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  • Témérité

16 octobre 2013

TF, 16 octobre 2013, 4F_11/2013 et 4F_12/2013 (d)

Demande de révision, partialité, demande de récusation, témérité ; art. 6 ch. 1 CEDH, art. 30 al. 1 Cst., art. 121 ss LTF, art. 123 al. 2 lit. a LTF ; cf.

N 532

(vol. 2007-2011 ; TF, 10 janvier 2011, 4A_189/2010) et N 586 (vol. 2007-2011 ; TF, 11 octobre 2011, 4A_377/2011) (arrêts faisant l’objet de la présente demande de révision).

Une demande de révision motivée par le seul fait que les membres du tribunal visés ont rendu une décision défavorable au requérant est irrecevable (c. 1). Lorsque le TF n'entre pas en matière sur un recours, son jugement ne remplace pas la décision attaquée, de sorte que c'est à l'autorité cantonale qui a rendu la décision — et non au TF — qu'une demande de révision doit être adressée s'il est découvert un motif portant sur les faits allégués devant l'autorité cantonale en question ou sur la procédure cantonale. Le TF est compétent pour se saisir de la demande de révision du requérant, même s'il n'est pas entré en matière sur tous les points du recours contre lequel elle est dirigée (TF, 10 janvier 2011, 4A_189/2010 [N 532, vol. 2007-2011]). Le requérant invoque en effet la nullité en tout point de la décision portée en révision. De plus, une division de la procédure est empêchée par des raisons pratiques (c. 3.2.1). Il en va différemment de la demande de révision dirigée contre l'arrêt TF, 11 octobre 2011, 4A_377/2011 (N 586, vol. 2007-2011). Le TF n'étant entré en matière sur aucun point du recours, son jugement n'a en effet pas remplacé la décision attaquée. De plus, les motifs invoqués ne concernaient pas les faits sur lesquels se fonde la décision de non entrée en matière du TF, mais la partialité des juges cantonaux (c. 3.2.2). Les motifs de révision soulevés par le requérant ne révèlent aucune circonstance propre à démontrer objectivement la partialité des juges cantonaux et relèvent de vagues spéculations. Ainsi, l'aspiration du juge d'instruction cantonal à être nommé au TFB n'a pas d'incidence sur son impartialité dans une procédure à laquelle la Confédération est partie. De même on ne peut inférer que l'ancien mandataire du requérant aurait eu un conflit d'intérêt du fait qu'il travaille dans une étude voisine de celle d'une personne devenue depuis juge au TFB (c. 4.2). Les autres motifs soulevés par le requérant sont amenés tardivement dans la présente procédure de révision, car ils devaient être connus au plus tard une fois qu'a été rendue la décision du Tribunal de commerce zurichois du 23 août 2008. Le requérant ne donne en outre aucune raison qui l'aurait empêché de faire valoir ces motifs plus tôt. Si le requérant entendait tirer des faits allégués de quelconques motifs de récusation, il aurait dû les faire valoir dans la procédure cantonale dès qu'il a eu connaissance des faits dont ils découlent. Ces motifs ne doivent en effet pas être soulevés dans une demande de révision devant le TF, mais auraient dû l'être dans le délai du recours en nullité devant le Tribunal de cassation du canton de Zurich, selon la procédure cantonale alors en vigueur (c. 4.3). La demande du requérant, dénuée d'emblée de chances de succès, est rejetée sur tous les points sur lesquels le TF est entré en matière (c. 4.4). [JD]

03 septembre 2013

TF, 3 septembre 2013, 4A_298/2013 (f)

Contrat de vente, exécution de jugement, procédure sommaire, droit d'être entendu, fait nouveau, témérité ; art. 29 Cst., art. 99 al. 1 LTF, art. 106 al. 2 LTF, art. 219 CPC, art. 257 al. 2 CPC, art. 339 al. 2 CPC, art. 341 al. 3 CPC.

Celui qui invoque une violation du droit d'être entendu (art. 29 Cst.) doit indiquer quel aspect de ce droit a été touché. Le TF n'examine pas cette question d'office (art. 106 al. 2 LTF). Une décision touchant les mesures d'exécution doit être rendue en procédure sommaire (art. 339 al. 2 CPC), car il s'agit d'une exception légale à l'application de la procédure ordinaire (art. 219 CPC in fine). Elle n'est pas fondée, comme le prétend la recourante, sur la disposition régissant les cas clairs (art. 257 al. 2 CPC). C'est donc à tort qu'elle se plaint de n'avoir pas pu faire valoir son point de vue dans le cadre de la procédure ordinaire (c. 2.2). Il n'est pas possible de revenir indirectement sur un jugement au fond au moyen d'objections matérielles soulevées dans la procédure d'exécution (art. 341 al. 3 CPC), d'autant plus lorsque ces objections s'appuient en partie sur des allégations de faits et des preuves nouvelles (art. 99 al. 1 LTF) (c. 3). Le recours, qui confine à la témérité, est rejeté et la demande d'effet suspensif dont il était assorti devient sans objet (c. 5). [JD]

