I Droit d'auteur et droits voisins

Gestion collective

30 juin 2015

TF, 30 juin 2015, 4A_203/2015 (d)

sic! 11/2015, p. 639-640, « Vergütung für die Vervielfältigung in Netzwerken » ; gestion collective, tarifs des sociétés de gestion, tarif contraignant pour les tribunaux, recours en matière civile, valeur litigieuse, obligation d’alléguer, motivation du recours, droit d’être entendu, sécurité du droit, interprétation des tarifs, usage privé, ProLitteris, réseau numérique, copie analogique, copie numérique ; art. 29 al. 2 Cst., art. 42 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 106 LTF, art. 19 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA, art. 55 CPC, art. 58 CPC.

Contre une décision d’un tribunal civil cantonal concernant l’application d’un tarif, le recours en matière civile est recevable, indépendamment de la valeur litigieuse d’après l’art. 74 al. 2 lit. b LTF (c. 1.1). Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est donc lié ni par l’argumentation du recourant, ni par celle de l’autorité de première instance. Cependant, vu l’obligation de motiver le recours (art. 42 al. 1 et al. 2 LTF), le TF ne traite en principe que des griefs allégués, sauf si d’autres lacunes juridiques sont évidentes. Il n’est pas tenu d’examiner toutes les questions juridiques abordées en première instance, si celles-ci ne lui sont plus soumises. En matière de violation des droits fondamentaux et de violation du droit cantonal ou intercantonal, il existe un devoir de motivation qualifié: le grief doit être invoqué et motivé précisément conformément à l’art. 106 al. 2 LTF (c. 1.2). En l’espèce, le grief de violation du droit d’être entendu est manifestement infondé : le recourant reproche plutôt à l’autorité précédente de ne pas avoir suivi son point de vue juridique (c. 2). D’après l’art. 59 al. 3 LDA, les tarifs lient le juge lorsqu’ils sont en vigueur. Cette disposition sert la sécurité du droit: le juge civil ne doit pas à nouveau examiner l’équité d’un tarif puisque cette question est traitée dans le cadre de la procédure administrative d’approbation de ce tarif. Toutefois, le juge civil peut et doit vérifier que les sociétés de gestion, sur la base d’un tarif, ne font pas valoir de droits à rémunération incompatibles avec les dispositions impératives de la loi, en particulier lorsque l’utilisation est libre d’après la LDA. Au surplus l’application et l’interprétation d’un tarif dans un cas particulier sont des questions juridiques du ressort des tribunaux civils (c. 3.3). La réglementation concernant l’usage privé, comme toute la LDA, est technologiquement neutre. Elle vaut pour les copies effectuées sur une base analogique comme pour les copies numériques (c. 3.4.1). Pour cette raison, les principes de l’ATF 125 III 141 concernant les photocopies sont aussi applicables aux reproductions réalisées sur l’intranet d’une entreprise. Dans cet arrêt le TF a estimé admissible qu’une redevance soit forfaitaire et qu’elle soit due indépendamment du fait qu’une œuvre soit on non reproduite. Cela peut certes s’avérer insatisfaisant dans des cas particuliers, mais est inévitable dans le domaine des utilisations massives incontrôlables. La simple possibilité de reproduire une œuvre dans le cadre de la licence légale de l’art. 19 al. 1 lit. c LDA suffit donc à justifier la redevance (c. 3.4.2). Le projet de révision de la LDA du 15 septembre 2004 prévoyait une redevance sur les appareils, ainsi qu’une exonération pour les petites et moyennes entreprises qui ne reproduisent qu’accessoirement des œuvres à des fins d’information interne ou de documentation. Le législateur a cependant renoncé à une telle réglementation, cela à une époque (2007) où l’environnement numérique existait déjà. Le recourant doit donc s’acquitter de la redevance tarifaire, même s’il se peut qu’il n’utilise pas son réseau numérique pour des actes de copie. Les art. 55 et 58 CPC n’impliquent pas que ProLitteris allègue les différents actes de reproduction du recourant (c. 3.4.3). [VS]

08 juillet 2015

TAF, 8 juillet 2015, B-3865/2015 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; gestion collective, tarif des sociétés de gestion, effet suspensif, pesée d’intérêts, effet rétroactif d’un tarif, sécurité du droit ; art. 74 al. 2 LDA; cf. N 27 (vol. 2007- 2011 ; TF, 19 juin 2007 ; ATF 133 II 263 ; sic! 10/2007, p. 722-735, «MP3-Player II ») ; N 611 (vol. 2012-2013 ; CAF, 30 novembre 2012) ; N 790 (TAF, 14 mars 2014, B-6540/2012 ; sic! 10/2014, p. 618-623, « Zustatztarif zum GT 3a » et N 797 (CAF, 2mars 2015).

En l’espèce, les recours n’apparaissent a priori ni manifestement bien fondés, ni manifestement mal fondés. Pour décider sur leur effet suspensif, il faut donc procéder à une pesée des intérêts en présence, sans préjuger la situation à régler ou la rendre impossible. Prioritairement, ce sont les intérêts des personnes représentées par les parties qui doivent être pris en considération, à savoir ceux des ayants droit, d’une part, et des utilisateurs d’œuvres, d’autre part. Les sociétés de gestion peuvent en général, sans grands frais, compenser des redevances non dues avec des créances tarifaires futures; tandis que, sans tarif approuvé, elles ne peuvent pas encaisser d’indemnités, même lorsque l’utilisation concernée est soumise à la surveillance de la Confédération. Le TAF a déjà tranché la question de l’assujettissement des utilisations faisant l’objet du tarif litigieux (cf.N 79), mais il n’a jamais examiné de manière approfondie celle de l’effet rétroactif d’un tarif, qui a été laissée ouverte par le TF (cf. N 27, vol. 2007-2011). Si l’effet suspensif devait être refusé, l’insécurité juridique relative à la rétroactivité concernerait de nombreux utilisateurs et occasionnerait des difficultés pratiques de part et d’autre. En comparaison, le risque de pertes sur débiteurs avant qu’un encaissement ne soit possible paraît supportable. En l’espèce, il faut donc décréter l’effet suspensif s’agissant de l’approbation rétroactive du tarif et mettre provisoirement en vigueur ce tarif pour les utilisations se produisant dès l’entrée en force de la présente décision incidente. [VS]

02 septembre 2015

TAF, 2 septembre 2015, B-1736/2014 (d)

medialex 10/2015, « Tarif commun H » ; tarifs des sociétés de gestion, tarifs séparés, tarif H, modification des conclusions, conclusions nouvelles, motivation du recours, droit d’être entendu, équité du tarif, augmentation du tarif, autonomie des sociétés de gestion, obligation de collaborer, cognition de la CAF, cognition du TAF, pouvoir de cognition, constatation inexacte de faits pertinents ; art. 13 PA, art. 49 lit. b PA, art. 49 lit. c PA, art. 52 al. 1 PA, art. 59 LDA, art. 60 LDA.

