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  • Imitation

08 mai 2008

OG BE, 8 mai 2008, APH 04 4621 V1JUD (d)

sic! 4/2009, p. 244-252, « Expo.02-Karte » (Thouvenin Florent, Anmerkung) ; œuvre, individualité, carte géographique, Expo.02, qualité pour agir, concurrence déloyale, imitation servile, exploitation d’une prestation d’autrui ; art. 2 LDA, art. 10 al. 2 LDA, art. 2 LCD, art. 3-8 LCD, art. 5 LCD, art. 9 al. 1 LCD.

La carte géographique thématique de la demanderesse constitue une œuvre protégée (art. 2 LDA), car elle est le résultat de nombreux choix qui lui confèrent un caractère individuel (c. 2b). La reprise, par la défenderesse, dans sa propre carte, en particulier des signes conventionnels (Signaturen) figurant sur la carte de la demanderesse constitue une violation des droits de reproduction et de mise en circulation (art. 10 al. 2 LDA) de la demanderesse (c. 2c). Du fait qu'il entre en concurrence avec d'autres fournisseurs de cartes de géographie, un office fédéral est activement légitimé au sens de l'art. 9 al. 1 LCD (c. 3a). La LDA et la LCD sont applicables cumulativement (c. 3b). La clause générale de l'art. 2 LCD est subsidiaire par rapport aux dispositions spéciales des art. 3-8 LCD (c. 3c). En l'espèce, en l'absence de reprise directe au moyen de procédés techniques de reproduction, la reprise de la carte de la demanderesse n'est pas prohibée par l'art. 5 lit. c LCD (c. 3d). En raison du caractère public de la carte reprise, l'art. 5 lit. a et b LCD n'est pas non plus applicable (c. 3e-3f). La reprise de la carte de la demanderesse permet à la défenderesse de s'épargner plusieurs phases de production et viole dès lors l'art. 2 LCD (imitation servile) (c. 3h).

25 août 2009

OG ZG, 25 août 2009, SO 2008 43 (d)

sic! 10/2010, p. 721-723, « Le Corbusier Möbel II » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, meuble, Le Corbusier, imitation ; art. 67 al. 1 lit. f LDA, art 3 lit. d LCD, art. 23 al. 1 LCD.

L'utilisation, dans la fabrication de meubles, d'armatures en acier combinées à des rembourrages de forme carrée ne peut pas être protégée en tant que telle par le droit d'auteur (c. 2.3.2). L'art. 67 al. 1 lit. f LDA punit néanmoins la mise en circulation de meubles qui dégagent la même impression générale que des meubles « Le Corbusier » protégés par le droit d'auteur (ATF 113 II 190) (c. 2.3.1-2.3.2). La qualité des matériaux utilisés ne joue aucun rôle et le fait que les imitations ne subissent pas de déformation après utilisation ne constitue pas une différence déterminante. N'ayant pas d'influence sur leur apparence, la manière différente dont les meubles sont désignés ne joue pas non plus de rôle (c. 2.3.2). En lien avec l'art. 23 al. 1 LCD, l'art. 3 lit. d LCD punit la mise en circulation d'imitations serviles d'œuvres d'autrui. L'apparence identique des meubles suffit à faire naître une confusion. Même si elle est utilisée entre guillemets, la désignation « Le Corbusier » est de nature à renforcer la confusion (c. 3.3).

LCD (RS 241)

- Art. 23

-- al. 1

- Art. 3

-- al. 1 lit. d

LDA (RS 231.1)

- Art. 67

-- al. 1 lit. f

02 mai 2011

TF, 2 mai 2011, 4A_78/2011 (d)

sic! 9/2011, p. 504-509, « Le-Corbusier-Möbel III » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, meuble, individualité, Le Corbusier, imitation, contrat de vente, action en interdiction, action en cessation, abus de droit, conclusion, concurrence déloyale ; art. 2 al. 1 LDA, art. 2 al. 2 lit. f LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 62 al. 1 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 3 lit. e LCD, art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP.

À l'exception du remplacement de la condition de l'originalité par celle de l'individualité (c. 2.1), la définition de l'œuvre (art. 2 al. 1 LDA) n'a pas été modifiée par la LDA de 1992 (c. 2.4). Il n'y a pas de raison de revenir sur la décision du TF (ATF 113 II 190) selon laquelle le siège LC 1 ne présente pas un degré d'individualité suffisant (il est similaire à deux sièges créés antérieurement par des tiers) pour être qualifié d'œuvre (des arts appliqués [art. 2 al. 2 lit. f LDA]) et être protégé par la LDA (c. 2.4). Dans le cadre d'une action en interdiction (art. 62 al. 1 lit. a LDA) ou en cessation (art. 62 al. 1 lit. b LDA), le demandeur doit indiquer précisément ce qui doit être interdit au défendeur. Le juge est lié par les conclusions du demandeur (c. 3.2). En l'espèce, la vente, par les intimés (italiens), d'imitation de divers meubles « Le Corbusier » à des clients suisses est régie par le droit italien (art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat déjà. Il ne peut donc pas être considéré que les intimés — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. 3.4). Doit dès lors être rejetée la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de vendre en Suisse (« in der Schweiz zu verkaufen ») ces imitations de meubles (c. 3.4-3.7). Est en revanche admise la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de proposer au public, en particulier à la vente via Internet, ces meubles en Suisse (c. 3.3). La LCD ne prohibe en principe pas l'imitation. Si elle interdit l'utilisation de prestations dans des circonstances particulières relevant de la concurrence, elle ne protège pas pour autant ces prestations en tant que telles (c. 4.1). Du fait que, dans leur publicité pour l'imitation du siège LC 1, ils ne se réfèrent pas à « Le Corbusier », ni n'utilisent son nom, ni ne font allusion à la série de meubles « LC », ni ne font usage des expressions « Original-Qualität » ou « klassische Ausführung », les intimés ne violent pas l'art. 3 lit. d et e LCD (c. 4.2).

