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  • Action, voir ég. cumul d’actions
  • en cessation

02 mai 2011

TF, 2 mai 2011, 4A_78/2011 (d)

sic! 9/2011, p. 504-509, « Le-Corbusier-Möbel III » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, meuble, individualité, Le Corbusier, imitation, contrat de vente, action en interdiction, action en cessation, abus de droit, conclusion, concurrence déloyale ; art. 2 al. 1 LDA, art. 2 al. 2 lit. f LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 62 al. 1 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 3 lit. e LCD, art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP.

À l'exception du remplacement de la condition de l'originalité par celle de l'individualité (c. 2.1), la définition de l'œuvre (art. 2 al. 1 LDA) n'a pas été modifiée par la LDA de 1992 (c. 2.4). Il n'y a pas de raison de revenir sur la décision du TF (ATF 113 II 190) selon laquelle le siège LC 1 ne présente pas un degré d'individualité suffisant (il est similaire à deux sièges créés antérieurement par des tiers) pour être qualifié d'œuvre (des arts appliqués [art. 2 al. 2 lit. f LDA]) et être protégé par la LDA (c. 2.4). Dans le cadre d'une action en interdiction (art. 62 al. 1 lit. a LDA) ou en cessation (art. 62 al. 1 lit. b LDA), le demandeur doit indiquer précisément ce qui doit être interdit au défendeur. Le juge est lié par les conclusions du demandeur (c. 3.2). En l'espèce, la vente, par les intimés (italiens), d'imitation de divers meubles « Le Corbusier » à des clients suisses est régie par le droit italien (art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat déjà. Il ne peut donc pas être considéré que les intimés — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. 3.4). Doit dès lors être rejetée la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de vendre en Suisse (« in der Schweiz zu verkaufen ») ces imitations de meubles (c. 3.4-3.7). Est en revanche admise la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de proposer au public, en particulier à la vente via Internet, ces meubles en Suisse (c. 3.3). La LCD ne prohibe en principe pas l'imitation. Si elle interdit l'utilisation de prestations dans des circonstances particulières relevant de la concurrence, elle ne protège pas pour autant ces prestations en tant que telles (c. 4.1). Du fait que, dans leur publicité pour l'imitation du siège LC 1, ils ne se réfèrent pas à « Le Corbusier », ni n'utilisent son nom, ni ne font allusion à la série de meubles « LC », ni ne font usage des expressions « Original-Qualität » ou « klassische Ausführung », les intimés ne violent pas l'art. 3 lit. d et e LCD (c. 4.2).

06 mars 2007

KG AI, 6 mars 2007, K 6/06 (d)

sic! 12/2007, p. 917-918 (rés.), « MFC Merchant Bank S.A. / MFC Finanz GmbH » ; motifs relatifs d’exclusion, signes similaires, abréviation, sigle, similarité des produits ou services, risque de confusion, raison de commerce, MFC Merchant Bank S.A., MFC Finanz GmbH, usage à titre de raison de commerce, registre du commerce, doute, tribunal civil, impression générale, statuts, action en cessation, faute, dommage, intérêt pour agir, concurrence déloyale ; art. 951 CO, art. 956 al. 2 CO, art. 3 al. 1 lit. b LPM, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 13 LPM, art. 55 LPM, art. 3 lit. d LCD, art. 9 LCD.

Ce ne sont pas les autorités du registre du commerce, mais le juge qui tranche la question de savoir s’il existe un risque de confusion entre deux raisons de commerce. Les autorités du registre du commerce se limitent à refuser l’enregistrement d’une raison de commerce identique à une autre préexistante et, dans le doute, elles doivent plutôt admettre l’enregistrement puisque c’est au tribunal qu’il revient de décider en dernier ressort (c. 8). L’examen de l’existence d’un risque de confusion est fonction de l’impression d’ensemble que les raisons de commerce considérées laissent dans la mémoire d’une personne bénéficiant d’une capacité de distinction normale et déployant une attention usuelle dans les affaires. Même si les raisons de commerce doivent être comparées de manière globale, certains de leurs éléments caractéristiques marquent l’impression d’ensemble qui s’en dégage. Leur reprise ou leur imitation peut suffire à créer un risque de confusion, sans que la présence d’autres éléments dont la force distinctive serait faible ne permette de faire la différence entre les raisons de commerce considérées (c. 7). Dans le cas d’espèce, les deux raisons de commerce comportent le sigle «MFC ». Elles se différencient par les termes «Merchant Bank » et « Finanz » et par la mention de leur forme juridique (SA/Sàrl). C’est le sigle qui se trouve au début de chacune des deux raisons de commerce qui constitue l’élément marquant de celles-ci (c. 9-11). Sa reprise, même avec l’ajout d’un terme générique comme « Finanz » et l’indication que la deuxième société est une Sàrl, génère un risque de confusion qui doit être compris au sens de l’ensemble du droit des signes distinctifs et dans l’examen duquel la concordance des buts statutaires des parties doit être prise en compte (c. 9). L’action en suppression du trouble de l’art. 956 al. 2 CO suppose uniquement une utilisation indue,même sans faute, de la raison de commerce considérée ; il suffit que, d’après les circonstances, un dommage soit susceptible de se produire (c. 12). La demanderesse a un intérêt juridiquement protégé à ce que la cause soit également jugée du point de vue du droit des marques, puisque la défenderesse n’utilise pas le signe « MFC » uniquement à titre de raison de commerce (c. 14). Les marques de la demanderesse et la raison de commerce de la défenderesse sont très semblables et même partiellement identiques en ce qui concerne leur élément caractéristique « MFC ». Les prestations offertes par les deux parties se recoupent également au moins partiellement. La composition graphique du papier à lettres de la défenderesse, qui met en évidence le signe « MFC » par l’utilisation de couleur et de gros caractères, augmente même le risque de confusion du point de vue du droit des marques. Comme les marques enregistrées qui sont formées d’acronymes doivent fondamentalement être traitées de la même manière que les autres marques, un risque de confusion doit être admis et l’action en suppression du trouble de l’art. 55 LPM également, indépendamment même de toute faute de la partie défenderesse (c. 16-17). L’admission d’une violation de la protection accordée aux raisons de commerce et du droit des marques ne dispense pas le tribunal de l’examen d’une éventuelle violation des dispositions de la LCD (c. 18). La protection des indications de provenance industrielle, selon l’art. 3 lit. d LCD, intervient en effet autant dans l’intérêt de la communauté que dans celui des particuliers. Dans la mesure où le droit des raisons de commerce et/ou celui des marques n’ont pas vocation à s’appliquer, il convient d’examiner, du point de vue spécifique du droit contre la concurrence déloyale, si le comportement concret d’une partie est propre à provoquer des confusions. La théorie selon laquelle l’application de la LCD ne doit pas permettre d’obtenir une protection que les droits de la propriété intellectuelle auraient refusée doit être abandonnée au vu du développement du droit de la concurrence (c. 19). Du point de vue de l’art. 3 lit. d LCD aussi, un risque de confusion doit être admis en l’espèce (c. 20), indépendamment même d’une éventuelle absence de dessein de provoquer la confusion (c. 21), vu notamment le refus de la défenderesse de modifier sa raison de commerce et sa présence sur le marché en dépit de l’identité des éléments marquants « MFC », de la proximité géographique des entreprises et du recoupement partiel de leur clientèle au vu de leurs buts statutaires (c. 21).