L’objet de la procédure de recours ne peut être constitué que de ce qui faisait déjà l’objet de la procédure de première instance, ou de ce qui aurait dû l’être selon une interprétation correcte de la loi. Les sociétés de gestion recourantes peuvent restreindre l’objet du litige par rapport à ce qu’elles demandaient en première instance (c. 1.2.1). La motivation du recours doit indiquer quels points de la décision attaquée sont critiqués, et pourquoi. Il faut montrer quels considérants de fait ou de droit sont faux ou non pertinents, et en quoi. Ces conditions sont réunies en l’espèce (c. 1.2.2). Le droit d’être entendu de l’intimée au recours n’est pas violé, puisqu’elle a la possibilité de s’exprimer sur les modifications du tarif devant le TAF, lequel a la même cognition que la CAF (c. 1.3). Des utilisations semblables d’un même cercle d’utilisateurs, relevant de la compétence de diverses sociétés de gestion, doivent être réglées par un seul tarif commun, sauf s’il existe des raisons objectives pour des tarifs séparés (c. 2.1). Pour appliquer les critères de l’art. 60 LDA, la CAF poursuit le but d’un équilibre objectif des intérêts entre les ayants droit et les utilisateurs d’œuvres et elle s’oriente sur le critère d’une rémunération conforme au marché. L’équité se détermine aussi en fonction du rapport de la redevance avec les recettes, subsidiairement les frais, de l’utilisateur. Les bases de calcul de la redevance doivent tenir compte des difficultés pratiques de contrôler l’utilisation des œuvres. Des forfaits et des approximations sont admissibles. Une redistribution de la charge financière et même une augmentation générale du tarif peuvent être équitables si les redevances précédentes étaient trop basses, si les critères d’évaluation défavorisaient certains utilisateurs ou si un changement dans le système de calcul se justifie pour une autre raison. Dans le cadre du contrôle de l’équité du tarif, il faut aussi examiner le niveau et le mode de calcul de la redevance (c. 2.2). Pour l’utilisation de musique lors d’événements combinant de la musique avec des prestations non artistiques, un certain pourcentage de redevance peut être équitable soit d’un point de vue économique, par exemple lorsque les recettes procurées par la musique sont plus importantes que le coefficient de recettes utilisé comme base de calcul, soit d’un point de vue juridique, sur la base de l’expérience artistique collective et de l’intensité particulière de l’utilisation de la musique pour l’événement en question. La détermination des paramètres de calcul doit cependant être effectuée sur la base de chiffres fiables et un accord intervenu sur un tarif précédent ne signifie pas que les bases de calcul sont incontestées (c. 2.4). La CAF peut apporter des modifications au tarif proposé, mais elle n’est pas obligée d’indiquer aux parties à quelles conditions son approbation pourrait être donnée (c. 3.1). Elle ne doit pas interférer dans l’autonomie tarifaire des sociétés de gestion plus que ne le nécessite un équilibre objectif des intérêts entre ayants droit et utilisateurs. Si plusieurs solutions sont envisageables, la CAF dépasserait ses compétences en imposant la sienne. C’est pourquoi les sociétés de gestion ont un devoir de collaboration dans la procédure et sont tenues de fournir à la CAF les éléments de fait fondant le projet de tarif. Celle-ci examine ce projet avec pleine cognition, mais doit respecter une certaine liberté de disposition des sociétés de gestion et leur autonomie (c. 3.2). Quant au TAF, il décide aussi avec pleine cognition et examine l’opportunité de la décision attaquée. Il revoit complètement les questions d’interprétation juridique, mais il fait preuve de retenue là où la CAF, en tant qu’autorité judiciaire spécialisée indépendante, a traité de questions complexes concernant la gestion collective ou a pesé les intérêts en présence tout en respectant l’autonomie des sociétés de gestion. En fin de compte, cela revient à rechercher si la CAF a excédé son pouvoir d’appréciation ou en a abusé (c. 3.3). En l’espèce, les pourcentages de redevances ne peuvent être examinés indépendamment de l’assiette de la redevance. La CAF doit se prononcer sur l’équité du tarif dans son ensemble (c. 3.4). On ne sait pas si cette autorité, lorsqu’elle a approuvé les tarifs communs H précédents, a examiné leur équité sous un angle économique ou sous un angle juridique comme expliqué au c. 3.4 (recte: 2.4) ci-dessus. En l’espèce, le pourcentage de redevance est appliqué sur la somme du prix d’entrée et de la boisson alcoolisée la moins chère. Le fait que cette base de calcul ne tienne pas compte des revenus de boissons plus élevés dus à la danse pourrait plaider, du point de vue économique, pour un pourcentage de redevance majoré. Mais la danse nécessite aussi de la place, ce qui influe négativement sur le nombre de visiteurs. Ainsi, les arguments économiques se compensent et ne plaident pas en faveur d’une différenciation du pourcentage par rapport aux événements non dansants. L’argument juridique de la haute intensité de l’utilisation musicale doit aussi être relativisé. Cette intensité s’exprime moins dans les mouvements rythmiques accompagnant la danse que dans la concentration cognitive du public relative à ce qu’il écoute, que l’on rencontre surtout en cas de concert. Les événements dansants ne sont pas seulement formés de danse commune, mais aussi de rencontres, de discussions et de consommations qui amoindrissent l’intensité de l’utilisation musicale. Celle-ci est toutefois plus grande que pour le divertissement d’ambiance (c. 3.6.3). En résumé, il existe certes des arguments objectifs allant dans le sens d’une plus grande intensité de l’utilisation musicale en cas de manifestations dansantes ; mais cet argument juridique doit être mis en relation avec les considérations économiques, qui peuvent rendre floue la différence entre les manifestations dansantes et les autres événements musicaux dans l’industrie de la restauration. Les recourantes n’ont pas suffisamment motivé leurs prétentions sous l’angle de ces aspects économiques (c. 3.6.4). La CAF a eu raison de ne pas comparer le pourcentage du tarif commun H à ceux des autres tarifs, puisque les bases de calcul auxquelles s’appliquent ces pourcentages sont différentes d’un tarif à l’autre (c. 3.7.3). Le grief de constatation inexacte de faits pertinents n’est pas réalisé en l’espèce : la CAF a tenu compte correctement d’une étude, réalisée à la demande des parties, sur les facteurs poussant le public à fréquenter un club ou une soirée dansante (c. 4). [VS]

12 octobre 2015

TAF, 12 octobre 2015, B-5587/2015 (d)

medialex 11/2015, « Tarif commun S » ; tarifs des sociétés de gestion, tarif S, effet suspensif, mesures provisionnelles, valeur litigieuse, frais de procédure, contestation pécuniaire ; art. 55 PA, art. 56 PA, art. 63 PA, art. 4 FITAF, art. 74 al. 2 LDA.