02 décembre 2011

OG ZH, 2 décembre 2011, LK110002-0/U (d)

sic! 6/2012, p. 378-386, « Le-Corbusier-Möbel IV » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, individualité, Le Corbusier, auteur, coauteur, imitation, contrat de vente, abus de droit, usage privé, droit de mise en circulation, publicité, dommage, remise du gain, concurrence déloyale ; art. 42 al. 2 CO, art. 10 al. 2 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 100 LDIP, art. 118 LDIP

Vu l'ATF 113 II 190, les modèles de meubles LC2, LC3 et LC4 sont protégés par la LDA ; tel n'est en revanche pas le cas du modèle LC1 (c. V.1.2-V.1.3). Par ailleurs, selon l'Obergericht ZH, les modèles LC6 (Fig. 2a) et LC7 (Fig. 2b) sont protégés par la LDA, car leurs éléments ne sont pas purement fonctionnels (c. V.1.4-V.1.5). Heidi Weber n'a ni la qualité d'auteur d'une œuvre indépendante ou dérivée (c. 2.1) ni la qualité de coauteur des meubles en cause, car elle n'a procédé (avec l'accord de « Le Corbusier ») sur ces meubles qu'à des modifications mineures (simplifications pour la production en série, modifications d'ordre pratique, choix de nouveaux matériaux) qui n'ont pratiquement pas d'incidence sur leur design (c. V.2.2-V.2.3). La vente, par les défendeurs (italiens), d'imitation de meubles « Le Corbusier » à des acheteurs suisses est régie par le droit italien (art. 100 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat, avec la fabrication de la chose ou avec son acquisition par le vendeur. Il ne peut donc pas être considéré que les défendeurs — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent (art. 10 al. 2 lit. b LDA) des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. V.3.2.1-V.3.2.2). Peut rester ouverte la question de savoir si un acquéreur de ces meubles (qui, selon la LDA, violent les droits de la demanderesse) peut, en Suisse, se prévaloir de l'exception d'usage privé (c. V.3.2.2 in fine). Bien que la vente elle-même ne constitue pas une violation de la LDA (c. V.3.3.3), les défendeurs violent l'art. 10 al. 2 lit. b LDA en proposant à la vente en Suisse (grâce, notamment, à l'envoi de prospectus avec des prix en francs suisses à des adresses en Suisse, ainsi qu'à l'utilisation d'un site Internet en allemand consultable en Suisse) ces imitations de meubles (LC2, LC3, LC4, LC6 et LC7) (c. V.3.3.2). Du fait qu'ils ne font pas de publicité avec le nom « Le Corbusier » (et parfois même sans l'abréviation LC), qu'ils ne laissent pas entendre que leurs produits sont ceux de la demanderesse et qu'ils ont les mêmes coûts de production et de publicité que la demanderesse, les défendeurs ne violent pas la LCD (c. VI.1), en particulier l'art. 3 lit. d LCD, en lien avec le modèle LC1 (c. VI.2). Le fait que le défendeur 1 ait détruit des pièces nécessaires au calcul du dommage doit être apprécié en sa défaveur au sens de l'art. 42 al. 2 CO (c. VII.2.1-VII.2.2). Dans la fixation du dommage (art. 42 al. 2 CO), il convient de prendre en compte un bénéfice net de 10 % du prix de vente final des meubles, ce qui prend en considération le fait que les défendeurs ont les mêmes coûts que la demanderesse et le fait que l'absence de frais de licence pour les défendeurs est compensée par les prix plus bas pratiqués par les défendeurs (c. VII.2.4.2). Vu que ce ne sont que les actes de publicité qui sont illicites et qu'ils touchent avant tout les acheteurs individuels (et non les revendeurs), il convient d'estimer à 62 % du bénéfice net le gain à restituer à la demanderesse et de réduire encore légèrement ce montant afin de tenir compte du fait que d'éventuelles ventes du modèle LC1 ne violent ni la LDA ni la LCD (c. VII.2.4.3).

Fig. 2a – Table LC6
Fig. 2a – Table LC6
Fig. 2b – Chaise LC7
Fig. 2b – Chaise LC7

20 janvier 2011

OG ZH, 20 janvier 2011, LL 100003-0/U (d) (mes. prov.)

sic! 9/2011, p. 509-513, « Praliné-Skulptur » ; mesures provisionnelles, risque de récidive, déclaration, reconnaissance d’obligation juridique, peine conventionnelle, œuvre, individualité, sculpture, boîte de pralinés, imitation, action en fourniture de renseignements ; art. 2 LDA, art. 62 al. 1 lit. c LDA, art. 65 a LDA.