09 juin 2011

TF, 9 juin 2011, 4A_207/2010 (d)

sic! 11/2011, p. 666-671, « R (fig.) RSW Rama 374 Swiss Watch / RAM Swiss Watch » ; motifs relatifs d’exclusion, signes similaires, anglais, Rama, Suisse, watch, bélier, horlogerie, identité des produits ou services, produit de consommation courante, risque de confusion, action en interdiction, action en cessation, intérêt pour agir, conclusion, maxime de disposition, prestation, dispositif ; art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 55 al. 1 lit. a LPM.

Une action en cessation du trouble suppose un intérêt juridiquement protégé actuel et doit tendre à l’interdiction d’un comportement défini précisément. Lorsque l’action s’élève contre une violation du droit à la marque, l’activité à interdire et le signe violant la marque doivent être décrits précisément (c. 4.1). L’autorité saisie d’une telle demande peut en préciser les conclusions, en les limitant et en accordant moins que ce que le demandeur souhaitait, sans violer la maxime de disposition (c. 4.2). Même si la LPM ne comporte pas le terme de « prestation », le dispositif d’un jugement est suffisamment déterminé pour être exécuté s’il ressort des considérants que ce terme doit être compris comme désignant les produits et les services pour lesquels la protection du droit à la marque est revendiquée (c. 4.2). Il existe un risque de confusion au sens de l’art. 3 al. 1 lit. c LPM lorsqu’un signe plus récent menace la force distinctive d’une marque antérieure (c. 5.1). L’existence d’un risque de confusion ne s’examine pas dans le cadre d’une comparaison abstraite des signes, mais en fonction de toutes les circonstances du cas particulier. Le degré d’attention consenti par le cercle des consommateurs auxquels les produits sont destinés et les circonstances dans lesquelles ces derniers sont commercialisés comptent également. En présence de produits de consommation de masse d’usage courant (comme les produits alimentaires), le degré d’attention du consommateur et sa capacité de faire la différence sont moindres qu’en présence de produits spéciaux destinés à un cercle plus ou moins fermé de professionnels (c. 5.1). En l’espèce, les parties s’adressent avec les mêmes produits (montres) à un même public, ce qui conduit à exiger une différenciation plus marquée des signes considérés (c. 5.2). Les montres distribuées par les parties ne sont pas des produits de consommation de masse. Toutefois, les parties ne destinent pas leurs produits qu’à des professionnels. Comme ces montres (en raison de leur prix) ne sont pas achetées tous les jours, il est juste de retenir un degré d’attention un peu plus élevé, mais pas une attention considérablement accrue (c. 5.2). Les dénominations de fantaisie « Rama » et « RAM » sont prépondérantes dans les signes considérés, dont les autres éléments sont dépourvus de force distinctive ; elles en déterminent l’impression d’ensemble (c. 5.3). Ni leur effet sonore, ni leur prononciation éventuellement différente, ni leur aspect visuel, ni non plus leur contenu sémantique ne permettent de les différencier suffisamment (c. 5.4.1, 5.4.2 et 5.4.3). Le public suisse ne voit dans ces signes que des désignations de fantaisie dépourvues de contenu significatif et ignore que le terme « RAM » signifie « bélier ». Le fait qu’il figure dans un dictionnaire anglais de base ne suffit pas pour en déduire que ce mot serait connu d’une large partie du public suisse. Il faudrait d’autres indices pour l’admettre, comme par exemple son utilisation dans de la publicité ou en relation avec les produits considérés (c. 5.4.3). Il y a dès lors un risque de confusion entre les signes en cause (c. 5.1-5.5).

R (fig.) RSW Rama Swiss Watch
R (fig.) RSW Rama Swiss Watch

13 décembre 2007

HG ZH, 13 décembre 2007, HG020324 (d)

sic! 6/2009, p. 411-416, « Puma » ; action, action en interdiction, action en cessation, action en fourniture de renseignements, action échelonnée, action en paiement, qualité pour défendre, risque de violation, risque de récidive, preuve, confiscation, destruction, canaux de distribution, importation parallèle ; art. 55 al. 1 lit. a, b et c LPM, § 189 ZPO/ZH.

Il existe un risque imminent de violation du droit à la marque (art. 55 al. 1 lit. a LPM) si une violation analogue du droit à la marque a déjà eu lieu (danger de récidive) ou si des indices laissent penser qu’une violation comparable aura lieu prochainement (danger de commission d’une première infraction) (c. 2.2.2). Celui qui allègue un danger de récidive doit en apporter la preuve, en démontrant par exemple que la défenderesse ne s’est pas approvisionnée auprès d’une source autorisée par le demandeur ou que les produits en cause sont des contrefaçons (c. 2.2.3). Un seul cas suffit (c. 2.2.5). Celui qui prétend que sa marque est contrefaite doit prouver qu’il est titulaire de la marque et que les prétendues contrefaçons proviennent de la défenderesse. Il doit en outre indiquer quelles sont les instructions de fabrication en vigueur dans ses centres de production, en particulier en ce qui concerne le label de sécurité, et comment il veille à leur respect. Il doit enfin prouver que c’est sans son accord que la défenderesse distribue les produits (c. 2.2.4). L’action en interdiction (Unterlassungsbegehren) (art. 55 al. 1 lit. a LPM) ne nécessite pas de faute du défendeur (c. 2.2.5). L’action en interdiction est admise en l’espèce (c. 2.2.6). Le rappel des produits et leur confiscation peuvent servir à l’exécution de l’action en interdiction (c. 2.3.1). L’action en cessation (art. 55 al. 1 lit. b LPM), qui peut conduire à la confiscation et à la destruction des produits, ne peut être admise que si la défenderesse distribue effectivement des produits mis en circulation sans l’accord de la demanderesse (c. 2.3.2). La demanderesse ne peut exiger le rappel des produits et leur confiscation si la défenderesse n’en revendique ni la propriété ni la possession au moment du dépôt de la demande (défaut de légitimation passive) (c. 2.3.3). L’action en fourniture de renseignements (art. 55 al. 1 lit. c LPM) ne peut pas être utilisée pour obtenir des informations au sujet des sources et des canaux de distribution d’importations parallèles (c. 2.4.2). Cette action ne permet d’obtenir de la défenderesse des renseignements qu’au sujet de son fournisseur direct (c. 2.4.3 et 2.4.5). L’action échelonnée (Stufenklage) permet d’introduire une action en paiement non chiffrée dans l’attente de la production des comptes. L’obligation de produire les comptes suppose la violation des droits de la demanderesse (c. 2.5.2). La demande de production des comptes fait l’objet d’un jugement partiel (§ 189 ZPO/ZH) (c. 2.5.4).