Il convient de traiter sans délai une demande d’effet suspensif, l’art. 55 al. 3 PA étant en l’espèce applicable par analogie (c. 1). Les recours contre les décisions de la CAF n’ont un effet suspensif que si le juge instructeur du TAF l’ordonne. Pour décider, il faut peser les différents intérêts privés et publics en jeu. Il faut déterminer si les raisons qui plaident en faveur d’une exécution immédiate l’emportent sur celles qui plaident pour la solution contraire. La situation à régler par la décision finale ne doit ni être préjugée, ni rendue impossible. Les pronostics sur l’issue de la procédure ne peuvent être pris en compte que s’ils sont clairs. En cas d’incertitudes de fait ou de droit, il faut faire preuve de retenue (c. 2.2). D’après l’art. 56 LDA, d’autres mesures provisionnelles que l’effet suspensif sont possibles pour maintenir intact un état de fait existant durant la procédure de recours, ou pour sauvegarder des intérêts menacés (c. 2.2). Une norme tarifaire qui prévoit la prolongation provisoire de l’ancien tarif jusqu’à l’entrée en vigueur du nouveau tarif serait contraire à l’art. 74 al. 2 LDA, car cette disposition implique qu’un nouveau tarif entre immédiatement en vigueur et qu’il appartient au juge instructeur du TAF d’ordonner la prolongation de l’ancien tarif dans le cadre de sa décision sur l’effet suspensif. En général, une telle prolongation sera préférée à la solution de l’art. 74 al. 2 LDA dans les cas où le recours s’avère manifestement fondé ou infondé, tandis que l’effet suspensif sera décrété dans les cas où la soumission à la surveillance fédérale des utilisations couvertes par le tarif est discutable; en revanche, la solution de l’art. 74 al. 2 LDA (c’est-à-dire l’entrée en vigueur immédiate du nouveau tarif) aura la priorité si la pesée des intérêts conduit à une impasse et qu’aucun intérêt prépondérant de l’une ou l’autre des parties n’apparaît (c. 3). En l’espèce, aucun pronostic clair ne peut être fait sur l’issue de la procédure et le recours ne semble ni manifestement bien fondé, ni manifestement mal fondé. Pour décider sur l’effet suspensif, il faut donc procéder à une pesée des intérêts en présence. Ce sont les intérêts des personnes représentées par les parties qui doivent être pris en considération, à savoir ceux des ayants droit, d’une part, et ceux des utilisateurs d’œuvres, d’autre part (c. 4). L’intérêt des ayants droit à bénéficier du nouveau tarif est d’importance égale par rapport à celui des utilisateurs à payer des redevances plus basses pour des raisons économiques. D’éventuels paiements indus pourraient être compensés avec des créances tarifaires futures. De plus, les intimées au recours ont assuré qu’elles étaient prêtes à rechercher des solutions à l’amiable avec les diffuseurs qui se retrouveraient dans des difficultés financières suite à l’entrée en vigueur du nouveau tarif. La mauvaise situation économique des radios privées, qui n’est d’ailleurs pas démontrée, n’est donc pas une raison prépondérante qui justifierait l’effet suspensif. Au contraire, il serait encore plus délicat pour elles que les intimées au recours, si elles devaient gagner la procédure, puissent après coup leur réclamer un surcroît de redevance à titre rétroactif. Au surplus, sous l’angle de la simplification des déclarations à fournir, aucun argument ne plaide pour l’ancien, respectivement le nouveau tarif. Comme on ne peut dégager aucun intérêt prépondérant en l’espèce, il faut s’en tenir à la solution de l’art. 74 al. 2 LDA et refuser l’effet suspensif (c. 5). Puisque la recourante demande l’annulation du nouveau tarif et, simultanément, la prolongation de l’ancien, la valeur litigieuse est constituée de la différence entre les recettes à attendre selon le nouveau tarif, durant toute sa durée de validité, et celles qui seraient procurées par l’ancien tarif. Le tarif litigieux concerne aussi d’autres associations que la recourante, si bien qu’une réduction proportionnelle de ce montant ne serait pas justifiée. La valeur litigieuse se situe ainsi entre CHF 1 million et CHF 5 millions. Comme les affaires tarifaires sont des contestations pécuniaires, l’échelle pour l’avance de frais est de CHF 7 000.- à CHF 40 000.- (c. 6). [VS]

29 juin 2015

CAF, 29 juin 2015 (d)

« Tarif A Radio (Swissperform) 2013-2016 » ; tarifs des sociétés de gestion, effet suspensif, pesée d’intérêts, mesures provisionnelles ; art. 55 PA, art. 56 PA, art. 74 al. 2 LDA.

Il convient de traiter sans délai une demande d’effet suspensif, l’art. 55 al. 3 PA étant en l’espèce applicable par analogie (c. 1). Les recours contre les décisions de la CAF n’ont un effet suspensif que si le juge instructeur du TAF l’ordonne. Pour décider, il faut peser les différents intérêts privés et publics en jeu. Il faut déterminer si les raisons qui parlent en faveur d’une exécution immédiate l’emportent sur celles qui plaident pour la solution contraire. La situation à régler par la décision finale ne doit ni être préjugée, ni rendue impossible. Les pronostics sur l’issue de la procédure ne peuvent être pris en compte que s’ils sont clairs. En cas d’incertitudes de fait ou de droit, il faut faire preuve de retenue (c. 2.1). L’effet suspensif est limité aux ordres positifs figurant dans la décision attaquée ; il ne doit pas avoir valeur de précédent en remodelant le rapport de droit litigieux et sert  tout au plus à maintenir la situation préexistante durant la procédure de recours. D’après l’art. 56 LDA, d’autres mesures provisionnelles que l’effet suspensif sont possibles pour maintenir intact un état de fait existant, ou pour sauvegarder des intérêts menacés (c. 2.2). La recourante (à titre principal) et l’intimée (dans une conclusion subsidiaire) souhaitent que la prétention tarifaire litigieuse ne puisse pas faire l’objet de mesures d’exécution (forcée) durant la procédure de recours. En général, une telle solution sera préférée à celle l’art. 74 al. 2 LDA dans les cas où le recours s’avère manifestement fondé ou infondé, tandis que l’effet suspensif sera décrété dans les cas où il est incertain que les redevances litigieuses soient dues ; en revanche, la solution de l’art. 74 al. 2 LDA (c’est-à-dire l’entrée en vigueur immédiate du nouveau tarif) aura la priorité si la pesée des intérêts conduit à une impasse et qu’aucun intérêt de l’une ou l’autre des parties n’apparaît prépondérant (c. 3). En l’espèce, il faut peser les différents intérêts en présence, car il n’est pas possible de faire un pronostic clair sur l’issue de la procédure et le recours n’apparaît ni manifestement bienfondé, ni manifestement mal fondé. Ce sont les intérêts des personnes représentées par les parties qui doivent être pris en considération, à savoir ceux des ayants droit, d’une part, et des utilisateurs d’œuvres, d’autre part (c. 4). En l’espèce, d’éventuels paiements indus pourraient être compensés avec des créances tarifaires futures. La diminution provisoire de liquidités dont souffrira la recourante n’est pas un intérêt prépondérant justifiant l’effet suspensif. Au contraire, il serait encore plus délicat pour elle que l’intimée au recours, si elle devait gagner la procédure, puisse après coup lui réclamer un surcroît de redevance à titre rétroactif. Au surplus, sous l’angle de la simplification des déclarations à fournir, aucun argument ne plaide pour l’une ou l’autre des parties. Comme on ne peut dégager aucun intérêt prépondérant en l’espèce, il faut s’en tenir à la solution de l’art. 74 al. 2 LDA et refuser l’effet suspensif (c. 5). Peut rester ouverte la question de savoir si le TAF est compétent (et si oui sous quelle forme) pour ordonner une interdiction de recouvrer la prétention litigieuse par voie d’exécution forcée (c. 6). [VS]

