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05 décembre 2014

HG ZH, 5 décembre 2014, HG060392 (d)

sic! 5/2015 p. 316-323, « Oscar » ; motifs relatifs d’exclusion, risque de confusion admis, force distinctive, force distinctive faible, reprise d’une marque antérieure, similarité des signes, similarité des produits ou services, signe descriptif, signe libre, dilution de la force distinctive, usage de la marque, usage sérieux, territoire suisse, marque étrangère, péremption, bonne foi, abus de droit, priorité, action échelonnée, action en interdiction, action en fourniture de renseignements, jugement partiel, Oscar, télévision, mode, vin, divertissement, allemand, italien, Tessin, Italie, États-Unis ; art. 2 al. 2 CC, art. 2 lit. a LPM, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 11 al. 1 LPM, art. 11 al. 3 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 14 al. 1 LPM, art. 55 al. 1 LPM.

La plaignante, une société américaine, est titulaire de la marque « OSCAR » et organise chaque année la cérémonie des Oscars du cinéma « Academy Awards ». La défenderesse exploite les chaînes de télévision RAI. La plaignante lui reproche d’avoir permis la diffusion sur le territoire suisse des émissions de divertissement « Oscar del Vino », « La Kore Oscar della Moda » et « Oscar TV », dans lesquelles des prix sont remis dans les domaines du vin, de la mode et de la télévision. La défenderesse allègue la péremption des prétentions de la demanderesse. La péremption d’une action, qui découle du principe de la bonne foi de l’art. 2 CC, n’est admise qu’à des conditions restrictives. À lui seul, l’écoulement du temps ne peut fonder l’abus de droit. Il faut en plus, en principe, que le titulaire des droits ait connaissance de la violation de ses droits, qu’il n’entreprenne rien pour les faire respecter et que le contrevenant ne puisse attribuer cette passivité à une ignorance. Lorsque le titulaire des droits, en usant de l’attention commandée par les circonstances, aurait pu se rendre compte de la violation de ses droits et agir plus tôt, on peut parfois admettre que le contrevenant ait pu conclure de bonne foi à l’existence d’une tolérance. La durée nécessaire pour admettre une péremption dépend des circonstances du cas d’espèce. La jurisprudence oscille entre des durées de quatre à huit ans (c. 3.3.3). En l’espèce, même si on devait admettre, comme le prétend la défenderesse, que la plaignante a pris connaissance en 2003 de la diffusion des émissions litigieuses en Suisse, le dépôt de la plainte, survenu dans les trois ans, constitue une réaction suffisamment rapide, d’autant plus que les émissions en cause ne sont diffusées qu’une fois par an. Par ailleurs, on ne peut conclure à une méconnaissance négligente de la plaignante, car on ne peut attendre d’une société américaine qu’elle surveille de façon permanente et continue toutes les émissions diffusées en Europe. Ce d’autant plus qu’il s’agit en l’espèce d’émissions diffusées en Suisse, une fois par année, par une société italienne (c. 3.3.4). Les prétentions de la demanderesse ne sont donc pas périmées (c. 3.3.5). Il est de