Pachmann,
Bachmann, avocat, activité d’avocat,
marque verbale, marque combinée, raison de commerce, contenu
sémantique, usage à titre de marque, violation du droit d’être
entendu, fardeau de la preuve, fardeau de l’allégation,
arbitraire, maxime des débats, risque de confusion, droit au nom ;
art. 9 Cst., art. 9 al. 2 Cst., art. 8 CC, art. 29 CC, art. 55 CPC,
art. 150 al. 1 CPC, art. 951 al. 2 CO, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art.
13 al. 2 LPM, art. 2 LCD, art. 3 al. 1 lit. c LCD.
La
notion de risque de confusion est la même pour l’ensemble du droit
des signes distinctifs et il s’agit d’une question de droit que
le TF revoit librement. Comme les sociétés anonymes peuvent choisir
librement leurs raisons de commerce, la jurisprudence pose
généralement des exigences élevées concernant leur force
distinctive. Selon la jurisprudence constante, les raisons de
commerce bénéficient d’une protection également à l’encontre
des entreprises qui sont actives dans une autre branche du commerce.
Mais les exigences concernant la différenciation des raisons de
commerce sont plus strictes lorsque les entreprises peuvent entrer en
concurrence de par leurs buts statutaires ou s’adressent, pour une
autre raison, aux mêmes cercles de clients ; cela vaut aussi en
cas de proximité géographique des entreprises. C’est en fonction
de l’impression d’ensemble qu’elles laissent auprès du public
que doit être tranchée la question de savoir si deux raisons de
commerce sont suffisamment différentes pour coexister. Cela doit
être vérifié non seulement dans le cadre d’un examen attentif et
simultané des raisons de commerce, mais également en fonction du
souvenir qu’elles laissent. Lequel est marqué par les éléments
des raisons de commerce qui sont frappants de par leur effet sonore
ou leur signification. Ces éléments revêtent une importance
déterminante dans l’examen de l’impression d’ensemble générée
par une raison de commerce. Cela vaut en particulier pour les
désignations de pure fantaisie qui bénéficient en général d’une
forte force distinctive. Il en va autrement pour les désignations
descriptives qui appartiennent au domaine public. Il y a risque de
confusion lorsque la raison de commerce d’une entreprise peut être
prise pour celle d’une autre ou donne l’impression erronée que
les entreprises seraient économiquement ou juridiquement liées (c.
3.1). En l’espèce, la Cour cantonale a retenu que les signes
étaient semblables parce qu’ils se différenciaient seulement par
leurs premières lettres « P » et « B » mais
qu’en dépit de la similitude des domaines d’activité et de la
proximité des sièges des deux entreprises, il convenait de tenir
compte de ce que leurs raisons de commerce n’étaient pas de pure
fantaisie mais reprenaient les noms de famille des avocats qui les
exploitent. La Cour cantonale a en outre relevé que les noms de
famille sont donnés par la nature et qu’une personne physique a un
intérêt digne de protection à pouvoir désigner sous celui-ci les
prestations qu’elle, ou les personnes qui sont sous sa
responsabilité, dispense. De sorte qu’il existe très peu de
possibilités de différenciation. En particulier, lorsque le service
offert présente une composante personnelle forte, comme c’est le
cas pour l’activité d’avocat. Il n’est par conséquent par
possible de transposer sans autre aux noms de famille la portée de
la protection accordée aux dénominations de fantaisie. Les noms de
famille rares ont ainsi certes une force distinctive accrue, mais la
portée de leur champ de protection se limite (sauf circonstances
particulières relevant de la loi contre la concurrence déloyale)
aux noms de famille identiques et ne s’étend pas à ceux qui sont
semblables seulement. Le fait que les raisons de commerce considérées
soient construites de la même manière (soit nom de famille –
Avocats – SA) n’augmente pas le risque de confusion puisque cette
configuration est usuelle. Dans le cas particulier, le fait que la
première lettre de chacun des deux noms de famille (à laquelle une
attention particulière est accordée parce qu’elle se trouve en
début du mot) soit différente (P et B), la manière différente de
les écrire et leur effet phonétique différent également, mais
surtout le caractère extraordinairement rare de l’un des deux noms
de famille et relativement commun de l’autre, ainsi que l’absence
de cas de confusion effectif en dépit de la similitude des signes,
de la proximité géographique des entreprises, et du caractère pour
l’essentiel similaire de leurs activités, excluent l’existence
d’un risque de confusion au sens du droit des raisons de commerce
(c. 3.2 et c. 3.3.2). Le TF considère que la Cour cantonale a, à
juste titre, examiné de manière différente le degré de
différenciation nécessaire, selon que la raison de commerce
concernée est formée de désignations de personnes, de désignations
descriptives ou de désignations de fantaisie. Les éléments
désignant l’activité professionnelle déployée (avocats) ainsi
que la forme juridique (SA) constituent des éléments à faible
force distinctive des raisons de commerce examinées. Le risque de
confusion doit ainsi être déterminé en fonction des deux noms de
famille « Pachmann » et « Bachmann » qui se
différencient par leur première lettre qui joue un rôle marquant,
parce qu’elle figure au début des dénominations considérées. Du