09 mars 2009

TF, 9 mars 2009, 4A_529/2008 (f)

sic! 9/2009, p. 607-609, « Produits cosmétiques » ; action, action en interdiction, action en prévention de trouble, action en cessation, intérêt pour agir, risque de récidive, présomption, fardeau de la preuve, preuve ; art. 8 CC, art. 55 al. 1 lit. a et b LPM, art. 9 al. 1 lit. a LCD.

Un intérêt suffisant existe pour justifier une action en interdiction de trouble lorsque le défendeur a déjà commis des atteintes dont la répétition n'est pas à exclure ou s'il y a des indices concrets qu'il va commettre de telles atteintes. Le danger de répétition est présumé si le défendeur a déjà commis de telles violations et qu'il ne reconnaît pas les droits du demandeur ou nie à tort que les actes qu'on lui reproche portent atteinte à ces droits. Cette présomption est réfragable et ne vaut que pour le risque d'une répétition future des actes incriminés. Elle ne libère pas le demandeur du fardeau de la preuve complet des atteintes qu'il allègue avoir déjà subies. Celui qui entend faire cesser une atteinte identifiée à son droit à la marque qui perdure n'agit pas en prévention de trouble au sens de l'art. 55 al. 1 lit. a LPM, mais en cessation de l'atteinte au sens de l'art. 55 al. 1 lit. b LPM. C'est dès lors à lui d'établir, en vertu de l'art. 8 CC, que les produits censés contrefaire sa marque ont été fabriqués par les défendeurs et que les défendeurs sont bien les auteurs de l'atteinte.

21 octobre 2011

CJ GE, 21 octobre 2011, C/22832/2010 (f)

sic! 3/2012, p. 191-197, « Tech Line (fig.) » (Schlosser Ralph, Remarque) ; action, action en constatation de la nullité d’une marque, action en cessation, demande reconventionnelle, intérêt pour agir, incertitude, titulaire de la marque, conclusion subsidiaire, Tech Line Electronica, technologie, appareils électroniques, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, concurrence déloyale ; art. 2 lit. a LPM, art. 3 al. 1 LPM, art. 52 LPM, art. 2 LCD, art. 3 lit. d LCD, art. 9 LCD.

L’action en constatation de l’art. 52 LPM est ouverte à toute personne disposant d’un intérêt suffisant, notamment lorsqu’une incertitude juridique affecte les relations entre les parties (c. 4.1.2). En l’espèce, la titularité de la dénomination « Tech Line » étant incertaine, le demandeur dispose d’un intérêt suffisant pour solliciter la constatation de la nullité de la marque enregistrée par la partie adverse. En dérogation au principe de subsidiarité, cet intérêt subsiste malgré les conclusions prises par le demandeur en cessation de trouble, car la constatation de la nullité pourrait constituer un motif permettant de faire droit auxdites conclusions (c. 4.1.3). Le signe « Tech Line (fig.) », formé de deux désignations génériques, est descriptif pour des gammes/lignes de produits techniques/technologiques, catégories auxquelles appartiennent les produits concernés de la classe 9 (appareils d’enregistrement, de transmission et de lecture audio et vidéo) (c. 4.2.1-4.2.6). Dès lors que l’enregistrement du signe « Tech Line (fig.) » est nul (c. 4.2.7), la situation entre les parties est claire et la défenderesse n’a aucun intérêt digne de protection à requérir, par demande reconventionnelle, la constatation de la nullité du signe « Tech Line Electronica (fig.) » (c. 5.1-5.2). Les conclusions en cessation de trouble du demandeur sont rejetées, car celui-ci ne peut se baser ni sur le droit des marques (c. 6.1-6.2.1) ni sur le droit de la concurrence (c. 6.2.2-6.2.3) pour interdire à la défenderesse d’utiliser une dénomination appartenant au domaine public (c. 6.3).

Fig. 157a – Tech Line Electronica (fig.) (demandeur)
Fig. 157a – Tech Line Electronica (fig.) (demandeur)
Fig. 157b – Tech Line (fig.) (défenderesse)
Fig. 157b – Tech Line (fig.) (défenderesse)

02 novembre 2009

KG FR, 2 novembre 2009, 102 2009-113 (d) (mes. prov.)

sic! 10/2010, p. 726-730, « Thermodiffusion » ; mesures provisionnelles, action en cessation, violation d’un brevet, qualité pour agir, urgence, préjudice irréparable, solvabilité, dommage, clientèle, sûretés, capital-actions, concurrence déloyale, exploitation d’une prestation d’autrui ; art. 28d CC, art. 72 LBI, art. 9 LCD, art. 14 LCD ; cf. N 527 (arrêt du TF dans cette affaire).

Dans une action en cessation de l'acte (art. 72 LBI), la forme de la violation du brevet doit être décrite par des caractéristiques précises afin qu'il ne soit pas nécessaire d'interpréter des notions juridiques ou techniques ambiguës (c. 4.b). Celui qui prétend être titulaire d'un droit propre a toujours qualité pour agir au sens de l'art. 9 LCD, à la différence de celui qui, ouvertement et sans y être autorisé, fait valoir en son propre nom le droit d'un tiers (c. 4.c). Il y a toujours urgence au sens de l'art. 28d CC (applicable en vertu de l'art. 14 LCD) lorsqu'une procédure ordinaire (y compris les voies de recours possibles) durerait clairement plus longtemps qu'une procédure de mesures provisoires (c. 4.d). La LCD et les lois de propriété intellectuelle sont applicables cumulativement lorsqu'il existe des motifs spécifiques du droit de la concurrence (en l'occurrence, l'exploitation de façon indue du résultat d'un travail confié) qui ne se retrouvent pas dans le droit de la propriété intellectuelle (c. 4.e). Un préjudice est difficilement réparable lorsqu'un versement en argent ne permet pas de le compenser complètement ou lorsque la solvabilité de la partie adverse est douteuse. En droit de la concurrence, une injonction de cesser un acte prononcée au terme d'une procédure ordinaire peut, pratiquement, être sans intérêt pour le lésé; par ailleurs, le dommage est généralement difficile à déterminer, notamment lorsqu'il consiste en une perte de clientèle (c. 4.g). Il ne peut être renoncé à la fourniture de sûretés que lorsqu'il n'y a que de très faibles doutes sur le bien-fondé du droit exercé. À défaut d'autres éléments, le montant de la sûreté peut être fixé en fonction du montant du capital-actions de la requérante (c. 6.b.bb).

