Disposition

     LDA (RS 231.1)

          Art. 54

14 mai 2012

TAF, 14 mai 2012, B-3896/2011 (d)

medialex 3/2012, p. 173-174 (rés.) « Tarif commun 3a, chambres d’hôtels et d’hôpitaux, logements de vacances » ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarif commun 3a, pouvoir de cognition, autonomie des sociétés de gestion, compétence matérielle, surveillance des sociétés de gestion par l’IPI, divertissement de fond ou d’ambiance ; art. 49 PA, art. 46 LDA, art. 53 LDA, art. 54 LDA, art. 55 LDA ; cf. N 609 (TF, 13 novembre 2012, 2C_580/2012 ; sic! 3/2013, p. 154-157, « GT 3a » ; medialex 1/2013, p. 49-50 ; arrêt du TF dans cette affaire).

La surveillance exercée par l'IPI sur la gestion des sociétés doit être distinguée de la surveillance des tarifs par la CAF. D'après l'art. 55 al. 1 LDA, cette dernière est compétente pour approuver les tarifs. Elle ne peut donc vérifier le respect des obligations des sociétés de gestion que dans le cadre d'une procédure d'approbation tarifaire. Si une société réclame des redevances sans être au bénéfice d'un tarif approuvé par la CAF, cette violation de l'art. 46 LDA (al. 1 et 3) ne relève pas de la compétence d'approbation de la CAF, mais de la surveillance de la gestion incombant à l'IPI (c. 2.2). En matière tarifaire, la cognition du TAF n'est pas limitée. Il fait toutefois preuve d'une certaine retenue lorsque la CAF, en tant qu'autorité spécialisée, a examiné des questions complexes de droit de la gestion collective, lorsqu'elle a soupesé les intérêts en présence ou lorsqu'elle a sauvegardé l'autonomie tarifaire des sociétés de gestion. Pour cette raison, le TAF n'examine en principe des formulations tarifaires qu'avec un effet cassatoire. Il ne peut les modifier lui-même qu'exceptionnellement (c. 2.2). L'obligation de l'IPI d'impartir à une société de gestion un délai convenable pour régulariser la situation, avant de prendre d'autres mesures, ne vaut que si la société de gestion s'abstient d'agir conformément à ses obligations, pas si elle agit d'une manière contraire à la loi. Dans ce dernier cas, l'IPI peut prononcer une interdiction d'agir sans impartir de délai préalable (c. 4.2). Dans les chambres d'hôtels ou d'hôpitaux, de même que dans les logements de vacances, la réception d'émissions de radio ou de télévision est au premier plan. On ne peut donc pas parler de divertissement de fond ou d'ambiance au sens du Tarif commun 3a (c. 5.3). [VS]

07 mai 2018

TAF, 7 mai 2018, B-5220/2014 (d)

« ProLitteris » ; gestion économique, société de gestion, qualité pour recourir, intérêt digne de protection, action en constatation, droit d’être entendu,  réparation de la violation du droit d’être entendu, principe de la proportionnalité, surveillance des sociétés de gestion par l’IPI ; art. 29 al. 2 Cst, art. 25 al. 2 PA, art. 48 al. 1 lit. c PA, art. 45 LDA, art. 50 LDA, art. 54 LDA.