notoriété publique que la plaignante est l’organisatrice de la cérémonie annuelle de remise des Oscars, diffusée en Suisse avec son accord par des chaînes de langue allemande, et faisant l’objet de reportages dans les médias suisses. Pour le consommateur suisse moyen, la marque « Oscar » est immédiatement reconnaissable comme un signe distinctif de la plaignante. La marque est donc utilisée. En relation avec les services protégés de divertissement, y compris de distribution de prix, l’usage, par la diffusion télévisuelle en Suisse, effectuée par un tiers avec le consentement de la plaignante, doit être qualifié de sérieux. Le fait que la cérémonie soit organisée à l’étranger n’y change rien (c. 3.5.4). La défenderesse allègue une dégénérescence de la marque. Puisque la cérémonie est diffusée sur tout le territoire suisse, une dégénérescence ne peut être admise que si elle s’opère sur tout le territoire. Tel n’est pas le cas en suisse allemande, où il est notoire que le terme « Oscar » ne représente pas un synonyme de « remise de prix », de « prix » ou de « distinction ». En lien avec des remises de prix, le terme « Oscar » est directement associé par le citoyen moyen ou par le téléspectateur moyen à la cérémonie annuelle des Oscars et aux statuettes qui y sont remises. Le fait que ce terme soit parfois utilisé en relation avec des remises de prix d’autres organisateurs n’y change rien (c. 3.6.3.2). Le signe « Oscar » possède une force distinctive en Suisse pour les services protégés en classe 41 de divertissement, y compris la distribution de prix pour des performances méritoires. Les téléspectateurs suisses rattachent directement les « Oscars » aux prix offerts par la plaignante. On ne saurait admettre qu’il s’agit d’une marque faible. Les exemples italiens fournis par la défenderesse pour invoquer une dilution sont dénués de pertinence en droit suisse, d’autant plus qu’il ne faut pas prendre en compte que l’utilisation du terme « Oscar » en langue italienne, mais aussi l’utilisation Suisse alémanique qui en est faite (c. 3.6.4.2). Les signes en cause sont similaires. Les ajouts « del Vino », « La Kore [...] della Moda » et «TV» sont descriptifs des domaines du vin, de la mode et de la télévision et ne permettent pas de distinguer suffisamment ces signes de la marque de la plaignante. Les services sont eux aussi similaires, et le risque de confusion doit être admis (c. 3.6.4.3). Un droit de continuer l’usage présuppose un lien direct avec la Suisse, impliquant une couverture du marché suisse. La présence sur le marché n’est pas suffisante lorsque les prestations sont rendues accessibles au consommateur final plus par hasard que d’une manière contrôlée. Le fait que les émissions aient pu être captées dans certaines parties du Tessin ne constitue pas un usage du signe en Suisse (c. 3.7.4). Par l’usage du signe « Oscar » dans les trois émissions en cause, la défenderesse a donc violé les droits à la marque de la plaignante (c. 3.8). Le tribunal fait droit aux conclusions en cessation (c. 4.1.4) et, dans le cadre d’une action échelonnée, en fourniture de renseignements (c. 4.3.7). [SR]

