« Responsabilité
de l’organe d’une association » ; responsabilité,
violation des droits de propriété intellectuelle, dommage, preuve
du dommage, faute, fixation du dommage, tarifs des sociétés de
gestion, tarif contraignant pour les tribunaux, obligation d’informer
les sociétés de gestion, estimation de la redevance ; art. 55
al. 3 CC, art. 41 CO, art. 10 LDA, art. 35 LDA, art. 51 al. 1 LDA,
art. 59 al. 3 LDA, art. 62 al. 2 LDA.
Les
organes d’une personne morale sont personnellement responsables de
leurs fautes d’après l’art. 55 al. 3 CC. Tel est le cas lorsque
le comportement de l’organe remplit les conditions d’une norme de
droit matériel concernant la responsabilité. La jurisprudence
rendue sous l’aLDA a retenu que la responsabilité personnelle de
l’organe était engagée vis-à-vis des tiers en cas d’exécution
illicite de musique lors d’une manifestation associative (c.
4.2.2). Lorsqu’un droit de l’auteur selon l’art. 10 al. 1 LDA
est violé, des dommages-intérêts peuvent être demandés selon
l’art. 62 al. 2 LDA, en relation avec l’art. 41 CO. Comme
l’établissement du dommage est fréquemment impossible, la
jurisprudence du TF admet un calcul hypothétique du gain manqué
selon la méthode de l’analogie avec la licence. Le dommage
correspond alors à la redevance hypothétique qui aurait été
convenue par des parties raisonnables à un contrat de licence. On
peut se référer aux tarifs des sociétés de gestion. La méthode
de l’analogie n’est toutefois admissible, selon le TF, que s’il
s’avère qu’un contrat de licence aurait pu être conclu. D’après
l’art. 35 LDA, les artistes interprètes ont une prétention en
paiement lorsque des phonogrammes disponibles sur la marché sont
utilisés, notamment à des fins de représentation. Il s’agit
cependant d’un droit à rémunération légal, qui n’est pas
soumis aux conditions de l’art. 41 CO (c. 5.2.1). D’après l’art.
51 al. 1 LDA et le tarif commun Hb, les organisateurs de
manifestations récréatives avec de la musique doivent renseigner
les sociétés de gestion. Les informations nécessaires sont à
fournir dans les 30 jours, sinon les données peuvent être estimées
par SUISA. En outre, le tarif commun Hb prévoit que la redevance
peut être doublée lorsque la musique est utilisée sans
autorisation ou lorsque l’utilisateur fournit des données fausses
ou lacunaires afin de se procurer un avantage indû. Si l’utilisateur
ne communique toujours pas les informations nécessaires, par écrit,
dans les 30 jours suivant l’estimation, celle-ci est alors
considérée comme reconnue (c. 5.2.2). Les tarifs des sociétés de
gestion sont contraignants pour les tribunaux civils, sauf s’ils
sont contraires à des dispositions légales impératives (c. 5.2.3).
En l’espèce, des exécutions publiques de musique ont eu lieu sans
que l’organisateur n’ait requis d’autorisation. Il y a donc une
violation de l’art. 10 LDA et ainsi une illicéité par rapport au
dommage causé. Le rapport de causalité entre les exécutions
musicales et le dommage existe également. En ce qui concerne la
faute, une personne raisonnable idéale qui organise chaque année
une manifestation réunissant environ 1'000 personnes doit se
préoccuper des exigences réglementaires. Une prolongation de
l’heure normale de fermeture peut ainsi être nécessaire, de même
qu’une patente ou un dispositif de sécurité. En effectuant de
telles recherches, le défendeur aurait constaté l’obligation
d’annoncer la manifestation à la demanderesse et de requérir une
licence. Sa faute doit donc être reconnue (c. 5.3.1.2). Le défendeur
a agi comme organe au sens de l’art. 55 al. 3 CC et a violé l’art.
10 LDA. Le dommage subi par la demanderesse est ainsi intervenu
illicitement et l’exigence du rapport de causalité est remplie. En
outre, le défendeur est en faute car il ne s’est pas suffisamment
préoccupé des aspects réglementaires et n’a pas satisfait aux
exigences de la demanderesse. Il répond ainsi personnellement et
solidairement de la violation du droit d’auteur (c. 5.3.1.3). En
revanche, l’art. 35 LDA prévoit une licence légale et n’est pas
une norme qui justifierait une responsabilité solidaire et
personnelle du défendeur en tant qu’organe. Seule l’association
organisatrice est responsable du paiement de la redevance découlant
du droit à rémunération (c. 5.3.2). Le dommage doit être calculé
selon la méthode de l’analogie avec la licence. Il n’apparaît
pas que le tarif commun Hb soit contraire à la loi. En particulier,
le doublement de la redevance qu’il prévoit en l’absence
d’autorisation a été admis par le TF, comme peine conventionnelle
de droit privé. Puisque le défendeur, en tant qu’organe, a violé
son devoir d’information vis-à-vis de la demanderesse, celle-ci
était en droit de procéder à une estimation. Le tarif prescrit en
outre un supplément de CHF 40.- lorsqu’aucune liste des morceaux
exécutés n’est remise à la demanderesse. Mais seule la moitié
de ce montant peut être ajoutée à la créance en réparation du
dommage pour violation du droit d’auteur, l’autre moitié
concernant la créance basée sur l’art. 35 LDA pour les droits
voisins (c. 5.3.3). [VS]