Il est rendu suffisamment vraisemblable et il n'est d'ailleurs pas contesté que des sculptures en forme de boîtes de pralinés sont des œuvres au sens de l'art. 2 LDA (c. III.1). Selon l'art. 65 a LDA, la personne qui requiert des mesures provisionnelles doit notamment rendre vraisemblable qu'elle subit ou risque de subir, de manière sérieuse et concrète, une violation de son droit d'auteur (c. III.1 et III.2.1). Une déclaration claire et inconditionnelle par laquelle la partie adverse s'engage à ne pas réitérer le comportement litigieux permet en principe d'écarter un risque de récidive (c. III.2.1). En l'espèce, il y a des raisons objectives d'exclure un risque de récidive étant donné que l'intimée n'a, depuis l'avertissement du requérant, plus proposé à la vente d'imitations de la sculpture du requérant ni donné à penser qu'elle le ferait (c. III.2.2). Bien qu'elle ne prévoie pas de peine conventionnelle, qu'elle ne contienne aucune reconnaissance d'obligation juridique (ohne Anerkennung einer Rechtspflicht) et qu'elle parle de « ‹ sogenanntes › Plagiat », la déclaration par laquelle l'intimée s'engage à ne pas fabriquer, offrir et vendre d'imitations de la sculpture du requérant suffit à écarter un risque de récidive, ce d'autant que l'intimée a notamment fourni les renseignements demandés au sujet de la provenance des imitations (art. 62 al. 1 lit. c LDA) (c. III.2.2 et III.2.3).

19 juillet 2010

TF, 19 juillet 2010, 4A_168/2010 (f)

sic! 11/2010, p. 797-801, « Pneus-Online » (Schlosser Ralph, Remarque) ; medialex 4/2010, p. 231 (rés.) ; motifs relatifs d’exclusion, signes similaires, nom de domaine, pneus-online.com, reifendirekt.ch, pneus, vente, Internet, signe appartenant au domaine public, droits conférés par la marque, risque de confusion, droit au nom, raison de commerce, concurrence déloyale, imitation, risque de tromperie, comportement parasitaire, réputation ; art. 2 lit. a LPM, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 13 LPM, art. 2 LCD, art. 3 lit. d LCD.

Le titulaire des droits exclusifs (droit au nom, droit des raisons de commerce ou droit des marques) sur un signe utilisé comme nom de domaine peut en principe interdire à des tiers d'utiliser ce signe comme nom de domaine (c. 4.1). La partie verbale de la marque « PNEUS-ONLINE.COM (fig.) », qui désigne clairement la vente de pneus sur Internet, appartient au domaine public (art. 2 lit. a LPM) (c. 4.3.2) et ne permet pas de s'opposer à l'utilisation de noms de domaine tels que « pneus-online.ch » ou « pneuonline.ch » (c. 4.4). La LCD ne saurait permettre d'interdire à un tiers l'utilisation d'un signe appartenant au domaine public. Des circonstances particulières peuvent toutefois faire apparaître une imitation comme déloyale, par exemple si l'utilisateur est induit en erreur de façon évitable quant à la provenance du produit imité ou si l'imitateur exploite de façon parasitaire le renom des produits d'un concurrent (c. 5.1). Est déloyal (art. 2, art. 3 lit. d LCD) le fait d'utiliser sciemment des noms de domaine très similaires à « pneus-online.com » et de créer ainsi, de façon délibérée, un risque de confusion pour exploiter, de manière parasitaire, la réputation acquise par la titulaire de ce nom de domaine (c. 5.2.1-5.2.2).

18 septembre 2008

TC VD, 18 septembre 2008, CM08.023643-122/2008 (f) (mes. prov.)

sic! 11/2009, p. 803-813, « Plastic-Clogs II » ; conditions de la protection du design, nouveauté, originalité, présomption, impression générale, combinaison, souvenir à court terme, représentation du design, marque, matériaux, fonction technique, expertise privée, Suisse, territorialité, contrefaçon, concurrence déloyale, imitation, risque de confusion, idée, réputation, comportement parasitaire, mesures provisionnelles ; art. 2 LDes, art. 4 lit. c LDes, art. 8 LDes, art. 21 LDes, art. 3 lit. d LCD.

Selon l'art. 2 al. 1 LDes, un design doit être nouveau et original. Il doit se distinguer nettement de ce qui est connu et ne pas se contenter d'être une variation d'une forme préexistante (c. III.a). Il découle de l'art. 21 LDes que c'est à la personne qui invoque la nullité d'un design de prouver le défaut de nouveauté ou d'originalité (c. III.a). Au sens de l'art. 2 al. 2 LDes, le public cible est aussi bien constitué des producteurs et des commerçants que des consommateurs qui, lors d'une acquisition, effectuent des comparaisons avec les designs existant sur le marché. Seuls les designs antérieurs identiques sont destructeurs de la nouveauté. La nouveauté peut résulter de la combinaison concrète de caractéristiques qui, ensemble, donnent au design son apparence même si, considérées isolément, ces caractéristiques ne pourraient pas prétendre à la nouveauté (c. III.b). Les critères de l'art. 8 LDes sont aussi valables pour déterminer si un design est original au sens de l'art. 2 al. 3 LDes. L'impression générale ne résulte pas des détails, mais des caractéristiques essentielles. Ce sont les facultés d'appréciation des personnes intéressées par une acquisition qui sont déterminantes (c. III.c). Au sens de l'art. 4 lit. c LDes, la protection d'un design est possible dès qu'il existe une solution technique de rechange, à moins que cette solution soit d'un emploi peu pratique ou qu'elle entraîne des coûts de production supérieurs (c. III.d). Cette question est de la compétence du juge du fond (c. III.f). Une expertise privée est traitée comme une simple allégation d'une partie (c. III.e). La nouveauté d'un design peut être donnée malgré la subsistance d'éléments caractéristiques d'autres designs. Même si chacun des éléments d'un design manque en soi d'originalité, leur combinaison peut produire une impression d'ensemble d'originalité (c. III.f). L'examen d'une contrefaçon potentielle se fonde sur l'impression qui demeure dans la mémoire à court terme d'un acquéreur éventuel qui investit une certaine attention à comparer les produits, généralement sans les tenir l'un à côté de l'autre. Les particularités d'un design, qui ne relèvent pas du détail, sont susceptibles d'avoir une influence. Lorsque le design est enregistré, seules les illustrations qui accompagnent le dépôt sont déterminantes. L'adjonction d'une marque ne modifie pas l'impression d'ensemble, pas plus que l'utilisation d'un autre matériau, à moins qu'il ne contribue à donner une impression différente (c. IV.a). Des designs qui ne sont pas commercialisés en Suisse ne peuvent pas donner lieu à une violation de la LDes ou de la LCD (c. IV.c et V.a in fine). En l'espèce, les designs de l'intimée ne présentent pas suffisamment de différences avec ceux des requérantes et doivent dès lors être considérés comme des contrefaçons (c. IV.d-IV.f). Est également applicable en matière de design la jurisprudence du TF selon laquelle l'utilisateur antérieur d'une marque peut non seulement invoquer son droit d'employer le signe à l'avenir dans la même mesure que par le passé, mais également requérir une interdiction de toute atteinte à son encontre fondée sur la LCD si le titulaire utilise sa marque de manière déloyale (c. V.a). Selon l'art. 3 lit. d LCD, la seule imitation d'une marchandise non protégée par une législation spéciale ne constitue pas un acte de concurrence déloyale si le risque de confusion est prévenu d'une autre manière, par exemple par l'utilisation de marques divergentes. Toute utilisation de l'idée esthétique d'autrui n'est pas en soi illicite. L'application de l'art. 3 lit. d LCD suppose en effet l'appropriation d'une position digne de protection dont dispose un tiers sur le marché. Elle nécessite au surplus que l'imitateur exploite la réputation du produit d'un concurrent de façon parasitaire (c. V.c). En l'espèce, les mesures prises par l'intimée sont suffisantes pour éviter que le consommateur ne confonde ses modèles avec ceux des requérantes (c. V.d).