02 août 2007

TF, 2 août 2007, 4A_201/2007 (d)

sic! 2/2008, p. 145-146, « Klimaschränke » ; irrecevabilité, recours, action en constatation de la nullité d’un brevet, demande reconventionnelle, action en cessation, action en fourniture de renseignements, conclusion ; art. 42 al. 1 LTF, art. 91 lit. a LTF, art. 107 al. 2 LTF.

Admission du principe d'un recours en matière civile contre un jugement sur moyen séparé tiré de la nullité d'un brevet et sur les conclusions reconventionnelles en abstention et en production de comptes, mais non-entrée en matière sur le recours faute pour le recourant, qui s'était limité à demander la cassation du jugement sur moyen séparé et éventuellement le renvoi de la cause à l'autorité de premier jugement pour nouvelle décision au sens des considérants, d'avoir pris des conclusions au fond.

09 juin 2011

TF, 9 juin 2011, 4A_92/2011 (f)

sic! 12/2011, p. 727-730, « Jetfly » ; raison de commerce, société, organe, nom de domaine, jetfly.com, risque de confusion, droit au nom, nom commercial, Jetfly, usage, usurpation, Suisse, Benelux, territorialité, priorité, contrat de licence, droit des marques, action en cessation, arbitraire, renvoi de l’affaire ; art. 29 al. 2 CC.

La recourante no 2, active en Suisse, étant sa filiale, la recourante no 1 — société mère — peut invoquer la protection de son nom en Suisse (c. 5.2). Le nom de domaine « jetfly.com » exploité par l'intimée, active dans le même secteur commercial que les recourantes, reprend textuellement la partie principale du nom des recourantes. Le critère de la protection géographique est réalisé à l'échelle européenne, étant donné la spécificité du domaine d'activité des sociétés en cause. Il y a donc un risque de confusion entre le nom de domaine « jetfly.com » et le nom commercial des recourantes de sorte qu'elles sont lésées par cette usurpation (c. 6.2). En raison du principe de la territorialité, l'intimée ne peut pas se prévaloir en Suisse d'un droit de priorité résultant d'un contrat de licence limité au Benelux (c. 7.2). Ayant utilisé le nom « Jetfly » dans la vie commerciale en Suisse dès 2004 alors que la marque « Jetfly » n'a été enregistrée par B. SA qu'en 2006, les recourantes bénéficient d'un droit de priorité. C'est ainsi à tort que l'autorité inférieure a nié aux recourantes la possibilité de se prévaloir en Suisse de ce droit au nom commercial acquis par l'usage et donc indépendant de la marque. L'action en cessation de trouble (art. 29 al. 2 CC) est donc bien fondée (c. 8). En niant à tort que les recourantes ont allégué que l'intimée a exercé une activité en Suisse, l'autorité inférieure a versé dans l'arbitraire. La cause lui est donc renvoyée afin qu'elle détermine si les actes de l'intimée en tant qu'organe fondent une activité de l'intimé en Suisse (c. 9.2).

03 novembre 2008

HG AG, 3 novembre 2008, HSU.2008.15 (d) (mes. prov.)

sic! 6/2009, p. 419-423, « Beutelsuppen » ; concurrence déloyale, Knorr, conditionnement, emballage, sachet, denrées alimentaires, soupe, ingrédient, couleur, force distinctive, impression générale, élément fonctionnel, fonction technique, signe descriptif, besoin de libre disposition, publicité, imposition dans le commerce, imitation, imitation servile, marque, risque de confusion, mesures provisionnelles, action en cessation, valeur litigieuse ; art. 2 LCD, art. 3 lit. d LCD, art. 17 al. 1 ZPO/AG.

La force distinctive d'un conditionnement s'apprécie en considérant celui-ci dans son ensemble et non chaque élément isolément (c. 5.2.4). Est dépourvue de force distinctive originaire la simple combinaison d'éléments techniquement nécessaires (forme carrée d'un sachet de soupe) ou descriptifs et usuels (ingrédients illustrés sur le sachet ou représentation d'une assiette de soupe) (c. 5.2.4-5.2.5). La couleur verte doit demeurer librement disponible dans toutes ses nuances pour des aliments, car elle en suggère la fraîcheur et le caractère naturel (c. 5.2.5). Si la publicité de la marque Knorr n'intervient pas en lien avec le conditionnement Knorr-Beutelsuppe, l'imposition de celui-ci dans le commerce n'est pas démontrée (c. 5.3.2). Une part de marché importante n'est pas propre à démontrer qu'un conditionnement a acquis une force distinctive par son utilisation dans le commerce (c. 5.3.3). Le conditionnement de la requérante est donc dépourvu de force distinctive, tant originaire que dérivée (c. 5.4). L'imitation d'un sachet de soupe ne constitue pas une imitation déloyale d'une gamme ou d'une série de produits, même si de nombreux goûts sont proposés (c. 6.2.2). On ne peut parler de copie servile pour un conditionnement dont la forme est standard dans toute la Suisse sans vider de sa substance le principe de la liberté d'imitation (c. 6.2.3). Le risque de confusion est d'autant moins important que les marques apposées sur les conditionnements des deux parties se distinguent clairement l'une de l'autre (c. 6.2.4). La valeur litigieuse d'une demande en cessation visant l'interdiction de commercialiser des produits de masse sur l'ensemble du territoire suisse se monte, compte tenu de l'importance des parties sur le marché, à 1 000 000 francs (c. 8.2).

Fig. 160a – Bon Chef ABC (intimé)
Fig. 160a – Bon Chef ABC (intimé)
Fig. 160b – Bon Chef Basler Mehlsuppe (intimé)
Fig. 160b – Bon Chef Basler Mehlsuppe (intimé)

05 février 2013

TF, 5 février 2013, 4A_443/2012 (d)

ATF 139 III 110 ; sic! 6/2013, p. 355-359, « LSVA-Erfassungssystem» ; Tribunal fédéral des brevets, action en cessation, action en dommages-intérêts, action dirigée contre la Confédération, tâches publiques, activité commerciale, licence dans l’intérêt public ; art. 3 al. 1 LRCF, art. 26 al. 1 lit. a LTFB, art. 41 CO, art. 40 LBI, art. 72 LBI, art. 73 LBI.

