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02 octobre 2014

TF, 2 octobre 2014, 4A_142/2014 (f)

sic! 1/2015, p. 49-53, « Couronne dentée II », brevets, horlogerie, couronne dentée, affichage, mécanisme d’affichage, guichet de cadran, cadran, grande date, mouvement, montre, dispositif d’affichage, homme du métier, action en interdiction, action en constatation de la nullité d’un brevet, action en fourniture de renseignements, action en cessation, action échelonnée, action en dommages-intérêts, nouveauté en droit des brevets, non-évidence, fardeau de la preuve, fardeau de l’allégation, maxime de disposition, décision partielle, décision incidente, demande auxiliaire, garantie d’un procès équitable, expertise, évaluation du dommage, dommage, indépendance des prétentions, interprétation de la revendication, état de la technique, extension illicite de l’objet du brevet ; art. 123 al. 2 CBE 2000, art. 29 al. 1 Cst., art. 29 al. 2 Cst., art. 42 al. 2 LTF, art. 91 lit. a LTF, art. 93 al. 1 LTF, art. 37 al. 1 LTFB, art. 37 al. 2 LTFB, art. 37 al. 3 LTFB, art. 1 al. 1 LBI, art. 7 al. 1 LBI, art. 7 al. 2 LBI, art. 8 al. 1 LBI, art. 8 al. 2 LBI, art. 26 al. 1 lit. a LBI, art. 26 al. 1 lit. c LBI, art. 51 LBI, art. 58 al. 2 LBI, art. 66 lit. a LBI, art. 72 LBI, art. 73 al. 1 LBI, art. 55 al. 1 CPC, art. 56 CPC, art. 57 CPC, art. 125 lit. a CPC, art. 133 lit. e CPC, art. 237 CPC; cf. N 925 (TFB, 30 janvier 2014, O2012_033 ; sic! 6/2014, p. 376-388, « Couronne dentée ») et N 929 (TFB, 2 juin 2015, O2012_033 ; sic! 12/2015, p. 695-696, « Couronne dentée III »).