« Tarif commun 3a » ; tarif commun 3a complémentaire, tarifs des sociétés de gestion, équité du tarif, autonomie des sociétés de gestion ; art. 45, art. 47 LDA, art. 59, art. 60 LDA.

Les tarifs communs 3a et 3a complémentaire (réception d’émissions, musique de fond) sont des tarifs fondamentalement basés sur les coûts d’utilisation. Comme tels comptent les frais du matériel de réception, les autres frais concernant la réception d’émission (y compris les coûts d’installation dans le bâtiment), les frais d’électricité, les redevances selon la LRTV et les redevances de droits d’auteur et de droits voisins (c. 6.2). La CAF a considéré en 2007 qu’une majoration de 50% des redevances prévues par le tarif commun 3a en cas d’encaissement par SUISA (au lieu d’un encaissement par Billag SA, conjointement à l’encaissement des redevances selon LRTV) était équitable. Selon la jurisprudence, il appartient aux utilisateurs de prouver que tel n’est plus le cas, même si le tarif de 2007, prolongé depuis lors, reposait sur un accord (c. 6.3.1). Le cas normal d’un point de vue juridique est celui d’un encaissement des redevances tarifaires par une société de gestion, ce qui résulte en particulier de l’art. 47 al. 1 LDA. Un encaissement effectué par Telecom PTT, puis par Billag SA, permettait des économies de gestion qui étaient répercutées sur les utilisateurs. La révision de la LRTV n’autorise plus un encaissement des redevances selon la LDA conjointement à celles prévues par la LRTV. Ni les sociétés de gestion, ni les utilisateurs, ne sont responsables de cette situation. Mais les sociétés de gestion ne peuvent plus accorder des conditions de faveur aux utilisateurs (c. 6.3.2). Les redevances plus basses encaissées par Billag SA sont à considérer comme comportant un rabais (c. 6.3.3). Pour le contrôle de l’équité des redevances prévues par le nouveau tarif commun 3a, il faut comparer ces dernières à celles prévues par l’ancien tarif en cas d’encaissement par SUISA, pas à celles prévues en cas d’encaissement par Billag SA. On voit ainsi que les nouveaux taux sont inférieurs de 20% à 10% par rapport aux anciens (c. 6.3.4). Les sociétés de gestion ont suffisamment prouvé qu’un encaissement par SUISA en remplacement de Billag SA occasionnerait pour elles des surcoûts d’environ CHF 2 mios par année, ce qui justifie une augmentation des redevances de 7.67% (c. 6.4). Une baisse des coûts du matériel de sonorisation de 25% depuis 2008 paraît plausible. Mais ces coûts ne sont pas les seuls déterminants. Si l’on tient compte des autres frais, une baisse des redevances du TC 3a se justifierait à raison de 4.3775% à 11.19% dans le domaine audio, et à raison de 11.05% dans le domaine audiovisuel. L’étude de 2008 sur laquelle se sont basées les sociétés de gestion n’est certes plus actuelle sur certains points, notamment parce que plusieurs entreprises n’auront plus à payer de redevances selon la LRTV dans le futur. Mais une actualisation régulière des chiffres ne peut pas être exigée vu les coûts de telles études. Au surplus, le contrôle de la CAF consiste à pronostiquer l’équité future des redevances en se basant sur des données du passé. En résumé, les sociétés de gestion peuvent prétendre à une augmentation de la redevance de 7.67%, tandis que les associations d’utilisateurs ont droit à une baisse de 4.3775% à 11.19% dans le domaine audio et de 11.05% dans le domaine audiovisuel (c. 6.5). Le fait que les commerces suisses souffriraient du tourisme d’achat ou du commerce électronique n’est pas pertinent d’après l’art. 60 LDA. Cette disposition ne permet pas de prendre en compte la situation économique des utilisateurs et ces derniers sont libres de renoncer aux biens protégés par la LDA (c. 6.6). Le montant absolu des redevances perçues durant les dernières années n’est pas pertinent non plus (c. 6.6.1). L’attention que prêtent les clients des débiteurs de la redevance aux biens protégés par la LDA ne joue aucun rôle, car ce ne sont pas eux qui sont utilisateurs au sens de la LDA. La CAF a déjà reconnu depuis longtemps l’influence positive des actes couverts par le tarif commun 3a sur les recettes des utilisateurs (c. 6.6.2). Les sociétés de gestion ont démontré que les pourcentages maximaux de redevance prévus par l’art. 60 al. 2 LDA étaient respectés (c. 6.6.3). Le renchérissement négatif de 0.7% depuis 2008 justifie une baisse des redevances dans la même proportion (c. 6.6.4). En revanche, la force du franc suisse par rapport à l’euro ne joue pas de rôle car le tarif concerne des utilisations en Suisse (c. 6.6.5). La comparaison avec l’étranger, effectuée par les sociétés de gestion, ne permet pas de conclure que les redevances seraient inéquitablement hautes (c. 6.6.6). Comme la présente affaire concerne la suppression d’un rabais sur les redevances, ni les sociétés de gestion, ni les utilisateurs ne peuvent invoquer les principes de la jurisprudence sur l’augmentation abrupte des redevances (c. 6.6.7). La CAF reconnaît que le préposé à la surveillance des prix a effectué des calculs importants d’un point de vue économique. Mais, sous l’angle du droit d’auteur, la détermination des redevances basée sur les coûts n’est qu’une méthode subsidiaire. Les ayants droit peuvent prétendre dans tous les cas à une rémunération équitable d’après l’art. 60 al. 2 LDA. Une baisse des redevances doit donc être exclue. Même si la CAF a renoncé à un examen détaillé des documents des sociétés de gestion concernant la comparaison avec l’étranger, elle constate que les redevances pratiquées en Suisse se situent à un bas niveau par rapport au reste de l’Europe. Une baisse de celles-ci ne seraient pas justifiable vu les engagements internationaux de la Suisse. En effet, les ayants droit ont droit à une rémunération équitable d’après les art. 11bis al. 2 de la Convention de Berne et 15 al. 1 WPPT, et l’exploitation normale de leurs œuvres ne doit pas être affectée, pas plus que leurs intérêts légitimes, d’après le test des trois étapes prévu par les art. 8 et 10 du WCT. Les sociétés de gestion ont démontré qu’elles avaient examiné d’autres pistes qu’un encaissement par SUISA, pour remplacer Billag SA, et que la gestion des droits impliquait un minimum de services aux clients. En raison de leur autonomie tarifaire, on ne peut pas leur reprocher d’avoir choisi la solution d’un encaissement par SUISA (c. 6.7). Globalement, il existe des motifs de baisse des redevances tarifaires de 4.3775% à 11.19% dans le domaine audio, auxquels s’ajoutent encore 0.7% pour le renchérissement négatif. Dans le domaine audiovisuel, cela correspond à une baisse de 11. 75%. A l’inverse, il y a des motifs de hausse de 7.67% en raison de la disparition de l’encaissement par Billag SA. En tout, il en résulte donc une baisse maximale de 4.22% des taux tarifaires. Il s’agit seulement d’une valeur indicative, vu que les données statistiques sont anciennes et qu’il faut nécessairement faire des pronostics. Mais la baisse des redevances de 20% à 10% proposée par les sociétés de gestion est en tous les cas équitable. Il est également équitable que les petites entreprises profitent plus de cette baisse que les grandes. D’après les exemples fournis en procédure, les petites entreprises pourront supporter les redevances prévues (c. 6.8). Le rabais prévu par le tarif est aussi soumis au contrôle de l’équité, même s’il ne joue pas de rôle pour l’appréciation de l’équité des redevances elles-mêmes. Une disposition réservant le rabais aux utilisateurs qui s’annoncent spontanément a presque un caractère pénal et semble injuste. Les utilisateurs doivent pouvoir compter au moins sur un rappel (c. 7). La charge diachronique du tarif pour les utilisateurs est aussi soumise au contrôle de l’équité par la CAF (c. 8). Il n’apparaît pas équitable que le tarif commun 3a soit fondamentalement modifié dès avant l’entrée en vigueur du nouveau système de redevance selon la LRTV. La comparaison avec l’étranger ne peut pas le justifier, vu les difficultés d’une telle comparaison (c. 8.1). Une prolongation automatique du tarif doit être limitée dans le temps, en particulier parce que les effets du changement de système selon la LRTV sont incertains (c. 8.2). La décision de la CAF ne prendra effet qu’à l’échéance du délai de recours (c. 11). Des dépens de première instance ne sont pas prévus dans la procédure d’approbation tarifaire (c. 12.2). [VS]

