Disposition

     LPM (RS 232.11)

          Art. 48

10 mars 2009

TAF, 10 mars 2009, B-386/2008 (d)

sic! 10/2009, p. 721 (rés.), « GB » ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, significations multiples, signe verbal, GB, sigle, abréviation, nom géographique, indication géographique, indication de provenance, signe trompeur, égalité de traitement, raison de commerce ; art. 6quinquies lit. B ch. 2 et 3 CUP, art. 5 PAM, art. 1 LPM, art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM, art. 48 LPM.

Les acronymes font partie des signes enregistrables et sont en principe à traiter comme les autres marques (c. 6.2). Il suffit qu’une indication géographique suscite une association d’idées avec un pays, une région ou un lieu chez le consommateur moyen pour que le signe qui la contient soit descriptif et de la sorte exclu de la protection (c. 8.2). Les produits désignés dans les classes 7, 17, 26 et 38 concernent non seulement des spécialistes tels que des fabricants de machines, notamment dans le textile, mais aussi le consommateur suisse moyen (c. 8.2). En relation avec les produits des classes 7 et 26, la combinaison de lettres « GB » sera perçue en Suisse par un large cercle de destinataires incluant également les consommateurs moyens comme une abréviation pour « Grande-Bretagne ». Il importe peu à cet égard que « GB » signifie également « Gigabyte » dès lors que, dans le cas de mots à plusieurs sens, seul est déterminant celui qui domine dans le contexte particulier. L’usage du signe litigieux en tant que marque ne se réduit pas aux relations commerciales entretenues avec des clients spécialisés qui connaîtraient également le lieu de fabrication des produits en plus de la raison de commerce de la recourante. Il s’étend au contraire aussi aux relations avec des clients potentiels, même hors du cercle de l’industrie des machines textiles, lesquels associeront pour certains produits des classes 7 et 38 l’abréviation « GB » à la Grande-Bretagne (c. 8.5). Cela vaut d’autant plus que le sigle utilisé par la recourante est dénué d’éléments complémentaires et de graphisme particulier. Il est sans importance que l’abréviation officielle et la plus couramment utilisée en Angleterre soit « UK ». Est au contraire déterminante la manière dont le cercle des destinataires pertinents en Suisse comprend le sigle « GB » en relation avec les produits désignés (c. 8.6). Celui-ci constitue une indication de provenance directe et appartient par conséquent au domaine public (art. 2 lit. a LPM) (c. 9). Un risque de tromperie (art. 2 lit. c LPM) existe dès lors que les produits désignés par les lettres « GB » sont susceptibles, en raison de la structure économique de l’Angleterre, d’y être fabriqués. Le risque est d’autant plus élevé que le signe litigieux utilise une police de caractères standard et ne contient pas d’indications supplémentaires (c. 10.2). Le signe « GB » n’est pas comparable aux autres marques citées par la recourante qui contiennent également l’abréviation « GB » dès lors que celles-ci se composent également d’autres éléments (c. 11.2 et 11.5). Il faut enfin rappeler qu’il n’existe pas de droit à l’égalité de traitement dans l’illégalité, en particulier lorsqu’en dépit d’une pratique dérogatoire, des raisons sérieuses et objectives parlent pour un changement de pratique et que l’intérêt à l’application conforme du droit l’emporte sur la sécurité juridique. Des décisions antérieures – de surcroît erronées – ne doivent pas servir de ligne directrice jusqu’à la fin des temps et, sous cet angle, la pratique de l’instance inférieure en matière d’enregistrement des marques n’est pas gravée dans le marbre (c. 11.3). L’examen d’une raison de commerce par le registre du commerce n’est pas préjudiciel pour l’examen d’une marque par l’IPI. L’inscription d’une raison de commerce comportant l’élément « GB » ne permet dès lors pas de conclure qu’une marque « GB » doit également être inscrite en Suisse (c. 12.2).

08 octobre 2009

TF, 8 octobre 2009, 4A_324/2009 (d)

sic! 2/2010, p. 91-97, « Gotthard / Gotthard (fig.) » (Fournier Guillaume, Remarque) ; motifs absolus d’exclusion, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, marque verbale, marque combinée, nom géographique, indication de provenance, Gothard, combustibles, montagne, besoin de libre disposition, action en constatation, action en radiation d’une marque, demande reconventionnelle, intérêt pour agir, qualité pour agir, raison de commerce ; art. 2 lit. a LPM, art. 47 LPM, art. 48 LPM, art. 52 LPM.