Les prétentions en dommages et intérêts et en publication du jugement sont indépendantes de celles en fourniture d’informations et en interdiction. Le jugement accueillant une demande auxiliaire en reddition de comptes, ayant pour objet les renseignements nécessaires à l’évaluation du dommage, est une décision incidente. Le recours au TF, contre une telle décision, n’est pas assujetti aux conditions restrictives de l’art. 93 al. 1 LTF (c. 1). Le juge instructeur a la faculté de limiter la procédure à des questions ou à des conclusions déterminées, dans la perspective de régler séparément certaines des prétentions en cause, par une décision partielle, ou de régler séparément certaines questions de fait ou de droit par une décision incidente, selon l’art. 237 CPC. Il n’en a toutefois, sous réserve d’un abus de son pouvoir d’appréciation, pas l’obligation, même si les parties l’en requièrent. L’art. 125 CPC n’exclut pas que le tribunal rende une décision partielle, relative à certaines prétentions, ou incidente, relative à certaines questions de fait ou de droit, alors même que la procédure n’a pas été préalablement, ni formellement limitée. L’art. 133 lit. e CPC n’impose pas non plus d’annoncer l’éventualité d’une décision partielle ou incidente dans l’invitation aux débats (c. 2). L’homme du métier n’est pas un individu réel, mais une fiction juridique. Il a reçu une formation classique dans le domaine technique en cause et il est doté de compétences et de connaissances moyennes dans ce même domaine. Il n’est pas exempt des idées habituellement préconçues dans ledit domaine. L’homme du métier est typiquement le professionnel appelé à réaliser l’objet décrit dans le brevet ou chargé de résoudre le problème correspondant. Aux termes de l’art. 56 CPC, le tribunal interpelle les parties lorsque leurs actes ou déclarations sont peu clairs, contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets. Il leur donne l’occasion de les clarifier et de les compléter. Il incombe au tribunal d’élucider la situation juridique sur la base des faits régulièrement établis dans le procès. Le tribunal doit statuer selon les règles de répartition du fardeau de la preuve lorsque des faits importants n’ont pas été régulièrement allégués puis prouvés. Il n’est pas autorisé à se prononcer sur la conséquence juridique de faits autres que ceux dûment établis et il doit s’abstenir de spéculer sur l’issue de la cause dans l’hypothèse où les parties auraient procédé différemment. Il ne peut rendre aucun jugement grevé de réserves ou fondé sur des conjectures. En se référant dans le cas d’espèce au rapport de deux experts, dont les connaissances et les aptitudes personnelles permettent de présumer qu’ils se sont référés aux connaissances et aptitudes typiques d’un professionnel appelé à réaliser l’objet décrit dans le brevet ou chargé de résoudre le problème correspondant, le TFB a, implicitement au moins, recouru à la notion d’homme du métier telle qu’elle est décrite ci-dessus. Comme le procès civil est soumis à la maxime des débats selon l’art. 55 al. 1 CPC, et qu’aucune dérogation n’est prévue en matière de brevet d’invention, il appartenait aux parties d’alléguer et de prouver, le cas échéant, que des connaissances particulières et inhabituelles, différentes de celles des deux experts, auraient été nécessaires pour apprécier la validité et la portée du brevet concerné (c. 5). La nouveauté d’une invention n’est détruite que lorsque toutes ses caractéristiques ont été rendues accessibles au public avant le dépôt de la demande de brevet. L’examen de la nouveauté consiste dans une comparaison individuelle entre chaque solution déjà divulguée et l’invention en cause. La nouveauté de cette invention n’est détruite que lorsqu’une antériorité en présente identiquement toutes les caractéristiques. Il est suffisant, mais nécessaire que l’enseignement technique revendiqué soit déjà apporté à l’homme du métier par une solution connue. Il appartient à la partie qui invoque l’absence de nouveauté de la prouver. Tel n’est pas le cas lorsque trois caractéristiques du brevet dont la validité est contestée ne se retrouvent pas dans le brevet antérieur qui lui est opposé au titre d’antériorité détruisant la nouveauté (c. 6). Pour qu’une invention soit brevetable, l’objet du brevet doit être le résultat d’une activité inventive, car la protection légale n’est pas accordée à ce que l’homme du métier peut logiquement développer en connaissance de l’état de la technique et par la simple mise en œuvre de compétences moyennes ; l’invention brevetable est le résultat d’une sagacité plus considérable. L’activité inventive doit être appréciée d’après ce qui était objectivement réalisable à la date déterminante. À la différence du critère relatif à la nouveauté de l’invention, l’appréciation de l’activité inventive nécessite d’appréhender l’état de la technique dans sa globalité. Tous les enseignements et toutes les antériorités accessibles au public constituent dans leur ensemble le patrimoine technique dont un homme du métier, doté de capacités de combinaison normales, dispose librement pour aborder le problème à résoudre. Il faut examiner si l’état de la technique a suggéré une combinaison évidente d’éléments distincts, compte tenu de leur fonction au sein de l’ensemble ; il importe toutefois de ne pas considérer de manière erronée et artificielle, dans une approche rétrospective issue de la connaissance de la solution en cause, une combinaison comme résultant à l’évidence de l’état de la technique (c. 7). Tant selon l’art. 26 al. 1 lit. c LBI, que l’art. 123 al. 3 CBE 2000, le juge peut être requis de constater la nullité du brevet lorsque son objet va au-delà du contenu de la demande de brevet dans la version qui a déterminé sa date de dépôt. L’art. 26 al. 1 lit. c LBI se rattache à l’art. 58 al. 2 LBI qui interdit de modifier les pièces techniques, pendant la procédure d’examen de la demande de brevet, de manière à ce que l’objet de la demande modifiée aille au-delà de leur contenu. Avant le 1er juillet 2008, selon l’art. 58 al. 2 lit. a LBI, la date de dépôt de la demande de brevet était reportée à celle du dépôt des pièces modifiées qui, le cas échéant, en étendaient l’objet. Ce report devait toutefois s’accomplir formellement au cours de la procédure d’examen ; à défaut, le brevet délivré était nul selon l’art. 26 al. 1 ch. 3bis aLBI. L’extension ainsi interdite peut consister aussi bien dans l’adjonction que dans la suppression d’informations. La modification est en revanche admise si elle a pour seul effet de préciser l’invention ou d’éliminer une contradiction. La substitution ou la suppression d’une caractéristique, dans une revendication, est admissible s’il apparaît directement et sans ambiguïté à l’homme du métier que cette caractéristique n’est pas présentée comme essentielle dans la divulgation de l’invention, qu’elle n’est pas indispensable en tant que telle à la réalisation de l’invention, eu égard aux problèmes techniques que celle-ci propose de résoudre et que sa suppression ou sa substitution n’impose pas de vraiment modifier en conséquence d’autres caractéristiques. Si une caractéristique est remplacée par une autre, il est indispensable que celle-ci soit couverte par les pièces techniques initiales. Le TF confirme le jugement du TFB, qui a considéré que, quoiqu’elles aient été importantes, la présence de 8 différences entre le libellé de la revendication No 1 du brevet dans la demande initialement déposée et dans le brevet finalement obtenu, n’a pas étendu l’objet du brevet par rapport à celui figurant dans la demande, en se fondant sur l’analyse de deux experts qui ont retenu que pour l’homme du métier les caractéristiques présentes dans le libellé final de la revendication étaient aisément reconnaissables dans les pièces techniques initiales. Le TF relève que la présence d’une expertise dissidente, qui ne motive pas ses conclusions de manière intelligible, ne suffit pas à démontrer que les modifications apportées seraient incompatibles avec l’art. 26 al. 1 lit. c LBI dont le sens ne peut être qu’un avis d’expert même déraisonnable ou non pertinent suffirait à établir une extension inadmissible de l’objet du brevet, au sens de l’art. 26 al. 1 LBI (c. 8). Le brevet confère à son titulaire le droit d’exiger la cessation d’une utilisation illicite de l’invention, en particulier de l’utilisation à titre professionnel par un tiers, au sens de l’art. 8 al. 1 et 2 LBI et de réclamer la réparation du dommage causé par cette utilisation illicite (art. 66 lit. a, 72 et 73 al. 1 LBI). L’invention est définie par les revendications du brevet, au besoin interprétées d’après la description et les dessins (art. 51 LBI). Les revendications doivent être interprétées comme l’homme du métier les comprend. Les pièces techniques et, en particulier le libellé des revendications s’adressent à l’homme du métier ; l’enseignement technique doit être mis en œuvre par lui et il faut par conséquent apprécier de son point de vue ce qui est rendu accessible par le brevet. La sécurité juridique exige que l’homme du métier puisse savoir à quoi s’en tenir à la seule lecture du brevet. Lorsqu’un doute subsiste parce que la revendication et la description sont équivoques, c’est le titulaire qui doit en pâtir et non les tiers. Le fascicule du brevet peut conférer un sens spécial à un terme technique, divergent du sens courant. Ce qui amène le TF a admettre qu’en l’espèce la notion de « denture » périphérique est un entraînement constitué de dents en nombre indéterminé, y compris, s’il y a lieu, une dent unique ; et que rien ne justifie d’interpréter ce mot, dans le libellé de la revendication, en ce sens que la couverture du brevet serait restreinte aux entraînements périphériques comprenant deux dents au minimum. Le recours de la défenderesse, qui avait conclu reconventionnellement à la constatation de la nullité du brevet et qui contestait également que son mécanisme à dent unique tombait dans la revendication No 1 du brevet qui décrivait une denture à cet emplacement et pour cette fonction, est rejeté. [NT]