CPC (RS 272)

- Art. 341

-- al. 3

- Art. 339

-- al. 2

- Art. 257

-- al. 2

- Art. 219

Cst. (RS 101)

- Art. 29

LTF (RS 173.110)

- Art. 106

-- al. 2

- Art. 99

-- al. 1

10 octobre 2018

TAF, 10 octobre 2018, B-7159/2016 (f)

« Dénonciation », gestion collective, sociétés de gestion, surveillance des sociétés de gestion, dénonciation, frais de procédure, témérité, principe de l’équivalence, principe de la proportionnalité, causalité ; art. 127 al. 1 Cst, art. 46a LOGA, art. 13 al. 1 LIPI, art. 71 PA, art. 1 O-PA, art. 10 O-PA, art. 2 al. 1 OGEmol, art. 3 al. 2 OGEmol, art. 53 LDA, art. 16d ODAu, art. 2 OTa-IPI.

Au sens de l'art. 53 LDA, la surveillance de la gestion est étendue et permet à l'IPI d'examiner si les sociétés de gestion exécutent leurs tâches selon des règles déterminées, respectivement si les tarifs sont respectés (c. 3.2). La dénonciation est une procédure non contentieuse par laquelle un administré peut attirer l'attention d'une autorité hiérarchiquement supérieure sur une situation de fait ou de droit qui justifierait à son avis une intervention de l'Etat dans l'intérêt public (c. 4.1). La jurisprudence et la doctrine retiennent que celui qui dépose une plainte auprès de l'IPI en raison d'une mesure prise par une société de gestion est considéré comme un dénonciateur au sens de l'art. 71 PA. Cette disposition est en effet applicable par analogie (c. 4.3). Selon l'art. 71 al. 2 PA, le dénonciateur n'a aucun des droits reconnus à la partie. L'autorité saisie décide, d’après son pouvoir d'appréciation, si elle donne suite on non à la dénonciation. La seule qualité de dénonciateur ne donne pas le droit de recourir contre la décision prise à la suite de la dénonciation ; le dénonciateur doit encore pouvoir invoquer un intérêt digne de protection à ce que l'autorité de surveillance intervienne (c. 4.4). Le principe de la légalité en droit fiscal, érigé en droit constitutionnel indépendant à l'art. 127 al. 1 Cst, s'applique à toutes les contributions publiques (c. 5.1). Si la qualité de contribuable et l'objet de l'impôt doivent toujours être définis dans une loi formelle, la jurisprudence a assoupli cette exigence en ce qui concerne le mode de calcul de certaines contributions. La compétence d'en fixer le montant peut ainsi être déléguée à l'exécutif lorsqu'il s'agit d'une contribution dont la quotité est limitée par des principes constitutionnels contrôlables, tels que ceux de la couverture des frais et de l'équivalence (c. 5.2). Ce dernier est l'expression du principe de la proportionnalité en matière de contributions publiques : le montant de la contribution exigée d'une personne déterminée doit être en rapport avec la valeur objective de la prestation fournie à celle-ci (c. 5.3). L’assouplissement du principe de la légalité en matière fiscale ne vaut pas lorsqu'une contribution ne permet de couvrir qu'une partie des dépenses effectives. Dans ce cas, les principes de l'équivalence et de la couverture des frais ne permettent pas d'encadrer de manière suffisante la contribution en cause (c. 5.4). Il est notoire que les émoluments encaissés par les tribunaux et les administrations n'arrivent pas, et de loin, à couvrir leurs dépenses effectives (c. 5.5). Lorsque les activités du secteur privé sont soumises à la surveillance étatique, l'autorité responsable peut prélever des émoluments pour couvrir ses frais. En principe, c’est à l’administré surveillé qu’il incombe de les payer, conformément à l’art. 2 al. 1 OGEmol (c. 5.6.1). Les prestations de surveillance peuvent entraîner des émoluments dus en contrepartie de prestations déterminées ou une taxe annuelle (c. 5.6.3). L'art. 46a LOGA constitue une base légale permettant au Conseil fédéral d'édicter des dispositions prévoyant la perception d'émoluments pour les décisions et les autres prestations de l'administration fédérale (c. 6.1). Le cercle des contribuables doit être fixé dans une loi au sens formel. Force est de constater que l’art. 13 al. 1 LIPI ne dit pas clairement qui doit supporter les taxes perçues par l’IPI pour la surveillance des sociétés de gestion. La logique veut cependant que ce soit ces dernières (c. 6.2.3). Cela découle aussi des interprétations historique, téléologique (c. 6.2.4) et systématique (c. 6.2.5). L'application des dispositions réglementaires sur les frais et émoluments