Fig. 159a –Modèle « Cayman » (requérantes)
Fig. 159a –Modèle « Cayman » (requérantes)
Fig. 159b –Modèle « Beach » (requérantes)
Fig. 159b –Modèle « Beach » (requérantes)

18 août 2011

TAF, 18 août 2011, B-3245/2010 (d)

sic! 1/2012, p. 48-51, « Panitumumab » ; certificat complémentaire de protection, brevet, revendication, interprétation de la revendication, combinaison thérapeutique, effets du brevet, imitation, non-évidence, libre appréciation des preuves, expertise, expertise complémentaire ; art. 19 PA, art. 51 al. 2 et 3 LBI, art. 66 lit. a LBI, art. 140b al. 1 lit. a LBI, art. 40 PCF.

En vertu de l'art. 140b al. 1 lit. a LBI, un certificat complémentaire de protection (CCP) ne peut être délivré que pour un produit protégé par un brevet (c. 2.3). Bien que la procédure administrative soit régie par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 19 PA, art. 40 PCF), le juge ne peut s'écarter du résultat d'une expertise que pour de justes motifs. S'il a des doutes sur l'exactitude d'une expertise, il doit ordonner une expertise complémentaire (c. 4). En vertu de l'art. 51 al. 2 et 3 LBI, les revendications — à interpréter grâce à la description et aux dessins — déterminent l'étendue de la protection conférée par le brevet (c. 5.1). La protection conférée par le brevet peut toutefois être plus large étant donné qu'elle s'étend non seulement aux utilisations, mais également aux imitations au sens de l'art. 66 lit. a LBI, pour autant que ces imitations ne découlent pas d'une manière évidente de l'état de la technique (c. 5.2). En l'espèce, la substance active Panitumumab ne remplit pas la condition de la non-évidence (c. 5.2). Par ailleurs, le brevet protège la combinaison thérapeutique — inventive — de deux substances actives et non pas les substances actives elles-mêmes, telles que le Panitumumab (c. 5.1, 5.3-5.4 et 6). N'y change rien le fait que les substances actives puissent être administrées séparément (c. 5.1 in fine et 6).

03 novembre 2008

HG AG, 3 novembre 2008, HSU.2008.15 (d) (mes. prov.)

sic! 6/2009, p. 419-423, « Beutelsuppen » ; concurrence déloyale, Knorr, conditionnement, emballage, sachet, denrées alimentaires, soupe, ingrédient, couleur, force distinctive, impression générale, élément fonctionnel, fonction technique, signe descriptif, besoin de libre disposition, publicité, imposition dans le commerce, imitation, imitation servile, marque, risque de confusion, mesures provisionnelles, action en cessation, valeur litigieuse ; art. 2 LCD, art. 3 lit. d LCD, art. 17 al. 1 ZPO/AG.