CBE 2000 (RS 0.232.142.2)

- Art. 123

-- al. 2

CPC (RS 272)

- Art. 237

- Art. 133

-- lit. e

- Art. 125

-- lit. a

- Art. 57

- Art. 56

- Art. 55

-- al. 1

Cst. (RS 101)

- Art. 29

-- al. 1

-- al. 2

LBI (RS 232.14)

- Art. 58

-- al. 2

- Art. 8

-- al. 2

-- al. 1

- Art. 73

-- al. 1

- Art. 72

- Art. 66

-- lit. a

- Art. 51

- Art. 26

-- al. 1 lit. a

-- al. 1 lit. c

- Art. 1

-- al. 1

- Art. 7

-- al. 2

-- al. 1

LTF (RS 173.110)

- Art. 91

-- lit. a

- Art. 93

-- al. 1

- Art. 42

-- al. 2

LTFB (RS 173.41)

- Art. 37

-- al. 3

-- al. 2

-- al. 1

25 août 2015

TFB, 25 août 2015, O2013_008 (d)

Conditions de la protection du brevet, nouveauté, non-évidence, homme de métier, état de la technique, violation d’un brevet, contrefaçon, brevet européen, décision étrangère, action échelonnée, jugement partiel, action en cessation, action en fourniture de renseignements, action en dommages-intérêts, action en remise du gain, dommage, pistolet de pulvérisation ; art. 66 lit. a LBI, art. 66 lit. b LBI, art. 85 CPC.

La défenderesse, accusée par la plaignante d’avoir violé le brevet européen qu’elle détient sur un pistolet de pulvérisation, allègue un défaut de nouveauté par rapport à deux brevets existants. Le TFB rejette cet argument, et cite une décision concordante du Bundespatentgericht allemand (c. 4.3). La défenderesse allègue également une absence d’activité inventive par rapport au premier des deux brevets cités, l’invention découlant d’une manière évidente de l’état de la technique, qu’elle exemplifie en citant plusieurs autres brevets. Le TFB considère, contrairement au Bundespatentgericht allemand, que les documents cités ne rendent pas l’invention litigieuse évidente pour l’homme du métier (c. 4.4). L’objet réalisé par la défenderesse remplissant toutes les caractéristiques de la première revendication de la plaignante, il constitue une contrefaçon de l’invention brevetée au sens de l’art. 66 lit. a LBI (c. 4.5). La demanderesse prend des conclusions en cessation du trouble, en fourniture de renseignements et en reddition de comptes. Elle conclut en outre à ce qu’il lui soit donné la possibilité, dans une deuxième étape, d’établir et de chiffrer son dommage ou le gain dont elle pourrait demander la délivrance, sans, à ce stade de la procédure, prendre de conclusions chiffrées ou chercher à établir que les conditions d’une action en dommages-intérêts ou en délivrance du gain seraient remplies (c. 5.1). L’action échelonnée suppose l’existence d’une prétention de droit matériel en fourniture de renseignements et en reddition de comptes (c. 5.3). Le TFB considère qu’une telle prétention de droit matériel découle de l’art. 66 lit. b LBI (c. 5.4). Il fait donc droit aux conclusions en cessation et à celles en fourniture de renseignements et en reddition de comptes (c. 5.5). Et puisque la demanderesse a requis et obtenu que la procédure soit suspendue en ce qui concerne les actions pécuniaires jusqu’à droit connu sur l’existence d’une violation et sur l’action en fourniture de renseignements et en reddition de comptes, on ne peut pas lui faire grief de n’avoir pas allégué et établi que les conditions d’une action en dommages-intérêts ou en délivrance du gain seraient remplies (c. 5.6). [SR]

07 octobre 2015

TFB, 7 octobre 2015, O2013_006 (d)

Compétence internationale, droit applicable, internationalité, droit international privé, vraisemblance, action en nullité, divulgation antérieure, revendication, interprétation de la revendication, homme de métier, nouveauté, moyens de preuve, preuve, prise en considération de décisions étrangères, limitation de revendications, répartition des frais de justice ; art. 22 ch. 4 CL, art. 28 LBI, art. 107 al. 1. lit. f CPC, art. 1 al. 2 LDIP ; cf. N 936 (TFB, 11 février 2015, S2014_001 ; sic! 9/2015, p. 522-525, « Dibenzothiazepinderivat »).

