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  • Harry Potter

17 août 2010

KG SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 (d)

sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) » ; droits conférés par la marque, marque de haute renommée, Harry Potter, nom de personne, motifs absolus d’exclusion, réputation, signes similaires, préservatif, signe contraire aux bonnes moeurs, action en radiation d’une marque, concurrence déloyale ; art. 2 LPM, art. 2 lit. d LPM, art. 15 LPM, art. 3 lit. e LCD.

Rien ne s'oppose (en particulier pas des motifs absolus d'exclusion au sens de l'art. 2 LPM) à l'enregistrement comme marque du nom d'un personnage de fiction tel que Harry Potter pour une liste étendue de produits (appartenant en l'espèce aux classes 9, 14, 16, 21, 24, 25, 28 et 41) (c. 7.a.aa-7.a.bb). Peu importe à cet égard que le nom Harry Potter ne soit connu du public qu'en lien avec des romans et des films (c. 7.a.bb). Le signe « HARRY POTTER » peut donc être enregistré comme marque (c. 7.a.bb in fine). Pour que la marque « HARRY POTTER » soit de haute renommée (art. 15 LPM), il suffit que le personnage Harry Potter soit célèbre; peu importe que les produits « HARRY POTTER » ne le soient pas (c. 7.b.aa). La marque « HARRY POTTER » est clairement célèbre, car elle jouit d'un taux élevé de reconnaissance auprès du public suisse, bénéficie d'une haute estime et a un caractère (absolument) unique (c. 7.b.cc). Vu la très grande similitude entre les signes sur les plans visuel et sonore, l'usage de la marque « HARRY POPPER (fig.) » (enregistrée pour des préservatifs [classe 10]) menace le caractère distinctif de la marque « HARRY POTTER », de sorte que la titulaire de la marque « HARRY POTTER » peut interdire à la défenderesse l'usage du signe « HARRY POPPER (fig.) » (c. 7.c.bb). L'usage du signe « HARRY POPPER (fig.) » exploite par ailleurs la réputation de la marque « HARRY POTTER » (c. 7.d.bb). Peut rester ouverte la question de l'atteinte à la réputation de la marque « HARRY POTTER » (c. 7.e). La demanderesse n'a pas demandé tardivement l'interdiction de l'usage du signe « HARRY POPPER (fig.) » (c. 7.f.bb). La marque « HARRY POPPER (fig.) » est nulle et doit être radiée par l'IPI (c. 8.a-8.b). Peut rester ouverte la question de savoir si le signe « HARRY POPPER (fig.) » est contraire aux bonnes mœurs (art. 2 lit. d LPM) (c. 9). L'usage du signe « HARRY POPPER (fig.) » est par ailleurs déloyal au sens de l'art. 3 lit. e LCD (c. 10.b.cc).

Harry Popper (fig.)
Harry Popper (fig.)

29 mai 2019

TF, 29 mai 2018, 4A_12/2018 (d)

Harry Potter, préservatif, produits pornographiques, marque combinée, remise du gain, fourniture de renseignements, jugement partiel, action échelonnée, obligation de renseigner, intérêt digne de protection, fardeau de la preuve, fardeau de l’allégation, appréciation des preuves, arbitraire, maxime des débats, participation à l’administration des preuves, droit d’être entendu ; art. 9 Cst., art. 29 al. 2 Cst., art. 8 CC, art. 42 al. 2 CO, art. 55 CPC, art. 59 al. 2 lit. a CPC, art. 164 CPC ; cf. N415 (vol. 2007-2011 ; KGSZ, 17 août 2010, ZH 2008 19 ; sic ! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) ») ; N900 (TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 ; sic ! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II ») et N902 (TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014).

Selon l’art. 42 al. 2 CO, le dommage qui ne peut pas être exactement établi doit être déterminé par le Juge équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par le lésé. Hormis dans le cas rare de la prise en compte des principes abstraits déduits de l’expérience, cette détermination équitable du dommage se base sur une appréciation de l’état de fait et relève ainsi de la détermination des faits qui n’est revue par le TF qu’en cas d’arbitraire. Il incombe au Juge dans le cadre d’un exercice correct de sa liberté d’appréciation de faire la lumière sur les critères de décision dont il envisage de tenir compte, respectivement sur ceux pour lesquels il a besoin d’informations complémentaires. La latitude donnée au Juge de considérer le dommage comme établi sur la base d’une simple estimation n’a pas pour but d’exonérer le demandeur de manière générale du fardeau de la preuve, ni non plus de lui conférer la possibilité d’élever des prétentions en dommages et intérêts de n’importe quelle hauteur sans avoir à fournir de plus amples indications. Bien au contraire, l’application de cette disposition ne le dispense pas d’alléguer, dans toute la mesure possible et exigible, toutes les circonstances qui constituent un indice de l’existence d’un dommage et en permettent la détermination. L’art. 42 al. 2 CO ne libère pas le demandeur de son obligation d’étayer sa réclamation. Les circonstances alléguées doivent être de nature à justifier suffisamment l’existence d’un dommage, ainsi qu’à en rendre l’ordre de grandeur saisissable. Cela vaut aussi en cas de réclamation de la remise du gain en ce qui concerne les circonstances que la partie chargée du fardeau de la preuve souhaite invoquer concernant la réalisation d’un gain, respectivement sa diminution. Un établissement exact des faits ne doit cependant pas être exigé dans les cas où l’art. 42 al. 2 CO s’applique, dans la mesure où l’allégement du fardeau de la preuve consacré en faveur du demandeur par cette disposition comporte aussi une limitation du fardeau de l’allégation et de l’étayement des faits (« Substanziierung ») (c. 3.1). Du moment qu’en dépit de l’obligation qui découlait pour elle du jugement partiel précédent, la recourante refusait de communiquer à l’autre partie les informations nécessaires pour établir le montant du gain que cette dernière ne pouvait pas fournir, l’instance cantonale n’a pas violé le droit fédéral en fixant le gain dans le cadre d’une application par analogie de l’art. 42 al. 2 CO et en le déterminant en fonction de l’ensemble des circonstances. Il n’est pas nécessaire pour permettre de recourir à une telle application par analogie de l’art. 42 al. 2 CO de se trouver en présence d’un refus injustifié de collaborer au sens de l’art. 164 CPC (c. 3.5). Le respect du droit d’être entendu au sens de l’art. 29 al. 2 Cst. implique que le tribunal entende, examine et prenne en compte dans son processus décisionnel les éléments avancés par celui que la décision atteint dans ses droits. Le jugement doit être motivé pour que les parties puissent se faire une idée des considérants du tribunal. La motivation doit mentionner de manière succincte les considérations qui ont guidé le tribunal et sur lesquelles il fonde son jugement. Il n’est par contre pas nécessaire que la décision passe en revue de manière détaillée et réfute chacun des arguments soulevés par les parties. Il suffit que le jugement soit motivé de telle sorte qu’il puisse, le cas échéant, être contesté de manière adéquate. Le fait qu’une autre solution ait pu entrer en ligne de compte ou même être préférable n’est pas déjà constitutif d’arbitraire. Tel n’est le cas que lorsque le jugement attaqué est manifestement insoutenable, en contradiction claire avec la situation de fait, viole crassement une norme ou un principe de droit incontesté ou contrevient d’une manière choquante aux principes de la justice (c. 4.1). [NT]