ATF 140 II 483 ; sic! 2/2015, p. 89-92, « Tarif A Radio (Swissperform II) [2013-2016] », JdT 2015 II 206 ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarif A télévision, tarif contraignant pour les tribunaux, recours en matière de droit public, question préalable, autonomie des sociétés de gestion, qualité pour agir des sociétés de gestion ; art. 82 lit. a LTF, art. 86 al. 1 lit. a LTF, art. 90 LTF, art. 35 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA.
Contre une décision du TAF concernant l’approbation d’un tarif par la CAF, c’est le recours en matière de droit public qui est ouvert (c. 1.1). La question de savoir si un tarif permet ou non de calculer la redevance dans une situation donnée (en l’espèce l’existence de plusieurs canaux de distribution pour le même programme) relève de l’interprétation de ce tarif. Il s’agit donc d’une question de droit et non de fait (c. 3). D’après l’art. 59 al. 3 LDA, les tarifs lient le juge lorsqu’ils sont en vigueur. Cette disposition sert la sécurité du droit: le juge civil ne doit pas à nouveau examiner l’équité d’un tarif puisque cette question est traitée dans le cadre de la procédure administrative d’approbation de ce tarif. Toutefois, le juge civil peut et doit vérifier que les sociétés de gestion, sur la base d’un tarif, ne font pas valoir de droits à rémunération incompatibles avec les dispositions impératives de la loi. De plus, l’application et l’interprétation d’un tarif approuvé dans un cas concret sont des questions juridiques qui relèvent de la compétence des tribunaux civils (c. 5.2). Les autorités d’approbation tarifaire doivent éclaircir les questions juridiques qui ont une influence sur le champ d’application du tarif (c. 6.2). Lorsque la gestion collective obligatoire est prévue, ce sont les sociétés de gestion qui peuvent faire valoir les actions civiles prévues par la LDA (gesetzliche Prozessstandschaft). Elles peuvent aussi demander par la voie civile le paiement des simples droits à rémunération, quand bien même l’action n’est pas directement prévue par la LDA. La créance se base alors sur le tarif. Il en découle que les sociétés de gestion, dans les domaines surveillés par la Confédération, ne peuvent faire valoir des redevances que s’il existe un tarif. Mais, à l’inverse, l’inexistence d’un tarif valable ne signifie pas que les rémunérations prévues par la loi ne seraient pas dues (c. 6.4). Dans une affaire antérieure, la recourante avait intenté une action en constatation pour éclaircir la question de savoir si certains actes étaient couverts par l’art. 35 LDA. Le TF avait alors nié l’existence d’un intérêt digne de protection, au motif que la question devait être éclaircie dans le cadre de la procédure d’approbation du tarif (c. 6.6). Dans l’intérêt de la sécurité juridique, les autorités tarifaires doivent examiner à quels droits s’applique le tarif et, en cas de contestation à ce sujet, quels sont les droits qui existent; cela même si la question n’influe pas sur l’équité du tarif. Le fait que cette question puisse aussi être examinée par les tribunaux civils n’y change rien. Le tarif n’est certes pas contraignant pour les tribunaux civils s’agissant des aspects de droit matériel. Mais si l’affaire est portée jusqu’au TF, celui-ci pourra coordonner sa décision sur les questions matérielles avec la Iiere Cour de droit civil, ce qui assurera la sécurité du droit au plus haut niveau et réduira le nombre de procès civils (c. 6.6 et 6.7). Si plusieurs solutions tarifaires sont équitables, il n’appartient pas à la CAF de restreindre l’autonomie tarifaire des sociétés de gestion et le pouvoir de négociation des partenaires tarifaires en imposant la solution qui lui paraît appropriée (c. 7.3). Un tarif n’est pas inéquitable du seul fait qu’il contient des clauses non contestées, qui peuvent ne pas être absolument nécessaires. En effet, de telles clauses peuvent éclairer le lecteur qui ne connaît pas la loi suisse ou la jurisprudence fédérale (c. 7.4). La détermination dans le tarif des conditions de protection d’un phonogramme en Suisse, litigieuses entre les parties, n’est pas une question d’application du tarif, mais plutôt une question juridique abstraite sur l’étendue de la protection qui doit être tranchée par les autorités tarifaires même si elle pourrait aussi être éclaircie par les tribunaux civils (c. 8.4). Une clause tarifaire destinée à être appliquée uniquement si le point de vue juridique de la société de gestion est confirmé ne doit pas être biffée. En effet une telle clause est nécessaire pour que la société de gestion puisse exercer les droits, à supposer que son point de vue juridique soit fondé (c. 9.2). [VS]