de recours (c. 35). [VS]

08 juillet 2015

TAF, 8 juillet 2015, B-3865/2015 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; gestion collective, tarif des sociétés de gestion, effet suspensif, pesée d’intérêts, effet rétroactif d’un tarif, sécurité du droit ; art. 74 al. 2 LDA; cf. N 27 (vol. 2007- 2011 ; TF, 19 juin 2007 ; ATF 133 II 263 ; sic! 10/2007, p. 722-735, «MP3-Player II ») ; N 611 (vol. 2012-2013 ; CAF, 30 novembre 2012) ; N 790 (TAF, 14 mars 2014, B-6540/2012 ; sic! 10/2014, p. 618-623, « Zustatztarif zum GT 3a » et N 797 (CAF, 2mars 2015).

En l’espèce, les recours n’apparaissent a priori ni manifestement bien fondés, ni manifestement mal fondés. Pour décider sur leur effet suspensif, il faut donc procéder à une pesée des intérêts en présence, sans préjuger la situation à régler ou la rendre impossible. Prioritairement, ce sont les intérêts des personnes représentées par les parties qui doivent être pris en considération, à savoir ceux des ayants droit, d’une part, et des utilisateurs d’œuvres, d’autre part. Les sociétés de gestion peuvent en général, sans grands frais, compenser des redevances non dues avec des créances tarifaires futures; tandis que, sans tarif approuvé, elles ne peuvent pas encaisser d’indemnités, même lorsque l’utilisation concernée est soumise à la surveillance de la Confédération. Le TAF a déjà tranché la question de l’assujettissement des utilisations faisant l’objet du tarif litigieux (cf.N 79), mais il n’a jamais examiné de manière approfondie celle de l’effet rétroactif d’un tarif, qui a été laissée ouverte par le TF (cf. N 27, vol. 2007-2011). Si l’effet suspensif devait être refusé, l’insécurité juridique relative à la rétroactivité concernerait de nombreux utilisateurs et occasionnerait des difficultés pratiques de part et d’autre. En comparaison, le risque de pertes sur débiteurs avant qu’un encaissement ne soit possible paraît supportable. En l’espèce, il faut donc décréter l’effet suspensif s’agissant de l’approbation rétroactive du tarif et mettre provisoirement en vigueur ce tarif pour les utilisations se produisant dès l’entrée en force de la présente décision incidente. [VS]

07 novembre 2013

TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 (d)

sic! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II » ; for, compétence matérielle, droit transitoire, dispositions transitoires, entrée en vigueur, effet rétroactif, moyens de preuve, lieu de l’acte, lieu du résultat, action en fourniture de renseignements, produits érotiques, préservatif ; art. 109 al. 2 LDIP, art. 191 al. 1 LDIP, art. 197 al. 2 LDIP ; cf. N 415 (vol. 2007-2011 ; KG SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 ; sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter /Harry Popper (fig.) ») et N 902 (TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014 ; arrêt du TF dans cette affaire).

C’est à juste titre que l’autorité précédente a considéré que dans le cadre d’une action portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle, la détermination du lieu de l'acte ou du résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP ne concernait que la compétence de l’autorité et non le bien-fondé de l’action (c. 2.2). Cependant, c’est à tort que cette autorité a appliqué le régime de droit transitoire de l’art. 196 al. 1 LDIP à des questions de compétence au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP. L’art. 197 LDIP, qui établit le régime de droit transitoire relatif aux questions de compétence, prévoit que le nouveau droit s’applique dès son entrée en vigueur avec effet rétroactif. L’erreur de l’autorité de première instance l’a conduite à refuser, en violation du droit fédéral, une partie des moyens de preuves établissant les actes contrefaisants et leur résultat qui étaient soumis par la demanderesse, au motif qu’ils étaient antérieurs à l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP. Pour cette raison déjà, la décision attaquée doit être révoquée et l’affaire renvoyée à l’autorité précédente pour un nouvel examen (c. 2.3). L’autorité de première instance aurait dû examiner les moyens de preuve suggérant que des livraisons et des ventes avaient été réalisées dans le canton de Schwyz (après l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP), car la livraison et la vente de marchandises contrefaites peuvent constituer des actes ou un résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP (c. 2.4). [AC]

