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30 juin 2015

TF, 30 juin 2015, 4A_203/2015 (d)

sic! 11/2015, p. 639-640, « Vergütung für die Vervielfältigung in Netzwerken » ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarif contraignant pour les tribunaux, recours en matière civile, valeur litigieuse, obligation d’alléguer, motivation du recours, droit d’être entendu, sécurité du droit, interprétation des tarifs, usage privé, ProLitteris, réseau numérique, copie analogique, copie numérique ; art. 29 al. 2 Cst., art. 42 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 106 LTF, art. 19 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA, art. 55 CPC, art. 58 CPC.

Contre une décision d’un tribunal civil cantonal concernant l’application d’un tarif, le recours en matière civile est recevable, indépendamment de la valeur litigieuse d’après l’art. 74 al. 2 lit. b LTF (c. 1.1). Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est donc lié ni par l’argumentation du recourant, ni par celle de l’autorité de première instance. Cependant, vu l’obligation de motiver le recours (art. 42 al. 1 et al. 2 LTF), le TF ne traite en principe que des griefs allégués, sauf si d’autres lacunes juridiques sont évidentes. Il n’est pas tenu d’examiner toutes les questions juridiques abordées en première instance, si celles-ci ne lui sont plus soumises. En matière de violation des droits fondamentaux et de violation du droit cantonal ou intercantonal, il existe un devoir de motivation qualifié: le grief doit être invoqué et motivé précisément conformément à l’art. 106 al. 2 LTF (c. 1.2). En l’espèce, le grief de violation du droit d’être entendu est manifestement infondé : le recourant reproche plutôt à l’autorité précédente de ne pas avoir suivi son point de vue juridique (c. 2). D’après l’art. 59 al. 3 LDA, les tarifs lient le juge lorsqu’ils sont en vigueur. Cette disposition sert la sécurité du droit: le juge civil ne doit pas à nouveau examiner l’équité d’un tarif puisque cette question est traitée dans le cadre de la procédure administrative d’approbation de ce tarif. Toutefois, le juge civil peut et doit vérifier que les sociétés de gestion, sur la base d’un tarif, ne font pas valoir de droits à rémunération incompatibles avec les dispositions impératives de la loi, en particulier lorsque l’utilisation est libre d’après la LDA. Au surplus l’application et l’interprétation d’un tarif dans un cas particulier sont des questions juridiques du ressort des tribunaux civils (c. 3.3). La réglementation concernant l’usage privé, comme toute la LDA, est technologiquement neutre. Elle vaut pour les copies effectuées sur une base analogique comme pour les copies numériques (c. 3.4.1). Pour cette raison, les principes de l’ATF 125 III 141 concernant les photocopies sont aussi applicables aux reproductions réalisées sur l’intranet d’une entreprise. Dans cet arrêt le TF a estimé admissible qu’une redevance soit forfaitaire et qu’elle soit due indépendamment du fait qu’une œuvre soit on non reproduite. Cela peut certes s’avérer insatisfaisant dans des cas particuliers, mais est inévitable dans le domaine des utilisations massives incontrôlables. La simple possibilité de reproduire une œuvre dans le cadre de la licence légale de l’art. 19 al. 1 lit. c LDA suffit donc à justifier la redevance (c. 3.4.2). Le projet de révision de la LDA du 15 septembre 2004 prévoyait une redevance sur les appareils, ainsi qu’une exonération pour les petites et moyennes entreprises qui ne reproduisent qu’accessoirement des œuvres à des fins d’information interne ou de documentation. Le législateur a cependant renoncé à une telle réglementation, cela à une époque (2007) où l’environnement numérique existait déjà. Le recourant doit donc s’acquitter de la redevance tarifaire, même s’il se peut qu’il n’utilise pas son réseau numérique pour des actes de copie. Les art. 55 et 58 CPC n’impliquent pas que ProLitteris allègue les différents actes de reproduction du recourant (c. 3.4.3). [VS]

08 juillet 2015

TAF, 8 juillet 2015, B-3865/2015 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; gestion collective, tarif des sociétés de gestion, effet suspensif, pesée d’intérêts, effet rétroactif d’un tarif, sécurité du droit ; art. 74 al. 2 LDA; cf. N 27 (vol. 2007- 2011 ; TF, 19 juin 2007 ; ATF 133 II 263 ; sic! 10/2007, p. 722-735, «MP3-Player II ») ; N 611 (vol. 2012-2013 ; CAF, 30 novembre 2012) ; N 790 (TAF, 14 mars 2014, B-6540/2012 ; sic! 10/2014, p. 618-623, « Zustatztarif zum GT 3a » et N 797 (CAF, 2mars 2015).

