Disposition

     LTF (RS 173.110)

          Art. 86

27 février 2014

TF, 27 février 2014, 2C_783/2013 (d)

ATF 140 II 305 ; sic! 6/2014, p. 362-364, « Gemeinsamer Tarif Sender (GT S) », medialex 2/2014, p. 111, « Tarif commun S », JdT 2015 II 206 ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarifs communs S, recours en matière de droit public, redevance équitable, pouvoir de cognition, équité du tarif, règle des 10%, règle des 3%, calcul de la redevance, déduction des frais d’acquisition de la publicité, comparaison avec l’étranger ; art. 15 WPPT, art. 16 WPPT, art. 190 Cst., art. 82 lit. a LTF, art. 86 al. 1 lit. a LTF, art. 90 LTF, art. 49 PA, art. 47 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA.

Contre une décision du TAF concernant l’approbation d’un tarif par la CAF, c’est le recours en matière de droit public qui est ouvert (c. 1.1). Les critères de l’art. 60 LDA sont contraignants pour la CAF et ils ne représentent pas seulement des lignes directrices pour l’exercice de son pouvoir d’appréciation. Ce sont des notions juridiques indéterminées, dont le TF revoit l’interprétation et l’application. Toutefois, ce dernier fait preuve d’une certaine retenue dans le contrôle des décisions prises par des autorités spécialisées, lorsque des aspects techniques particuliers sont en discussion. Cette retenue vaut aussi pour le TAF, malgré sa cognition illimitée selon l’art. 49 PA (c. 2.2.1). Comme la CAF est une autorité spécialisée, le TAF doit respecter son pouvoir d’appréciation dans l’application des critères de l’art. 60 LDA, ce qui revient finalement à ne sanctionner que les abus ou les excès (c. 2.2.2). D’après la systématique de l’art. 15 WPPT, des réserves au sens de l’alinéa 3 ne sont nécessaires que s’il s’agit de déroger au principe de l’alinéa 1, c’est-à-dire à la redevance équitable elle-même. Aussi longtemps qu’une telle redevance équitable est prévue, l’art. 16 WPPT ne s’applique pas (c’est-à-dire notamment l’obligation de ne pas instaurer, dans le domaine des droits voisins, des exceptions plus larges qu’en droit d’auteur) (c. 6.2). Ni l’art. 12 CR, ni l’art. 15 WPPT, ne précisent ce qu’il faut entendre par redevance équitable. Les législateurs nationaux ont donc une marge de manœuvre relativement large pour transposer les obligations internationales. Le simple fait que les droits d’auteur et les droits voisins doivent tous deux être protégés ne signifie pas qu’ils doivent être valorisés de la même manière : la valeur des droits voisins est indépendante de celle des droits d’auteur et la relation entre ces deux catégories de droits varie selon les circonstances. Il est possible de leur attribuer la même valeur, mais cela n’est pas obligatoire (c. 6.3). Les pourcentages de 10 %, respectivement de 3 %, prévus par l’art. 60 LDA, ne représentent pas des taux normaux, mais sont des limites supérieures qui ne peuvent être dépassées qu’à la condition prévue par l’art. 60 al. 2 LDA, à savoir que lesdits pourcentages ne suffisent pas à procurer une rémunération équitable aux ayants droit. A cette condition, un dépassement est alors possible (c. 6.4). Pour juger de ce qui est équitable, il est difficile de se baser sur des valeurs du marché réelles, car la gestion collective obligatoire empêche justement le développement d’un marché comparable. Si l’on voulait rechercher des valeurs du marché fictives, il faudrait tenir compte des difficultés pratiques auxquelles se heurterait la gestion individuelle, qui conduiraient souvent à une rémunération moindre, voire à une disparition de la rémunération. La détermination d’un prix concurrentiel fictif semble donc plutôt hypothétique (c. 6.5). Dans ces conditions, il ne peut être reproché au législateur d’avoir concrétisé la notion d’équité sur la base d’une appréciation politique, et d’avoir attribué aux droits voisins une autre valeur qu’aux droits d’auteur. Le rapport légal 10 : 3 est compatible avec les traités internationaux et lie le TF d’après l’art. 190 Cst. La loi prévoit certes expressément une possibilité de déroger aux limites maximales, donc au rapport 10 : 3, s’il y a pour cela des raisons particulières. Une interprétation ayant pour conséquence une dérogation générale à ce rapport ne serait toutefois plus conforme à la loi, et n’est pas imposée par l’art. 15 al. 1 WPPT (c. 6.6). La déduction des frais d’acquisition de la publicité de l’assiette de la redevance peut être rediscutée dans le cadre d’un tarif futur, mais le rapport 10 : 3 s’oppose à ce qu’elle soit compensée par un supplément seulement pour les droits voisins, et pas pour les droits d’auteur (c. 7.1). Il n’est pas démontré que le marché en ligne soit comparable à celui de la radio et de la télévision, et l’affirmation selon laquelle les droits de reproduction étaient plus valorisés avant d’être soumis à la gestion collective obligatoire (le 1er juillet 2008) n’est pas suffisamment étayée (c. 7.2). D’après la jurisprudence du TF, les comparaisons tarifaires avec l’étranger sont certes admissibles et judicieuses ; elles n’ont cependant qu’une valeur limitée, vu que les législations nationales connaissent des critères différents et que les circonstances de fait peuvent varier. Néanmoins, étant donné les difficultés à apprécier la rémunération équitable, la comparaison avec l’étranger est encore l’un des critères les moins discutables, pour autant que l’on puisse tenir compte de manière appropriée des différences pertinentes (c. 7.3.1). [VS]