13 décembre 2017

TF, 13 décembre 2017, 2C_685/2016, 2C_806/2016 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; jonction de causes, motivation du recours, décision incidente, tarifs des sociétés de gestion, tarifs complémentaires, divertissement de fond ou d’ambiance, test des trois étapes, triple test, usage privé, équité du tarif, tarif contraignant pour les tribunaux, cognition de la CAF, pouvoir de cognition de la CAF, pouvoir de cognition du TAF, pouvoir de cognition du TF, effet rétroactif, effet suspensif; art. 11bis CB, art. 8 WCT, art. 6 WPPT, art. 8 Cst, art. 42 LTF, art. 71 LTF, art. 93 al. 3 LTF, art. 95 LTF, art. 97 LTF, art. 105 LTF, art. 106 LTF, art. 107 al. 2 LTF, art. 10 al. 2 lit. e LDA, art. 10 al. 2 lit. f LDA, art. 19 al. 1 lit. a LDA, art. 22 LDA, art. 46 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA, art. 83 al. 2 LDA, art. 24 PCF ; N 797 (CAF, 2 mars 2015)

Les recours concernent le même jugement, ils contiennent pour l’essentiel les mêmes conclusions et ils soulèvent des questions juridiques identiques. Il se justifie donc de joindre les procédures (c. 1.1). Contre une décision du TAF concernant l’approbation d’un tarif par la CAF, c’est le recours en matière de droit public qui est ouvert (c. 1.2). Le TF revoit l’interprétation du droit fédéral et des traités internationaux avec un plein pouvoir de cognition. Il base sa décision sur l’état de fait constaté par l’autorité inférieure, mais il peut le rectifier ou le compléter s’il apparaît manifestement inexact ou s’il a été établi en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (c. 1.3). Le TF applique le droit d’office et n’est pas lié par les arguments des parties ou par les considérants de la décision attaquée (c. 1.4). Les motifs du recours doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Cela implique que le recourant doit se pencher au moins brièvement sur ses considérants. En matière de violation des droits fondamentaux et de violation du droit cantonal ou intercantonal, il existe un devoir de motivation qualifié : le grief doit être invoqué et motivé précisément d’après l’art. 106 al. 2 LTF (c. 1.5). Les tarifs approuvés et entrés en force sont contraignants pour les tribunaux. Toutefois, un tarif ne peut pas prévoir de redevance pour une utilisation libre d’après la LDA. En cas de litige, il appartient au juge civil de décider de ce qui est couvert ou non par le droit d’auteur. L’approbation d’un tarif par la CAF ne peut pas créer des droits à rémunération qui ne découlent pas de la loi. A l’inverse, une redevance prévue par la loi ne peut pas être exercée s’il n’existe pas un tarif valable et approuvé. Les tarifs des sociétés de gestion sont donc soumis à un double contrôle complémentaire, d’une part par la CAF et d’autre part par les tribunaux civils (c. 2.2). Si une partie veut attaquer une décision incidente avec la décision finale, elle doit prendre une conclusion spéciale à cet effet, la motiver et expliquer en quoi la décision incidente influe sur la décision finale. Ces exigences sont implicitement respectées en l’espèce (c. 2.2). Lorsqu’un hôtel reçoit des programmes de radio et de télévision grâce à sa propre antenne et les diffuse dans les chambres, il y a un acte de retransmission au sens de l’art. 10 al. 2 lit. e LDA et non de « faire voir ou entendre » au sens de l’art. 10 al. 2 lit. f LDA, car il y a une nouvelle restitution à un cercle indéterminé de destinataires (c. 5.1). Il paraît douteux que l’exception de l’art. 22 al. 2 LDA puisse s’appliquer, vu