En l’espèce, les recours n’apparaissent a priori ni manifestement bien fondés, ni manifestement mal fondés. Pour décider sur leur effet suspensif, il faut donc procéder à une pesée des intérêts en présence, sans préjuger la situation à régler ou la rendre impossible. Prioritairement, ce sont les intérêts des personnes représentées par les parties qui doivent être pris en considération, à savoir ceux des ayants droit, d’une part, et des utilisateurs d’œuvres, d’autre part. Les sociétés de gestion peuvent en général, sans grands frais, compenser des redevances non dues avec des créances tarifaires futures; tandis que, sans tarif approuvé, elles ne peuvent pas encaisser d’indemnités, même lorsque l’utilisation concernée est soumise à la surveillance de la Confédération. Le TAF a déjà tranché la question de l’assujettissement des utilisations faisant l’objet du tarif litigieux (cf.N 79), mais il n’a jamais examiné de manière approfondie celle de l’effet rétroactif d’un tarif, qui a été laissée ouverte par le TF (cf. N 27, vol. 2007-2011). Si l’effet suspensif devait être refusé, l’insécurité juridique relative à la rétroactivité concernerait de nombreux utilisateurs et occasionnerait des difficultés pratiques de part et d’autre. En comparaison, le risque de pertes sur débiteurs avant qu’un encaissement ne soit possible paraît supportable. En l’espèce, il faut donc décréter l’effet suspensif s’agissant de l’approbation rétroactive du tarif et mettre provisoirement en vigueur ce tarif pour les utilisations se produisant dès l’entrée en force de la présente décision incidente. [VS]

21 février 2018

TF, 21 février 2018, 4A_549/2017 (f)

« Gestion économique » ; instance cantonale unique, compétence matérielle, commission arbitrale fédérale, tribunal civil, recours en matière civile, recours en matière de droit public, tarifs des sociétés de gestion, tarif contraignant pour les tribunaux, gestion collective, gestion économique, société de gestion ; art. 42 al. 2 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 75 al. 2 lit. a LTF, art. 45 al. 1 LDA, art. 46 LDA, art. 53 al. 1 LDA, art. 55 LDA, art. 59 al. 3 LDA, art. 74 al. 1 LDA.

Lorsque le droit fédéral prévoit une instance cantonale unique, le recours en matière civile est recevable quelle que soit la valeur litigieuse selon l’art. 74 al. 2 lit. b LTF ; de plus, le tribunal supérieur n’a pas à statuer sur recours d’après l’art. 75 al. 2 lit. a LTF (c. 1.2). En cas de recours en matière civile, le TF n’est pas lié par l’argumentation des parties et il apprécie librement la portée juridique des faits, mais il s’en tient d’ordinaire aux questions juridiques que la partie recourante a soulevées (c. 1.3). Une fois entrés en force, les tarifs d’une société de gestion lient le juge en vertu de l’art. 59 al. 3 LDA, si bien que les autorités civiles ne sont pas compétentes pour revoir la décision de la CAF sur le caractère équitable du tarif. Celle-ci peut faire l’objet d’un recours au TAF, puis d’un recours en matière de droit public au TF (c. 2.3.1). La gestion économique des sociétés selon l’art. 45 al. 1 LDA implique des tarifs forfaitaires et une répartition des redevances simplifiée. Elle contraint les sociétés à faire l’impossible pour comprimer les frais administratif. L’IPI veille au respect de cette obligation, qui ne peut pas non plus être contrôlée par le juge civil. Les décisions de l’IPI à ce sujet doivent faire l’objet d’un recours au TAF, puis d’un recours en matière de droit public au TF (c. 2.3.2). En revanche, le juge civil peut vérifier qu’un tarif approuvé ne contrevienne pas à des règles légales impératives, en particulier qu’il ne prévoit pas de redevances pour des activités non soumises à rémunération selon la loi. La décision est alors susceptible de recours en matière civile au TF (c. 2.3.3). En l’espèce, le recourant est débiteur d’une redevance en contrepartie de son exploitation d’une photocopieuse et d’un réseau informatique. Il ne supporte pas une participation aux frais de fonctionnement de la société de gestion. Cette participation et son calcul ne concernent que les membres de la société. En reprochant à cette dernière de ne pas administrer ses affaires selon les règles d’une gestion saine et économique, le recourant soulève une question relevant de la compétence exclusive de l’IPI, qui ne peut pas être examinée par l’autorité judiciaire civile (c. 2.4). [VS]