10 décembre 2013

OG AR, 10 décembre 2013, D2Z 12 2 (d)

sic! 10/2014, p. 632-634, « Axxeva / Adexxa » ; droits conférés par la marque, droit absolu, raison de commerce, but social, droit de la personnalité, concurrence déloyale, risque de confusion admis, principe de la spécialité, similarité des produits ou services, jugement partiel, action échelonnée, nom de domaine, clientèle, placement de personnel, marque verbale, mesures provisionnelles ; art. 956 al. 2 CO, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 13 al. 1 LPM, art. 13 al. 2 lit. c LPM, art. 13 al. 2 lit. e LPM, art. 55 al. 1 lit. a LPM, art. 55 al. 1 lit. b LPM, art. 85 CPC.

La plaignante, « Axxeva Services AG », qui a pour but d’opérer du placement de personnel, de la location de services et de fournir des services commerciaux, est titulaire de la marque verbale « Axxeva », enregistrée dans les classes 35, 41 et 42. Elle reproche notamment à la défenderesse, qui a temporairement utilisé la raison de commerce « Adexxa Services AG » et a des buts sociaux similaires, une atteinte à sa marque et à sa raison de commerce. La défenderesse a expressément reconnu qu’il existe un risque de confusion entre les deux raisons de commerce. En outre, le juge unique de l’Obergericht AR a octroyé des mesures provisionnelles à la plaignante, fondées sur le droit des marques (ERZ 12 58). Comme la notion de risque de confusion s’apprécie de manière similaire dans les différents domaines du droit des signes distinctifs, et du fait de la concession opérée par la défenderesse, le tribunal se limite, quant à l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion entre les signes « AXXEVA » et « ADEXXA », à renvoyer aux considérants du jugement rendu en matière de mesures provisionnelles, desquels il découle que l’existence d’un risque de confusion entre les deux raisons de commerce est manifeste. L’action en cessation fondée sur l’art. 956 al. 2 CO est admise et le tribunal interdit à la défenderesse d’utiliser la raison de commerce « Adexxa Services AG » en Suisse (c. 2.1). Les droits exclusifs conférés par l’art. 13 LPM incluent l’emploi de la marque en tant que nom, raison de commerce, enseigne, dénomination commerciale ou nom de domaine. En se référant aux considérants du jugement précité, le tribunal admet qu’il existe un risque de confusion entre la marque enregistrée « AXXEVA » et le signe « ADDEXA » utilisé par la défenderesse. Les demandes fondées sur l’art. 55 al. 1 lit. a et b LPM sont admises (c. 2.2). Par contre, la demanderesse ne peut exiger qu’il soit interdit à la défenderesse d’utiliser des noms de domaines de manière générale. L’utilisation d’un nom de domaine ne peut être interdite qu’en relation avec les biens et services pour lesquels la marque est protégée (c. 2.3). L’action échelonnée suppose l’existence d’une prétention de droit matériel en fourniture de renseignements, qui existe en l’espèce (c. 2.5). [SR]

25 août 2015

TFB, 25 août 2015, O2013_008 (d)

Conditions de la protection du brevet, nouveauté, non-évidence, homme de métier, état de la technique, violation d’un brevet, contrefaçon, brevet européen, décision étrangère, action échelonnée, jugement partiel, action en cessation, action en fourniture de renseignements, action en dommages-intérêts, action en remise du gain, dommage, pistolet de pulvérisation ; art. 66 lit. a LBI, art. 66 lit. b LBI, art. 85 CPC.

La défenderesse, accusée par la plaignante d’avoir violé le brevet européen qu’elle détient sur un pistolet de pulvérisation, allègue un défaut de nouveauté par rapport à deux brevets existants. Le TFB rejette cet argument, et cite une décision concordante du Bundespatentgericht allemand (c. 4.3). La défenderesse allègue également une absence d’activité inventive par rapport au premier des deux brevets cités, l’invention découlant d’une manière évidente de l’état de la technique, qu’elle exemplifie en citant plusieurs autres brevets. Le TFB considère, contrairement au Bundespatentgericht allemand, que les documents cités ne rendent pas l’invention litigieuse évidente pour l’homme du métier (c. 4.4). L’objet réalisé par la défenderesse remplissant toutes les caractéristiques de la première revendication de la plaignante, il constitue une contrefaçon de l’invention brevetée au sens de l’art. 66 lit. a LBI (c. 4.5). La demanderesse prend des conclusions en cessation du trouble, en fourniture de renseignements et en reddition de comptes. Elle conclut en outre à ce qu’il lui soit donné la possibilité, dans une deuxième étape, d’établir et de chiffrer son dommage ou le gain dont elle pourrait demander la délivrance, sans, à ce stade de la procédure, prendre de conclusions chiffrées ou chercher à établir que les conditions d’une action en dommages-intérêts ou en délivrance du gain seraient remplies (c. 5.1). L’action échelonnée suppose l’existence d’une prétention de droit matériel en fourniture de renseignements et en reddition de comptes (c. 5.3). Le TFB considère qu’une telle prétention de droit matériel découle de l’art. 66 lit. b LBI (c. 5.4). Il fait donc droit aux conclusions en cessation et à celles en fourniture de renseignements et en reddition de comptes (c. 5.5). Et puisque la demanderesse a requis et obtenu que la procédure soit suspendue en ce qui concerne les actions pécuniaires jusqu’à droit connu sur l’existence d’une violation et sur l’action en fourniture de renseignements et en reddition de comptes, on ne peut pas lui faire grief de n’avoir pas allégué et établi que les conditions d’une action en dommages-intérêts ou en délivrance du gain seraient remplies (c. 5.6). [SR]