Le recours en matière civile est ouvert contre les décisions rendues en matière civile (art. 72 LTF). La question de savoir si l'on a affaire dans un cas particulier à des prétentions de droit privé fédéral est considérée comme une affaire civile (c. 1). Pour autant qu'il n'agisse pas de façon officielle, mais de façon commerciale, l'État est soumis aux règles de droit privé tant de la responsabilité civile que de la propriété intellectuelle. L'exploitation de l'infrastructure de perception de la redevance poids lourds liée aux prestations constitue cependant une tâche de droit public (c. 2.2.1-2.2.2.). La responsabilité patrimoniale de la Confédération doit donc être évaluée sur la base de la loi sur la responsabilité de la Confédération, dont l'application n'est pas du ressort du TFB, et non pas sur la base de l'action en réparation du dommage de l'art. 73 LBI (c. 2.2.2). Autre est la question de savoir si la Confédération peut se voir reprocher la violation d'un brevet et si une action en cessation fondée sur l'art. 72 LBI peut lui être intentée, auquel cas le TFB serait compétent pour trancher selon l'art. 26 al. 1 lit. a LTFB (c. 2.3.1). La Confédération dispose également de la possibilité de demander une licence dans l'intérêt public (art. 40 LBI, c. 2.3.2-2.3.3). [DK]

27 juin 2014

TF, 27 juin 2014, 4A_38/2014 (d)

ATF 140 III 297 ; sic! 10/2014, p. 624-632, « Keytrader », JdT 2015 II 203 ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, nullité d’une marque, concurrence déloyale, intérêt pour agir, action en cessation, risque de récidive, nom de domaine, cercle des destinataires pertinent, spécialistes du secteur financier, inscription au registre du commerce, raison sociale, inscription au registre des marques, enquête démoscopique, interprétation des moyens de preuve, constatation erronée des faits, combinaison de mots, usage de la marque, preuve de l’usage d’une marque, services financiers, trader, vocabulaire de base anglais, key ; art. 26 Cst., art. 190 Cst. art. 944 al. 1 CO, art. 2 lit. a LPM, art. 52 LPM, art. 2 LCD, art. 3 al. 1 lit. d LCD ; cf. N 769 (vol. 2012- 2013 ; TF, 12 juillet 2012, 4A_45/2012, sic! 12/2012, p. 816-819, « Keytrade AG / Keytrade Bank SA » (Marbach Eugen, Anmerkung)).

Lorsque la partie succombante persiste à contester l’illicéité de son comportement durant les discussions entre les parties, il faut admettre un risque de récidive, qui confère à la demanderesse un intérêt juridique à agir en cessation du trouble, que cette action soit fondée sur la LPM ou la LCD (c. 2.3.2). Au contraire, la demanderesse n’a pas d’intérêt juridique à agir en cessation du trouble lorsque la défenderesse s’est conformée à un jugement antérieur et ainsi effacé les deux noms de domaines litigieux ; quand bien même elle aurait également persisté à contester l’illicéité de l’enregistrement et de l’exploitation de ces deux noms de domaines ; ce qui n’est pas démontré en l’espèce. Pour les services financiers et les produits technologiques qui leur sont liés, le cercle des destinataires pertinent est composé des spécialistes du domaine financier, ainsi que des consommateurs moyens (c. 3.3). Les critères régissant l’inscription d’une raison sociale au registre du commerce diffèrent de ceux employés pour l’inscription d’un signe au registre des marques. Il n’y a donc pas de violation du droit d’être entendu lorsqu’une autorité n’applique pas les conclusions d’une décision antérieure rendue en matière de registre du commerce à l’examen de la validité d’une marque similaire à la raison sociale. Cependant, rien ne s’oppose à prendre en considération cette décision dans un souci de cohérence (c. 3.5). Le mot « trader » est compris par le cercle des destinataires pertinent comme « Börsen- oder Wertpapierhändler ». Ce terme est donc descriptif des services financiers dans les classes 09, 36, 38 et 42 (c. 3.5.1). La demanderesse a produit devant l’instance précédente une enquête démoscopique qui établit que seuls 2 % des personnes interrogées rapprochent le seul mot anglais « key » des notions de « haupt- », « wichtig ». Cependant, l’autorité précédente n’a pas constaté les faits de manière manifestement erronée lorsqu’elle retient que le cercle des destinataires pertinents comprendra le signe « KEYTRADER » dans le sens de « besonders wichtigen Händlers bzw.Wertpapierhändlers ». En effet, les résultats de l’enquête démoscopique n’excluent pas qu’une majorité des destinataires des services financiers en classe 36, 38 et 42 comprennent le terme anglais « key » en combinaison avec un autre mot, dans le sens de « haupt- », « wichtig » (c. 3.5.2). L’autorité précédente viole le droit d’être entendu et procède à une constatation inexacte des faits lorsqu’elle rejette l’affirmation de la recourante, selon laquelle le signe « KEYTRADER » n’est pas un mot qui fait partie du vocabulaire anglais, sur la base des résultats de ses propres recherches, sans donner l’occasion aux parties de se prononcer sur ces éléments (c. 3.5.3). Cependant, le fait que le signe « KEYTRADER » ne corresponde pas à un terme existant du vocabulaire anglais ne diminue pas le caractère descriptif de ces deux éléments. Le mot anglais « key » combiné à un substantif sert à renforcer l’importance de ce mot, tout comme c’est le cas pour le mot allemand « Schlüssel ». Il faut donc considérer que l’utilisation du mot anglais « key » en combinaison avec un substantif est comprise par le cercle des destinataires comme un renforcement de l’importance de ce mot. Le signe « KEYTRADER » est donc compris par le cercle des destinataires pertinent comme désignant des « besonders wichtigen Händler bzw. Wertpapierhändler ». La marque est donc descriptive des produits et services financiers en classe 36, 38 et 42 (c. 3.5.4). L’usage de la marque doit être établi pour le cercle des destinataires potentiels des produits et services visés et non seulement pour le cercle des clients effectifs (c. 4.4). Le risque de confusion au sens de l’art. 3 al. 1 lit. d LCD doit être étudié concrètement et non abstraitement sur la base de critères d’évaluation établis pour le même signe, mais au regard du droit des marques (c. 7.2.2). [AC]

26 janvier 2015

TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014 (d)