Celui qui peut établir un intérêt juridique suffisant a qualité pour agir en constatation d'un droit ou d'un rapport juridique prévu par la LPM (art. 52 LPM). L'existence d'un tel intérêt est déterminée par le droit fédéral. Elle est donnée lorsque les relations juridiques entre les parties sont incertaines et que l'incertitude sur leur existence et leur contenu peut être balayée par l'action en constatation. Le titulaire d'une raison de commerce dispose d'un intérêt digne image de protection à ce que l'insécurité juridique issue de l'usage d'un élément de sa raison de commerce en tant que marque verbale par un tiers soit dissipée par l'examen de la validité de cette marque. Il est de plus légitimé à agir reconventionnellement en radiation non seulement de la marque verbale, mais aussi de la marque combinée qui contient le signe litigieux, et cela même si le demandeur n'a pas allégué une violation de cette marque-ci (c. 2). Les signes composés d'une combinaison simple de chiffres, de lettres ou de formes géométriques courantes ou faisant directement référence à la qualité du produit ou du service désigné appartiennent au domaine public (art. 2 lit. a LPM). Leur caractère descriptif doit être immédiatement reconnaissable par les cercles des destinataires concernés, sans effort d'imagination particulier. Les indications de provenance appartiennent également au domaine public. Les indications directes telles que les noms de villes, de localités, de vallées, de régions, de pays et de continent ne peuvent, de plus, faire l'objet d'un enregistrement. Les signes contenant ou se réduisant à une indication géographique ne constituent pas une indication de provenance lorsqu'ils ne sont pas perçus dans ce sens par les cercles des destinataires déterminants d'après l'ensemble des circonstances concrètes. Une marque qui se compose ou se réduit à une indication géographique sera toutefois la plupart du temps comprise comme une indication de provenance. La délimitation des cercles des destinataires pertinents ainsi que leur perception du signe en raison du degré d'attention attendu constituent des questions de droit que le TF examine librement. Il en va de même pour le sens du signe Gotthard en relation avec la marchandise qu'il désigne. Déterminer le sens général de la dénomination Gotthard est en revanche une question de fait (c. 3). Le mot Gotthard est connu en Suisse comme une indication géographique qui désigne non seulement un massif montagneux ou un tunnel, mais aussi une région (c. 4). Utilisée pour désigner des combustibles, la marque Gotthard s'associera, dans l'esprit des destinataires, avec la région du même nom et s'imposera comme indication de provenance et non comme un nom de fantaisie (c. 5.1). Pour fonder la nécessité qu'une indication géographique reste disponible, il suffit qu'il ne soit pas exclu que des fournisseurs ou producteurs s'y établissent, même dans un futur lointain (c. 5.2). Une marque combinée contenant un élément appartenant au domaine public est susceptible de protection pour autant que son impression d'ensemble soit déterminée par les autres éléments possédant un caractère distinctif. Une marque contenant une indication de provenance n'est ainsi protégeable que si cet élément du domaine public est tout à fait secondaire et qu'elle possède par ailleurs une force distinctive suffisante. Un signe constitué d'une montagne stylisée surmontée d'une couronne de nuages apparaît de surcroît descriptif pour des combustibles qui proviennent d'une manière ou d'une autre du milieu naturel (c. 6).

Fig. 21 – Gotthard (fig.)
Fig. 21 – Gotthard (fig.)

08 septembre 2010

TAF, 8 septembre 2010, B-2303/2007, B-2304/2007, B-2306/2007, B-2307/ 2007 et B-2347/2007 (d)

sic! 2/2011, p. 111 (rés.), « Tahitian Noni Authentic (fig.) ; Tahitian Noni (fig.) ; Equine Essentials The Tahitian Noni Advantage (fig.) ; Tahitian Noni Juice Kraftzwerg ; Canine Essentials The Tahitian Noni Advantage (fig.) » ; motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, nom géographique, Tahiti, signe figuratif, français, noni, authentique, essentiel, avantage, juice, cheval, chien, produit de consommation courante, matériel dentaire, boissons, denrées alimentaires, dentiste, vétérinaire, indication de provenance, canaux de distribution, lieu de fabrication, matière première, décision étrangère, revirement de jurisprudence ; art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 48 al. 1 LPM.

