Disposition

     LPAP (RS 232.21)

          Art. 6

22 mars 2011

TAF, 22 mars 2011, B-8005/2010 (d)

sic! 7/8/2011, p. 441 (rés.), « Cleantech Switzerland » ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, anglais, Suisse, matériel scolaire, publicité, formation, imprimé, produit en papier, contenu immatériel, écologie, force distinctive, indication publicitaire, besoin de libre disposition, fonction officielle, signe trompeur, égalité de traitement ; art. 1 LPM, art. 2 lit. a LPM, art. 6 LPAP.

Lorsqu'un produit ou un service tire sa valeur économique essentiellement de son contenu immatériel, la signification du signe qui le désigne doit être mise en relation non seulement avec le produit ou le service lui-même, mais également avec son contenu immatériel (c. 2.3). Un signe enregistré pour un produit ou service qui tire sa valeur économique essentiellement de son contenu immatériel doit être propre à distinguer ce produit ou service de ceux d'autres entreprises (art. 1 LPM) mais, du fait que tout signe est en principe susceptible de décrire le contenu thématique d'un produit ou service, les exigences ne peuvent pas être trop élevées (c. 2.3). Le matériel scolaire (classe 16) s'adresse avant tout aux enseignants, les services de publicité (classe 35), d'éducation et de formation (classe 41) essentiellement aux entreprises et administrations et les produits de l'imprimerie et les photographies (classe 16) à toute entreprise ou personne physique (c. 3). Du fait que le signe Cleantech Switzerland ne contient pas de référence à la fonction officielle ( « Exportförderungsstelle des Bundes ») de sa déposante, la question de savoir si, eu égard à l'art. 6 LPAP, les demandes d'enregistrement émanant d'organes officiels doivent être examinées selon d'autres critères peut rester ouverte (c. 4.1). Vu que la liste des produits revendiqués précise que ces produits sont de provenance suisse, il n’y a pas de risque de tromperie en lien avec l’élément « SWITZERLAND » (c. 4.2). Même si le signe « CLEANTECH SWITZERLAND » est une création nouvelle (c. 4.6), tous ses destinataires le comprennent – sans effort d’imagination, vu le sens clair de ses éléments (c. 4.5) – comme « saubere Technologie/Technik aus der Schweiz » (c. 4.3-4.4). Le signe « CLEANTECH SWITZERLAND » est descriptif (art. 2 lit. a LPM) en lien avec le contenu thématique (potentiel) des produits revendiqués (c. 4.8.1) – y compris en lien avec « Waren aus Papier und Pappe (Karton) » (classe 16) car, même si ces produits n’ont pas de contenu thématique, ils sont susceptibles d’être fabriqués de manière écologique (c. 4.8.2) – et constitue une indication publicitaire directe (c. 4.7-4.9). Peut rester ouverte la question du besoin de libre disposition relatif au signe « CLEANTECH SWITZERLAND » (c. 4.9). La recourante ne peut se prévaloir de l’égalité de traitement (c. 5.1) ni en lien avec la marque « CLEANTECH » (enregistrée 10 ans plus tôt) (c. 5.2) ni en lien avec d’autres marques qui sont soit construites différemment soit destinées à des produits ou services pour lesquels elles ne sont pas descriptives (c. 5.3).

31 janvier 2011

TAF, 31 janvier 2011, B-6372/2010 (d)

sic! 6/2011, p. 384 (rés.), « SwissMilitary by BTS » ; motifs absolus d’exclusion, signe contraire au droit en vigueur, signe public, Suisse, militaire, armée, Confédération, fédéral, rapports officiels, principe de la spécialité, renvoi de l’affaire, frais et dépens ; art. 6ter CUP, art. 61 al. 1 PA, art. 2 lit. d LPM, art. 6 LPAP, art. 8 LPAP.