ProLitteris demande l’annulation d’une décision de l’IPI lui enjoignant de réclamer à trois anciens directeurs le remboursement des parts de l’employé sur des versements complémentaires effectués à des fins de prévoyance professionnelle. La société de gestion a un intérêt digne de protection à recourir, car elle sauvegarde son autonomie privée ; en revanche, il n’existe pas un tel intérêt au niveau pécuniaire, puisque l’exécution de la décision attaquée placerait la recourante dans une meilleure situation financière que son annulation (c. 1.2). Des conclusions en constatation de la licéité des versements litigieux ne sont pas recevables, vu que l’intérêt digne de protection de la recourante est déjà sauvegardé par les conclusions en annulation (c. 1.3). Une lettre précédente de l’IPI, par laquelle il avait considéré comme licites les paiements disputés, doit aussi être qualifiée de décision (c. 2.4.1). Cette dernière, de même que l’approbation du rapport annuel 2012 par l’IPI, se basaient toutefois sur des informations incomplètes (c. 2.4.3). Au surplus, elle n’est pas la cause des versements. La recourante ne peut donc pas invoquer la protection de sa bonne foi (c. 2.4.4). Elle ne prouve pas que le remboursement ordonné serait impossible à exécuter (c. 2.4.5). Une pesée des intérêts ne joue pas non plus en sa faveur : elle est certes une société privée, mais elle accomplit des tâches d’intérêt public, ce qui explique le contrôle de la Confédération. D’après l’art. 45 al. 1 et 3 LDA, elle doit administrer ses affaires selon les règles d’une gestion saine et économique et ne doit pas viser de but lucratif, ce qui optimise la rémunération des ayants droit. L’intérêt de ceux-ci a une importance particulière et l’emporte sur celui de la recourante ou de ses trois anciens directeurs (c. 2.4.7). La recourante a eu suffisamment l’occasion de s’exprimer sur les circonstances de l’affaire, mais elle n’a pas été transparente. Le rapport du Contrôle fédéral des finances, sur lequel se base la décision attaquée, ne repose pas sur des éléments inconnus de la recourante. Par conséquent, l’IPI n’était pas obligé de lui donner une nouvelle fois l’occasion de prendre position sur l’appréciation juridique des faits. Mais même s’il y avait eu une violation du droit d’être entendu, celle-ci aurait été réparée dans le cadre de la procédure de recours (c. 3.3.1). Un délai convenable pour régulariser la situation illicite a été imparti à la recourante, conformément à l’art. 54 al. 1 LDA. Elle n’avait pas droit à un avertissement préalable informel, vu que l’IPI était déjà intervenu à plusieurs reprises, vu qu’elle était tenue de renseigner l’autorité de surveillance d’après l’art. 50 LDA et vu qu’un tel avertissement informel n’est pas prévu par la loi. Sur la base des informations limitées données par la recourante, l’IPI pouvait considérer qu’un avertissement informel ne suffirait pas pour rétablir la légalité. Les mesures prises respectent donc le principe de la proportionnalité (c. 3.3.2). La décision attaquée a été suffisamment motivée (c. 3.3.3). Quant au fond, l’ubiquité des œuvres, le nombre d’utilisateurs et d’utilisations, de même que le progrès technique contraignent les auteurs à recourir à une société de gestion collective. Celle-ci agit comme intermédiaire entre les ayants droit et les utilisateurs, sur la base de tarifs négociés approuvés par la CAF (c. 4.2.1). La société répartit les redevances perçues en se fondant sur un règlement approuvé par l’IPI, selon les prescriptions de l’art. 49 LDA (c. 4.2.2). Les règles de l’art. 45 LDA protègent les ayants droit et les utilisateurs. Les sociétés de gestion agissent à titre fiduciaire et, pour cette raison, elles sont tenues d’administrer leurs affaires selon les règles d’une gestion saine et économique, ce qui implique de renoncer à tout arbitraire, de procéder selon des règles fixes et de minimiser les frais de gestion. L’obligation d’agir selon des règles déterminées et selon le principe d’égalité de traitement a pour corollaire d’exercer les tâches de manière transparente et prévisible. De là découle le devoir d’établir des règles de répartition et des tarifs. Si les sociétés de gestion ont l’interdiction de viser un but lucratif, c’est parce qu’elles sont au service des ayants droit originaires et qu’elles doivent leur reverser tout l’argent perçu, après couverture des frais. Enfin, l’obligation de conclure des contrats de représentation réciproque selon l’art. 45 al. 4 LDA a pour but d’offrir aux ayant droit suisses une gestion simple de leurs droits à l’étranger (c. 4.2.3). Le contrôle de la Confédération sur les sociétés de gestion concerne d’une part les tarifs, d’autre part la conduite des affaires. Le premier est exercé par la CAF et porte sur les rapports externes de la société avec les utilisateurs, le second est du ressort de l’IPI et concerne avant tout les relations internes de la société avec ses membres (c. 4.2.5). La surveillance de la CAF s’étend à l’équité du tarif, mais l’autorité reconnaît une certaine liberté de disposition et une certaine autonomie aux sociétés de gestion. En revanche, le contrôle de l’IPI est limité à la légalité (c. 4.2.6). L’abus, l’excès ou le non-exercice du pouvoir d’appréciation relèvent du contrôle de la légalité (c. 4.2.7). Avec la révision totale de la LDA en 1989, la surveillance de l’Etat sur les sociétés de gestion a été renforcée (c. 4.3.1). Elle doit assurer la protection des ayants droit et des utilisateurs et une gestion des droits efficiente ; mais au surplus, l’autonomie privée des sociétés doit être préservée (c. 4.3.2). L’ampleur des coûts totaux de gestion ne dit encore rien sur le respect de l’obligation d’agir économiquement selon l’art. 45 al. 1 LDA. C’est la finalité des moyens investis qui doit être conforme aux normes légales. Si ce n'est pas le cas, la gestion ne saurait être économique au sens de l’art. 45 al. 1 LDA. En l’espèce, les versements litigieux aux anciens directeurs ne peuvent être justifiés par une clause statutaire tolérant des frais administratifs allant jusqu’à un quart des recettes perçues. En effet, il est douteux que l’IPI ait approuvé cette clause, qui ne figure pas dans le règlement de répartition. La question peut toutefois rester ouverte : lesdits versements ont été effectués dans le seul intérêt des trois anciens directeurs, ce qui n’est pas conforme au but des normes réglant la gestion collective et n’est donc pas économique (c. 4.3.3). Le fait que la recourante soit une coopérative n’y change rien : son autonomie privée n’existe que dans le cadre des dispositions légales. Même s’il était usuel, dans l’économie privée, que l’employeur prenne à sa charge les parts de cotisations sociales dues par ses cadres, cela ne serait pas compatible avec la situation particulière de la recourante et les tâches publiques qu’elle accomplit (c. 4.3.4). Le respect de la gestion saine et économique est d’autant plus important que la recourante est en position de monopole, ce qui empêche les ayants droit de mandater une autre entité (c. 4.3.5). Les anciens directeurs sont eux-mêmes responsables de la couverture de prévoyance professionnelle insuffisante qu’ils ont tolérée pendant 20 ans. Par les versements complémentaires subséquents, ils sont mieux traités que si la couverture avait été adéquate dès le départ. La recourante ne prouve pas les raisons qui auraient justifié une prise en charge par l’employeur des parts de cotisations dues par l’employé. L’IPI devait intervenir d’office vu que la gestion n’a pas été saine et économique (c. 4.3.6). Les mécanismes de contrôle interne de la recourante n’étaient pas suffisants, car le Conseil d’administration avait lui-même décidé des versements litigieux. De plus, l’Assemblée générale n’a pas été informée de manière transparente et l’organe de contrôle n’avait pas à vérifier ces versements. Enfin, le cercle des ayants droit protégés par l’art. 45 LDA est plus large que celui des seuls membres de la recourante (c. 4.3.7). Il y a en l’espèce une faute qualifiée dans l’exercice du pouvoir d’appréciation, qui devait être sanctionnée par l’IPI dans le cadre de son contrôle de la légalité des actes de gestion (c. 4.3.9). [VS]