Le TFB applique le droit international privé suisse à un état de fait international (c. 2.1 et 2.2 ; cf. N 936). Il rappelle également que l’action en nullité d’un brevet appartient à toute personne qui peut justifier d’un intérêt juridique (art. 28 LBI, c. 2.3). Concernant l’usage antérieur, il convient de distinguer entre la façon dont l’invention aurait effectivement été divulguée et la question de savoir si l’objet divulgué est effectivement couvert par les revendications. Pour déterminer si une divulgation a effectivement eu lieu, il faut établir une chaîne d’éléments substantifiés qui permette d’établir concrètement qui, avant la date de priorité, a rendu public quel objet technique, à quel moment et dans quelles conditions. La certitude absolue ne peut pas être exigée. Il suffit que le tribunal n’ait plus de doutes sérieux quant à la réalité des faits allégués ou que les doutes qui demeurent apparaissent légers. Cette preuve peut se faire de différentes manières : en fournissant une facture ou un bulletin de livraison à un tiers non tenu au secret, daté, pour autant qu’un lien concret puisse être établi avec l’objet technique en question (par ex. un numéro d’identification tel que le numéro de la machine) ; en soumettant un document qui permette d’attribuer un enseignement technique spécifique à l’objet en question (tel que, par exemple, un dessin technique qui porte un numéro d’identification ou auquel ce dernier peut être clairement attribué, que ce soit directement ou indirectement) (c. 4.1.1. et 4.1.2.). La preuve de l’état du développement technique de l’objet appartient également au demandeur (c. 4.1.3). L’interprétation d’une revendication qui se fonde sur la description de l’invention doit se faire au travers des yeux de l’homme de métier et à la lumière de l’état de la technique, des désavantages qui en découlent et de la solution que le brevet se propose d’apporter (c. 4.2.2.2). Prise en compte de décisions de l’OEB et de décisions étrangères (c. 4.2.2.3). Le Tribunal fédéral des brevets peut restreindre les revendications (c. 5). La limitation substantielle des revendications par la défenderesse entraîne un désistement d’action proportionnelle du demandeur (c. 6). Une limitation répétée des revendications par la défenderesse qui n’est pas considérée comme nécessaire par le tribunal entraînera une répartition des frais défavorable à la défenderesse (c. 6). [DK]

30 janvier 2014

TFB, 30 janvier 2014, O2012_033 (f)

sic! 6/2014, p. 376-388, « Couronne dentée » ; brevet, horlogerie, violation d’un brevet, couronne dentée, affichage, mécanisme d’affichage, guichet de cadran, cadran, grande date, mouvement, montre, dispositif d’affichage, homme de métier, action en interdiction, action en constatation de la nullité d’un brevet, action en fourniture de renseignements, action échelonnée, description du comportement illicite, cumul des titres de protection, extension illicite de l’objet du brevet, nouveauté en droit des brevets, non évidence, conclusions précises, remise du gain, fardeau de la preuve, fardeau de l’allégation, maxime de disposition, concurrence déloyale ; art. 26 al. 1 lit. a LTFB, art. 26 al. 4 LTFB, art. 41 LTFB, art. 10 des Directives procédurales du TFB du 28.11.2011, art. 8 CC, art. 26 al. 1 lit. a LBI, art. 26 al. 1 lit. c LBI, art. 26 al. 1 lit. d LBI, art. 51 al. 1 LBI, art. 58 al. 2 LBI, art. 66 lit. a LBI, art. 66 lit. b LBI, art. 72 LBI, art. 125 al. 1 LBI, art. 3 al. 1 lit. b LCD ; cf. N 916 (TF, 2 octobre 2014, 4A_142/2014 ; sic! 1/2015, p. 49-53, « Couronne dentée II ») et N 929 (TFB, 2 juin 2015, O2012_033 ; sic! 12/2015, p. 695-696, « Couronne dentée III »).