La LPAP concrétise et étend la protection prévue par l’art. 6ter CUP (c. 2.2-2.3). L’art. 6 LPAP (c. 2.3 et 3.1) impose d’examiner si une expression est susceptible d’être confondue avec les mots « Confédération » et « fédéral » (notamment) avant de déterminer si son emploi est de nature à faire croire faussement à l’existence de rapports officiels entre la Confédération (notamment) et celui qui en fait usage (c. 3.2). Alors que l’élément « MILITARY » (Militär) n’est pas susceptible d’être confondu avec les mots énumérés par l’art. 6 LPAP, l’élément « SWISS » (schweizerisch) ne peut l’être que s’il est utilisé dans un contexte officiel (c. 3.3). Du fait qu’elle appartient au domaine public, l’indication de provenance « Schweiz » ne peut être enregistrée dans une marque que si elle est accompagnée d’un autre élément au moins (c. 3.3). L’élément « SWISSMILITARY » (« SchweizerMilitär ») (c. 3.4) se rapporte à l’armée et à la Confédération suisse, de sorte que – en lien avec l’élément « MILITARY » – l’élément « SWISS » peut être confondu avec les mots « Confédération » et « fédéral » au sens de l’art. 6 LPAP (c. 3.4.1). L’élément « BY BTS » – c’est-à-dire un renvoi à une entreprise (c. 3.4) – n’est pas propre à écarter l’impression qu’il existe des rapports officiels entre la Confédération et celui qui fait usage du signe « SWISS MILITARY BY BTS » (c. 3.4.2). L’art. 6 LPAP n’instaurant pas (à la différence d’autres lois [LPENCR et LPNEONU]) une interdiction absolue d’utiliser les éléments énumérés, la possibilité d’enregistrer le signe « SWISS MILITARY BY BTS » comme marque ne peut pas être écartée d’emblée (art. 8 LPAP, art. 2 lit. d LPM), mais doit être examinée en lien avec chaque produit revendiqué (principe de la spécialité) (c. 3.4.3). Il se justifie, en application de l’art. 61 al. 1 PA, de renvoyer l’affaire à l’IPI afin qu’il examine, en lien avec chaque produit revendiqué, la possibilité d’enregistrer le signe « SWISS MILITARY BY BTS » (c. 4-5). Il n’est pas perçu de frais de procédure ; des dépens sont alloués à la recourante (c. 6).

17 avril 2015

TAF, 17 avril 2015, B-5192/2013 (i)

Motifs absolus d’exclusion, signe contraire au droit en vigueur, armoiries publiques, radiation d’une marque, marque de service, acronyme, risque de confusion admis, Tessin, services funéraires ; art. 2 lit. d LPM, art. 75 LPM, art. 1 LPAP, art. 2 LPAP, art. 6 LPAP, art. 8 LPAP, art. 18 LPAP. 

Selon l’art. 18 de la Loi fédérale pour la protection des armoiries publiques et autres signes publics (LPAP ; RS 232.21), le Département fédéral de justice et police (DFJP) peut ordonner à l’IPI la radiation d’une marque de fabrique ou de commerce, qui n’est pas admissible selon cette législation (c. 2.1 – 2.2.3). Le signe radié sur demande du DFJP était enregistré pour des « monuments funéraires en métal, bronze tombes » en classe 6, des « monuments funéraires non métalliques » en classe 19 et des services de « funérailles, crémations, funérailles » en classe 45. L’art. 75 LPM prévoit que l’expression « marque de fabrique ou de commerce » soit remplacée par le mot « marque », dans tous les actes législatifs, à l’exception des articles 1 et 2 LPAP (c. 3.1.4). Cette disposition est imprécise, ambiguë et incomplète, puisqu’il ne peut être déterminé si les art. 8, 10, 11 et 18 de la LPAP sont également concernés ou non. Il s’agit d’une lacune qui doit être comblée par l’interprétation. Or, il ressort du matériel législatif que le législateur a bien entendu exclure du champ d’application de la LPAP les marques de services (c. 3.1.4.3). Le DFJP a donc la faculté d’ordonner à l’IPI la radiation d’une marque de fabrique ou de commerce (mais pas de service) enregistrée par l’IPI, lorsque celle-ci viole la LPAP (art. 1 et art. 6-8) (c. 3.1.4.4). En revanche, si le DFJP entend faire radier une marque de service, contenant des armoiries ou autres emblèmes publics, qui contrevient à la LPAP, il doit agir devant le juge civil (c. 3.1.4.4). En matière d’armoiries publiques et autres signes publics cantonaux, toutes les dispositions cantonales pertinentes peuvent être considérées et non pas seulement la Constitution cantonale (en l’espèce : une loi cantonale et une ordonnance d’exécution du Conseil d’État) (c. 3.2.2.2). En comparant le signe radié et le sigle du canton, il est indubitable que la marque reprend l’acronyme « ti » et l’emblème du canton du Tessin en noir et blanc, exactement dans la même forme que le prévoient officiellement les dispositions cantonales en la matière. C’est-à-dire la forme utilisée officiellement dans toutes les activités de l’État du Tessin. Le signe considéré viole donc l’art. 1 al. 1 ch. 1-4 LPAP. La marque a été enregistrée en violation de l’art. 2 al. 2 lit. d LPM (c. 3.2.2.4). L’art. 6 LPAP prévoit que les mots « Confédération », « fédéral », «canton», «cantonal », « commune », « communal » ou les expressions susceptibles d’être confondues avec eux ne peuvent être employés ni seuls, ni en combinaison avec d’autres mots, si cet emploi est de nature à faire croire faussement à l’existence de rapports officiels de ces entités publiques avec celui qui fait usage de ces mots. Or, l’acronyme « ti » est le sigle du canton du Tessin. L’élément « ti » du signe « TI CENTRO FUNERARIO » recourt d’ailleurs à la même police de caractères que l’acronyme officiel. Son association avec l’exacte réplique de l’emblème du canton du Tessin est propre à faire croire faussement à l’existence de rapports officiels entre la recourante et le canton du Tessin, et ainsi à induire en erreur sur la situation économique. L’inscription de la marque dans Swissreg suggère à tort un lien entre la recourante et l’entité publique (c. 3.2.3.2). Par conséquent, le signe « TI CENTRO FUNERARIO » crée un risque de confusion pour les produits revendiqués en classes 6 et 19, ce qui constitue une violation de l’art. 6 LPAP. L’inscription du signe représente donc une violation de l’art. 8 LPAP. Sur la base de l’art. 18 LPAP, le DFJP pouvait bien ordonner à l’IPI de radier le signe pour les classes 6 et 19 (c. 3.2.3.3). En revanche, les marques de services étant exclues du champ d’application de la LPAP, le DFJP ne pouvait pas ordonner la radiation de la marque de service « TI CENTRO FUNERARIO » en classe 45 (c. 3.3). Le recours est partiellement admis. La décision de radiation de la marque en classe 45 doit être annulée, bien que ce résultat ne soit pas nécessairement convaincant sur un plan pratique (sic!). Au surplus, le recours est rejeté (c. 5). [AC]

