Disposition

     LDA (RS 231.1)

          Art. 9

17 juin 2015

HG BE, 17 juin 2015, HG 15 39 (d) (mes. prov.)

Œuvre, droit d’auteur, individualité de l’œuvre, unicité statistique, œuvre photographique, transfert de droits d’auteur, recueil, contrat de licence, concurrence déloyale, exploitation d’une prestation d’autrui, mesures provisionnelles, vraisemblance, examen théorique des conducteurs de véhicules automobiles, programme d’ordinateur, CD-ROM, Excel ; art. 2 al. 1 LDA, art. 4 LDA, art. 6 LDA, art. 9 LDA, art.16 al. 1 LDA, art. 65 LDA, art. 5 lit. c LCD.

Pour l’examen théorique des conducteurs de véhicules automobiles, la demanderesse — l’association des services des automobiles — a conçu 276 questions avec pour chacune trois réponses possibles et des images (et photographies) associées. Ce matériel est mis sur le marché par le biais de contrats de licence. Sans bénéficier d’une telle licence, la défenderesse a repris un CD sur lequel étaient enregistrées les questions et les réponses sous forme de tableau Excel, les images et des instructions sur la façon d’assembler les questions et les images. En droit d’auteur, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre. Lorsqu’une œuvre est créée par un employé, l’employeur ne peut acquérir les droits d’auteur sur cette œuvre, et faire valoir les droits exclusifs qui y sont liés, qu’en se les faisant céder (art. 16 al. 1 LDA) (c. 17.1). Si le matériel d’examen constitue une œuvre, les membres du groupe de travail qui les ont conçues en sont les auteurs. La demanderesse n’étant pas parvenue à rendre vraisemblable une cession expresse ou tacite des droits, la requête de mesures provisionnelles doit déjà être rejetée pour défaut de légitimation active (c. 17.4-17.5). La requête doit aussi être rejetée au motif que la demanderesse n’est pas parvenue à rendre vraisemblable l’existence d’une œuvre protégée (c. 18). Selon le critère de l’unicité statistique, l’œuvre doit se distinguer de ce qui est usuel au point qu’il paraisse exclu qu’un tiers, confronté à la même tâche, puisse créer une œuvre pratiquement identique (c. 18.1). En l’espèce, tant les images que les questions et réponses ne sont pas suffisamment individuelles pour être protégées. Les images ne constituent que de banales représentations de diverses situations, qui pourraient être réalisées de manière similaire par d’autres personnes ayant reçu la consigne de réaliser des images correspondant aux questions. Il en va de même pour les questions, qui ne constituent qu’une banale compilation de questions possibles d’examen découlant de la législation et dictées par la logique (c. 18.5). On ne peut non plus conclure à l’existence d’un recueil, le choix et l’ordonnancement des éléments n’étant pas individuels. Les questions sont listées de manière banale dans une liste Excel, sans avoir été, apparemment, disposées volontairement dans un ordre particulier, et les images sont stockées séparément (c. 18.7). Sous l’angle de l’art. 5 lit. c LCD, la demanderesse ne rend pas vraisemblable que sa compilation de questions constitue un produit prêt à être mis sur le marché. Le matériel enregistré sur le CD ne constitue pas un logiciel d’apprentissage fini, mais la matière de base permettant aux acquéreurs de développer leurs propres logiciels d’apprentissage. En outre, la demanderesse ne parvient pas à rendre vraisemblable que la défenderesse n’a pas effectué de sacrifice correspondant. La défenderesse n’a pas simplement copié le matériel de la demanderesse, mais elle l’a intégré dans son propre produit, modifiant notamment l’ordre des réponses et les images (c. 21.3). La demande de mesures provisionnelles doit donc aussi être rejetée sous l’angle de l’art. 5 lit. c LCD (c. 21.4). [SR]

18 septembre 2014

HG ZH, 18 septembre 2014, HE140296 (d) (mes. prov.)