« Tarif commun Ma » ; tarifs des sociétés de gestion, valeur litigieuse, frais de procédure, contestation pécuniaire ; art. 63 al. 4bis PA, art. 1 lit. a OFIPA, art. 2 OFIPA, art. 14 à 18 OFIPA, art. 16a ODAu, art. 16b ODAu.

Les taxes et débours de la procédure d’approbation tarifaire se déterminent d’après l’art. 16a ODAu et ils sont supportés solidairement par les sociétés de gestion participant à la procédure selon l’art. 16b ODAu. Dans la mesure où l’ODAu ne contient pas de dispositions particulières, l’OGEmol est également applicable. L’art. 16 al. 1 (recte : 16a al. 1) ODAu dispose que les taxes sont réglées par application analogique des art. 1 lit. a, 2 et 14 à 18 de l’Ordonnance du 10 septembre 1969 sur les frais et indemnités en procédure administrative. D’après l’art. 63 al. 4bis PA, l’émolument d’arrêté est calculé en fonction de l’ampleur et de la difficulté de la cause, de la manière de procéder des parties et de leur situation financière. Il est fixé entre CHF 100 et CHF 5'000 dans les contestations non pécuniaires, et entre CHF 100.- et CHF 50'000.- dans les autres contestations. La PA doit être appliquée en l’espèce, d’après son art. 1 al. 1 lit. d (recte : 1 al. 2 lit. d). Les procédures d’approbation des tarifs des sociétés de gestion sont des contestations pécuniaires. Pour la fixation des taxes, le principe de la couverture des frais et de l’équivalence doit être pris en compte, en tant que limite constitutionnelle. L’art. 2 al. 2 de l’Ordonnance sur les frais et indemnités en procédure administrative prévoit différents taux pour le calcul de l’émolument d’arrêté dans les contestations pécuniaires. Comme le tarif a fait l’objet d’un accord en l’espèce, l’intérêt pécuniaire se situe entre CHF 0.- et CHF 10'000.-. L’émolument d’arrêté et de rédaction est ainsi fixé à CHF 1'500.- (c. 7). [VS]

OFIPA (RS 172.041.0)

- Art. 14-18

- Art. 2

- Art. 1

-- lit. a

ODAu (RS 231.11)

- Art. 16b

- Art. 16a

PA (RS 172.021)

- Art. 63

-- al. 4bis

13 décembre 2017

TF, 13 décembre 2017, 2C_685/2016, 2C_806/2016 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; jonction de causes, motivation du recours, décision incidente, tarifs des sociétés de gestion, tarifs complémentaires, divertissement de fond ou d’ambiance, test des trois étapes, triple test, usage privé, équité du tarif, tarif contraignant pour les tribunaux, cognition de la CAF, pouvoir de cognition de la CAF, pouvoir de cognition du TAF, pouvoir de cognition du TF, effet rétroactif, effet suspensif; art. 11bis CB, art. 8 WCT, art. 6 WPPT, art. 8 Cst, art. 42 LTF, art. 71 LTF, art. 93 al. 3 LTF, art. 95 LTF, art. 97 LTF, art. 105 LTF, art. 106 LTF, art. 107 al. 2 LTF, art. 10 al. 2 lit. e LDA, art. 10 al. 2 lit. f LDA, art. 19 al. 1 lit. a LDA, art. 22 LDA, art. 46 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA, art. 83 al. 2 LDA, art. 24 PCF ; N 797 (CAF, 2 mars 2015)