28 juillet 2008

TF, 28 juillet 2008, 2C_234/2008 (d)

ATF 134 II 272 ; sic! 11/2008, p. 811-816, « Greyerzer » ; AOP, cahier des charges, fromage, organisme de certification, TAF, compétence matérielle, denrées alimentaires, arbitraire, égalité de traitement ; art. 8 al. 1 Cst., art. 86 al. 1 lit. d LTF, art. 16 al. 2 lit. b LAgr, art. 166 al. 2 LAgr, art. 7 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 16 al. 3 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 21 al. 2 Ordonnance sur les AOP et les IGP.

Selon la jurisprudence, le TAF est, en vertu de l'art. 166 al. 2 LAgr, l'autorité matériellement compétente lorsqu'un producteur d'une denrée alimentaire bénéficiant d'une AOP attaque une décision d'une autorité cantonale basée sur la troisième partie de l'Ordonnance sur les AOP et les IGP, même si la compétence en matière d'exécution a été conférée aux organes cantonaux de contrôle des denrées alimentaires ; le fait que des questions d'hygiène puissent aussi jouer un rôle n'y change rien (c. 1.3.4). De tels cas doivent être traités par la procédure du droit agricole (c. 1.3.5). Le cahier des charges d'une AOP est un acte qui a le caractère d'une réglementation générale et abstraite, même s'il doit faire l'objet d'une décision d'application. Il peut ainsi, exactement comme les ordonnances, faire l'objet d'un examen à titre préjudiciel de sa conformité à la loi et à la Constitution, que ce soit de manière abstraite ou à l'occasion d'un cas d'application (c. 3.2-3.4). Il est en principe autorisé de fixer dans le cahier des charges d'une AOP des exigences de qualité plus strictes que celles découlant du droit des denrées alimentaires (c. 4.4). Si toutefois ces exigences sont dénuées de justification et ne sont pas respectées par une majorité des producteurs d'une région donnée (c. 4.5-4.6), elles ne sauraient être imposées à un producteur particulier sans violer le droit fédéral et, en particulier, le principe de l'égalité devant la loi (c. 4.7). Le Tribunal administratif cantonal n'est pas compétent pour délivrer directement à une fromagerie le certificat lui permettant de faire usage de l'AOP (c. 5.4). Il est par contre compétent pour vérifier l'application des dispositions protectrices des art. 16-17a Ordonnance sur les AOP et les IGP (c. 5.5).