L’art. 41 LTFB implique un transfert automatique au TFB de tous les procès qui n’ont pas encore été plaidés sur le fond au 1er janvier 2012, quel que soit l’avancement de l’instruction. Selon l’art. 10 des Directives procédurales du TFB, le TFB reprend le traitement des procédures qui, au moment de l’entrée en vigueur de la LTFB, sont pendantes devant les tribunaux cantonaux, dans la mesure où la juridiction cantonale concernée justifie que les débats principaux n’ont pas encore eu lieu. L’interprétation du droit cantonal revient aux juridictions cantonales auxquelles il appartient de déterminer à quel moment il convient d’admettre, selon leur propre procédure cantonale, que les débats principaux sont réputés avoir eu lieu (c. 14). Les actions en cessation de trouble doivent viser l’interdiction d’un comportement précisément décrit. La partie condamnée doit apprendre ce qu’elle n’est plus en droit de faire, et les autorités d’exécution ou les autorités pénales doivent savoir quel comportement elles doivent empêcher ou peuvent assortir d’une peine. Si l’on fait valoir auprès de ces autorités que le défendeur a répété un acte prohibé malgré l’interdiction du juge civil, celles-ci doivent seulement avoir à vérifier si les conditions factuelles invoquées sont remplies. En revanche, elles ne doivent pas être amenées à qualifier sur le plan juridique le comportement en cause. Mentionner l’essence des revendications d’un brevet dans les conclusions visant l’interdiction de sa violation peut s’avérer insuffisant. Le mode de violation du brevet ou le mode d’exécution allégué doit ainsi être décrit de façon à ce qu’un examen purement factuel permette sans autre de constater si on est en présence d’une forme d’exécution prohibée. Il faut donc décrire la forme de violation comme un acte technique réel, à travers certaines caractéristiques qui ne nécessitent aucune interprétation juridique ou interprétation de termes techniques ambigus. Ceci en particulier parce que le dispositif du jugement, éventuellement interprété sur la base des considérants, doit exposer concrètement quelles caractéristiques du mode d’exécution sont attaquées en tant que mise en œuvre de l’enseignement technique. Il ne suffit ainsi pas de répéter les caractéristiques mentionnées dans le brevet. Une description du mode de violation est nécessaire; et ce n’est que lorsque les caractéristiques du mode d’exécution utilisant le brevet litigieux sont concrètement désignées qu’une éventuelle interdiction peut être exécutée. Ce n’est en fait que lorsque l’énoncé de la revendication est spécifique au point qu’un examen purement factuel permet sans autre de constater si on est en présence d’une forme d’exécution prohibée et que cet énoncé ne nécessite aucune interprétation juridique ou interprétation de termes techniques ambigus, que la désignation concrète des caractéristiques techniques concrètes du mode d’exécution peut se confondre avec l’énoncé de la revendication qui fonde l’interdiction. Ce qui a été admis en l’espèce (c. 17). Est réputée constituer une extension allant au-delà du contenu des pièces initialement déposées, une modification qui n’est pas divulguée à la date pertinente (de dépôt ou d’un éventuel report au sens de l’art. 58 a LBI), soit un enrichissement technique du contenu de la demande et donc un apport d’informations de nature technique qui ne se déduit pas – directement et sans ambiguïté – de l’intégralité du contenu technique – explicite ou implicite – soumis à la date pertinente. Pour toutes les prétentions relevant du droit privé fédéral, l’art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve auquel correspond, en principe, le fardeau de l’allégation et, partant, les conséquences de l’absence de preuve ou d’allégation. La partie qui entend se prévaloir d’un motif de nullité d’un brevet supporte le fardeau de la preuve, à moins que la loi n’en dispose autrement, conformément à l’art. 8 CC. Un état de fait qui n’a pas été allégué par la partie qui en supporte le fardeau ne peut pas être admis par le juge et, si en raison d’un défaut d’allégation, un état de fait ne peut pas être pris en considération ou demeure incertain, le juge doit se prononcer en vertu de l’art. 8 CC en défaveur de la partie qui supporte le fardeau de la preuve. Dès lors que la partie qui souhaite se prévaloir du motif de nullité découlant d’une extension illicite de l’art. 26 al. 1 lit. c LBI supporte le fardeau de la preuve de cette extension illicite et doit alléguer de façon détaillée d’une part la modification en cause et d’autre part la détermination de l’homme du métier et l’étendue de ses connaissances à la date pertinente (date de dépôt ou de report). Le même principe d’allégation détaillée relative à l’homme du métier et à ses connaissances s’applique à la question de l’activité inventive et à la suffisance de description au sens des art. 26 al. 1 lit. a (en relation avec l’art. 1 al. 2) et 26 al. 1 lit. b LBI. Il ne suffit dès lors pas de simplement alléguer qu’une modification particulière ne serait pas explicitée dans le contenu des pièces initialement déposées (à la date de dépôt ou de report). Encore faut-il identifier l’homme du métier (typiquement par sa profession et/ou sa formation) et ses connaissances générales (typiquement les sujets techniques qu’il doit maîtriser en sa qualité d’homme du métier déterminé) à la date pertinente et expliquer pour quels motifs une telle modification ne se déduirait pas du contenu explicite des pièces initialement déposées à l’aide des connaissances de l’homme du métier (c. 19). Tel n’a pas été le cas en l’espèce. La Cour a retenu en outre qu’il résultait de l’examen des pièces modifiées en cours de procédure d’enregistrement qu’aucune extension illicite n’était intervenue (c. 20 et c. 21-23). Concernant la nouveauté, la Cour rappelle qu’une combinaison avec d’autres documents n’est pas admissible et considère qu’il convient dès lors d’admettre la nouveauté de l’invention revendiquée par rapport aux deux antériorités invoquées (c. 26). Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si pour l’homme du métier elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. L’homme du métier joue ainsi un rôle décisif dans l’appréciation de l’activité inventive. À l’instar de la question de l’examen de l’extension illicite, l’appréciation de l’activité inventive présuppose une allégation détaillée quant à la détermination de l’homme du métier et ses connaissances à la date pertinente par la partie qui souhaite se prévaloir du motif de nullité correspondant au sens de l’art. 26 al. 1 lit. a (en relation avec l’art. 1 al. 2) et 26 al. 1 lit. b LBI. Cette information est nécessaire afin de déterminer si ses connaissances générales auraient incité et permis à l’homme du métier de combler une lacune entre une ou plusieurs antériorités déterminées (par exemple une ou plusieurs publications et/ou usage public antérieur) et l’invention revendiquée. Une telle allégation détaillée est également nécessaire afin de déterminer si ses connaissances générales auraient permis à l’homme du métier de combiner les enseignements contenus dans des antériorités différentes afin de les réduire en un mode d’exécution combinée (réelle) couvert par l’invention revendiquée. Le défaut d’une allégation détaillée en ce sens contraint en principe le juge à rejeter le motif de nullité invoqué, ainsi que cela a été fait en l’espèce, la demanderesse ayant présenté l’homme du métier uniquement comme un praticien du domaine technologique normalement qualifié qui possède des connaissances générales dans le domaine concerné et qui est censé avoir eu accès à tous les éléments de l’état de la technique (c. 32). Selon l’art. 125 al. 1 LBI, dans la mesure où, pour la même invention, un brevet suisse et un brevet européen ayant effet en Suisse ont été délivrés au même inventeur ou à son ayant cause avec la même date de dépôt ou de priorité, le brevet suisse ne porte plus effet dès la date à laquelle le délai pour former opposition au brevet européen est échu, ou la procédure d’opposition a définitivement abouti au maintien en vigueur du brevet européen. Dans le contexte de la LBI, une invention se comprend comme une règle de comportement technique portant sur l’utilisation des éléments naturels ou des forces de la nature et aboutissant à un résultat déterminé. L’invention est définie dans une ou plusieurs revendications du brevet (art. 51 al. 1 LBI). En l’espèce, la revendication 1 du brevet suisse concerné ne définit pas la même invention que celle de la revendication 1 du brevet européen. Le brevet suisse décrit ainsi une règle différente de celle du brevet européen. Par conséquent, les deux brevets ne protègent pas la même invention et les conditions d’application de l’art. 125 LBI ne sont pas réalisées (c. 37). L’art. 72 al. 1 LBI prévoit que celui qui est atteint ou menacé dans ses droits par l’un des actes mentionnés à l’art. 66 LBI, notamment par la contrefaçon ou par l’imitation d’une invention brevetée (art. 66 lit. a LBI) peut demander la cessation de cet acte. Comme en l’espèce la demanderesse a prouvé que la défenderesse viole le brevet litigieux, comme l’atteinte a déjà commencé et, comme selon la correspondance échangée entre les parties respectives et leurs conseils, et selon les contestations intervenues dans la présente procédure, elle n’a pas pris fin, il convient d’ordonner à la défenderesse – sous la menace de l’art. 292 CP, soit l’amende – de cesser tout usage du mécanisme breveté en relation avec des montres (c. 40). Quand il est, comme en l’espèce, impossible pour le demandeur de chiffrer ses prétentions lorsque l’ignorance résulte de faits qui sont entre les mains du défendeur ou d’un tiers, le demandeur peut intenter une action dite échelonnée, dans laquelle une conclusion en reddition de comptes est liée à une conclusion indéterminée en paiement de la somme due. La seconde est principale, la première est complémentaire. L’action en renseignement découle de l’art. 66 lit. b LBI (c. 41). [NT]

