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7-8/2019, p. 436-439, « Riverlake / RiverLake » ;
raison de commerce, raison sociale, signe fantaisiste, néologisme,
force distinctive moyenne, reprise d’une
raison de commerce, terme générique,
terme descriptif, droit de la personnalité, risque de confusion
indirect, risque de confusion admis, impression générale, registre
du commerce, droit au nom, usurpation, nom de domaine, transfert de
nom de domaine, site Internet, anglais, Riverlake,
RiverLake Capital AG,
riverlake.com,
transport maritime,
finance, services financiers ; art. 29 al. 2 CC, art. 951 CO,
art. 956 al. 2 CO.
Un
prestataire logistique genevois, actif notamment dans le transport
maritime de marchandises et ayant fait inscrire entre 1985 et 2011
quatre raisons de commerce contenant principalement le terme
« Riverlake », a attaqué une entreprise zougoise,
« RiverLake Capital AG », fournissant des services dans
le domaine de la finance, suite à l’inscription en 2017 de sa
raison de commerce dans le registre du commerce du canton de Zoug.
Dans son jugement, l’instance précédente a interdit à la société
zougoise d’utiliser l’élément « RiverLake » dans sa
raison sociale, ainsi que dans les affaires en Suisse, notamment sur
son site Internet, pour la désigner ou pour désigner ses services.
Selon l’instance précédente, le terme « Riverlake »,
bien que composé de deux désignations génériques, constitue un
néologisme. Elle considère qu’il s’agit d’un signe
fantaisiste doté d’une force distinctive au moins moyenne, et que
ni l’élément descriptif « Capital AG », ni
l’utilisation d’un « L » majuscule dans la raison de
commerce de la recourante ne lui permettent de se distinguer
suffisamment nettement de la raison de commerce antérieure de la
défenderesse, d’une manière qui permettrait d’exclure tout
risque de confusion indirect (c. 2.2). Dans l’examen de l’existence
d’un risque de confusion entre les raisons de commerce litigieuses,
c’est à raison que l’instance cantonale s’est fondée sur
l’impression d’ensemble produite sur le public, doté de
connaissances moyennes de l’anglais. Elle n’a pas violé le droit
fédéral en considérant que l’expression « Riverlake »,
considérée dans son ensemble, ne constitue pas une désignation
descriptive, mais bien plutôt une désignation fantaisiste, certes
dénuée d’originalité particulière. Contrairement à ce que
soutient la recourante, et à l’inverse de ce qui prévaut en droit
des marques, les raisons de commerce sont aussi protégées contre
leur emploi par des entreprises actives dans d’autres branches. Par
ses considérations, l’instance précédente n’a commis aucune
violation de l’art. 951 CO, en lien avec l’art. 956 al. 2 CO (c.
2.3). Selon l’art. 29 al. 2 CC, celui qui est lésé par une
usurpation de son nom peut intenter action pour la faire cesser.
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l’usage du nom
d’autrui porte atteinte à ses intérêts lorsque l’appropriation
du nom entraîne un risque de confusion ou de tromperie ou que cette
appropriation est de nature à susciter dans l’esprit du public,
par une association d’idées, un rapprochement qui n’existe en
réalité pas entre le titulaire du nom et le tiers qui l’usurpe
sans droit. Le degré d’atteinte requis par la loi est réalisé
lorsqu’une association d’idées implique le titulaire du nom dans
des relations qu’il récuse et qu’il peut raisonnablement
récuser. L’usurpation du nom d’autrui ne vise pas seulement
l’utilisation de ce nom dans son entier, mais aussi la reprise de
sa partie principale si cette reprise crée un risque de confusion
(c. 3.1). Dans son mémoire de recours, la demanderesse ne démontre
pas que l’instance inférieure ait commis une violation de l’art.
29 al. 2 CC (c. 3.2). La recourante, qui s’est vu ordonner par
l’instance précédente de transférer à la défenderesse le nom
de domaine www.riverlake.com dans les 30 jours suivant le prononcé
du jugement, ne traite pas dans son mémoire des considérations de
la décision attaquée. Elle affirme seulement que le domaine de
premier niveau « .com » ne s’adresse pas seulement à
la population suisse, et doit pouvoir continuer à être utilisé
dans le monde entier. Comme l’explique à raison la défenderesse,
les noms de domaine en « .com » peuvent être consultés
depuis la Suisse, et atteignent donc aussi le public Suisse.
L’atteinte produit des effets en Suisse. Le blocage d’un nom de
domaine ne peut être limité ni territorialement, ni sur le fond. La
recourante n’explique pas en quoi la décision de l’instance
précédente serait disproportionnée, et ne met pas en cause le
fondement de la prétention au transfert du nom de domaine (c. 4). Le recours est rejeté (c. 5). [SR]