04 septembre 2013

TAF, 4 septembre 2013, B-6104/2012 (d)

sic! 3/2014, p. 144-149, « Ausserordentliche Zuwendung an Fürsorge-Stiftung » ; gestion collective, rapport annuel d’activité, ProLitteris, Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle, surveillance des sociétés de gestion par l’IPI, décision, pouvoir de cognition, versement extraordinaire, Fondation sociale en faveur des auteurs et des éditeurs de ProLitteris, principes de gestion, compétences de l’assemblée générale, compétences du conseil d’administration, statuts de ProLitteris ; art. 47 al. 1 lit. b PA, art. 48 al. 1 lit. a PA, art. 883 CO, art. 48 al. 2 LDA, art. 52 LDA, art. 53 al. 1 LDA, art. 54 al. 1 LDA, art. 74 al. 1 LDA.

La décision de l'IPI, en tant qu'autorité de surveillance, de refuser le rapport annuel d'activité de ProLitteris est une décision qui peut faire l'objet d'un recours au TAF (c. 1.1). Dans ce domaine, le pouvoir de cognition du TAF n'est pas plus étendu que celui de l'autorité de surveillance. Le TAF doit faire preuve de retenue dans l'évaluation de questions complexes de gestion des droits d'auteur (c. 3.2). Dans le cadre de la clé de répartition de l'art. 48 al. 2 LDA, le produit de la dissolution d'une provision sur les revenus de la taxe sur la valeur ajoutée doit être traité comme un revenu de l'exploitation des droits d'auteurs (c. 4.2). Le ch. 7.3.6 des statuts de ProLitteris ne fixe pas une limite absolue de 10 % en ce qui concerne la quote-part des versements à la Fondation sociale en faveur des auteurs et des éditeurs de ProLitteris, dans le sens d'une autolimitation de l'assemblée générale, qui s'opposerait au versement extraordinaire contesté (c. 4.2.2). Le versement extraordinaire à la Fondation sociale en faveur des auteurs et des éditeurs de ProLitteris ne viole pas le ch. 7.3.6 des statuts de ProLitteris (c. 4.2.3). Les exigences des art. 48 al. 2 LDA et 883 CO n'ont pas été respectées par le conseil d'administration de ProLitteris. Celui-ci n'a pas suffisamment informé les membres de l'assemblée générale de leur pouvoir de décision concernant le versement extraordinaire à la Fondation sociale en faveur des auteurs et des éditeurs de ProLitteris. Le conseil d'administration a, bien plus, créé l'impression qu'il s'agissait seulement d'avaliser une décision qui lui revenait. Le recours est rejeté (c. 5.5). Le présent recours parvient à la même conclusion que l'autorité inférieure, mais pour d'autres motifs. Il convient donc de modifier la décision attaquée sans que cela emporte l'admission, même partielle, du recours (c. 6). [AC]