Disposition

CPC (RS 272)

     Art. 261

          al. 1 lit. b

25 octobre 2011

TF, 25 octobre 2011, 4A_358/2011 (d) (mes. prov.)

Mesures provisionnelles, revirement de jurisprudence, recours, décision incidente, préjudice irréparable, preuve, bonne foi, restauration, bière, signes similaires, réputation, droit au nom, droits de la personnalité, droit d’être entendu, arbitraire, vraisemblance ; art. 9 Cst., art. 29 al. 2 Cst., art. 93 al. 1 lit. a LTF, art. 261 al. 1 lit. b CPC.

Dans le récent ATF 137 III 324 (cf. N 208), rendu après le dépôt du présent recours, le TF a remis en question sa jurisprudence (ATF 134 I 83) selon laquelle une décision incidente portant sur des mesures provisionnelles était susceptible de causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 lit. a LTF) et pouvait sans autre faire l'objet d'un recours au TF. Le TF exige désormais du recourant qu'il démontre qu'une telle décision est, dans le cas concret, susceptible de lui causer un préjudice irréparable de nature juridique (art. 93 al. 1 lit. a LTF). En l'espèce, la recourante devant encore pouvoir se fier à l'ATF 134 I 83, la condition posée par l'art. 93 al. 1 lit. a LTF doit, conformément aux règles de la bonne foi, être considérée comme remplie (c. 1.1). La recourante exploite une brasserie et un restaurant ; elle a confié l'exploitation du restaurant à l'intimée. Dans sa décision de refus de mesures provisionnelles, l'Obergericht LU ne viole pas l'art. 9 Cst. en considérant que le concept de la recourante (une brasserie liée à un restaurant) n'est pas affecté par le fait que l'intimée n'utilise plus, en lien avec ses services de restauration, les signes utilisés par la recourante (pour sa bière, sa brasserie et son restaurant) (cf. Fig. 158a), mais un nouveau signe (cf. Fig. 158b) (qu'elle a déposé comme marque) très similaire à ceux de la recourante (c. 2.2). L'Obergericht LU ne viole pas non plus l'art. 9 Cst. en considérant que l'intimée continue à vendre la bière de la recourante ; la bière est certes vendue en lien avec le nouveau signe de l'intimée, mais ce nouveau signe est très similaire à ceux de la recourante (c. 2.3). En estimant que les affirmations de la recourante au sujet du prétendu préjudice qu'elle subit (notamment une perte de réputation ainsi qu'une violation du droit au nom et du droit de la personnalité) sont trop peu concrètes, l'Obergericht LU ne viole pas le droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst. ; c. 3.1) de la recourante (c. 3.3-3.6). L'Obergericht LU n'applique pas de façon arbitraire l'art. 261 al. 1 lit. b CPC en considérant que la recourante ne rend pas vraisemblable que le comportement de l'intimée risque concrètement de lui causer un préjudice difficilement réparable (c. 4-4.1). Enfin, du fait que la recourante écoule sa bière presque exclusivement par l'intermédiaire de l'intimée et qu'elle n'est donc pas véritablement entrée sur le marché, il n'est pas arbitraire de considérer que la recourante ne rend pas vraisemblable une perturbation de son marché (c. 4.2).

Fig. 158a – Rathaus Brauerei
Fig. 158a – Rathaus Brauerei
Fig. 158b – RESTAURANT Rathaus Brauerei LUZERN (fig.)
Fig. 158b – RESTAURANT Rathaus Brauerei LUZERN (fig.)

09 janvier 2013

TF, 9 janvier 2013, 4A_508/2012 (f) (mes. prov.)

sic! 5/2013, p. 310-314, « Nespresso III » (Berger Mathis, Anmerkung) ; Nespresso, café, capsule de café, machine à café, mesures superprovisionnelles, mesures provisionnelles, recours en matière civile, recours constitutionnel subsidiaire, décision intermédiaire ; art. 93 al. 1 lit. a LTF, art. 98 LTF, art. 30 LPM, art. 161 al. 1 CPC, art. 261 al. 1 lit. b CPC, art. 265 al. 2 CPC, art. 308 al. 1 lit. b CPC, art. 319 lit. a CPC ; cf. N 208 (vol. 2007-2011 ; ATF 137 III 324, sic! 10/2011, p. 589-593, « Nespresso »), N 660 (TF, 26 juin 2012, 4A_36/2012 ; sic! 10/2012, p. 627-632 « Nespresso II »), N 662 (Handelsgericht SG, 21 mai 2013, HG.2011.199 ; sic! 12/2013, p. 759-766, « Nespresso IV ») et N 765 (TF, 27 août 2013, 4A_142/2013 ; sic! 1/2014, p. 32-37, « Nespresso V »).