27 juin 2007

TF, 27 juin 2007, 4A_116/2007 (d)

ATF 133 III 490 ; sic ! 11/2007, p. 824-829, « Turbinenfuss (3D) » ; JdT 2008 I 393 ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe tridimensionnel, produit industriel, turbine, spécialiste, force distinctive, provenance commerciale, droit d’être entendu, jugement constitutif, frais de procédure, effet suspensif, cause à caractère pécuniaire, valeur litigieuse, estimation ; art. 29 al. 2 Cst., art. 51 al. 2 LTF, art. 72 al. 2 lit. b ch. 2 LTF, art. 74 al. 1 lit. b LTF, art. 103 LTF, art. 105 al. 2 LTF, art. 106 al. 2 LTF, art. 2 lit. a LPM ; cf. N 176 (arrêt du TAF dans cette affaire).

La décision attaquée, qui porte sur l'enregistrement d'une marque, ne peut pas être qualifiée de jugement constitutif au sens de l'art. 103 al. 2 lit. a LTF. C'est donc à raison que, sur la base de l'art. 103 al. 3 LTF, la recourante demande (en ce qui concerne les frais) que l'effet suspensif soit accordé (c. 2). Le recours en matière civile contre une décision d'enregistrement de marque (art. 72 al. 2 lit. b ch. 2 LTF) est une affaire pécuniaire et est ainsi soumis par l'art. 74 al. 1 lit. b LTF à une valeur litigieuse minimale de 30 000 francs (c. 3.1-3.2). Vu l'expérience pratique, dans une affaire relative à un signe de peu d'importance, il convient en principe d'estimer (art. 51 al. 2 LTF) la valeur litigieuse à un montant situé entre 50 000 et 100 000 francs. (c. 3.3). En l'espèce, vu la complexité des produits industriels en cause, la dimension internationale de l'entreprise et le fait que le signe est déjà utilisé, la valeur litigieuse doit être arrêtée à 100 000 francs, ce qui rend le recours recevable (c. 3.4). La recourante ne motive pas (art. 106 al. 2 LTF) en quoi l'instance inférieure a violé son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.) (c. 5.1) et relève que les actes d'instruction contestés sont inutiles et non pertinents, de sorte qu'une rectification des faits (art. 105 al. 2 LTF) est exclue (c. 5.2). Un signe tridimensionnel appartient au domaine public (art. 2 lit. a LPM) s'il ne s'écarte pas de ce qui est usuel et attendu et ne reste ainsi pas ancré dans le souvenir du consommateur. L'originalité d'un tel signe est à déterminer sur la base d'une comparaison entre ce signe et les formes habituelles du segment concerné du marché (c. 6.1). Le cercle des destinataires d'un produit ne se compose que des personnes auxquelles le produit est effectivement destiné. En l'occurrence, des composants de turbines (classe 7) ne sont destinés qu'à des spécialistes du domaine des turbines (c. 6.2-6.3). Ces spécialistes reconnaissent spontanément la forme de sapin du signe en cause comme l'une des formes les plus courantes d'un pied d'aube. Le signe est donc descriptif des marchandises auxquelles il est destiné, tant comme marque tridimensionnelle au sens strict que comme marque tridimensionnelle au sens large (c. 6.3). Les quelques particularités — mineures — du signe ne sont pas originales et inattendues au point d'en faire un signe distinctif de l'entreprise de la recourante (c. 6.4). Le signe « Turbinenfuss (3D) » appartient donc au domaine public (c. 6.5).