LDA (RS 231.1)

- Art. 55

- Art. 59

-- al. 3

- Art. 74

-- al. 1

- Art. 53

-- al. 1

- Art. 45

-- al. 1

- Art. 46

LTF (RS 173.110)

- Art. 75

-- al. 2 lit. a

- Art. 42

-- al. 2

- Art. 74

-- al. 2 lit. b

16 janvier 2019

HG.2018.48-HGK (d)

Droit d’auteur, gestion collective, « ProLitteris »; instance cantonale unique, compétence matérielle, procédure simplifié ; art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 5 al. 1 lit. c CPC, art. 6 al. 4 lit. a CPC, art. 243 CPC.

L’instauration d’une instance cantonale unique en propriété intellectuelle a pour but de concentrer les connaissances juridiques et spécialisées auprès d’un seul tribunal. La valeur litigieuse ne joue aucun rôle, sauf pour les litiges concernant la LCD selon l’art. 5 al. 1 lit. d CPC. Pour ceux-ci, la procédure simplifiée selon les art. 243 ss CPC est applicable lorsque la valeur litigieuse est inférieure à CHF 30'000.- (c. 3.1). Si le législateur avait voulu que la procédure simplifiée influence la compétence matérielle de l’instance cantonale unique, il aurait été inutile de prévoir une valeur litigieuse minimale pour les litiges relevant de la LCD (c. 3.2). Devant l’instance cantonale unique, la procédure simplifiée est inapplicable d’après l’art. 243 al. 3 CPC. Les litiges sont soumis à la procédure ordinaire, aussi pour une valeur litigieuse inférieure à CHF 30'000.-. La compétence matérielle de l’instance cantonale unique l’emporte ainsi sur la règle de procédure générale de l’art. 243 al. 1 CPC, aussi lorsque c’est le Tribunal de commerce qui fonctionne comme instance cantonale unique (c. 3.3). La jurisprudence du TF selon laquelle les règles sur le type de procédure l’emportent sur la compétence matérielle du tribunal de commerce n’est pas applicable (c. 3.4 et 3.5). [VS]

CPC (RS 272)

- Art. 243

- Art. 6

-- al. 4 lit. a

- Art. 5

-- al. 1 lit. c

-- al. 1 lit. a

10 octobre 2018

TAF, 10 octobre 2018, B-7159/2016 (f)

« Dénonciation », gestion collective, sociétés de gestion, surveillance des sociétés de gestion, dénonciation, frais de procédure, témérité, principe de l’équivalence, principe de la proportionnalité, causalité ; art. 127 al. 1 Cst, art. 46a LOGA, art. 13 al. 1 LIPI, art. 71 PA, art. 1 O-PA, art. 10 O-PA, art. 2 al. 1 OGEmol, art. 3 al. 2 OGEmol, art. 53 LDA, art. 16d ODAu, art. 2 OTa-IPI.