Suite à l'arrêt TF, 26 juin 2012, 4A_36/2012 (cf. N 660) renvoyant la cause au juge délégué de la Cour civile vaudoise pour qu'il demande une expertise sommaire à un technicien indépendant avant de trancher la question controversée et décisive de savoir si la forme des capsules Nespresso est techniquement nécessaire et, partant, si l'absence de validité de la marque est vraisemblable, le juge délégué a rendu, le 21 août 2012, une nouvelle ordonnance qualifiée d'ordonnance de mesures superprovisionnelles. Il s'agit de déterminer si cette dernière peut ou non faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. Les mesures superprovisionnelles sont rendues en cas d'urgence particulière. Le juge doit ensuite rapidement entendre la partie adverse et statuer sans délai sur la requête de mesures provisionnelles proprement dites. Il rend alors une décision sur mesures provisionnelles qui remplace la décision superprovisionnelle. Les mesures provisionnelles restent en principe en vigueur jusqu'à l'entrée en force de la décision au fond, mais elles peuvent être modifiées ou révoquées si les circonstances ont changé après leur prononcé ou s'il s'avère par la suite qu'elles sont injustifiées. Les mesures provisionnelles rendues par un tribunal de première instance peuvent être déférées à l'autorité cantonale supérieure par la voie de l'appel ou du recours stricto sensu (art. 308 al. 1 lit. b et art. 319 lit. a CPC) ; tandis que celles rendues par le tribunal supérieur statuant sur recours ou comme instance cantonale unique peuvent être portées devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile ou du recours constitutionnel subsidiaire (art. 98 LTF). Les mesures superprovisionnelles ne sont en revanche susceptibles d'aucun recours, ni devant l'autorité cantonale supérieure lorsqu'elles émanent d'une autorité inférieure, ni devant le Tribunal fédéral. L'exclusion de tout recours au Tribunal fédéral contre les mesures superprovisionnelles découle de l'obligation d'épuiser les voies de recours cantonales et se justifie aussi pour des questions de rapidité de la procédure. La procédure provisionnelle doit être poursuivie devant l'autorité saisie afin d'obtenir le remplacement des mesures superprovisionnelles par des mesures provisionnelles. Lorsqu'un recours dirigé contre des mesures provisionnelles est admis et que la décision attaquée est annulée, la cause est renvoyée au juge précédent pour nouvelle décision. La procédure se trouve ramenée au stade où elle se trouvait juste avant que la décision annulée soit rendue. L'annulation de la décision de mesures provisionnelles fait ainsi renaître les mesures superprovisionnelles (c. 1.1.1). Le juge à qui la cause est renvoyée doit à nouveau, et sans délai, statuer sur la requête de mesures provisionnelles proprement dites et donc rendre une nouvelle décision de mesures provisionnelles ordinaires terminant en principe la procédure provisionnelle. Si le juge n'est pas en mesure de statuer à bref délai, par exemple parce qu'il est tenu de requérir au préalable une expertise technique sommaire, il lui appartient, le cas échéant, de statuer sur le maintien, la modification ou la suppression des mesures précédemment ordonnées à titre superprovisionnel pour la durée restante de la procédure provisionnelle jusqu'à ce qu'il ait réuni les éléments nécessaires pour se prononcer, en principe définitivement, sur les mesures provisionnelles requises. Cette décision est une décision intermédiaire qui ne met pas fin à la procédure provisionnelle et sera remplacée par une décision de mesures provisionnelles dès que le juge disposera des éléments nécessaires pour la rendre. Cette décision intermédiaire est prononcée après audition des parties et susceptible de rester en vigueur un laps de temps important. Elle ne saurait être assimilée à une décision sur mesures superprovisionnelles. Ainsi, lorsque le juge statue sur le sort de mesures superprovisionnelles réactivées par l'annulation d'une décision sur mesures provisionnelles et qu'il le fait à titre intermédiaire, pour la durée restante de la procédure provisionnelle, il rend une décision de mesures provisionnelles susceptible de recours (c. 1.1.2). À défaut d'éléments nouveaux, et en particulier avant le dépôt de l'expertise exigée par l'arrêt TF, 26 juin 2012, 4A_36/2012 (cf. N 660]), le juge précédent ne peut pas rendre une nouvelle décision mettant fin à la procédure de mesures provisionnelles. La décision attaquée est ainsi une décision intermédiaire rendue sur la base des éléments disponibles à ce stade, non assimilable à une nouvelle décision mettant fin à la procédure de mesures provisionnelles (c. 4.1). Celui qui requiert des mesures provisionnelles doit rendre vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire fait l'objet d'une atteinte ou risque de le faire et qu'il s'expose ainsi à un préjudice difficilement réparable. L'enregistrement d'une marque n'intervient que si l'IPI n'a constaté aucun motif de nullité formel ou matériel. Il n'est pas arbitraire d'en déduire que la marque est, de prime abord et à défaut d'autres éléments, vraisemblablement valable. Il appartient à ceux qui contestent le bien-fondé de mesures provisionnelles de rendre vraisemblable que la marque sur la base de laquelle elles ont été rendues, ne pouvait pas être protégée (c. 4.2). Dans l'appréciation de l'existence d'un préjudice difficilement réparable, il n'y a pas à opposer les préjudices auxquels les parties sont exposées pour décider s'il y a lieu d'interdire ou non la commercialisation d'un produit par voie de mesures provisionnelles. Pour que des mesures provisionnelles soient justifiées, il suffit que la partie requérante risque un préjudice difficilement réparable. Il n'est pas nécessaire que ce préjudice soit plus important ou plus vraisemblable que celui qu'encourrait la partie adverse au cas où les mesures requises seraient ordonnées (c. 5). [NT]