Marque radiée
Marque radiée
Acronyme et armoirie officiels du Tessin
Acronyme et armoirie officiels du Tessin

22 janvier 2018

TAF, 22 janvier 2018, B-850/2016 (d)

sic! 6/2018, p. 313-319, « Swiss Military » (Gregor Wild, Anmerkung); Procédure d’opposition, protection de la confiance, imposition par l’usage, garantie de la propriété, champ de protection, signe contraire au droit en vigueur, identité des signes, identité des produits ou services, risque de confusion, armoiries publiques, signes publiques ; art. 16 al. 1 ADPIC, art. 26 Cst., art. 2 lit. c LPM, art. 2 lit. d LPM, art. 3 lit. a LPM, art. 6 aLPAP, art. 6 LPAP, art. 9 LPAP.

Les motifs absolus d’exclusion, comme la violation du droit, doivent être pris en compte également dans le cadre d’une procédure d’opposition, en particulier pour déterminer le champ de la protection de la marque opposante. Le TAF vérifie donc si le signe « Swiss Military » viole la LPAP pour prendre en compte une éventuelle violation dans la détermination du champ de protection dont bénéficie la marque opposante (c. 5.1). Le terme « Swiss » peut aussi bien constituer une indication de provenance se rapportant à notre pays qu’une référence aux autorités administratives de celui-ci. En tant qu’indication de provenance, le terme appartient au domaine public et ne peut pas être monopolisé par un enregistrement de marque, de sorte qu’il reste d’une utilisation libre pour les tiers même s’il fait l’objet d’un enregistrement dans le cadre d’une marque comportant d’autres éléments distinctifs. En tant que référence aux autorités administratives de la Suisse, son utilisation peut être interdite. Les termes « militaire » et « armée » sont synonymes et font référence de manière non équivoque à la Confédération également dans leur traduction anglaise de « Military » (c. 5.2.2). Le fait que la marque opposante considérée soit enregistrée pour des montres qui sont assimilées par la jurisprudence à des éléments du matériel militaire augmente le risque de confusion avec la Confédération plutôt qu’il ne l’exclut selon l’art. 6 aLPAP. En vertu de cette disposition en vigueur jusqu’au 1er janvier 2017, le signe « Swiss Military » revendiqué pour des montres ne pouvait ainsi pas être utilisé par d’autres entités que la Confédération (c. 5.2.3). Depuis le 1er janvier 2017, date de l’entrée en vigueur des art. 6 et 9 LPAP, l’utilisation d’une dénomination désignant la Suisse comme entité administrative est exclusivement réservée à cette dernière indépendamment même de l’existence d’un risque de confusion. Selon le Message, les désignations officielles ne doivent plus être utilisées que par les collectivités ainsi désignées et leurs organes (ou éventuellement les entités tierces exerçant une activité étatique ou semi-étatique) au sens de l’art. 9 al. 2 LPAP. La marque opposante viole donc la LPAP révisée dans la mesure où le signe « Swiss Military » doit être qualifié de désignation officielle au sens de l’art. 6 LPAP ou est susceptible d’être confondu avec une désignation officielle et n’est pas utilisé par la collectivité qu’il désigne (au sens de l’art. 9 al. 1 LPAP). A la différence de ce qui valait sous l’ancien art. 6 LPAP, l’art. 9 al. 1 LPAP interdit désormais l’utilisation per se d’une désignation officielle et des termes susceptibles d’être confondus avec elle, par toute autre personne que la collectivité concernée. Ceci qu’il en résulte ou non un risque de confusion. Seules les exceptions des alinéas 2 et 3 de l’art. 9 entrent en ligne de compte ; soit pour les personnes exerçant une activité étatique ou semi-étatique selon l’alinéa 2 ; ou pour les utilisations en combinaison avec d’autres éléments verbaux ou figuratifs pour autant qu’un tel emploi ne soit ni trompeur, ni contraire à l’ordre public, aux bonnes mœurs ou au droit (al. 3) (c. 5.3.1). Le caractère contraire au droit d’un signe au sens de l’art. 2 lit. d LPM ne peut pas être réparé par un long usage selon la doctrine dominante et constante (c. 6.2). Un courant minoritaire paraît admettre une imposition par l’usage, mais uniquement pour un signe trompeur au sens de l’art. 2 lit. c LPM qui aurait acquis avec le temps une autre signification de sorte qu’il ne serait plus susceptible d’induire le public en erreur (c. 6.2.1). En l’espèce, la marque opposante étant constituée uniquement de signes qui ne peuvent pas être utilisés par sa déposante selon la LPAP, elle ne dispose par conséquent pas d’un champ de protection qui la dote d’une force d’interdiction lui permettant de faire opposition à la deuxième marque bien que celle-ci soit identique et destinée à des produits identiques (c. 7). L’enregistrement d’une marque ne crée pas de droits acquis à une prétention en interdiction [l’examen de la validité d’une marque demeurant de la compétence des tribunaux civils]. A fortiori, la simple privation d’un droit d’action entre parties, comme c’est le cas en l’espèce puisque le rejet de l’opposition n’empêchera pas les parties de saisir le juge civil pour déterminer laquelle d’entre elles dispose d’un droit préférable à la marque, ne saurait porter atteinte à la garantie de la propriété (c. 8.1). Le recours est admis. [NT]