La force distinctive d'un conditionnement s'apprécie en considérant celui-ci dans son ensemble et non chaque élément isolément (c. 5.2.4). Est dépourvue de force distinctive originaire la simple combinaison d'éléments techniquement nécessaires (forme carrée d'un sachet de soupe) ou descriptifs et usuels (ingrédients illustrés sur le sachet ou représentation d'une assiette de soupe) (c. 5.2.4-5.2.5). La couleur verte doit demeurer librement disponible dans toutes ses nuances pour des aliments, car elle en suggère la fraîcheur et le caractère naturel (c. 5.2.5). Si la publicité de la marque Knorr n'intervient pas en lien avec le conditionnement Knorr-Beutelsuppe, l'imposition de celui-ci dans le commerce n'est pas démontrée (c. 5.3.2). Une part de marché importante n'est pas propre à démontrer qu'un conditionnement a acquis une force distinctive par son utilisation dans le commerce (c. 5.3.3). Le conditionnement de la requérante est donc dépourvu de force distinctive, tant originaire que dérivée (c. 5.4). L'imitation d'un sachet de soupe ne constitue pas une imitation déloyale d'une gamme ou d'une série de produits, même si de nombreux goûts sont proposés (c. 6.2.2). On ne peut parler de copie servile pour un conditionnement dont la forme est standard dans toute la Suisse sans vider de sa substance le principe de la liberté d'imitation (c. 6.2.3). Le risque de confusion est d'autant moins important que les marques apposées sur les conditionnements des deux parties se distinguent clairement l'une de l'autre (c. 6.2.4). La valeur litigieuse d'une demande en cessation visant l'interdiction de commercialiser des produits de masse sur l'ensemble du territoire suisse se monte, compte tenu de l'importance des parties sur le marché, à 1 000 000 francs (c. 8.2).

Fig. 160a – Bon Chef ABC (intimé)
Fig. 160a – Bon Chef ABC (intimé)
Fig. 160b – Bon Chef Basler Mehlsuppe (intimé)
Fig. 160b – Bon Chef Basler Mehlsuppe (intimé)

26 mai 2009

TF, 26 mai 2009, 4A_86/2009 (d)

ATF 135 III 446 ; sic! 11/2009, p. 793-802, « Maltesers / Kit Kat Pop Choc II » (Schneider Martin, Anmerkung) ; JdT 2010 I 665 ; concurrence déloyale, droit des marques, imitation, similarité des produits ou services, force distinctive, risque de confusion, réputation, exploitation de la réputation ; art. 2 LCD, art. 3 lit. d et e LCD.

Le droit des marques ne constitue pas une loi spéciale par rapport à la LCD. Les règles sur la concurrence déloyale ne sont pas subsidiaires à la protection des marques, mais possèdent leur propre champ d'application. Les conditions de protection spécifiques à chaque domaine doivent donc être examinées de manière autonome. L'application de l'art. 2 LCD n'est pas nécessaire si le comportement incriminé tombe dans le champ d'application des art. 3 à 8 LCD, dont l'applicabilité doit ainsi être examinée en premier. Le fait d'imiter un modèle qui ne possède pas une force distinctive suffisante ne contrevient pas à l'art. 3 lit. d LCD et ne peut être considéré comme déloyal au sens de l'art. 2 LCD qu'en raison de circonstances particulières. Dès lors que la similarité entre deux produits repose uniquement sur des éléments qui ne bénéficient d'aucune force distinctive, le risque de confusion peut être écarté. Agit par contre de manière déloyale celui qui transfère sur son propre produit la renommée d'un produit concurrent au moyen d'une association d'idées. Il suffit qu'un signe distinctif proche de celui d'un tiers soit utilisé de manière à ce que la référence aux produits concurrents apparaisse évidente, indépendamment de l'existence d'un risque de confusion entre les deux produits.

Fig. 162a – Maltesers (recourante)
Fig. 162a – Maltesers (recourante)
Fig. 162b – Kit Kat Pop Choc (intimée)
Fig. 162b – Kit Kat Pop Choc (intimée)

29 octobre 2010

TF, 29 octobre 2010, 2C_852/2009 (d)

sic! 3/2011, p. 176-180, « Försterkäse III » (Simon Jürg, Anmerkung) ; AOP, étendue de la protection, Vacherin Mont d’Or, Försterkäse, fromage, imitation, usurpation, contrefaçon, monopole, cahier des charges, récipient, emballage, sangle de bois, réputation, exploitation de la réputation, similarité des produits ou services, risque de tromperie ; art. 16 al. 7 lit. b LAgr, art. 17 al. 2 lit. a Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 17 al. 3 lit. b et c Ordonnance sur les AOP et les IGP ; cf. N 573 (arrêt du TAF dans cette affaire).

La liberté d’imitation prévaut en principe en Suisse (c. 5). La LAgr ne vise pas à accorder des monopoles sur certains produits. Selon l’art. 16 al. 7 lit. b LAgr, seules les AOP et les IGP enregistrées – et non pas les produits en tant que tels – sont protégées contre toute usurpation, contrefaçon ou imitation (c. 6.4). Bien que l’art. 17 al. 2 lit. a Ordonnance sur les AOP et les IGP interdise l’utilisation commerciale d’une dénomination protégée pour tout produit comparable (non conforme au cahier des charges) ou non comparable (si cette utilisation exploite la réputation de la dénomination protégée) – notamment si la dénomination enregistrée est imitée ou évoquée – et que la similarité entre les produits puisse jouer un rôle dans ce cadre, un produit n’est pas d’emblée interdit du fait qu’il est similaire à un produit protégé par une AOP/IGP (c. 6.4-6.6). L’art. 17 al. 3 lit. b et c Ordonnance sur les AOP et les IGP interdit également la – simple (c. 7.2) – utilisation d’un récipient ou d’un emballage (de nature à créer une impression erronée sur l’origine du produit) ou de la forme distinctive d’un produit protégé par une AOP/IGP (c. 7.1). Il est toutefois nécessaire que ce récipient, cet emballage ou cette forme présente des particularités typiques (c. 7.3). La simple sangle de bois (fonctionnelle) cerclant le fromage n’étant pas spécifique au Vacherin Mont-d’Or (AOP) (tout comme d’ailleurs la forme ronde) et ne constituant pas un emballage particulier, le « Krümmenswiler Försterkäse » (même si des tiers le comparent au Vacherin Mont-d’Or [AOP]) ne peut pas se voir interdire d’être cerclé de la sorte, ce d’autant que le « Krümmenswiler Försterkäse » n’est pas – à la différence du Vacherin Mont-d’Or (AOP) – commercialisé dans une boîte en bois et qu’il porte un nom totalement différent (c. 3) (c. 7.4 et 8).