CPC (RS 272)

- Art. 319

-- lit. a

- Art. 308

-- al. 1 lit. b

- Art. 265

-- al. 2

- Art. 161

-- al. 1

- Art. 261

-- al. 1 lit. b

LPM (RS 232.11)

- Art. 30

LTF (RS 173.110)

- Art. 93

-- al. 1 lit. a

- Art. 98

31 janvier 2017

TFB, 31 janvier 2017, S2017_003 (f) (mes. prov.)

Montre, bracelet de montre, fermoir, action en cession d’une demande de brevet, fardeau de l’allégation, fardeau de la preuve, droit à la délivrance du brevet, mesures superprovisionnelles, vraisemblance, dommage difficilement réparable, restriction au droit de disposer ; art. 23 al. 1 lit. b LTFB, art. 23 al. 3 LTFB, art. 332 CO, art. 3 LBI, art. 29 al. 1 LBI, art. 60 al. 2 LBI, art. 77 al. 1 lit. a LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 261 al. 1 lit. c CPC, art. 261 al. 1 lit. b CPC, art. 262 lit. c CPC.

S’agissant de la prétention en cession d’une demande de brevet au sens de l’art. 29 al. 1 LBI, le demandeur, prétendu ayant droit, doit alléguer et, en cas de contestation, prouver : 1. Qui est l’inventeur de quel enseignement technique, 2. L’acquisition du droit à la délivrance du brevet pour cet enseignement technique par le prétendu ayant droit, 3. La communication au défendeur, soit le demandeur inscrit à l’Office de la demande de brevet litigieuse, de l’enseignement technique de cet inventeur et 4. L’incorporation de l’enseignement technique dans la demande de brevet litigieuse du défendeur. Les allégations générales ne suffisent pas : il convient de présenter l’enseignement technique concret. Lorsqu’il s’agit de co-inventeurs, il convient d’identifier la contribution concrète à l’invention du ou des co-inventeurs considérés. A cette fin, un renvoi général au contenu de la demande de brevet litigieuse ne suffit pas. En effet, c’est précisément la tâche du Tribunal de déterminer d’une part la mesure dans laquelle l’enseignement technique de l’ayant droit et l’enseignement technique de la demande litigieuse correspondent. Lorsque la question est soulevée dans le cadre d’une requête de mesures provisionnelles, la vraisemblance de l’existence des faits correspondant suffit (c. 5). Dans le cas d’espèce, le TFB considère que les éléments essentiels tendant à démontrer que la demande de brevet a été déposée sans droit par la défenderesse ont été invoqués de façon vraisemblable notamment parce qu’il a été exposé (1) quel inventeur a inventé quel enseignement technique, (2) comment le droit au brevet a été acquis par la demanderesse, (3) comment cet enseignement technique a été communiqué sous le sceau de la confidentialité à la défenderesse 1 et (4) comment cet enseignement technique a été décrit et revendiqué dans la demande de brevet litigieuse (c. 8). L’aliénation « en l’occurrence en chaîne entre plusieurs défenderesses » d’une demande de brevet potentiellement usurpée est de nature à causer un dommage difficilement réparable à celui qui rend vraisemblable qu’il est le véritable titulaire du droit à la délivrance du brevet (c. 9). La requête de mesures superprovisionnelles est admise. [NT]