Les recours concernent le même jugement, ils contiennent pour l’essentiel les mêmes conclusions et ils soulèvent des questions juridiques identiques. Il se justifie donc de joindre les procédures (c. 1.1). Contre une décision du TAF concernant l’approbation d’un tarif par la CAF, c’est le recours en matière de droit public qui est ouvert (c. 1.2). Le TF revoit l’interprétation du droit fédéral et des traités internationaux avec un plein pouvoir de cognition. Il base sa décision sur l’état de fait constaté par l’autorité inférieure, mais il peut le rectifier ou le compléter s’il apparaît manifestement inexact ou s’il a été établi en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (c. 1.3). Le TF applique le droit d’office et n’est pas lié par les arguments des parties ou par les considérants de la décision attaquée (c. 1.4). Les motifs du recours doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Cela implique que le recourant doit se pencher au moins brièvement sur ses considérants. En matière de violation des droits fondamentaux et de violation du droit cantonal ou intercantonal, il existe un devoir de motivation qualifié : le grief doit être invoqué et motivé précisément d’après l’art. 106 al. 2 LTF (c. 1.5). Les tarifs approuvés et entrés en force sont contraignants pour les tribunaux. Toutefois, un tarif ne peut pas prévoir de redevance pour une utilisation libre d’après la LDA. En cas de litige, il appartient au juge civil de décider de ce qui est couvert ou non par le droit d’auteur. L’approbation d’un tarif par la CAF ne peut pas créer des droits à rémunération qui ne découlent pas de la loi. A l’inverse, une redevance prévue par la loi ne peut pas être exercée s’il n’existe pas un tarif valable et approuvé. Les tarifs des sociétés de gestion sont donc soumis à un double contrôle complémentaire, d’une part par la CAF et d’autre part par les tribunaux civils (c. 2.2). Si une partie veut attaquer une décision incidente avec la décision finale, elle doit prendre une conclusion spéciale à cet effet, la motiver et expliquer en quoi la décision incidente influe sur la décision finale. Ces exigences sont implicitement respectées en l’espèce (c. 2.2). Lorsqu’un hôtel reçoit des programmes de radio et de télévision grâce à sa propre antenne et les diffuse dans les chambres, il y a un acte de retransmission au sens de l’art. 10 al. 2 lit. e LDA et non de « faire voir ou entendre » au sens de l’art. 10 al. 2 lit. f LDA, car il y a une nouvelle restitution à un cercle indéterminé de destinataires (c. 5.1). Il paraît douteux que l’exception de l’art. 22 al. 2 LDA puisse s’appliquer, vu le texte de la disposition («destinées à un petit nombre d’usagers ») et vu que le législateur voulait avant tout éviter la multiplication d’antennes sur le toit des maisons (c. 5.2.3). Il faut aussi prendre en compte le droit international, qui a évolué depuis 1993, en particulier le test des trois étapes prévu par la CB et les accords ADPIC, et les droits des art. 11bis CB, 8 WCT et 6 WPPT (c. 5.2.4). La CJUE a estimé, dans son arrêt du 7 décembre 2006 C-306/05, que les art. 11bis al. 1 chiffre 2 et 3 CB et 8 WCT s’opposaient à ce que la diffusion d’émissions dans des chambres d’hôtel soit libre sous l’angle du droit d’auteur. Cette décision n’est certes pas contraignante pour les tribunaux suisses, mais elle peut servir à l’interprétation de dispositions juridiques peu claires. Et le TF a déjà reconnu que l’idée d’une harmonisation avec le droit européen avait inspiré le droit d’auteur suisse (c. 5.2.5). Au vu de ce qui précède et des critiques de la doctrine, il faut admettre que la retransmission d’œuvres dans des chambres d’hôtel est une communication publique au sens de l’art. 11bis al. 1 CB, en partie au contraire de ce qui avait été retenu par l’ATF 119 II 51. L’art. 22 al. 2 LDA n’est donc pas applicable (c. 5.2.6). Un but lucratif est incompatible avec l’exception d’usage privé au sens de l’art. 19  al. 1 lit. a LDA. En cas de retransmission d’émissions dans des chambres d’hôtel, l’utilisation d’œuvres est réalisée par l’hôtelier et pas par le client de celui-ci. Cela résulte déjà du fait que les actes d’utilisation de l’art. 10 al. 2 lit. a à f se situent en amont de la jouissance de l’œuvre (c. 5.3.2). La « convergence des technologies » n’y change rien : l’obligation de payer des redevances dépend de l’ampleur de l’infrastructure mise à la disposition du client (c. 5.3.3). En cas de recours au TF, les griefs doivent porter sur les considérants de l’arrêt du TAF, pas sur ceux de la décision de la CAF (c. 6.1). L’industrie de l’électronique qui loue des appareils de réception n’est pas dans la même situation que l’hôtelier : il n’y a donc pas de violation de l’égalité de traitement si elle ne doit pas payer de redevance de droit d’auteur (c. 6.3). La redevance de réception selon la LRTV ne couvre pas les droits d’auteur et les droits voisins : elle profite à d’autres ayants droit et elle relève du droit public, alors que l’indemnité tarifaire relève du droit privé (c. 6.4). Les critères de l’art. 60 LDA sont contraignants pour la CAF et ils ne représentent pas seulement des lignes directrices pour l’exercice de son pouvoir d’appréciation. Ils sont des notions juridiques indéterminées, dont le TF revoit l’interprétation et l’application. Toutefois, ce dernier fait preuve d’une certaine retenue dans le contrôle des décisions prises par des autorités spécialisées, lorsque des aspects techniques particuliers sont en discussion. Cette retenue vaut aussi pour le TAF, malgré sa cognition illimitée selon l’art. 49 PA (c. 7.2.1). Comme la CAF est une autorité spécialisée, le TAF doit respecter son pouvoir d’appréciation dans l’application des critères de l’art. 60 LDA, ce qui revient finalement à ne sanctionner que les abus ou les excès (c. 7.2.2). En l’espèce le TAF s’est tenu à juste titre à ces exigences (c. 7.2.3). En ce qui concerne l’entrée en vigueur d’un tarif, il faut s’en tenir en principe à l’interdiction d’un effet rétroactif. Pour éviter d’autres retards, le TF peut renoncer à renvoyer l’affaire à la CAF et trancher lui-même la question de l’entrée en vigueur et de la durée de validité du tarif, en application de l’art. 107 al. 2 LTF (c. 8.3). La jurisprudence distingue entre la rétroactivité véritable et la rétroactivité impropre. Dans le premier cas, un acte applique le nouveau droit à un état de fait révolu au moment de son entrée en vigueur. Pour que cette rétroactivité proprement dite soit admissible, il faut qu’elle soit expressément prévue par la loi ou qu’elle en résulte clairement, qu'elle soit raisonnablement limitée dans le temps, qu'elle ne conduise pas à des inégalités choquantes, qu'elle réponde à un intérêt public digne de protection et, enfin, qu'elle respecte les droits acquis. En cas de rétroactivité improprement dite, la nouvelle règle s'applique à un état de fait durable, qui a débuté sous l’ancien droit mais qui n’est pas entièrement révolu au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit. La rétroactivité impropre est en principe admise si elle ne porte pas atteinte à des droits acquis. En ce qui concerne l’exigence de la limitation dans le temps, un effet rétroactif d’une année a déjà été admis. Cette exigence découle du principe de la proportionnalité, et avant tout de ce qui est raisonnable. Lorsque la rétroactivité favorise certaines personnes et en désavantage d’autres, comme en l’espèce, les conditions susmentionnées doivent être remplies (c. 8.4). Une entrée en vigueur rétroactive d’un tarif n’est pas exclue, mais elle doit être limitée dans le temps (c. 8.5.1). En l’espèce, la CAF a admis un effet rétroactif de deux ans et deux mois, ce qui est excessif. Les recourantes devaient certes s’attendre à l’introduction du tarif, mais on ne peut pas leur reprocher d’avoir retardé la procédure de manière inconvenante (c. 8.5.3). Une si longue rétroactivité poserait aussi des problèmes pratiques et soulèverait des questions d’égalité de traitement, par exemple lorsque des hôtels ont cessé leur activité ou ont changé de propriétaires (c. 8.5.4). La question de l’effet rétroactif doit cependant être distinguée de celle de la liquidation de l’effet suspensif ordonné suite aux recours (c. 8.6). En principe, l’effet suspensif ne doit pas favoriser matériellement la partie qui succombe au détriment de la partie qui l’emporte (c. 8.6.1). Lorsque le recours est rejeté ou qu’il est irrecevable, l’effet suspensif tombe et un examen du cas particulier conduit en général à admettre que la décision attaquée entre en vigueur avec effet au moment où elle a été rendue, pour ne pas favoriser indûment le recourant (c. 8.6.2). En l’espèce, l’effet suspensif n’avait été ordonné que partiellement et les redevances litigieuses sont perçues depuis le 8 juillet 2015. Il ne paraît pas justifié que le tarif entre en vigueur le 2 mars 2015, soit à la date de la décision de la CAF (c. 8.6.3). Pour les raisons pratiques et juridiques déjà évoquées en relation avec la rétroactivité, il se justifie que le tarif entre en vigueur au 8 juillet 2015. Cela permet aussi d’accorder un délai d’introduction aux recourantes, ce qui se justifie vu la longueur de la procédure qui ne leur est pas imputable (c. 8.6.4). [VS]