le texte de la disposition («destinées à un petit nombre d’usagers ») et vu que le législateur voulait avant tout éviter la multiplication d’antennes sur le toit des maisons (c. 5.2.3). Il faut aussi prendre en compte le droit international, qui a évolué depuis 1993, en particulier le test des trois étapes prévu par la CB et les accords ADPIC, et les droits des art. 11bis CB, 8 WCT et 6 WPPT (c. 5.2.4). La CJUE a estimé, dans son arrêt du 7 décembre 2006 C-306/05, que les art. 11bis al. 1 chiffre 2 et 3 CB et 8 WCT s’opposaient à ce que la diffusion d’émissions dans des chambres d’hôtel soit libre sous l’angle du droit d’auteur. Cette décision n’est certes pas contraignante pour les tribunaux suisses, mais elle peut servir à l’interprétation de dispositions juridiques peu claires. Et le TF a déjà reconnu que l’idée d’une harmonisation avec le droit européen avait inspiré le droit d’auteur suisse (c. 5.2.5). Au vu de ce qui précède et des critiques de la doctrine, il faut admettre que la retransmission d’œuvres dans des chambres d’hôtel est une communication publique au sens de l’art. 11bis al. 1 CB, en partie au contraire de ce qui avait été retenu par l’ATF 119 II 51. L’art. 22 al. 2 LDA n’est donc pas applicable (c. 5.2.6). Un but lucratif est incompatible avec l’exception d’usage privé au sens de l’art. 19  al. 1 lit. a LDA. En cas de retransmission d’émissions dans des chambres d’hôtel, l’utilisation d’œuvres est réalisée par l’hôtelier et pas par le client de celui-ci. Cela résulte déjà du fait que les actes d’utilisation de l’art. 10 al. 2 lit. a à f se situent en amont de la jouissance de l’œuvre (c. 5.3.2). La « convergence des technologies » n’y change rien : l’obligation de payer des redevances dépend de l’ampleur de l’infrastructure mise à la disposition du client (c. 5.3.3). En cas de recours au TF, les griefs doivent porter sur les considérants de l’arrêt du TAF, pas sur ceux de la décision de la CAF (c. 6.1). L’industrie de l’électronique qui loue des appareils de réception n’est pas dans la même situation que l’hôtelier : il n’y a donc pas de violation de l’égalité de traitement si elle ne doit pas payer de redevance de droit d’auteur (c. 6.3). La redevance de réception selon la LRTV ne couvre pas les droits d’auteur et les droits voisins : elle profite à d’autres ayants droit et elle relève du droit public, alors que l’indemnité tarifaire relève du droit privé (c. 6.4). Les critères de l’art. 60 LDA sont contraignants pour la CAF et ils ne représentent pas seulement des lignes directrices pour l’exercice de son pouvoir d’appréciation. Ils sont des notions juridiques indéterminées, dont le TF revoit l’interprétation et l’application. Toutefois, ce dernier fait preuve d’une certaine retenue dans le contrôle des décisions prises par des autorités spécialisées, lorsque des aspects techniques particuliers sont en discussion. Cette retenue vaut aussi pour le TAF, malgré sa cognition illimitée selon l’art. 49 PA (c. 7.2.1). Comme la CAF est une autorité spécialisée, le TAF doit respecter son pouvoir d’appréciation dans l’application des critères de l’art. 60 LDA, ce qui revient finalement à ne sanctionner que les abus ou les excès (c. 7.2.2). En l’espèce le TAF s’est tenu à juste titre à ces exigences (c. 7.2.3). En ce qui concerne l’entrée en vigueur d’un tarif, il faut s’en tenir en principe à l’interdiction d’un effet rétroactif. Pour éviter d’autres retards, le TF peut renoncer à renvoyer l’affaire à la CAF et trancher lui-même la question de l’entrée en vigueur