Disposition

LTF (RS 173.110)

     Art. 74

          al. 2 lit. e

15 décembre 2014

TF, 15 décembre 2014, 4A_362/2014 (d)

Frais et dépens, frais de procédure, mesures provisionnelles, décision finale, décision incidente, complètement de l’état de fait, rectification de l’état de fait, arbitraire dans la constatation des faits, répartition des frais de procédure, appréciation du juge, arbitraire ; art. 9 Cst., art. 29 al. 2 Cst., art. 29 al. 1 LTF, art. 42 al. 2 LTF, art. 74 al. 2 lit. e LTF, art. 75 al. 1 LTF, art. 90 LTF, art. 93 LTF, art. 98 LTF, art. 105 LTF, art. 106 al. 2 LTF ; cf. N 930 (TFB, 12 mai 2014, S2013_003) et N 931 (TFB, 12 mai 2014, S2013_004).

Les décisions sur mesures provisionnelles ne sont considérées comme des décisions finales au sens de l’art. 90 LTF que lorsqu’elles relèvent d’une procédure autonome. Les mesures provisionnelles notifiées séparément pendant ou en dehors d’une procédure principale et qui ne sont accordées que pour la durée du procès ou à condition qu’une procédure au fond soit introduite constituent des décisions incidentes au sens de l’art. 93 LTF. Dans le cas d’espèce, la décision qui déclare la requête de mesures provisionnelles comme étant partiellement sans objet et devant partiellement être rejetée doit être considérée comme finale (c. 1.1). Dans les recours formés contre des décisions portant sur des mesures provisionnelles, seule peut être invoquée la violation des droits constitutionnels (art. 98 LTF) ; elle doit l’être avec précision (art. 106 al. 2 LTF). Le recourant qui se prévaut d’une violation de l’art. 9 Cst. ne peut ainsi pas se contenter de simplement invoquer l’arbitraire. Une correction ou un complément de l’état de fait n’est possible que si l’instance précédente a violé des droits constitutionnels. Dans un tel cas, le recourant doit non seulement démontrer l’importance des faits en question pour l’issue de la procédure, mais également de quelle manière la constatation des faits telle qu’elle a été effectuée par l’instance précédente est contraire aux principes constitutionnels (c. 1.2). Dans les cas mentionnés à l’art. 107 CPC, le tribunal peut s’écarter des règles générales relatives à la répartition des frais de procédure et les répartir selon sa libre appréciation (c. 2.3.1 et 2.3.2). Le droit d’être entendu (art. 29 al. 2 Cst) vise d’une part à établir les faits, de l’autre à assurer que les parties puissent participer à la prise de la décision (c. 3.1). Le tribunal qui omet de prendre en considération la note de frais du conseil en brevet empêche la partie victime de cet oubli de faire valoir son point de vue relativement à la répartition des frais. Une telle omission constitue une violation de l’art. 29 al. 2 Cst., laquelle doit être corrigée. [DK]

Cst. (RS 101)

- Art. 29

-- al. 2

- Art. 9

LTF (RS 173.110)

- Art. 29

-- al. 1

- Art. 90

- Art. 93

- Art. 98

- Art. 106

-- al. 2

- Art. 75

-- al. 1

- Art. 42

-- al. 2

- Art. 105

- Art. 74

-- al. 2 lit. e

13 mai 2020

TF, 13 mai 2020, 4A_420/2019

Brevet, nullité partielle d’un brevet, procédé de moulage par injection, céramique, recours en matière civile, rectification des revendications d’un brevet, renonciation partielle à un brevet, allégués tardifs, fait nouveau, moyens de preuves nouveaux, acquiescement partiel, décision incidente, simplification de la procédure, frais et dépens, valeur litigieuse ; art. 74 al. 2 lit. e LTF, art. 75 al. 1 LTF, art. 31 al. 1 LTFB, art. 31 al. 2 LTFB, art. 31 al. 3 LTFB, art. 33 LTFB, art. 4 FP-TFB, art. 5 FP-TFB, art. 24 LBI, art. 25 LBI, art. 26 LBI, art. 91 al. 2 CPC, art. 125 CPC, art. 225 CPC, art. 229 CPC, art. 237 CPC.