19 août 2020

TAF, 19 août 2020, B-6343/2019 (d)

Sic ! 3/2021, p. 136 (rés.) « BRASSERIE FEDERAL » ; Armoiries publiques, signes publics, marque verbale, Confédération, droit dérivé d’un usage antérieur, droit de poursuivre l’utilisation ; art. 6 LPAP, art. 6 let. b LPAP, art 8 LPAP, art. 9 LPAP, art. 35 LPAP, art. 36 LPAP.

La recourante demande l’autorisation de poursuivre l’usage des armoiries de la Confédération présentes dans sa marque « Brasserie Federal (fig.) », pour des « Gastronomieverpflegungsdienstleistungen, Verpflegung von Gästen » en classe 43 (état de fait A.). L’élément « Federal » (protégé en tant que désignation officielle selon l’art. 6 let. b LPAP) est placé sur une bannière au-dessus d’une croix suisse inscrite dans un bouclier. Celui-ci n’est pas exactement triangulaire mais il est facilement reconnaissable comme un écu d’arme (c. 3.1). Cette combinaison peut éveiller dans l’esprit des consommateurs que son utilisateur est lié à la Confédération suisse ou qu’il s’agit d’une entreprise de la Confédération. Le signe est donc susceptible d’être confondu avec les armoiries de la Suisse au sens de l’art. 8 LPAP (c. 3.3) et son utilisation est en principe interdite. L’instance précédente considère qu’il n’existe pas de circonstances particulières légitimant la poursuite de l’utilisation au sens de l’art. 35 LPAP (c. 4). La marque en cause a été enregistrée en 2004. Elle a donc été déposée en temps utile (c. 5.1). La recourante doit en outre justifier d’un intérêt digne de protection (c. 5.2). Une entreprise est considérée comme « traditionnelle » si elle existe depuis au moins deux générations (c. 5.2.1). L’activité de l’entreprise ou de l’association doit exister à l’échelle nationale (c. 5.2.2). En l’espèce, s’il existe bien une entreprise de restauration dans les locaux de la recourante depuis des décennies, ce n’est que depuis 1997 que l’établissement porte le nom de « Brasserie Federal » et le que le logo est revendiqué. La recourante ne parvient pas à démontrer que son entreprise existe depuis plusieurs générations (c. 5.3). Au surplus, rien ne vient non plus démontrer que le signe de la recourante dispose d’une notoriété à l’échelle nationale (c. 5.4). En résumé, la recourante ne parvient pas à démontrer l’existence de circonstances particulières justifiant l’autorisation de la poursuite de l’usage des armoiries de la confédération dans sa marque. Le recours est rejeté (c. 6). [YB]