21 mars 2013

TFB, 21 mars 2013, S2013_001 (d) (mes. prov.)

Mesures provisionnelles, rectification de procès-verbal, contenu d’un procès-verbal, valeur litigieuse, violation d’un brevet, procédé de fabrication, caractéristiques substituées, invention de substitution, produit directement issu d’un procédé, homme de métier, équivalence, imitation, état de la technique, préjudice irréparable, produits pharmaceutiques, contraceptif, drospirénone ; art. 69 CBE 2000, art. 8a al. 1 LBI, art. 66 lit. a LBI, art. 109 LBI, art. 235 al. 2 CPC, art. 235 al. 3 CPC ; cf. N 759 (TF, 21 août 2013, 4A_160/2013 ; sic! 1/2014, p. 29-32, « Antibabypille »).

À défaut de délai établi par la loi, les parties qui souhaitent modifier un procès-verbal doivent adresser leur demande sans délai au tribunal. Une demande de rectification du procès-verbal envoyée dix-sept jours après la réception de celui-ci est tardive. Les parties doivent indiquer précisément les points qu'elles souhaitent voir modifier. Le procès-verbal n'est pas une retranscription exhaustive ou même détaillée des débats, seul le contenu essentiel de ceux-ci est retranscrit (c. 9). L'objet de la mesure provisionnelle doit être décrit avec précision. Dans le domaine des médicaments soumis à autorisation, la description du produit ou le numéro de l'autorisation de mise sur le marché peuvent suffire, si le brevet prétendument violé se rapporte à une substance ou à la formulation d'une composition et que l'autorisation de mise sur le marché se rapporte précisément à ces informations. En l'espèce, il s'agit d'un procédé de fabrication breveté et il n'est pas manifeste que le produit pharmaceutique visé par les mesures est le résultat direct de ce procédé de fabrication. Étant donné que le mode de fabrication des produits visés n'est pas décrit dans l'autorisation de mise sur le marché, la demande de mesures provisionnelles doit exposer en quoi le mode de fabrication des produits visés viole le procédé de fabrication breveté (c. 11). Le deuxième procédé de fabrication utilisé par la défenderesse produit un effet semblable à celui obtenu par le deuxième procédé de fabrication breveté de la recourante (c. 18.1). Il est établi que l'homme du métier aurait pu déduire la solution du deuxième procédé de fabrication de la défenderesse de celle utilisée dans le deuxième procédé breveté de la recourante (c. 18.2). Il est également établi que l'homme du métier aurait considéré la solution du deuxième procédé de fabrication de la défenderesse comme de qualité équivalente à celle du deuxième procédé breveté de la recourante. Le deuxième procédé de fabrication de la défenderesse est donc une imitation du deuxième procédé de fabrication breveté de la recourante (c. 18.3). Le fait que l'imitation du procédé breveté soit basée sur des connaissances appartenant à l'état de la technique ne constitue pas une exception autorisant cette imitation (c. 19). La drospirénone est bien l'une des deux substances essentielles du produit final. Selon la jurisprudence du TF, il n'est a priori pas insoutenable de considérer que l'utilisation de l'une des deux substances essentielles qui composent le produit final constitue le résultat direct d'un procédé de fabrication breveté (c. 22). Il faut admettre qu'il s'agit manifestement d'un préjudice difficile à réparer lorsque la preuve du dommage est elle-même difficile à fournir (c. 23). [AC]

05 février 2014

TAF, 5 février 2014, B-1165/2012 (d)

sic! 6/2014, p. 373 (rés.), « Mischgeräte (3D) » ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe tridimensionnel, forme fonctionnelle, forme disponible sur le marché, signe banal, force distinctive, cercle des destinataires pertinent, imitation, indication de provenance, marque combinée, marque tridimensionnelle, marque tridimensionnelle au sens strict, couleur, décision étrangère, égalité de traitement, matériel dentaire, embout mélangeur ; art. 8 al. 1 Cst., art 2 lit. a LPM, art. 3 al. 1 lit. d LCD.