06 octobre 2014

TFB, 6 octobre 2014, S2014_006 (d) (mes. prov.)

sic! 3/2015, p. 177-181 « Kaltmilchschäumer » ; mesures provisionnelles, action en interdiction, intérêt digne de protection, risque de récidive, urgence, conclusions précises, photographie, usage antérieur, conditions de la protection du brevet, nouveauté en droit des brevets, vraisemblance, témoin, allégation des parties, sûretés, procédé de fabrication, mousse de lait, machine à café ; art. 59 al. 2 lit. a CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 264 CPC.

Le litige porte sur un procédé de fabrication automatique de mousse de lait « Milchschaum » froide (c. 1.3). Les demanderesses requièrent des mesures d’interdiction de fabrication, d’offre, de promotion, de vente ou de mise sur le marché des machines à café de la défenderesse (c. 2.1). Elles sont en effet susceptibles d’être équipées d’un système de fabrication de mousse de lait qui viole leurs brevets suisse et européen (c. 2.2). La défenderesse fait valoir la nullité du droit conféré par les brevets en raison de l’absence de nouveauté (c. 2.8). En l’espèce, une récidive est à craindre, car la défenderesse n’a pas contesté que son produit constitue une violation de brevet. Elle conteste la validité du brevet et n’a fait aucune déclaration d’abstention inconditionnelle. Elle a également continué à produire et distribuer le produit jusqu’à épuisement de son stock, cinq mois après avoir reçu un avertissement de la demanderesse. On peut considérer dans un tel cas qu’un risque de violation existe et que l’intérêt digne de protection pour une action en interdiction « Unterlassungsbegehren » est donné (art. 59 al. 2 lit. a CPC) (c. 5.2). Le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu’une prétention dont il est titulaire est l’objet d’une atteinte ou risque de l’être et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 CPC). La condition de l’urgence est en l’espèce remplie, la requête de mesures provisionnelles ayant été déposée peu après qu’une décision sur opposition confirmant la validité du brevet fut rendue par l’OEB (c. 13). La formulation d’une requête de mesures provisionnelles doit être précise. Une photo peut suffire à concrétiser la forme et les dimensions d’un objet et est donc formellement admissible (c. 7.2 et 7.3). Le manque de nouveauté découlant d’un usage antérieur ne peut être pris en considération sur la base d’une simple déclaration non substantifiée par des documents supplémentaires tels que des photos ou des dessins techniques lorsque les faits remontent à plus de dix ans et que l’allégation se fonde sur la seule mémoire de celui qui la formule. Même dans le cas de mesures provisionnelles, les critères relatifs à l’usage antérieur doivent être appliqués strictement, en particulier lorsqu’il s’agit de déterminer si ce sont effectivement les mêmes spécificités techniques qui ont été rendues accessibles au public (c. 10.2). Dans la mesure où la défenderesse argumente que les machines incriminées ne sont plus commercialisées, des mesures provisionnelles d’interdiction ne sont pas susceptibles de lui causer un dommage (art. 264 CPC) (c. 14). [CH]

10 juin 2016

TFB, 10 juin 2016, O2012_043 (d)

Train, brevet, nullité d’un brevet, nouveauté en droit des brevets, confidentialité, obligation implicite de confidentialité, divulgation antérieure, fardeau de l’allégation, fardeau de la preuve ; art. 1 al. 1 LBI, art. 26 al. 1 lit. a LBI, art. 35 al. 1 LBI, art. 35 al. 2 LBI.