n'aboutit pas à un résultat différent (c. 7). Les art. 16d ODAu et 2 OTa-IPI renvoient à l’OGEmol (c. 7.1.1 et c. 7.1.2). L’art. 2 al. 1 de cette ordonnance consacre le principe de causalité. Selon celui-ci, des frais de procédure sont mis à la charge de celui qui les a causés (c. 7.2.2). La causalité naturelle entre deux événements (rapport de cause à effet) est un lien tel que sans le premier événement, le second ne se serait pas produit ; il n'est pas nécessaire que l'événement en question soit la cause unique ou immédiate du résultat. Il y a causalité adéquate lorsque le comportement incriminé était propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit. La causalité adéquate peut être interrompue par un événement extraordinaire ou exceptionnel auquel on ne pouvait s'attendre, et qui revêt une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus immédiate du dommage (c. 7.3). En l’espèce, l'existence même de la recourante comme société de gestion est l'événement sine qua non de la mesure de surveillance (causalité naturelle) (c. 7.5.1). Sous l'angle de la causalité adéquate, le principe de causalité ou du perturbateur conduit à conclure que c'est la société de gestion qui est tenue de payer les frais de sa surveillance (c. 7.5.2). L'entité surveillée doit objectivement s'attendre à faire parfois l'objet de dénonciations. Cela entre dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles. En ce sens, la dénonciation ne peut pas être vue en l'espèce comme un facteur d'interruption de la chaîne causale (c. 7.5.2). L'art. 3 al. 2 OGEmol dispose qu'il est possible de renoncer à percevoir des émoluments lorsque la décision ou la prestation sert un intérêt public prépondérant ou que la décision ou la prestation engendre des coûts insignifiants (c. 9.1). Cette disposition est de nature potestative (c. 9.2). La surveillance des sociétés de gestion, aussi importante soit-elle, ne protège pas un intérêt public aussi prépondérant que, par exemple, la surveillance des denrées alimentaires. Quant aux coûts engendrés par l'enquête, du fait qu'une décision a dû être rendue à la suite d'une procédure d'instruction, ceux-ci ne sauraient être vus comme insignifiants (c. 9.3). L'art. 1 O-PA suit le principe consistant à mettre les frais à la charge de la partie qui succombe. Ce principe ne s'applique, conformément à l’art. 10 O-PA, que pour autant que la dénonciation soit téméraire (c. 10.1.2) ou d’une ampleur extraordinaire, ou qu’elle présente des difficultés particulières. L'imputation de frais de justice à un dénonciateur est contraire au principe d'intérêt public de la surveillance et ne devrait être prévue que dans des cas exceptionnels. En particulier, il faut éviter que des administrés renoncent à déposer des dénonciations par crainte d'un éventuel impact financier (c. 10.2.1). Agit par témérité ou légèreté la partie qui, en faisant preuve de l'attention et de la réflexion que l'on peut attendre d'elle, sait ou devait savoir que les faits invoqués à l'appui de ses conclusions n'étaient pas conformes à la vérité ou qui, malgré l'absence évidente de toute chance de succès, persiste dans sa volonté de recourir. Tombe également sous le coup de cette disposition la partie qui forme un recours manifestement dénué de chances de succès, dont s'abstiendrait tout plaideur raisonnable et de bonne foi (c. 10.2.4). En l'espèce, au vu de la longueur et de la densité de l'analyse contenue dans la décision attaquée (19 pages), la dénonciation n'apparaît pas comme téméraire. Une dénonciation téméraire aurait été écartée autrement plus simplement et plus rapidement, car la témérité est quelque chose de manifeste (c. 10.2.5). La dénonciation n’était pas non plus d’une ampleur extraordinaire et ne pouvait être vue comme présentant des difficultés particulières (c. 10.3). Le montant de l’émolument demandé est conforme aux principes de l’équivalence et de la couverture des frais (c. 11). La décision attaquée rétablit une situation conforme au droit. L'ancienne pratique de l’IPI ne correspondait pas à la volonté du législateur et c'est avec raison qu’elle a été changée (c. 12.2). Quant au grief tiré de l'inopportunité, il ressort de ce qui précède que la décision attaquée ne découle que de la simple application du droit. Partant, il n'y a pas de place ici pour le grief d'inopportunité (c. 13). [VS]