CB (RS 0.231.15)

- Art. 11bis

Cst. (RS 101)

- Art. 8

LDA (RS 231.1)

- Art. 83

-- al. 2

- Art. 59

- Art. 22

- Art. 60

- Art. 46

- Art. 19

-- al. 1 lit. a

- Art. 10

-- al. 2 lit. e

-- al. 2 lit. f

LTF (RS 173.110)

- Art. 71

- Art. 93

-- al. 3

- Art. 106

- Art. 107

-- al. 2

- Art. 42

- Art. 95

- Art. 105

- Art. 97

PCF (RS 273)

- Art. 24

WCT (RS 0.231.151)

- Art. 8

WPPT (RS 0.231.171.1)

- Art. 6

« Tarif commun 12 » ; tarifs des sociétés de gestion, procédure tarifaire en cours, mesures provisionnelles, vide tarifaire, droit à rémunération; art. 56 PA, art. 40 al. 2 LDA, art. 74 al. 2 LDA.

Voir CAF, 11 juillet 2016 « tarif commun 3a ». Le tarif commun 12 vise des droits à rémunération, dont l’exercice est soumis à la surveillance de la Confédération. Sans tarif approuvé, les utilisations litigieuses pourraient certes être entreprises, mais les redevances ne pourraient pas être perçues. Il y a donc une urgence qui justifie des mesures provisionnelles (c. 5). De plus, une situation de vide tarifaire conduirait à une insécurité juridique aussi pour les utilisateurs, qui pourraient être confrontés à des prétentions après coup. Il y a ainsi un intérêt à ce que le fonctionnement de la gestion collective soit assuré durant la procédure par des mesures provisionnelles (c. 6). [VS]

05 septembre 2016

TF, 5 septembre 2016, 2C_685/2016 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; tarifs des sociétés de gestion, effet suspensif ; art. 32 al. 1 LTF, art. 103 LTF.

Selon l’art. 103 al. 1 LTF le recours, en règle générale, n’a pas d’effet suspensif. Mais le juge instructeur ou le président de la cour peut en décider autrement, d’office ou sur une requête d’une partie. L’effet suspensif sera ordonné si l’intérêt prépondérant d’une partie, de la collectivité ou d’un tiers le nécessite. Tel sera le cas si la décision attaquée risque de causer un dommage qui ne pourrait pas être réparé par l’admission ultérieure du recours, et que ce risque ne paraît pas supportable pour l’intéressé d’après les circonstances concrètes. Dans la pesée des intérêts, les pronostics sur l’issue de la procédure ne peuvent être pris en compte que s’ils sont clairs. De plus, il faut respecter une certaine continuité dans la procédure (c. 2.1). En l’espèce, on ne peut pas faire un pronostic clair sur l’issue de la procédure et la requête d’effet suspensif garantit que le régime qui valait déjà devant le TAF sera continué. En outre, son rejet occasionnerait des frais aussi pour les intimées au recours. La requête doit donc être admise (c. 2.2). [VS]

13 septembre 2016

TF, 13 septembre 2016, 2C_806/2016 (d)

« Tarif commun 3a complémentaire » ; tarifs des sociétés de gestion, effet suspensif ; art. 32 al. 1 LTF, art. 103 LTF. cf. N 1062 (TF, 5 septembre 2016, 2C_685/2016 (d))

Voir N 1062 (TF, 5 septembre 2016, 2C _685/2016) (c. 2.1). La recourante n’a pas requis l’effet suspensif. Cependant, dans une autre affaire concernant la même décision de la CAF, l’effet suspensif a été décrété pour les utilisations ayant eu lieu avant le 8 juillet 2016. Par souci de continuité et de cohérence dans la procédure, il se justifie en l’espèce que le TF prononce d’office l’effet suspensif, dans la même mesure que dans cette autre affaire (c. 2.2). [VS]

23 novembre 2016

CAF, 23 novembre 2016 (d)

« Tarif A radio (Swissperform) » ; tarifs des sociétés de gestion, compétence de la CAF, équité du tarif,  recettes brutes, déduction des frais d’acquisition de la publicité, procédure devant la CAF, preuves nouvelles devant la CAF, devoir de collaboration accru des parties en procédure tarifaire, webcasting, simulcasting, règle du ballet, musique fonction subordonnée ou d’accompagnement, règle pro rata temporis, augmentation de redevance, vente de programmes, obligation d’informer les sociétés de gestion; art. 7 al. 1 PA, art. 12 PA, art. 13 al. 1 PA, art. 32 al. 2 PA, art. 22c LDA, art. 35 al. 1 LDA, art. 40 LDA, art. 45 al. 1 LDA, art. 51 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA.