Au sens de l'art. 53 LDA, la surveillance de la gestion est étendue et permet à l'IPI d'examiner si les sociétés de gestion exécutent leurs tâches selon des règles déterminées, respectivement si les tarifs sont respectés (c. 3.2). La dénonciation est une procédure non contentieuse par laquelle un administré peut attirer l'attention d'une autorité hiérarchiquement supérieure sur une situation de fait ou de droit qui justifierait à son avis une intervention de l'Etat dans l'intérêt public (c. 4.1). La jurisprudence et la doctrine retiennent que celui qui dépose une plainte auprès de l'IPI en raison d'une mesure prise par une société de gestion est considéré comme un dénonciateur au sens de l'art. 71 PA. Cette disposition est en effet applicable par analogie (c. 4.3). Selon l'art. 71 al. 2 PA, le dénonciateur n'a aucun des droits reconnus à la partie. L'autorité saisie décide, d’après son pouvoir d'appréciation, si elle donne suite on non à la dénonciation. La seule qualité de dénonciateur ne donne pas le droit de recourir contre la décision prise à la suite de la dénonciation ; le dénonciateur doit encore pouvoir invoquer un intérêt digne de protection à ce que l'autorité de surveillance intervienne (c. 4.4). Le principe de la légalité en droit fiscal, érigé en droit constitutionnel indépendant à l'art. 127 al. 1 Cst, s'applique à toutes les contributions publiques (c. 5.1). Si la qualité de contribuable et l'objet de l'impôt doivent toujours être définis dans une loi formelle, la jurisprudence a assoupli cette exigence en ce qui concerne le mode de calcul de certaines contributions. La compétence d'en fixer le montant peut ainsi être déléguée à l'exécutif lorsqu'il s'agit d'une contribution dont la quotité est limitée par des principes constitutionnels contrôlables, tels que ceux de la couverture des frais et de l'équivalence (c. 5.2). Ce dernier est l'expression du principe de la proportionnalité en matière de contributions publiques : le montant de la contribution exigée d'une personne déterminée doit être en rapport avec la valeur objective de la prestation fournie à celle-ci (c. 5.3). L’assouplissement du principe de la légalité en matière fiscale ne vaut pas lorsqu'une contribution ne permet de couvrir qu'une partie des dépenses effectives. Dans ce cas, les principes de l'équivalence et de la couverture des frais ne permettent pas d'encadrer de manière suffisante la contribution en cause (c. 5.4). Il est notoire que les émoluments encaissés par les tribunaux et les administrations n'arrivent pas, et de loin, à couvrir leurs dépenses effectives (c. 5.5). Lorsque les activités du secteur privé sont soumises à la surveillance étatique, l'autorité responsable peut prélever des émoluments pour couvrir ses frais. En principe, c’est à l’administré surveillé qu’il incombe de les payer, conformément à l’art. 2 al. 1 OGEmol (c. 5.6.1). Les prestations de surveillance peuvent entraîner des émoluments dus en contrepartie de prestations déterminées ou une taxe annuelle (c. 5.6.3). L'art. 46a LOGA constitue une base légale permettant au Conseil fédéral d'édicter des dispositions prévoyant la perception d'émoluments pour les décisions et les autres prestations de l'administration fédérale (c. 6.1). Le cercle des contribuables doit être fixé dans une loi au sens formel. Force est de constater que l’art. 13 al. 1 LIPI ne dit pas clairement qui doit supporter les taxes perçues par l’IPI pour la surveillance des sociétés de gestion. La logique veut cependant que ce soit ces dernières (c. 6.2.3). Cela découle aussi des interprétations historique, téléologique (c. 6.2.4) et systématique (c. 6.2.5). L'application des dispositions réglementaires sur les frais et émoluments n'aboutit pas à un résultat différent (c. 7). Les art. 16d ODAu et 2 OTa-IPI renvoient à l’OGEmol (c. 7.1.1 et c. 7.1.2). L’art. 2 al. 1 de cette ordonnance consacre le principe de causalité. Selon celui-ci, des frais de procédure sont mis à la charge de celui qui les a causés (c. 7.2.2). La causalité naturelle entre