Selon la jurisprudence de l’OEB, la communication d’une information technique à un client n’est pas à considérer comme confidentielle. Sans indication expresse que l’information technique transmise doit être conservée secrète et dans le cadre d’une relation commerciale usuelle, la partie communiquant l’information peut admettre que l’information transmise fait partie du domaine public, et le bénéficiaire de l’information compter avec le fait qu’il n’existe aucune limitation concernant l’utilisation de cette information et sa communication à des tiers. Une obligation de confidentialité implicite peut résulter des circonstances dans lesquelles la communication de l’information concernée est intervenue. Elle peut par exemple résulter d’une collaboration aux travaux de recherche et de développement lorsqu’un intérêt commun au maintien de la confidentialité découle clairement de la nature de cette collaboration. L’existence d’une telle obligation implicite de confidentialité ne saurait toutefois être admise à la légère. Elle constitue plutôt l’exception et doit s’imposer comme découlant sans doute possible des circonstances. Il incombe à la partie qui se prévaut de l’existence d’une telle obligation implicite de confidentialité de l’alléguer et de l’établir. En l’absence d’un intérêt tant unilatéral que commun au maintien de la confidentialité d’une information transmise sans réserve, l’existence d’une obligation tacite de confidentialité ne saurait être admise. Le fait que l’information ne soit pas communiquée uniquement à un partenaire commercial potentiel mais également à des tiers parle contre l’existence d’une obligation tacite de confidentialité qui résulterait de la nature particulière de la relation commerciale nouée avec ce partenaire potentiel. Ce d’autant plus lorsque les indications techniques fournies sont si détaillées qu’elles mettent le professionnel, sous réserve de quelques adaptations et modifications usuelles, en situation de réaliser l’objet technique décrit. Lorsque les informations transmises ne consistent pas en un concept au contenu général qui ne pourrait être réalisé que moyennant un important effort de développement, elles ne sauraient avoir été fournies justement en vue d’un tel développement qui comporterait une obligation implicite de confidentialité. Lorsque la communication n’est pas intervenue dans le cadre d’un contrat de mandat mais en réponse à un appel d’offres, les informations transmises n’ont pas à être conservées secrètes (c. 4.7.4). Le brevet délivré est donc nul faute de nouveauté au sens de l’art. 26 al. 1 lit. a LBI en relation avec l’art. 1 al. 1 LBI (c. 4.8). [NT]

28 novembre 2016

TF, 28 novembre 2016, 4A_427/2016 (d)

Nouveauté, confidentialité tacite, divulgation antérieure, état de la technique, fardeau de la preuve, fardeau de l’allégation, maxime des débats ; art. 54 al. 1 CBE 2000, art. 54 al. 2 CBE 2000, art. 1 al. 1 LBI, art. 7 LBI, art. 7 al. 2 LBI, art. 55 al. 1 CPC.

Après avoir rappelé sa jurisprudence antérieure (ATF 117 II 480 c. 1a, p. 481-482) concernant les notions de nouveauté et divulgation susceptibles de la ruiner (c. 2), le TF examine la question de l’existence d’une éventuelle obligation tacite de confidentialité entre les parties (c. 3.5). Il souligne préalablement, à propos de l’exigence de nouveauté, qu’il n’est pas nécessaire qu’elle intervienne à l’attention d’un cercle indéterminé de personnes pour que la divulgation d’une invention en ruine la nouveauté. Il suffit que la transmission de l’invention en dehors du cercle des personnes tenues au secret vis-à-vis de l’inventeur et par là-même son accessibilité au public, ne puissent pas être exclues. Une seule vente ou une seule présentation de l’objet qui matérialise ou comporte l’information provoque sa divulgation ; en cas d’annonce à un ou à quelque(s) destinataire(s) particulier(s) déterminé(s), il convient donc de se demander si, au vu des circonstances, il doit être compté avec le fait qu’une diffusion ultérieure suivra, ou si au contraire elle devrait être exclue en vertu par exemple d’une obligation tacite de confidentialité qui se déduirait des circonstances particulières du cas d’espèce (c. 2). En présence d’une invention antérieure réalisée de manière indépendante, la question consiste à déterminer s’il n’existe aucune publication, respectivement aucune anticipation (Vorwegnahme) susceptible de ruiner la nouveauté parce que toutes les personnes qui avaient connaissance de l’enseignement technique souhaitaient le conserver secret ou étaient tenues de le faire et que par conséquent sa divulgation ultérieure apparaît comme exclue. Cela implique au minimum de prouver qu’un intérêt au maintien du secret existait effectivement et que la confidentialité était assurée de telle manière qu’en pratique une divulgation antérieure de l’enseignement technique apparaît comme exclue. Le fait que les personnes ayant eu connaissance de l’enseignement technique avant la date de priorité menaient ensemble des activités de développement ne permet pas à lui seul de conclure qu’une transmission, et par là-même une publication de l’enseignement technique était exclue. Même le fait établi d’une collaboration en matière de développement des personnes qui ont eu connaissance de l’enseignement technique avant la date de priorité ne permet pas de conclure que la connaissance antérieure de l’enseignement technique par des tiers non parties à cette collaboration ne constituerait pas une divulgation ruinant la nouveauté (c. 3.5). Dans le cas d’espèce, l’autorité précédente a considéré que la collaboration en matière de développement invoquée entre les parties n’était pas suffisante pour permettre de conclure que l’enseignement technique n’avait pas fait l’objet d’une divulgation détruisant la nouveauté dans le cadre des échanges de correspondance antérieurs de près de deux ans et demi à la date de priorité du brevet contesté (c. 3.5). [NT]

29 août 2017

TFB, 29 août 2017, O2015_011 (d)

Nouveauté, activité inventive, test clinique, divulgation antérieure, homme de métier, contrat de confidentialité; art. 54 al. 1 CBE, art. 54 al. 3 CBE, art. 56 CBE.

