sic! 11/2013, p. 718-720, « Noir Mat » ; recours en matière civile, instance cantonale unique, marque, raison de commerce, enseigne, nom de domaine, action en constatation de la nullité d’une marque, établissement des faits, rectification de l’état de fait, enregistrement abusif, intention déloyale, confusion, mauvaise foi, notoriété ; art. 42 al. 1 LTF, art. 42 al. 2 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 75 al. 2 lit. a LTF, art. 97 al. 1 LTF, art. 105 al. 1 LTF, art. 105 al. 2 LTF, art. 108 al. 1 lit. b LTF, art. 162 al. 5 ORC, art. 31 al. 2 LPM, art. 2 LCD, art. 3 LCD.
Lorsque le droit fédéral prévoit une instance cantonale unique, le recours en matière civile est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 lit. b LTF) et, contrairement à la règle générale (art. 75 al. 2 LTF), le tribunal supérieur désigné comme autorité cantonale de dernière instance n'a pas à statuer sur recours (art. 75 al. 2 lit. a LTF) (c. 1.1). Compte tenu de l'exigence de motivation de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 lit. b LTF), le TF n'examine en principe que les griefs invoqués. Il n'est pas tenu de traiter toutes les questions juridiques qui se posent lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (c. 1.3). Le TF conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La recourante qui entend remettre en cause les constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui retenu dans la décision attaquée. Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF) (c. 1.4). Celui qui dépose à titre de marque un signe déjà utilisé par un tiers ne pourra se prévaloir de son enregistrement s'il a agi avec une intention déloyale. Pour déterminer le caractère abusif ou non d'un enregistrement, le tribunal doit apprécier l'ensemble des faits. Il s'agit de définir l'intention, au moment du dépôt, de celui qui est devenu titulaire de l'enregistrement. Il faut tenir compte des buts et motifs du déposant à ce moment-là. Des circonstances postérieures au dépôt peuvent être prises en compte si elles permettent de fournir des indices quant à l'intention du titulaire au moment du dépôt de la marque. Savoir quelle était l'intention de la recourante au moment du dépôt de la marque en Suisse est une question de fait, et non de droit. Le même raisonnement peut être appliqué mutatis mutandis s'agissant de son intention lors de la réquisition d'inscription d'une raison de commerce (c. 2.2). Parmi les indices permettant d'admettre le caractère frauduleux d'un enregistrement, le TF mentionne le fait que le déposant connaissait les activités de celui dont il a repris les éléments distinctifs dans sa marque; le fait que ce dernier ait disposé d'une clientèle importante et exploité une enseigne réputée avec laquelle le déposant a toujours entretenu la confusion (en particulier en recevant à plusieurs reprises du courrier et des téléphones destinés à l'exploitant de l'enseigne, sans jamais l'en tenir informé). L'enregistrement d'un nom de domaine similaire à l'enseigne, avant même le dépôt de la marque litigieuse, est aussi un indice pris en compte par le TF. Enfin, la modification du but social de celui qui a déposé la marque litigieuse pour se rapprocher de celui de l'exploitant de l'enseigne est également un indice pertinent (c. 2.3). L'absence d'opposition à une demande d'inscription d'une raison de commerce au registre du commerce n'exclut pas une action ultérieure devant un juge civil. En matière de raison de commerce, le renvoi devant un tribunal est d'ailleurs explicitement prévu par le législateur (art. 162 al. 5 ORC). Il en va de même en matière de marque en cas d'absence d'opposition dans le délai de trois mois prévu par l'art. 31 al. 2 LPM. Le juge civil peut en effet être actionné en tout temps ; même à considérer qu'une opposition aurait été formée devant l'IPI, le juge civil ne serait d'ailleurs pas lié par la décision prise par l'IPI (c. 2.4). [NT]