La recourante a déposé deux marques tridimensionnelles avec revendications de couleur pour des appareils servant à mélanger des composés dans le domaine des soins dentaires (classe 10). Les produits pour lesquels la protection est revendiquée s’adressent aux milieux spécialisés dans la médecine dentaire, en particulier aux dentistes (c. 4). Les deux marques litigieuses représentent une forme possible des biens revendiqués et constituent de ce fait des marques de forme au sens étroit. Ces formes représentent des embouts mélangeurs (c. 5.1). En effectuant diverses recherches sur Internet, l'IPI a constaté qu'il existe sur le marché de nombreux autres embouts mélangeurs, incluant des imitations, dont les combinaisons de forme et de couleurs sont identiques aux signes déposés par la recourante. C'est à raison que l'IPI en a conclu qu'il existe une faible variété de formes sur le marché, et a opposé à la recourante que les combinaisons de forme et de couleurs sont aussi utilisées par la concurrence. Selon la jurisprudence, la variété de formes doit s'apprécier en tenant compte de toutes les formes disponibles sur le marché au moment de la décision d'enregistrement. Les imitations doivent aussi être prises en compte, même lorsqu'elles sont déloyales (c. 5.3 et 5.4). Concrètement, les formes qui peuvent être trouvées sur le marché peuvent certes varier, mais elles sont pourvues d'éléments de base identiques ou à tout le moins similaires (c. 5.6). Pour l'essentiel, les formes déposées correspondent aux formes usuelles. En outre, elles sont à tout le moins influencées par leur fonction, et le fait d'utiliser une couleur correspondant usuellement à un code dans le domaine dentaire, et plus généralement dans le domaine médical, indiquant la taille du produit ou la manière de l'utiliser. Les éléments des signes déposés sont donc courants et leur combinaison n'est ni surprenante, ni originale (c. 5.7). Même les rainures de la partie supérieure du cylindre ne sont pas perçues par les cercles de destinataires pertinents comme une indication de provenance, mais comme un élément fonctionnel. Le fait que la recourante soit peut-être la seule à utiliser cet élément de forme ne permet pas en lui-même de le rendre inattendu et surprenant, et de le faire ainsi sortir du domaine public (c. 5.8). Considérées dans leur ensemble, les marques combinées déposées servent à distinguer les produits de ceux qui sont disponibles dans le secteur considéré, mais elles se distinguent trop peu des variétés de formes attendues, et donc banales, pour être perçues comme des indications de provenance commerciale (c. 5.9). La recourante invoque sans succès la prise en compte de décisions étrangères (c. 7) ainsi que le principe de l'égalité de traitement (c. 8). Le fait qu'un signe puisse être protégé sous l'angle de l'art. 3 al. 1 lit. d LCD n'implique pas nécessairement qu'il ait une force distinctive en droit des marques (c. 7). Les deux marques déposées appartiennent au domaine public, et le recours est donc rejeté (c. 9). [SR]

Embouts mélangeurs
Embouts mélangeurs

06 décembre 2016

TFB, 6 décembre 2016, S2016_004 (d) (mes. prov.)

Action en interdiction, mesures provisionnelles, imitation, doctrine des équivalents, fonction objective, solution équivalente, limitation d'une revendication, Prosectuion History Estoppel, bonne foi, principe de la confiance ; art. 69 CBE ; art. 66 a LBI ; art. 2 CC

Afin de déterminer si l’on se trouve en présence d’une imitation illicite d’une invention brevetée, il convient d’appliquer la doctrine des équivalents. Se posent alors trois questions : 1. Les caractéristiques substituées remplissent-elles la même fonction objective (même effet) ? On se fondera ici sur les principaux effets innovants découlant du brevet. 2. Les caractéristiques substituées et leur même fonction objective sont-elles rendues évidentes à l’homme du métier par l’enseignement du brevet (accessibilité) ? Ce n’est pas l’état de la technique, mais le brevet litigieux qui constitue le point de départ pour répondre à cette question. 3. Enfin, l’homme de métier, en s’orientant selon la lettre de la revendication et à la lumière de la description, aurait-il considéré que les caractéristiques substituées présentent une solution équivalente ? (c. 4.5.2, c. 4.6.1.). Même si la Suisse, comme d’autres pays européens d’ailleurs, ne connaît pas la Prosecution History Estoppel, l’historique de la procédure du dépôt du brevet peut et doit même être prise en considération en particulier si une revendication a été limitée par le déposant afin d’obtenir le brevet. En application du principe de confiance énoncé à l’art. 2 CC, le titulaire du brevet est lié par les limitations qu’il a faites à son brevet dans le cadre de la procédure d’octroi. Il ne peut pas, par la suite, contourner ces limitations par la voie de la doctrine des équivalents (c. 4.5.3). [DK]

02 mai 2017

TF, 2 mai 2017, 4A_565/2016 (f)  

Design, montres, cadran, décision finale, jugement partiel, impression générale, élément caractéristique essentiel, caractère techniquement nécessaire, imitation, similarité des designs, souvenir à court terme, liberté de création, couleurs, expertise privée, étendue de la protection ; art. 90 LTF, art. 2 al. 2 LDes, art. 2 al. 3 LDes, art. 4 lit. c LDes, art. 8 LDes, art. 9 lit. e ODes, art. 3 al. 1 lit. d LCD.  