et de la durée de validité du tarif, en application de l’art. 107 al. 2 LTF (c. 8.3). La jurisprudence distingue entre la rétroactivité véritable et la rétroactivité impropre. Dans le premier cas, un acte applique le nouveau droit à un état de fait révolu au moment de son entrée en vigueur. Pour que cette rétroactivité proprement dite soit admissible, il faut qu’elle soit expressément prévue par la loi ou qu’elle en résulte clairement, qu'elle soit raisonnablement limitée dans le temps, qu'elle ne conduise pas à des inégalités choquantes, qu'elle réponde à un intérêt public digne de protection et, enfin, qu'elle respecte les droits acquis. En cas de rétroactivité improprement dite, la nouvelle règle s'applique à un état de fait durable, qui a débuté sous l’ancien droit mais qui n’est pas entièrement révolu au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit. La rétroactivité impropre est en principe admise si elle ne porte pas atteinte à des droits acquis. En ce qui concerne l’exigence de la limitation dans le temps, un effet rétroactif d’une année a déjà été admis. Cette exigence découle du principe de la proportionnalité, et avant tout de ce qui est raisonnable. Lorsque la rétroactivité favorise certaines personnes et en désavantage d’autres, comme en l’espèce, les conditions susmentionnées doivent être remplies (c. 8.4). Une entrée en vigueur rétroactive d’un tarif n’est pas exclue, mais elle doit être limitée dans le temps (c. 8.5.1). En l’espèce, la CAF a admis un effet rétroactif de deux ans et deux mois, ce qui est excessif. Les recourantes devaient certes s’attendre à l’introduction du tarif, mais on ne peut pas leur reprocher d’avoir retardé la procédure de manière inconvenante (c. 8.5.3). Une si longue rétroactivité poserait aussi des problèmes pratiques et soulèverait des questions d’égalité de traitement, par exemple lorsque des hôtels ont cessé leur activité ou ont changé de propriétaires (c. 8.5.4). La question de l’effet rétroactif doit cependant être distinguée de celle de la liquidation de l’effet suspensif ordonné suite aux recours (c. 8.6). En principe, l’effet suspensif ne doit pas favoriser matériellement la partie qui succombe au détriment de la partie qui l’emporte (c. 8.6.1). Lorsque le recours est rejeté ou qu’il est irrecevable, l’effet suspensif tombe et un examen du cas particulier conduit en général à admettre que la décision attaquée entre en vigueur avec effet au moment où elle a été rendue, pour ne pas favoriser indûment le recourant (c. 8.6.2). En l’espèce, l’effet suspensif n’avait été ordonné que partiellement et les redevances litigieuses sont perçues depuis le 8 juillet 2015. Il ne paraît pas justifié que le tarif entre en vigueur le 2 mars 2015, soit à la date de la décision de la CAF (c. 8.6.3). Pour les raisons pratiques et juridiques déjà évoquées en relation avec la rétroactivité, il se justifie que le tarif entre en vigueur au 8 juillet 2015. Cela permet aussi d’accorder un délai d’introduction aux recourantes, ce qui se justifie vu la longueur de la procédure qui ne leur est pas imputable (c. 8.6.4). [VS]

CB (RS 0.231.15)

- Art. 11bis

Cst. (RS 101)

- Art. 8

LDA (RS 231.1)

- Art. 83

-- al. 2

- Art. 59

- Art. 22

- Art. 60

- Art. 46

- Art. 19

-- al. 1 lit. a

- Art. 10

-- al. 2 lit. e

-- al. 2 lit. f

LTF (RS 173.110)

- Art. 71

- Art. 93

-- al. 3

- Art. 106

- Art. 107

-- al. 2

- Art. 42

- Art. 95

- Art. 105

- Art. 97

PCF (RS 273)

- Art. 24

WCT (RS 0.231.151)

- Art. 8

WPPT (RS 0.231.171.1)

- Art. 6