Marque combinée, action en constatation de la nullité d’une marque, action en remise du gain, action en dommage et intérêts, action en cessation, action en interdiction, action en fourniture de renseignements, décision intermédiaire, décision incidente, produits pornographiques, préservatif, valeur litigieuse, valeur litigieuse minimale, constatation des faits, arbitraire, arbitraire dans la constatation des faits, appréciation des preuves, administration des preuves, libre appréciation des preuves, fardeau de la preuve, déclaration incomplète, droit d’être entendu, grief irrecevable, interpellation du tribunal, interprétation d’un témoignage, témoin, for ; art. 29 al. 2 Cst., art. 30 Cst., art. 42 al. 1 LTF, art. 42 al. 2 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 92 al. 1 LTF, art. 95 LTF, art. 99 LTF, art. 105 al. 1 LTF, art. 106 al. 1 LTF, art. 8 CC, art. 53 CPC, art. 56 CPC, art. 153 CPC, art. 154 CPC, art. 157 CPC, art. 172 CPC, art. 109 al. 2 LDIP, cf. N 415 (vol. 2007-2011 ; Kantonsgericht SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 ; sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) » ; arrêt du tribunal cantonal schwyzois dans cette affaire) et N 900 (TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 ; sic! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II »).

Un recours en matière civile interjeté contre une décision incidente portant sur la compétence du tribunal au sens de l’art. 92 al. 1 LTF est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 lit. b LTF) (c. 1.1). Le TF ne peut rectifier ou compléter la constatation des faits effectuée par l’autorité précédente que s’ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l’art. 95 LTF. De façon manifestement inexacte signifie arbitraire. Il faut en outre que la correction du vice soit décisive pour le sort de la procédure (art. 97 al. 1 LTF). La partie qui attaque les constatations de faits de l’autorité précédente doit démontrer clairement et de manière substantielle en quoi ces conditions sont remplies. Dans la mesure où elle désire compléter l’état de fait, cette partie doit démontrer, pièces à l’appui, qu’elle avait déjà allégué les faits relevants en question et proposé les moyens de preuves correspondants, conformément à la procédure devant l’autorité précédente. Des faits nouveaux et des preuves nouvelles ne peuvent être présentés que si la décision de l’autorité précédente en donne l’occasion au sens de l’art. 99 al. 1 LTF, ce qui doit être exposé précisément dans le recours (c. 1.3). La recourante qui qualifie de contradictoires et manifestement inexacts les propos tenus par les témoins au vu des exploits échangés dans la procédure cantonale et du comportement adopté dans cette procédure par le représentant de la partie adverse, et qui accessoirement remet en question la crédibilité du témoin, exerce des griefs de nature appellatoire concernant l’appréciation des preuves effectuée par l’autorité précédente, sur lesquels le TF n’entre pas en matière (c. 2.1.2). Du moment que, contrairement à ce que soutient la recourante, la déclaration du témoin n’était ni peu claire, ni contradictoire, ni non plus manifestement incomplète, il n’est pas non plus évident que le tribunal aurait dû, en application par analogie de l’art. 56 CPC, donner l’occasion au témoin, par des questions ciblées, de clarifier et de compléter sa déclaration (c. 2.2.2). L’autorité précédente a ainsi retenu, sans violer le droit fédéral, qu’il ne pouvait qu’être raisonnablement déduit du témoignage intervenu que le témoin confirmait avoir vu et acheté dans la filiale du canton de Schwyz un paquet de préservatifs du type de celui litigieux (c. 2.2.3). La recourante adresse des griefs purement appellatoires concernant le résultat de l’administration des preuves opérée par l’autorité précédente. Elle ne démontre pas qu’une offre de preuves qu’elle aurait proposée régulièrement et en temps utile aurait été refusée, ni non plus dans quelle mesure l’autorité précédente se serait considérée de manière inadmissible comme liée, dans son administration des preuves, par des règles de preuves formelles. La recourante méconnaît en particulier le fait que le principe de la libre appréciation des preuves de l’art. 157 CPC ne change rien au fait que le résultat de l’appréciation des preuves effectuée par l’autorité précédente lie le TF. L’art. 157 CPC n’a ainsi pas pour conséquence que l’appréciation des preuves en elle-même constituerait une question de droit soumise au libre examen du TF selon l’art. 95 CPC. L’art. 8 CC ne prescrit pas par quels moyens les faits doivent être clarifiés, ni comment le résultat de l’administration des preuves doit être apprécié. La recourante n’établit enfin pas lequel de ses arguments concrets aurait été omis par l’autorité précédente, de sorte qu’elle aurait été empêchée, en violation de son droit d’être entendue, de faire valoir son point de vue dans la procédure. Le TF confirme ainsi que l’autorité précédente a retenu, sans violation du droit fédéral, sa compétence à raison du lieu (c. 3.2). [NT]

02 octobre 2014

TF, 2 octobre 2014, 4A_142/2014 (f)

sic! 1/2015, p. 49-53, « Couronne dentée II », brevets, horlogerie, couronne dentée, affichage, mécanisme d’affichage, guichet de cadran, cadran, grande date, mouvement, montre, dispositif d’affichage, homme du métier, action en interdiction, action en constatation de la nullité d’un brevet, action en fourniture de renseignements, action en cessation, action échelonnée, action en dommages-intérêts, nouveauté en droit des brevets, non-évidence, fardeau de la preuve, fardeau de l’allégation, maxime de disposition, décision partielle, décision incidente, demande auxiliaire, garantie d’un procès équitable, expertise, évaluation du dommage, dommage, indépendance des prétentions, interprétation de la revendication, état de la technique, extension illicite de l’objet du brevet ; art. 123 al. 2 CBE 2000, art. 29 al. 1 Cst., art. 29 al. 2 Cst., art. 42 al. 2 LTF, art. 91 lit. a LTF, art. 93 al. 1 LTF, art. 37 al. 1 LTFB, art. 37 al. 2 LTFB, art. 37 al. 3 LTFB, art. 1 al. 1 LBI, art. 7 al. 1 LBI, art. 7 al. 2 LBI, art. 8 al. 1 LBI, art. 8 al. 2 LBI, art. 26 al. 1 lit. a LBI, art. 26 al. 1 lit. c LBI, art. 51 LBI, art. 58 al. 2 LBI, art. 66 lit. a LBI, art. 72 LBI, art. 73 al. 1 LBI, art. 55 al. 1 CPC, art. 56 CPC, art. 57 CPC, art. 125 lit. a CPC, art. 133 lit. e CPC, art. 237 CPC; cf. N 925 (TFB, 30 janvier 2014, O2012_033 ; sic! 6/2014, p. 376-388, « Couronne dentée ») et N 929 (TFB, 2 juin 2015, O2012_033 ; sic! 12/2015, p. 695-696, « Couronne dentée III »).