CO (RS 220)

- Art. 332

CPC (RS 272)

- Art. 262

-- lit. c

- Art. 261

-- al. 1 lit. c

-- al. 1 lit. b

LBI (RS 232.14)

- Art. 60

- Art. 29

-- al. 1

- Art. 3

- Art. 77

-- al. 1 lit. a

LTFB (RS 173.41)

- Art. 23

-- al. 3

-- al. 1 lit. b

OBI (RS 232.141)

- Art. 105

-- al. 1 lit. d

01 juin 2016

AG BS, 1 juin 2016, ZK.2016.2 (d) (mes. prov.)

sic! 11/2017, p. 633 ss, « Schmuckanhänger » ; individualité de l’œuvre, unicité statistique, œuvre des arts appliqués, confiscation, action en cessation ; art. 2 al. 2 lit. f LDA, art. 10 al. 2 lit. a LDA, art. 261 al. 1 lit. b CPC.

Le caractère individuel doit s’exprimer au travers de l’œuvre elle-même. L’originalité au sens d’une empreinte personnelle de l’auteur n’est pas nécessaire. D’après la jurisprudence du TF, l’originalité exigée dépend de la marge de manœuvre de l’auteur : si elle est mince, la protection du droit d’auteur sera déjà accordée en cas d’activité autonome d’un degré moindre. Ce qui est déterminant, c’est le concept de l’unicité statistique de Max Kummer : par là il ne faut pas entendre l’unicité statistique de l’existence d’un événement ou d’une chose, mais celle de la configuration de l’œuvre, laquelle doit s’éloigner de qui est habituel en général. L’œuvre ne sera pas unique lorsque la probabilité est grande que le même cahier des charges ait pu conduire à une création identique ou en tout cas substantiellement semblable. Le droit de reproduction au sens de l’art. 10 al. 2 lit. a LDA englobe aussi la reproduction sous une forme modifiée (c. 4.2). En l’espèce, un examen sommaire conduit à admettre la qualité d’œuvre du pendentif litigieux et la violation du droit d’auteur de la requérante. Ce pendentif est une œuvre des arts appliqués au sens de l’art. 2 al. 2 lit. f LDA, la copie a été effectuée en violation du droit de reproduction et son exposition viole le droit de l’art. 10 al. 2 lit. c LDA (c. 4.3). Des mesures provisionnelles impliquent la menace d’une violation d’un droit et d’un dommage difficile à réparer. En outre, ces mesures doivent être urgentes et proportionnées. En l’espèce, l’intimée risque de partir à l’étranger à l’issue de l’exposition. La confiscation de la copie se justifie car l’action en cessation de la requérante est menacée. Ce dommage serait difficile à réparer par les actions habituelles en délivrance du gain et en dommages-intérêts. L’urgence est donnée et le principe de la proportionnalité est respecté, car la confiscation est un moyen approprié et nécessaire pour assurer l’action en cessation (c. 5.3). [VS]

Pièce originale
Pièce originale
Copie prétendue
Copie prétendue