Le
recours en matière civile est en principe recevable contre les
jugements du Tribunal fédéral des brevets, sans égard à la valeur
litigieuse (art. 74 al. 2 lit. e LTF et art. 75 al. 1 LTF) (c. 1).
Toutefois, dans les cas d’erreurs d’écriture ou de calcul que
vise l’art. 334 CPC, la voie du recours en matière civile n’est
disponible qu’après l’échec d’une demande de rectification.
En l’espèce cependant, l’objet du recours en matière civile
(annulation du jugement du TFB et nullité complète du brevet
concerné) ne recoupait pas une hypothétique demande en
rectification (reproduction dans le dispositif du jugement du TFB de
l’ensemble des nouvelles revendications du brevet limité par la
défenderesse et intimée), de sorte que le recours en matière
civile est recevable (c. 2). La renonciation partielle à un brevet
est prévue par les art. 24 et 25 LBI. Elle permet au titulaire de
conserver certains éléments du brevet menacé de nullité, lorsque
les revendications se révèlent formulées de manière trop large,
en méconnaissance de l’état de la technique. Elle suppose une
modification des revendications dans le cadre des modalités prévues
par l’art. 24 LBI. Elle s’accomplit en principe par une requête
adressée à l’IPI, mais peut intervenir aussi devant le tribunal
saisi d’une action en nullité. Ce tribunal doit alors vérifier si
les revendications nouvellement énoncées réduisent valablement la
portée du brevet litigieux. Parce que cette vérification nécessite
de constater et d’apprécier aussi des faits, la renonciation
partielle au brevet litigieux est assimilée à l’introduction de
faits ou de moyens de preuves nouveaux dans le procès civil. La
renonciation partielle doit donc intervenir avant la clôture de la
phase de l’allégation ; elle ne peut intervenir plus tard
qu’aux conditions de l’art. 229 al. 1 lit. a ou lit. b CPC. En
l’espèce, la phase de l’allégation s’est terminée avec la
réplique pour la demanderesse et avec la duplique pour la
défenderesse (2ème échange d’écritures selon les
art. 225 et 229 al. 2 CPC). La renonciation partielle déclarée au
stade de la duplique était inconditionnellement recevable. Si la
demanderesse voulait contester la validité de cette renonciation,
notamment au regard de l’art. 24 LBI, ou contester la validité de
la partie restante du brevet consistant dans les revendications
nouvellement énoncées par la défenderesse, sur la base de faits
non encore allégués mais dont l’allégation se justifiait
objectivement aux fins de ces constatations, ladite allégation lui
était encore permise par l’art. 229 al. 1 lit. a ou lit. b CPC. La
renonciation partielle au brevet litigieux équivaut à un
acquiescement partiel à la demande en justice. C’est pourquoi le
TFB, alors même qu’il rejetait l’action en nullité et aussi
l’action en cession du brevet, a réparti les frais judiciaires
entre les parties et compensé les dépens (c. 3). Les moyens
développés à l’appui du recours en matière civile ne sont pas
mentionnés dans le jugement attaqué et encore moins discutés dans
ce jugement. Les précédents juges n’y discutent que les moyens
soulevés à l’encontre du brevet dans son état antérieur à la
renonciation partielle. Celle-ci a de toute évidence introduit une
modification très importante de l’objet du litige. Ni le Code de
procédure civile, ni la LTFB ne prévoient explicitement une
procédure appropriée à cette situation. D’ordinaire, toutefois,
une renonciation partielle est apte à permettre une simplification
du procès. A première vue, il eût été opportun de rendre une
décision incidente selon l’art. 237 CPC sur les conclusions en
renonciation partielle articulées par la défenderesse, puis
d’inviter la demanderesse à recentrer son argumentation. Une
pareille solution pouvait s’inscrire dans le cadre de l’art. 125
CPC car cette disposition n’énumère pas limitativement les
mesures de simplification du procès. Selon la jurisprudence relative
à l’art. 75 al. 1 LTF, les moyens soumis au TF doivent avoir été
autant que possible déjà soulevés devant l’autorité
précédente ; à défaut, ils sont irrecevables. Cette exigence
n’est en l’occurrence pas satisfaite. L’argumentation
développée dans le cadre du recours est nouvelle et elle ne
s’impose pas en raison des motifs du jugement attaqué. La
demanderesse ne paraît pas avoir été empêchée de la soulever
déjà devant le TFB, notamment au stade des débats principaux. Elle
a simplement omis de le faire. Le recours en matière civile se
révèle par conséquence irrecevable dans la mesure où il tend à
la nullité du brevet litigieux (c. 4). La valeur litigieuse est un
des critères de fixation de l’émolument judiciaire à percevoir
par le TFB selon l’art. 31 al. 1 à 3 LTFB. Cette valeur est aussi
l’un des critères de fixation des dépens qu’une partie doit à
une autre partie, le cas échéant, selon les art. 4 et 5 du tarif
prévu par l’art. 33 LTFB. La valeur litigieuse doit être
elle-même estimée conformément à l’art. 91 al. 2 CPC lorsque,
comme en l’espèce, l’action intentée devant le Tribunal ne
porte pas sur le paiement d’une somme d’argent déterminée.
L’issue du litige ne saurait influencer l’estimation litigieuse
et il importe donc peu qu’en définitive le brevet soit
éventuellement jugé nul. Pour le surplus, la valeur économique du
droit d’exclusivité qui est l’enjeu du brevet et de la
contestation est sans aucun doute un critère d’estimation
pertinent. Le TFB exerce un pouvoir d’appréciation. En dépit des
protestations de la demanderesse, il n’appert pas que l’estimation
présentement attaquée procède d’un abus ou d’un excès de ce
pouvoir. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
[NT]