Les prétentions en dommages et intérêts et en publication du jugement sont indépendantes de celles en fourniture d’informations et en interdiction. Le jugement accueillant une demande auxiliaire en reddition de comptes, ayant pour objet les renseignements nécessaires à l’évaluation du dommage, est une décision incidente. Le recours au TF, contre une telle décision, n’est pas assujetti aux conditions restrictives de l’art. 93 al. 1 LTF (c. 1). Le juge instructeur a la faculté de limiter la procédure à des questions ou à des conclusions déterminées, dans la perspective de régler séparément certaines des prétentions en cause, par une décision partielle, ou de régler séparément certaines questions de fait ou de droit par une décision incidente, selon l’art. 237 CPC. Il n’en a toutefois, sous réserve d’un abus de son pouvoir d’appréciation, pas l’obligation, même si les parties l’en requièrent. L’art. 125 CPC n’exclut pas que le tribunal rende une décision partielle, relative à certaines prétentions, ou incidente, relative à certaines questions de fait ou de droit, alors même que la procédure n’a pas été préalablement, ni formellement limitée. L’art. 133 lit. e CPC n’impose pas non plus d’annoncer l’éventualité d’une décision partielle ou incidente dans l’invitation aux débats (c. 2). L’homme du métier n’est pas un individu réel, mais une fiction juridique. Il a reçu une formation classique dans le domaine technique en cause et il est doté de compétences et de connaissances moyennes dans ce même domaine. Il n’est pas exempt des idées habituellement préconçues dans ledit domaine. L’homme du métier est typiquement le professionnel appelé à réaliser l’objet décrit dans le brevet ou chargé de résoudre le problème correspondant. Aux termes de l’art. 56 CPC, le tribunal interpelle les parties lorsque leurs actes ou déclarations sont peu clairs, contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets. Il leur donne l’occasion de les clarifier et de les compléter. Il incombe au tribunal d’élucider la situation juridique sur la base des faits régulièrement établis dans le procès. Le tribunal doit statuer selon les règles de répartition du fardeau de la preuve lorsque des faits importants n’ont pas été régulièrement allégués puis prouvés. Il n’est pas autorisé à se prononcer sur la conséquence juridique de faits autres que ceux dûment établis et il doit s’abstenir de spéculer sur l’issue de la cause dans l’hypothèse où les parties auraient procédé différemment. Il ne peut rendre aucun jugement grevé de réserves ou fondé sur des conjectures. En se référant dans le cas d’espèce au rapport de deux experts, dont les connaissances et les aptitudes personnelles permettent de présumer qu’ils se sont référés aux connaissances et aptitudes typiques d’un professionnel appelé à réaliser l’objet décrit dans le brevet ou chargé de résoudre le problème correspondant, le TFB a, implicitement au moins, recouru à la notion d’homme du métier telle qu’elle est décrite ci-dessus. Comme le procès civil est soumis à la maxime des débats selon l’art. 55 al. 1 CPC, et qu’aucune dérogation n’est prévue en matière de brevet d’invention, il appartenait aux parties d’alléguer et de prouver, le cas échéant, que des connaissances particulières et inhabituelles, différentes de celles des deux experts, auraient été nécessaires pour apprécier la validité et la portée du brevet concerné (c. 5). La nouveauté d’une invention n’est détruite que lorsque toutes ses caractéristiques ont été rendues accessibles au public avant le dépôt de la demande de brevet. L’examen de la nouveauté consiste dans une comparaison individuelle entre chaque solution déjà divulguée et l’invention en cause. La nouveauté de cette invention n’est détruite que lorsqu’une antériorité en présente identiquement toutes les caractéristiques. Il est suffisant, mais nécessaire que l’enseignement technique revendiqué soit déjà apporté à l’homme du métier par une solution connue. Il appartient à la partie qui invoque l’absence de nouveauté de la prouver. Tel n’est pas le cas lorsque trois caractéristiques du brevet dont la validité est contestée ne se retrouvent pas dans le brevet antérieur qui lui est opposé au titre d’antériorité détruisant la nouveauté (c. 6). Pour qu’une invention soit brevetable, l’objet du brevet doit être le résultat d’une activité inventive, car la protection légale n’est pas accordée à ce que l’homme du métier peut logiquement développer en connaissance de l’état de la technique et par la simple mise en œuvre de compétences moyennes ; l’invention brevetable est le résultat d’une sagacité plus considérable. L’activité inventive doit être appréciée d’après ce qui était objectivement réalisable à la date déterminante. À la différence du critère relatif à la nouveauté de l’invention, l’appréciation de l’activité inventive nécessite d’appréhender l’état de la technique dans sa globalité. Tous les enseignements et toutes les antériorités accessibles au public constituent dans leur ensemble le patrimoine technique dont un homme du métier, doté de capacités de combinaison normales, dispose librement pour aborder le problème à résoudre. Il faut examiner si l’état de la technique a suggéré une combinaison évidente d’éléments distincts, compte tenu de leur fonction au sein de l’ensemble ; il importe toutefois de ne pas considérer de manière erronée et artificielle, dans une approche rétrospective issue de la connaissance de la solution en cause, une combinaison comme résultant à l’évidence de l’état de la technique (c. 7). Tant selon l’art. 26 al. 1 lit. c LBI, que l’art. 123 al. 3 CBE 2000, le juge peut être requis de constater la nullité du brevet lorsque son objet va au-delà du contenu de la demande de brevet dans la version qui a déterminé sa date de dépôt. L’art. 26 al. 1 lit. c LBI se rattache à l’art. 58 al. 2 LBI qui interdit de modifier les pièces techniques, pendant la procédure d’examen de la demande de brevet, de manière à ce que l’objet de la demande modifiée aille au-delà de leur contenu. Avant le 1er juillet 2008, selon l’art. 58 al. 2 lit. a LBI, la date de dépôt de la demande de brevet était reportée à celle du dépôt des pièces modifiées qui, le cas échéant, en étendaient l’objet. Ce report devait toutefois s’accomplir formellement au cours de la procédure d’examen ; à défaut, le brevet délivré était nul selon l’art. 26 al. 1 ch. 3bis aLBI. L’extension ainsi interdite peut consister aussi bien dans l’adjonction que dans la suppression d’informations. La modification est en revanche admise si elle a pour seul effet de préciser l’invention ou d’éliminer une contradiction. La substitution ou la suppression d’une caractéristique, dans une revendication, est admissible s’il apparaît directement et sans ambiguïté à l’homme du métier que cette caractéristique n’est pas présentée comme essentielle dans la divulgation de l’invention, qu’elle n’est pas indispensable en tant que telle à la réalisation de l’invention, eu égard aux problèmes techniques que celle-ci propose de résoudre et que sa suppression ou sa substitution n’impose pas de vraiment modifier en conséquence d’autres caractéristiques. Si une caractéristique est remplacée par une autre, il est indispensable que celle-ci soit couverte par les pièces techniques initiales. Le TF confirme le jugement du TFB, qui a considéré que, quoiqu’elles aient été importantes, la présence de 8 différences entre le libellé de la revendication No 1 du brevet dans la demande initialement déposée et dans le brevet finalement obtenu, n’a pas étendu l’objet du brevet par rapport à celui figurant dans la demande, en se fondant sur l’analyse de deux experts qui ont retenu que pour l’homme du métier les caractéristiques présentes dans le libellé final de la revendication étaient aisément reconnaissables dans les pièces techniques initiales. Le TF relève que la présence d’une expertise dissidente, qui ne motive pas ses conclusions de manière intelligible, ne suffit pas à démontrer que les modifications apportées seraient incompatibles avec l’art. 26 al. 1 lit. c LBI dont le sens ne peut être qu’un avis d’expert même déraisonnable ou non pertinent suffirait à établir une extension inadmissible de l’objet du brevet, au sens de l’art. 26 al. 1 LBI (c. 8). Le brevet confère à son titulaire le droit d’exiger la cessation d’une utilisation illicite de l’invention, en particulier de l’utilisation à titre professionnel par un tiers, au sens de l’art. 8 al. 1 et 2 LBI et de réclamer la réparation du dommage causé par cette utilisation illicite (art. 66 lit. a, 72 et 73 al. 1 LBI). L’invention est définie par les revendications du brevet, au besoin interprétées d’après la description et les dessins (art. 51 LBI). Les revendications doivent être interprétées comme l’homme du métier les comprend. Les pièces techniques et, en particulier le libellé des revendications s’adressent à l’homme du métier ; l’enseignement technique doit être mis en œuvre par lui et il faut par conséquent apprécier de son point de vue ce qui est rendu accessible par le brevet. La sécurité juridique exige que l’homme du métier puisse savoir à quoi s’en tenir à la seule lecture du brevet. Lorsqu’un doute subsiste parce que la revendication et la description sont équivoques, c’est le titulaire qui doit en pâtir et non les tiers. Le fascicule du brevet peut conférer un sens spécial à un terme technique, divergent du sens courant. Ce qui amène le TF a admettre qu’en l’espèce la notion de « denture » périphérique est un entraînement constitué de dents en nombre indéterminé, y compris, s’il y a lieu, une dent unique ; et que rien ne justifie d’interpréter ce mot, dans le libellé de la revendication, en ce sens que la couverture du brevet serait restreinte aux entraînements périphériques comprenant deux dents au minimum. Le recours de la défenderesse, qui avait conclu reconventionnellement à la constatation de la nullité du brevet et qui contestait également que son mécanisme à dent unique tombait dans la revendication No 1 du brevet qui décrivait une denture à cet emplacement et pour cette fonction, est rejeté. [NT]