Fig. 33 – Turbinenfuss (3D)
Fig. 33 – Turbinenfuss (3D)

02 mai 2017

TF, 2 mai 2017, 4A_565/2016 (f)  

Design, montres, cadran, décision finale, jugement partiel, impression générale, élément caractéristique essentiel, caractère techniquement nécessaire, imitation, similarité des designs, souvenir à court terme, liberté de création, couleurs, expertise privée, étendue de la protection ; art. 90 LTF, art. 2 al. 2 LDes, art. 2 al. 3 LDes, art. 4 lit. c LDes, art. 8 LDes, art. 9 lit. e ODes, art. 3 al. 1 lit. d LCD.  

Une décision intitulée « jugement séparé » constitue une décision finale au sens de l’art. 90 LTF lorsqu’elle met un terme à l’ensemble de la procédure (in casu : rejet intégral tant de la demande que de la demande reconventionnelle) (c. 1.2). L’art. 8 LDes prévoit que la protection d’un design enregistré s’étend aux designs qui présentent les mêmes caractéristiques essentielles et qui, de ce fait, produisent la même impression générale. Les critères de cette disposition peuvent être comparés à ceux utilisés pour établir le caractère d’originalité exigé par l’art. 2 al. 3 LDes (c. 3). Concrètement, le juge doit comparer le design enregistré par le demandeur au design suspecté d’être une imitation tel qu’il est utilisé dans le commerce par le défendeur. Dans un premier temps, le juge doit déterminer les caractéristiques essentielles de chacun de ces designs. Dans un deuxième temps, il lui incombe d’effectuer la comparaison à proprement parler, soit d’examiner si la prétendue imitation présente ou non les mêmes caractéristiques essentielles que le design enregistré et si elle produit, de ce fait, la même impression générale (c. 3.1). Le design est la forme du produit (dans le sens où elle révèle l’apparence de celui-ci) et non pas le produit lui-même. Il s’agit donc de comparer la prétendue imitation avec le design qui fait l’objet de l’enregistrement, c’est-à-dire exclusivement sur la base des représentations ou illustrations figurant au registre (cf. art. 9 lit. e ODes) et non sur la base des modèles effectivement commercialisés par le titulaire de l’enregistrement (c. 3.2). Un design susceptible de revêtir différentes positions doit être déposé puis enregistré dans une position déterminée. Comme il s’agit de se fonder sur ce qui est visible, il est exclu de tenir compte des concepts sous-tendant le design. De même, l’activité créatrice à l’origine du design, le style sous-jacent, le processus de fabrication ou les principes techniques ne peuvent être pris en considération. La valeur du produit n’étant pas un élément du design, la gamme de prix dans laquelle s’insère le produit ne joue aucun rôle au moment de déterminer l’impression générale (c. 3.2). L’impression générale qui se dégage d’un design doit être déterminée en fonction des caractéristiques essentielles du design (soit les éléments qui lui confèrent son empreinte caractéristique), et non sur la base de points de détail. Font partie de ces caractéristiques essentielles principalement les proportions, la disposition des divers éléments composant le design et, dans une certaine mesure, l’originalité des symboles graphiques. Cette énumération n’est pas exhaustive. Une caractéristique ne peut toutefois être qualifiée d’essentielle de manière abstraite, mais seulement en rapport avec le design concret objet de l’examen. Le critère déterminant est l’impression qui subsiste à court terme dans la mémoire d’un acheteur intéressé qui aurait été en mesure de comparer les designs litigieux dans un laps de temps relativement bref, sans toutefois les mettre côte à côte. Les caractéristiques essentielles doivent respecter les exigences du droit au design en ce qu’elles doivent contribuer à la nouveauté du design enregistré (art. 2 al. 2 LDes) et à ce que celui-ci se distingue de manière essentielle des designs existant à la date du dépôt ou de priorité (art. 2 al. 3 LDes). Les caractéristiques qui sont techniquement nécessaires ne sont pas essentielles (cf. art. 4 lit. c LDes). Des éléments à la fois fonctionnels et esthétiques ne sont par contre pas exclus de la protection (c. 3.3). Si les caractéristiques essentielles