point de vue du contenu sémantique, le public suisse ne décèle pas
dans les termes « Pach » une ancienne manière d’écrire
« Bach », et il est dès lors irrelevant que « Pachmann »
soit la manière d’écrire « Bachmann » en haut
allemand. Les jurisprudences « Adax » / « Hadax »
et « Pawag » / « Bawag » rendues en relation
avec des dénominations de pure fantaisie ne peuvent pas être
transposées à l’examen du risque de confusion entre deux noms de
famille. Outre la différence entre les premières lettres des deux
noms, le caractère extraordinairement rare du nom de famille
« Pachmann » alors que « Bachmann » est
relativement répandu, amène le public usuellement attentif à faire
la différence entre les deux raisons de commerce. Un risque de
confusion n’entrerait pas non plus en ligne de compte si une force
distinctive accrue devait être reconnue au patronyme « Pachmann »
du fait de sa rareté (c. 4). Le titulaire d’une marque peut
interdire aux tiers d’utiliser des signes similaires à une marque
antérieure pour des produits ou services identiques ou similaires
lorsqu’il en résulte un risque de confusion (art. 13 al. 2 en lien
avec l’art. 3 al. 1 lit. c LPM). Lequel est donné lorsqu’il doit
être craint que les cercles des destinataires pertinents soient
induits en erreur par la similitude des signes et attribuent les
produits, désignés par l’un ou l’autre des signes, au mauvais
titulaire de la marque ; ou lorsque le public distingue bien les
deux signes mais déduit de leur ressemblance de fausses relations
entre leurs titulaires. Pour trancher du risque de confusion entre
des marques, c’est l’impression d’ensemble que celles-ci
laissent dans le souvenir du consommateur qui est déterminante. La
question de savoir si deux marques se distinguent suffisamment ou
sont au contraire susceptibles d’être confondues ne doit pas être
résolue dans le cadre d’une comparaison abstraite des marques
considérées, mais doit tenir compte de toutes les circonstances du
cas d’espèce. Plus les produits pour lesquels les marques sont
enregistrées sont semblables, plus le risque que des confusions se
produisent est élevé, et plus le signe le plus récent doit se
différencier nettement des signes antérieurs pour bannir tout
risque de confusion. Le champ de protection d’une marque dépend de
sa force distinctive. Une marque faible bénéficie d’un champ de
protection plus limité contre les signes similaires qu’une marque
forte. Lorsqu’une marque s’approche du domaine public, elle ne
bénéficie que d’une force distinctive limitée tant qu’elle n’a
pas été imposée comme signe distinctif dans l’esprit du public
par des efforts publicitaires importants. Des différences modestes
suffisent à exclure le risque de confusion en présence d’une
marque faible. Constituent des marques faibles, celles dont les
éléments essentiels se rapprochent étroitement de termes
génériques du langage commun. Sont au contraire des marques fortes
celles qui frappent par leur contenu fantaisiste ou qui se sont
imposées dans le commerce (c. 4.1). Dans le cas particulier,
l’utilisation du terme « Bachmann » sur les cartes de
visite intervient bien à titre de marque mais dans une combinaison
avec des éléments figuratifs qui en déterminent l’impression
d’ensemble. C’est ainsi l’élément « B » qui
prédomine de sorte que le cercle des destinataires pertinents qui
est composé de personnes cherchant à obtenir des services
juridiques, ainsi que des publications ou des imprimés dans le même
domaine, ne risque pas d’être induit en erreur, même au cas où
il ne déploierait qu’un degré d’attention usuel (c. 4.2). Selon
l’art. 2 LCD, un comportement est déloyal et contraire au droit
s’il est trompeur ou viole d’une autre manière le principe de la
bonne foi dans les affaires et influence les relations entre
commerçants et consommateurs. Adopte un comportement déloyal en
particulier celui qui prend des mesures qui sont de nature à faire
naître une confusion avec les marchandises, les œuvres, les
prestations ou les affaires d’autrui. Entrent dans ce cas de figure
tous les comportements qui par la création d’un risque de
confusion induisent le public en erreur, en particulier afin
d’exploiter la réputation d’un concurrent. C’est ainsi en
fonction du comportement concrètement adopté sur le plan de la
concurrence que doit être tranchée la question de l’existence
d’un risque de confusion au sens de la LCD. Si la notion de risque
de confusion est la même pour l’ensemble du droit des signes
distinctifs, il convient dans la détermination de son existence dans
le cadre du droit de la concurrence, de tenir compte de toutes les
circonstances. Soit pas seulement de la manière dont le signe est
enregistré, mais aussi de celle dont il est concrètement utilisé
et des autres éléments en dehors des signes eux-mêmes. C’est ce
que la Cour cantonale a fait in casu en examinant comment la
marque mixte « Bachmann » était utilisée sur les cartes
de visite de l’intimée et en tenant compte du fait que les
personnes cherchant à obtenir les services d’un avocat ou d’autres
prestations juridiques déploient un degré d’attention supérieur
à la moyenne en raison du rapport de confiance particulier qui
caractérise la relation entre un avocat et son client, ainsi que des
dépenses supérieures à celles de l’acquisition d’un produit de
masse qui l’accompagnent (c. 5.2). Le recours est rejeté. [NT]