Si les participants à des tests cliniques ont signé des contrats de confidentialité, dans le cas où ces tests cliniques ont eu lieu avant le dépôt d’un brevet ou la date de priorité, la nouveauté des revendications concernées ne sera pas déniée sur la base d’un usage antérieur (c. 4.4.3.3). Un objet ne sera considéré comme appartenant à l’état de la technique que dans les conditions suivantes, telles que formulées par les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'Office européen des brevets, partie G, chap. IV, 2 : « Un objet ne peut être considéré comme ayant été mis à la disposition du public et par conséquent comme compris dans l'état de la technique conformément à l'article 54(1) que si les informations fournies à l'homme du métier sont suffisantes pour lui permettre, à la date pertinente (cf. GVI, 3), de mettre en pratique l'enseignement technique qui fait l'objet de la divulgation, compte tenu également des connaissances générales qu'il est censé posséder en la matière à cette date (cf. T 26/85, T 206/83 et T 491/99). Lorsqu'un document de l'état de la technique divulgue un objet qui est pertinent pour la nouveauté et/ou l'activité inventive de l'invention revendiquée, la divulgation de ce document doit être telle que l'homme du métier puisse reproduire cet objet en faisant appel à ses connaissances générales (cf. GVII, 3.1). » (c. 4.5.4.1). [DK]

02 mai 2019

TFB, 2 mai 2019, S2018_007 (d)

sic! 1/2020, p. 38-42, « Sägebletter » ; conditions de la protection du brevet, nouveauté en droit des brevets, revendication, interprétation de la revendication, homme de métier, état de la technique, divulgation antérieure, brevet européen, violation d’un brevet, caractéristiques de l’invention, description de l’invention, dessin, mesures provisionnelles, vraisemblance ; art. 69 al. 1 CBE 2000, art. 1 LBI, art. 7 al. 1 LBI, art. 7 al. 2 LBI, art. 51 al. 3 LBI, art. 77 LBI, art. 261 al. 1 CPC.

Les plaignantes, co-titulaires d’un brevet sur un outil destiné à être utilisé avec une machine, réclament le prononcé de mesures provisionnelles contre la défenderesse (c. 1), en invoquant une violation de la partie suisse de leur brevet européen (c. 7). Selon l’art. 77 LBI, en lien avec l’art. 261 al. 1 CPC, le juge doit ordonner les mesures provisionnelles nécessaires lorsque la partie requérante rend vraisemblable qu’une prétention dont elle est titulaire a été l’objet d’une atteinte ou risque de l’être (art. 261 al. 1 lit. a CPC) et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 lit. b CPC). Un fait allégué est vraisemblable lorsque certains éléments parlent en faveur de son existence, même si le tribunal tient encore pour possible qu’il ne se soit pas produit. Les exigences en matière de vraisemblance dépendent du caractère plus ou moins incisif des mesures requises. Si elles affectent gravement la partie adverse, les exigences sont plus élevées. Si à l’inverse les mesures l’affectent peu, notamment lorsqu’elles sont purement conservatoires, les exigences sont plus faibles (c. 8). L’homme du métier pour lequel l’activité inventive est évaluée n’est ni un expert du domaine technique dans lequel se pose le problème résolu par l’invention, ni un spécialiste disposant de connaissances exceptionnelles. Il ne connaît pas l’état de la technique dans son ensemble, mais il dispose de solides connaissances et compétences dans la branche en question, et est au bénéfice d’une bonne formation et d’une expérience suffisante et, ainsi, du bagage nécessaire pour aborder le domaine technique concerné. Ce personnage fictif est dépourvu d’intuition ou de capacité associative (c. 11). Les revendications doivent être interprétées du point de vue de l’homme du métier, à la lumière de la description et des dessins (art. 51 al. 3 LBI), ainsi que des connaissances techniques générales. Si le dossier de brevet ne définit pas un terme différemment, il faut présumer de la compréhension habituelle dans le domaine technique concerné. Les revendications doivent être interprétées de manière fonctionnelle, en ce sens qu’une caractéristique doit être interprétée de telle sorte qu’elle puisse remplir la fonction prévue. La revendication doit être lue de manière à ce que les modes de réalisation divulgués dans le brevet soient littéralement couverts. En outre, la formulation de la revendication ne doit pas être limitée à ces modes de réalisation si elle en couvre d’autres. Lorsque la jurisprudence fait référence à une « interprétation la plus large » des caractéristiques d'une revendication, la caractéristique doit toujours pouvoir remplir sa fonction dans le contexte de l’invention. La revendication ne doit ainsi, en principe, pas être interprétée de manière à inclure les modes de réalisation qui ne produiraient pas l’effet prévu par l’invention (c. 14). Une invention doit être nouvelle, en ce sens qu’elle ne doit pas être comprise dans l’état de la technique (art. 1 et 7 al. 1 LBI). L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt ou de priorité par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen (art. 7 al. 2 LBI). La nouveauté d’une invention n’est détruite que lorsque toutes ses caractéristiques ont été divulguées dans un seul document avant la date pertinente. L’existence d’une divulgation dans un document s’apprécie du point de vue de l’homme du métier concerné. Il faut pour ce faire prendre en compte ses connaissances et compétences à la date pertinente (date de dépôt ou de priorité) de l’invention à examiner. N’est considéré comme divulgué que ce qui est directement et clairement évident pour l’homme du métier sur la base du document pertinent. Cela comprend également les informations qui ne sont pas explicitement divulguées dans le document, mais qui le sont de manière implicite, compte tenu des connaissances et des compétences de l’homme du métier (c. 17). [SR]