ZR 114/2015, p. 83-86 ; droit d’auteur, mesures provisionnelles, mesures superprovisionnelles, droit de citation, plagiat, reproduction d’une œuvre, reportage, roman, œuvre, partie d’œuvre, individualité de l’œuvre, confiscation ; art. 2 al. 4 LDA, art. 9 LDA, art. 25 LDA, art. 62 LDA, art. 65 LDA ; cf. N 585 (TF, 27 novembre 2014, 4A_585/2014 ; sic! 3/2015, p. 175-176, Bergsteigen im Flachland).

Un journaliste se plaint du plagiat de nombreux passages de ses reportages dans un roman. La reprise des textes, même modifiés, est manifeste (c. 4.3). Les défendeurs, soit le romancier et son éditrice, argumentent que, selon l’art. 2 al. 4 LDA, les parties d’œuvres ne sont protégées que si elles constituent des créations de l’esprit qui ont un caractère individuel. Ils considèrent que les passages reproduits ne remplissent pas ces conditions, et que leur reprise est donc licite (c. 4.4). Selon le juge unique, cette analyse est sans fondement, l’art. 25 LDA protégeant l’œuvre dans son ensemble, même lorsque la reprise ne porte que sur une partie (c. 4.5). Une violation des droits d’auteur du demandeur paraît suffisamment vraisemblable pour que soient octroyées des mesures provisionnelles. Il est inutile d’examiner si tel serait aussi le cas si la reprise avait porté sur peu de passages, ou sur de simples passages banals, puisque tel n’est pas le cas en l’espèce (c. 4.6). [SR]

08 mai 2008

TF, 8 mai 2008, 4A_104/2008 (d)

sic! 10/2008, p. 713-717, « SBB-Uhren IV » ; droits d’auteur, contrat, CFF, transfert de droits d’auteur, principe de la confiance, théorie de la finalité, arbitraire ; art. 9 Cst., art. 95 LTF, art. 105 al. 2 LTF, art. 18 al. 1 CO, art. 9 al. 1 aLDA, art. 16 LDA ; cf. N 20 (arrêt du Handelsgericht AG dans cette affaire).

La constatation de la volonté effective de transférer des droits d'auteur relève du fait et le TF ne peut la revoir que si elle est manifestement inexacte ou arbitraire, ou si elle repose sur une violation des règles de droit selon l'art. 95 LTF. Il n'y a pas arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. du seul fait qu'une autre solution aurait également pu entrer en ligne de compte, ou même qu'elle aurait pu paraître préférable. Il n'est pas arbitraire de déduire un transfert de droits d'auteur du fait que leur titulaire originaire ne se considérait pas comme investi de ces droits et qu'il ne les a pas fait valoir à l'encontre de leur utilisateur dont il connaissait l'activité. Les règles relatives au transfert des droits d'auteur de la nouvelle LDA correspondent à celles de l'ancienne LDA. Les droits d'utilisation sont cessibles selon l'art. 9 al. 1 aLDA et leur transfert peut intervenir de manière informelle, le cas échéant tacitement ou par actes concluants. Ce qui est déterminant pour juger de l'existence d'un transfert des droits d'auteur, c'est la réelle et commune intention des parties selon l'art. 18 al. 1 CO. Lorsque celle-ci ne peut être établie, l'objet du contrat de transfert des droits d'auteur doit être déterminé en recourant au principe de la confiance, selon la théorie de la finalité. Le fait que le titulaire originaire de droits d'auteur n'ait pas eu conscience de ce qu'il en était investi n'empêche pas qu'il ait pu valablement transférer ces droits au sens de l'art. 16 LDA. Le transfert de droits d'auteur ne suppose en effet pas nécessairement la connaissance exacte de l'existence et de la portée des droits se rapportant à une œuvre. Il suffit que le cédant soit conscient, au moment du transfert, du fait que des droits pouvaient lui appartenir à titre originaire.