des designs objets de la comparaison concordent et qu’il en résulte une même impression générale, on est en présence d’une imitation (art. 8 LDes). Pour qu’il y ait imitation, il n’est toutefois pas nécessaire que toutes les caractéristiques essentielles soient reprises. Il suffit que les caractéristiques essentielles imitées ou légèrement modifiées, le cas échéant en combinaison avec d’autres éléments, produisent la même impression générale. Un design particulièrement original bénéficiera d’une sphère de protection plus large qu’un design faiblement original, dont la sphère de protection à l’encontre de formes semblables sera relativement réduite (c. 3.4.1). Si l’impression générale de similitude est retenue, peu importe qu’un nombre significatif de détails diffère par rapport à un design antérieur. Les détails peuvent toutefois jouer un rôle plus important dans les secteurs où la possibilité de création est restreinte. Dans ces domaines, il faut tenir compte du fait que les destinataires du produit consacrent plus d’attention au détail et que la perception des acheteurs est influencée par cette circonstance. Les différences de couleurs ne sont pas déterminantes, à tout le moins lorsque le design est déposé en noir et blanc. L’adjonction d’une marque ne modifie en principe pas l’impression générale, pas plus que l’utilisation d’un autre matériau, à moins que ces apports ne contribuent à donner une impression différente à l’aspect extérieur du produit (c. 3.4.2). Pour décider si un design se distingue suffisamment d’un autre design, ce qui est une question de droit, il n’y a pas lieu de se fonder sur l’opinion de spécialistes. S’agissant des déclarations contenues dans une expertise privée ou faites en audience par l’expert-témoin, celles-ci sont considérées comme de simples allégations d’une partie (c. 3.4.3). Dans le domaine de l’horlogerie, l’emploi d’une lunette de forme circulaire est parfaitement banal et les modèles floraux sont très répandus. Ces éléments ne confèrent donc pas leur empreinte caractéristique aux designs considérés dans le cas particulier, et la perception par l’acheteur potentiel d’une ressemblance s’agissant de ces éléments est sans incidence sur l’impression générale déterminante qui n’est pas la même du moment que les caractéristiques essentielles des designs comparés ne concordent pas (c. 4.2). In casu, l’acheteur potentiel sera d’autant plus attentif aux différences marquées entre les caractéristiques essentielles des deux designs qu’il est en présence de produits fabriqués par un secteur de l’industrie dans lequel une multitude de nouveaux objets sont développés et produits chaque année. Force est ainsi de constater que les caractéristiques essentielles des designs comparés ne concordent pas et que l’impression générale qui se dégage de chacun d’eux n’est pas la même, de sorte que le design du modèle comportant une marguerite sur son cadran ne saurait être qualifié d’imitation du design du modèle de la demanderesse dont le motif principal consiste en un soleil qui s’étend sur la quasi-totalité du cadran (c. 4.2). Une comparaison portant sur le concept à l’origine des produits (indication des heures par le biais d’un papillon placé sur une des pétales en mouvement de la fleur ornant le cadran pour le défendeur, indication de l’heure au moyen de pétales (ou de rayons du soleil) qui s’illuminent progressivement sur le cadran pour le demandeur) n’a pas lieu d’être, l’examen devant se limiter à une comparaison optique des deux designs (c. 4.4). Le fait que deux designs produisent une impression générale différente est insuffisant à écarter automatiquement tout risque de confusion au sens de l’art. 3 al. 1 lit. d LCD. Un risque de confusion indirect peut en effet subsister si l’auteur a fait naître l’idée que deux produits, en soit distincts, proviennent de la même entreprise (c. 5.1). Le fait que chacune des parties ait apposé sa marque sur ses produits tend à exclure le risque de confusion (c. 5.2). Le recours est rejeté. [NT]

Fig. 1074a
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Fig. 1074b
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