deux événements (rapport de cause à effet) est un lien tel que sans le premier événement, le second ne se serait pas produit ; il n'est pas nécessaire que l'événement en question soit la cause unique ou immédiate du résultat. Il y a causalité adéquate lorsque le comportement incriminé était propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit. La causalité adéquate peut être interrompue par un événement extraordinaire ou exceptionnel auquel on ne pouvait s'attendre, et qui revêt une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus immédiate du dommage (c. 7.3). En l’espèce, l'existence même de la recourante comme société de gestion est l'événement sine qua non de la mesure de surveillance (causalité naturelle) (c. 7.5.1). Sous l'angle de la causalité adéquate, le principe de causalité ou du perturbateur conduit à conclure que c'est la société de gestion qui est tenue de payer les frais de sa surveillance (c. 7.5.2). L'entité surveillée doit objectivement s'attendre à faire parfois l'objet de dénonciations. Cela entre dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles. En ce sens, la dénonciation ne peut pas être vue en l'espèce comme un facteur d'interruption de la chaîne causale (c. 7.5.2). L'art. 3 al. 2 OGEmol dispose qu'il est possible de renoncer à percevoir des émoluments lorsque la décision ou la prestation sert un intérêt public prépondérant ou que la décision ou la prestation engendre des coûts insignifiants (c. 9.1). Cette disposition est de nature potestative (c. 9.2). La surveillance des sociétés de gestion, aussi importante soit-elle, ne protège pas un intérêt public aussi prépondérant que, par exemple, la surveillance des denrées alimentaires. Quant aux coûts engendrés par l'enquête, du fait qu'une décision a dû être rendue à la suite d'une procédure d'instruction, ceux-ci ne sauraient être vus comme insignifiants (c. 9.3). L'art. 1 O-PA suit le principe consistant à mettre les frais à la charge de la partie qui succombe. Ce principe ne s'applique, conformément à l’art. 10 O-PA, que pour autant que la dénonciation soit téméraire (c. 10.1.2) ou d’une ampleur extraordinaire, ou qu’elle présente des difficultés particulières. L'imputation de frais de justice à un dénonciateur est contraire au principe d'intérêt public de la surveillance et ne devrait être prévue que dans des cas exceptionnels. En particulier, il faut éviter que des administrés renoncent à déposer des dénonciations par crainte d'un éventuel impact financier (c. 10.2.1). Agit par témérité ou légèreté la partie qui, en faisant preuve de l'attention et de la réflexion que l'on peut attendre d'elle, sait ou devait savoir que les faits invoqués à l'appui de ses conclusions n'étaient pas conformes à la vérité ou qui, malgré l'absence évidente de toute chance de succès, persiste dans sa volonté de recourir. Tombe également sous le coup de cette disposition la partie qui forme un recours manifestement dénué de chances de succès, dont s'abstiendrait tout plaideur raisonnable et de bonne foi (c. 10.2.4). En l'espèce, au vu de la longueur et de la densité de l'analyse contenue dans la décision attaquée (19 pages), la dénonciation n'apparaît pas comme téméraire. Une dénonciation téméraire aurait été écartée autrement plus simplement et plus rapidement, car la témérité est quelque chose de manifeste (c. 10.2.5). La dénonciation n’était pas non plus d’une ampleur extraordinaire et ne pouvait être vue comme présentant des difficultés particulières (c. 10.3). Le montant de l’émolument demandé est conforme aux principes de l’équivalence et de la couverture des frais (c. 11). La décision attaquée rétablit une situation conforme au droit. L'ancienne pratique de l’IPI ne correspondait pas à la volonté du législateur et c'est avec raison qu’elle a été changée (c. 12.2). Quant au grief tiré de l'inopportunité, il ressort de ce qui précède que la décision attaquée ne découle que de la simple application du droit. Partant, il n'y a pas de place ici pour le grief d'inopportunité (c. 13). [VS]