Formé de « TAHITIAN » (« tahitisch »), qui renvoie à l’île de Tahiti (c. 3.1), et de « NONI » (Morinda citrifolia), qui est le nom d’un arbuste de l’océan Pacifique Sud qui porte des fruits, l’élément « TAHITIAN NONI » signifie « tahitianisches Noni » (c. 3.2). Comme les consommateurs moyens – à qui s’adressent les produits de consommation courante revendiqués – (c. 4.1), les dentistes – à qui s’adressent des matières pour plomber les dents et pour empreintes dentaires (classe 5) – voient en principe dans l’élément « TAHITIAN » une indication de provenance (c. 4.2). Vu qu’il doit être déterminé sur la base de l’enregistrement, le cercle des destinataires d’un produit ne peut pas être limité aux personnes effectivement visées par des canaux de distribution spécifiques (c. 4.3). La combinaison de l’indication de provenance directe « TAHITIAN » et de l’élément « NONI » – qui, que ce soit sous forme d’arbuste ou de fruit, n’est pas connu du consommateur moyen suisse (revirement de jurisprudence) et n’est pas près de l’être (c. 5.3) – est dans l’ensemble comprise comme une indication de provenance vu la place prépondérante que prend l’élément « TAHITIAN » (c. 5.4-5.5). Dans le signe « TAHITIAN NONI JUICE KRAFTZWERG » (compris sans problème comme « aus Tahiti stammender Noni-Saft, der schon in geringer Menge kräftigt » [c. 6.1.1]), vu notamment la présence de l’élément « JUICE » (c. 6.1.2), l’élément « TAHITIAN » est compris comme une indication de provenance en lien non seulement avec des jus de fruits (classe 32) (c. 6.1.3), mais également avec divers autres boissons (classe 32) et aliments (classes 29 et 30) (c. 2.3 et 6.1.4), de sorte que le signe (« TAHITIAN NONI JUICE KRAFTZWERG ») est propre à induire en erreur (art. 2 lit. c LPM) sur la provenance de tous ces produits (c. 6.1.6-6.1.7). Peut rester ouverte la question de savoir si la distinction entre le lieu de fabrication et la provenance des matières de base et des composants utilisés faite par l’art. 48 al. 1 LPM doit déjà être prise en compte au stade de la procédure d’enregistrement car, du fait que le consommateur moyen ne connaît pas le sens de « NONI », la provenance des matières de base passe à l’arrière-plan, de sorte que le lieu de fabrication – qui ne se trouve pas à Tahiti – est déterminant (c. 6.1.5). Dans le signe « EQUINE ESSENTIALS THE THAITIAN NONI ADVANTAGE (fig.) » (cf. Fig. 62c) (« das Wesentliche für das Pferd – der Vorteil durch Tahitianisches Noni » [c. 6.2.2]), l’élément « EQUINE » (Pferd-, équin) n’étant pas compris par le consommateur moyen, la combinaison (dominante) « EQUINE ESSENTIALS » (« das Wesentliche für das Pferd ») n’est comprise que par les spécialistes du domaine vétérinaire (c. 6.2.1). Malgré la taille réduite de l’adjectif « TAHITIAN » et son insertion dans un slogan, le signe « EQUINE ESSENTIALS THE THAITIAN NONI ADVANTAGE (fig.) » est propre à induire en erreur (art. 2 lit. c LPM) le consommateur moyen sur la provenance de tous les produits revendiqués (classes 5 et 31) en raison de la combinaison entre l’adjectif « TAHITIAN » et l’image renvoyant clairement à l’océan Pacifique Sud (c. 6.2.3) (c. 6.2.4-6.2.6). Même en l’absence d’image (c. 6.3.2.1), le signe « CANINE ESSENTIALS THE TAHITIAN NONI ADVANTAGE (fig.) » (cf. Fig. 62d) (compris « Das essentielle für den Hund – Vorteil durch tahitianisches Noni » par le consommateur francophone [c. 6.3.1]) est propre à induire en erreur (art. 2 lit. c LPM) sur la provenance des produits revendiqués (classes 5 et 31) vu que l’adjectif « TAHITIAN » – qui n’apparaît pas complètement à l’arrière-plan (c. 6.3.2.1 in fine) – peut se rapporter à l’élément « CANINE ESSENTIALS » que le consommateur moyen comprend (c. 6.3.2-6.3.4). Vu que Tahiti apparaît comme un lieu de provenance possible, le signe (comprenant une image) « TAHITIAN NONI AUTHENTIC (fig.) » (cf. Fig. 62a) (« Echt Tahitian Noni » [c. 6.4.1]) est propre à induire en erreur (art. 2 lit. c LPM) sur la provenance de tous les produits revendiqués (classes 3, 5 et 32) (c. 6.4-6.4.4). Bien que l’élément « NONI » ne soit pas compris, le signe « TAHITIAN NONI (fig.) » (cf. Fig. 62b) est propre à induire en erreur (art. 2 lit. c LPM) sur la provenance des produits revendiqués (classes 3, 5, 29-32), car l’élément « TAHITIAN » ne passe pas au second plan et que, dans son ensemble, le signe n’a pas de signification secondaire qu’il conviendrait de prendre en compte (c. 6.5-6.5.4). En lien avec les signes « TAHITIAN NONI AUTHENTIC (fig.) » et « TAHITIAN NONI (fig.) », il s’agit d’ajouter que, du fait que le consommateur moyen ne connaît pas le sens de « NONI », la provenance des matières de base passe à l’arrière-plan, de sorte que le lieu de fabrication – qui ne se trouve pas à Tahiti – est déterminant (c. 6.1.5, 6.4.3 et 6.5.4). Ce n’est qu’en lien avec l’art. 2 lit. a LPM – et donc pas avec l’art. 2 lit. c LPM – que les décisions étrangères peuvent jouer un rôle d’indice à prendre en compte pour décider de l’enregistrement d’un signe (c. 7).