CBE 2000 (RS 0.232.142.2)

- Art. 123

-- al. 2

CPC (RS 272)

- Art. 237

- Art. 133

-- lit. e

- Art. 125

-- lit. a

- Art. 57

- Art. 56

- Art. 55

-- al. 1

Cst. (RS 101)

- Art. 29

-- al. 1

-- al. 2

LBI (RS 232.14)

- Art. 58

-- al. 2

- Art. 8

-- al. 2

-- al. 1

- Art. 73

-- al. 1

- Art. 72

- Art. 66

-- lit. a

- Art. 51

- Art. 26

-- al. 1 lit. a

-- al. 1 lit. c

- Art. 1

-- al. 1

- Art. 7

-- al. 2

-- al. 1

LTF (RS 173.110)

- Art. 91

-- lit. a

- Art. 93

-- al. 1

- Art. 42

-- al. 2

LTFB (RS 173.41)

- Art. 37

-- al. 3

-- al. 2

-- al. 1

25 août 2015

TFB, 25 août 2015, O2013_008 (d)

Conditions de la protection du brevet, nouveauté, non-évidence, homme de métier, état de la technique, violation d’un brevet, contrefaçon, brevet européen, décision étrangère, action échelonnée, jugement partiel, action en cessation, action en fourniture de renseignements, action en dommages-intérêts, action en remise du gain, dommage, pistolet de pulvérisation ; art. 66 lit. a LBI, art. 66 lit. b LBI, art. 85 CPC.

La défenderesse, accusée par la plaignante d’avoir violé le brevet européen qu’elle détient sur un pistolet de pulvérisation, allègue un défaut de nouveauté par rapport à deux brevets existants. Le TFB rejette cet argument, et cite une décision concordante du Bundespatentgericht allemand (c. 4.3). La défenderesse allègue également une absence d’activité inventive par rapport au premier des deux brevets cités, l’invention découlant d’une manière évidente de l’état de la technique, qu’elle exemplifie en citant plusieurs autres brevets. Le TFB considère, contrairement au Bundespatentgericht allemand, que les documents cités ne rendent pas l’invention litigieuse évidente pour l’homme du métier (c. 4.4). L’objet réalisé par la défenderesse remplissant toutes les caractéristiques de la première revendication de la plaignante, il constitue une contrefaçon de l’invention brevetée au sens de l’art. 66 lit. a LBI (c. 4.5). La demanderesse prend des conclusions en cessation du trouble, en fourniture de renseignements et en reddition de comptes. Elle conclut en outre à ce qu’il lui soit donné la possibilité, dans une deuxième étape, d’établir et de chiffrer son dommage ou le gain dont elle pourrait demander la délivrance, sans, à ce stade de la procédure, prendre de conclusions chiffrées ou chercher à établir que les conditions d’une action en dommages-intérêts ou en délivrance du gain seraient remplies (c. 5.1). L’action échelonnée suppose l’existence d’une prétention de droit matériel en fourniture de renseignements et en reddition de comptes (c. 5.3). Le TFB considère qu’une telle prétention de droit matériel découle de l’art. 66 lit. b LBI (c. 5.4). Il fait donc droit aux conclusions en cessation et à celles en fourniture de renseignements et en reddition de comptes (c. 5.5). Et puisque la demanderesse a requis et obtenu que la procédure soit suspendue en ce qui concerne les actions pécuniaires jusqu’à droit connu sur l’existence d’une violation et sur l’action en fourniture de renseignements et en reddition de comptes, on ne peut pas lui faire grief de n’avoir pas allégué et établi que les conditions d’une action en dommages-intérêts ou en délivrance du gain seraient remplies (c. 5.6). [SR]