12 septembre 2019

TAF, 12 septembre 2018, B-1714/2018 (d)

« Tarif commun 12 » ; tarifs des sociétés de gestion, gestion collective, approbation des tarifs, décision incidente, qualité de partie, action populaire, qualité pour recourir, intérêt pour agir, télévision de rattrapage, catch-up-TV ; art. 6 PA, art. 48 PA ; art. 42 al. 1 lit. d LDA.

En ce qui concerne leur qualité de parties en première instance, les recourantes peuvent attaquer la décision incidente qui la leur a niée (c. 1.2). Leur qualité pour recourir contre la décision d’approbation du tarif est étroitement liée à la question précédente (c. 1.3). Les conditions d’être spécialement atteintes par la décision attaquée, d’après l’art. 48 al. 1 lit. b PA, respectivement d’avoir un intérêt digne de protection selon l’art. 48 al. 1 lit. c PA, ne jouent pas de rôle pour les personnes qui sont destinataires matérielles (primaires) de la décision. Il en va différemment pour les tiers. Pour eux, les deux conditions doivent être réalisées cumulativement, selon un examen propre à chaque domaine juridique. Il convient d’éviter l’action populaire et de délimiter clairement le recours et la dénonciation à l’autorité de surveillance sans qualité de partie. Ont une importance, d’une part le fait pour les intéressés de pouvoir obtenir satisfaction par une autre voie, d’autre part le souci de ne pas compliquer excessivement l’activité administrative (c. 2.3). En ce qui concerne les tarifs de droit d’auteur, les critères ont été définis par l’ATF 135 II 172. En résumé, les tiers n’ont normalement pas de droit de recours, sauf s’ils se distinguent du gros des ayants droit et ont un intérêt divergent propre (c. 2.4). La partie recourante doit prouver sa qualité pour recourir, laquelle est examinée d’office (c. 2.5). En l’espèce, les recourantes ont cherché à participer à la procédure de première instance, mais la qualité de partie leur a été refusée par décision incidente du 22 mars 2017. Ainsi, elles ont pris part à la procédure devant l’autorité inférieure au sens de l’art. 48 al. 1 lit. a PA (c. 4.1). Les ayants droit eux-mêmes ne sont pas parties à la procédure d’approbation tarifaire mais, s’ils se distinguent du gros des ayants droit et sont spécialement atteints par le tarif, ils obtiennent la qualité de partie concernant la question de l’assujettissement à la gestion collective obligatoire des utilisations réglées par ce tarif (c. 4.2). Ils doivent se distinguer du gros des ayants droit non pas de manière générale, mais dans le cas particulier spécifique au litige. Or, en l’espèce, le tarif règle la reproduction d’œuvres et de prestations contenues dans des programmes de la même manière pour tous les ayants droit. Il ne contient aucune clause qui concernerait spécialement les organismes de diffusion. La condition de l’art. 48 al. 1 lit. b PA n’est donc pas remplie (c. 4.3.1). La question de l’intérêt digne de protection au sens de l’art. 48 al. 1 lit. c PA est étroitement liée à la précédente. Vu la multitude des ayants droit représentés par les sociétés de gestion, il est inévitable que leurs intérêts divergent. Mais, en l’espèce, les sociétés de gestion devaient représenter aussi les intérêts des organismes de diffusion, ce qu’elles ont fait effectivement. La formulation « spécialement atteint » à l’art. 48 al. 1 lit. b PA montre qu’un grand nombre de personnes concernées rend difficile la réalisation de la condition. Le droit de la gestion collective veut rassembler les droits en obligeant les ayants droit à passer par une société de gestion et en leur conférant un droit de participation approprié aux décisions de cette société. Les recourantes ne sont pas des ayants droit isolés, elles sont au nombre de 23. Si on admettait leur qualité pour recourir, on rendrait pratiquement impossible les négociations tarifaires et l’équilibre des intérêts entre associations d’utilisateurs et sociétés de gestion (c. 4.3.2). Une divergence d’opinion concernant la situation juridique n’est pas suffisante pour admettre cette qualité (c. 4.3.3). Au contraire de ce qui prévalait pour l’ATF 135 II 172, le TC 12 n’est pas un nouveau tarif et les organismes de diffusion n’ont pas jusqu’ici exercé individuellement leurs droits pour la télévision de rattrapage. De surcroît, l’autorité de première instance n’a fait que confirmer une analyse juridique précédente. Les recourantes ne peuvent rien tirer de la jurisprudence concernant la qualité pour recourir des concurrents directs, puisque la question doit être examinée de manière particulière pour chaque domaine juridique (c. 4.4). [VS]