Fig. 62a – Tahitian Noni Authentic
Fig. 62a – Tahitian Noni Authentic
Fig. 62b – Tahitian Noni
Fig. 62b – Tahitian Noni
Fig. 62c – Equine Essentials The Tahitian Noni Advantage
Fig. 62c – Equine Essentials The Tahitian Noni Advantage
Fig. 62d – Canine Essentials The Tahitian Noni Advantage
Fig. 62d – Canine Essentials The Tahitian Noni Advantage

11 septembre 2012

SG BS, 11 septembre 2012, SG.2010.246 (d)

sic! 4/2013, p. 233-236, « Juvena of Switzerland » ; motifs absolus d’exclusion, indication de provenance, signe trompeur, Suisse, produits cosmétiques, lieu de fabrication, étapes de fabrication, coûts de fabrication, coûts de recherche et développement, caractéristique décisive, part immatérielle de la création de valeur ; art. 47 al. 1 LPM, art. 47 al. 3 lit. a LPM, art. 48 al. 1 LPM, art. 64 al. 1 lit. a LPM, art. 64 al. 2 LPM.

Les marques « Juvena of Switzerland » et « la prairie Switzerland » sont des indications de provenance au sens de l'art. 47 al. 1 LPM. Les produits cosmétiques appartiennent à la catégorie des produits industriels. Comme tels, leur provenance commerciale est déterminée par le lieu où le produit a acquis ses qualités essentielles. Lorsque le processus de fabrication est réparti sur plusieurs sites, ce lieu peut différer du lieu de finition. Selon la pratique saint-galloise développée depuis les années 1960, la transformation d'un produit en Suisse doit représenter plus de 50 % des coûts de production totaux pour qu'il puisse être désigné par une indication de provenance suisse. Dans le cas de produits cosmétiques, il ne faut pas considérer uniquement le processus de fabrication et le conditionnement, mais également — et surtout — la recherche et le développement. Le calcul des coûts de production des produits cosmétiques ne doit dès lors pas seulement s'appuyer sur le processus physique de fabrication, mais doit aussi prendre en compte les coûts de recherche et de développement, c'est-à-dire la part immatérielle de la création de valeur. De plus, aux yeux du consommateur moyen, le remplissage et le conditionnement ne sont pas aussi importants, pour des cosmétiques, que la recherche et le développement. L'association de la qualité suisse à ces dernières caractéristiques n'éveillera donc pas chez lui de fausses attentes. Pour les produits concernés, la recherche et le développement ainsi que d'autres étapes cruciales de la production ont lieu en Suisse, de sorte que, bien qu'une partie du processus de fabrication intervienne à l'étranger, l'état de fait de l'art. 64 al. 1 lit. a LPM n'est pas réalisé en l'espèce (c. 2). [JD]