Une décision intitulée « jugement séparé » constitue une décision finale au sens de l’art. 90 LTF lorsqu’elle met un terme à l’ensemble de la procédure (in casu : rejet intégral tant de la demande que de la demande reconventionnelle) (c. 1.2). L’art. 8 LDes prévoit que la protection d’un design enregistré s’étend aux designs qui présentent les mêmes caractéristiques essentielles et qui, de ce fait, produisent la même impression générale. Les critères de cette disposition peuvent être comparés à ceux utilisés pour établir le caractère d’originalité exigé par l’art. 2 al. 3 LDes (c. 3). Concrètement, le juge doit comparer le design enregistré par le demandeur au design suspecté d’être une imitation tel qu’il est utilisé dans le commerce par le défendeur. Dans un premier temps, le juge doit déterminer les caractéristiques essentielles de chacun de ces designs. Dans un deuxième temps, il lui incombe d’effectuer la comparaison à proprement parler, soit d’examiner si la prétendue imitation présente ou non les mêmes caractéristiques essentielles que le design enregistré et si elle produit, de ce fait, la même impression générale (c. 3.1). Le design est la forme du produit (dans le sens où elle révèle l’apparence de celui-ci) et non pas le produit lui-même. Il s’agit donc de comparer la prétendue imitation avec le design qui fait l’objet de l’enregistrement, c’est-à-dire exclusivement sur la base des représentations ou illustrations figurant au registre (cf. art. 9 lit. e ODes) et non sur la base des modèles effectivement commercialisés par le titulaire de l’enregistrement (c. 3.2). Un design susceptible de revêtir différentes positions doit être déposé puis enregistré dans une position déterminée. Comme il s’agit de se fonder sur ce qui est visible, il est exclu de tenir compte des concepts sous-tendant le design. De même, l’activité créatrice à l’origine du design, le style sous-jacent, le processus de fabrication ou les principes techniques ne peuvent être pris en considération. La valeur du produit n’étant pas un élément du design, la gamme de prix dans laquelle s’insère le produit ne joue aucun rôle au moment de déterminer l’impression générale (c. 3.2). L’impression générale qui se dégage d’un design doit être déterminée en fonction des caractéristiques essentielles du design (soit les éléments qui lui confèrent son empreinte caractéristique), et non sur la base de points de détail. Font partie de ces caractéristiques essentielles principalement les proportions, la disposition des divers éléments composant le design et, dans une certaine mesure, l’originalité des symboles graphiques. Cette énumération n’est pas exhaustive. Une caractéristique ne peut toutefois être qualifiée d’essentielle de manière abstraite, mais seulement en rapport avec le design concret objet de l’examen. Le critère déterminant est l’impression qui subsiste à court terme dans la mémoire d’un acheteur intéressé qui aurait été en mesure de comparer les designs litigieux dans un laps de temps relativement bref, sans toutefois les mettre côte à côte. Les caractéristiques essentielles doivent respecter les exigences du droit au design en ce qu’elles doivent contribuer à la nouveauté du design enregistré (art. 2 al. 2 LDes) et à ce que celui-ci se distingue de manière essentielle des designs existant à la date du dépôt ou de priorité (art. 2 al. 3 LDes). Les caractéristiques qui sont techniquement nécessaires ne sont pas essentielles (cf. art. 4 lit. c LDes). Des éléments à la fois fonctionnels et esthétiques ne sont par contre pas exclus de la protection (c. 3.3). Si les caractéristiques essentielles des designs objets de la comparaison concordent et qu’il en résulte une même impression générale, on est en présence d’une imitation (art. 8 LDes). Pour qu’il y ait imitation, il n’est toutefois pas nécessaire que toutes les caractéristiques essentielles soient reprises. Il suffit que les caractéristiques essentielles imitées ou légèrement modifiées, le cas échéant en combinaison avec d’autres éléments, produisent la même impression générale. Un design particulièrement original bénéficiera d’une sphère de protection plus large qu’un design faiblement original, dont la sphère de protection à l’encontre de formes semblables sera relativement réduite (c. 3.4.1). Si l’impression générale de similitude est retenue, peu importe qu’un nombre significatif de détails diffère par rapport à un design antérieur. Les détails peuvent toutefois jouer un rôle plus important dans les secteurs où la possibilité de création est restreinte. Dans ces domaines, il faut tenir compte du fait que les destinataires du produit consacrent plus d’attention au détail et que la perception des acheteurs est influencée par cette circonstance. Les différences de couleurs ne sont pas déterminantes, à tout le moins lorsque le design est déposé en noir et blanc. L’adjonction d’une marque ne modifie en principe pas l’impression générale, pas plus que l’utilisation d’un autre matériau, à moins que ces apports ne contribuent à donner une impression différente à l’aspect extérieur du produit (c. 3.4.2). Pour décider si un design se distingue suffisamment d’un autre design, ce qui est une question de droit, il n’y a pas lieu de se fonder sur l’opinion de spécialistes. S’agissant des déclarations contenues dans une expertise privée ou faites en audience par l’expert-témoin, celles-ci sont considérées comme de simples allégations d’une partie (c. 3.4.3). Dans le domaine de l’horlogerie, l’emploi d’une lunette de forme circulaire est parfaitement banal et les modèles floraux sont très répandus. Ces éléments ne confèrent donc pas leur empreinte caractéristique aux designs considérés dans le cas particulier, et la perception par l’acheteur potentiel d’une ressemblance s’agissant de ces éléments est sans incidence sur l’impression générale déterminante qui n’est pas la même du moment que les caractéristiques essentielles des designs comparés ne concordent pas (c. 4.2). In casu, l’acheteur potentiel sera d’autant plus attentif aux différences marquées entre les caractéristiques essentielles des deux designs qu’il est en présence de produits fabriqués par un secteur de l’industrie dans lequel une multitude de nouveaux objets sont développés et produits chaque année. Force est ainsi de constater que les caractéristiques essentielles des designs comparés ne concordent pas et que l’impression générale qui se dégage de chacun d’eux n’est pas la même, de sorte que le design du modèle comportant une marguerite sur son cadran ne saurait être qualifié d’imitation du design du modèle de la demanderesse dont le motif principal consiste en un soleil qui s’étend sur la quasi-totalité du cadran (c. 4.2). Une comparaison portant sur le concept à l’origine des produits (indication des heures par le biais d’un papillon placé sur une des pétales en mouvement de la fleur ornant le cadran pour le défendeur, indication de l’heure au moyen de pétales (ou de rayons du soleil) qui s’illuminent progressivement sur le cadran pour le demandeur) n’a pas lieu d’être, l’examen devant se limiter à une comparaison optique des deux designs (c. 4.4). Le fait que deux designs produisent une impression générale différente est insuffisant à écarter automatiquement tout risque de confusion au sens de l’art. 3 al. 1 lit. d LCD. Un risque de confusion indirect peut en effet subsister si l’auteur a fait naître l’idée que deux produits, en soit distincts, proviennent de la même entreprise (c. 5.1). Le fait que chacune des parties ait apposé sa marque sur ses produits tend à exclure le risque de confusion (c. 5.2). Le recours est rejeté. [NT]

Fig. 1074a
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