Si des questions litigieuses n’ont pas été discutées par les parties lors des négociations tarifaires préalables, elles peuvent quand même être évoquées devant la CAF. Mais des allégations tardives peuvent avoir des conséquences sur la répartition des frais de procédure. Cependant, la CAF ne doit se préoccuper de questions de droit matériel que si elles étaient litigieuses déjà lors des négociations. De plus, les moyens de preuve qui n’ont pas été produits avec la requête ou lors de l’échange d’écritures ultérieur doivent être déposés au moins cinq jours avant l’audience, sinon ils peuvent être refusés (c. 3.1). Par rapport à une procédure administrative habituelle, les parties ont un devoir de collaboration accru en procédure tarifaire d’après l’art. 13 al. 1 PA. Celui-ci relativise la maxime d’office de l’art. 12 PA. Le devoir de collaboration existe indépendamment de la question de savoir si la partie supporte les conséquences d’une absence de preuve. Par analogie avec l’art. 8 CC, ce sont les sociétés de gestion qui ont fondamentalement le fardeau de la preuve en procédure tarifaire – voir aussi art. 9 al. 1 ODAu – même si les utilisateurs ont un devoir d’information selon l’art. 51 LDA (c. 3.2). Sur la base de l’art. 12 lit. c PA, la CAF peut demander des renseignements à des tiers pour établir l’état de fait (c. 3.3). D’après l’art. 7 al. 1 PA, la CAF examine d’office si elle est compétente. Elle l’est pour l’approbation de tarifs dans les domaines soumis à la surveillance de la Confédération selon l’art. 40 LDA. Savoir si tel est le cas constitue selon le TF une question préalable que la CAF doit examiner (c. 4). Celle-ci doit contrôler l’équité de la redevance tarifaire dans son ensemble en évaluant les différents éléments de l’équité les uns par rapport aux autres (c. 5). Ce sont les recettes brutes procurées par l’utilisation qui forment la base de l’évaluation. Au nombre de celles-ci comptent notamment les revenus touchés par un bureau de prélocation des billets de spectacle, les redevances de droits d’auteur et de droits voisins répercutées dans le prix de ces billets, les subventions ainsi que les revenus de la publicité et du sponsoring. Une concrétisation complète du principe des recettes brutes dans tous les tarifs s’avère toutefois difficile car les parties ont souvent convenu de solutions dérogatoires pour trouver un accord (c. 5.1). Les limites maximales de 10% et 3% prévues par l’art. 60 LDA existent sous réserve qu’une gestion rationnelle procure aux ayants droit une rémunération équitable selon l’art. 60 al. 2 LDA. Si plusieurs utilisations d’œuvres sont réglées par le même tarif, un dépassement de ces limites est possible ; il en va de même si les parties se sont mises d’accord sur la redevance (c. 5.3). D’après la jurisprudence constante de la CAF, les augmentations tarifaires abruptes sont à éviter. Occasionnellement, d’importantes augmentations ont été acceptées lorsqu’elles ont été échelonnées dans le temps. Il peut cependant être renoncé à un tel échelonnement si les redevances précédentes étaient manifestement trop basses ou si l’augmentation résulte d’un changement de système de calcul justifié objectivement ou de nouvelles redevances plus justes. L’augmentation peut être appréciée par rapport aux redevances payées jusqu’alors. Une différence de 40% a été jugée inadmissible par le passé (c. 5.4). Les clauses non pécuniaires d’un tarif sont aussi soumises au contrôle de l’équité sur la base de l’art. 59 al. 1 LDA, l’art. 45 al. 1 LDA servant de référence (c. 6). Le webcasting d’événements isolés est une représentation au sens de l’art. 35 al. 1 LDA, et non une diffusion. Il peut donc être exclu d’un tarif réglementant les utilisations de phonogrammes à des fins de diffusion. En revanche, le webcasting de programmes entiers est une diffusion au sens de l’art. 35 LDA et il ne met pas en jeu les droits en ligne. L’art. 35 LDA ne distingue pas entre le simulcasting et le webcasting. La SSR n’était pas autorisée à pratiquer le webcasting de programmes entiers avant le 1er  juin 2013. Les versions antérieures du tarif A n’ont donc pas pu régler cette forme d’utilisation. Par conséquent, il est admissible que le nouveau tarif le précise expressément (c. 7). La règle du ballet (réduction de moitié des taux de redevance) ne doit pas être appliquée lorsque la musique est diffusée en fond sonore sur des éléments rédactionnels. En effet, la concentration cognitive des auditeurs, en matière radiophonique, dépend de toute manière de ce qu’ils font en écoutant les émissions. La situation n’est donc pas comparable à celle réglée par le tarif commun H. De plus, une différenciation entre la musique de fond et de premier plan n’a pas été faite par le passé dans le tarif A, les forfaits étant inévitables en matière tarifaire. La règle du ballet découle d’une application par analogie de l’art. 60 al. 1 lit. c LDA, si bien qu’il faut partir du principe qu’elle a déjà été examinée par la CAF dans le cadre du contrôle de l’équité des versions précédentes du tarif A. Elle ne justifie donc pas une baisse de la redevance dans le nouveau tarif (c. 8.1). Un dépassement de la règle des 3% lorsque plusieurs droits sont concernés a déjà été admis précédemment par la CAF. Une augmentation des redevances pour les droits de l’art. 24b LDA ne peut pas être fondée uniquement sur la comparaison avec le TC S, la CAF ayant estimé qu’il existait des raisons objectives d’avoir des tarifs différents pour les diffuseurs privés et la SSR. Les motifs de cette augmentation doivent donc être démontrés par Swissperform, qui doit prouver qu’un plus grand nombre de copies est réalisé. La SSR a un devoir de collaboration dans l’établissement des faits, mais le fardeau de la preuve incombe à Swissperform. L’augmentation de redevance ne peut donc pas être acceptée, d’autant plus qu’elle serait abrupte (c. 8.2). Une limitation des bases tarifaires aux revenus publicitaires procurés par les émissions musicales ne serait pas conforme au principe selon lequel les ayants droit doivent participer aux recettes occasionnées par leurs œuvres. En effet, la portée des actions publicitaires concernant les émissions non musicales est aussi augmentée du fait que le taux d’écoute du programme est amélioré par la diffusion de musique dans d’autres émissions. De plus, la limitation aux revenus procurés par la musique est déjà assurée par la règle pro rata temporis de l’art. 60 al. 1 lit. c LDA. Enfin la notion d’émissions « musicales » est peu claire et soulève des problèmes de délimitation. Le principe des recettes brutes implique de compter au nombre des recettes tarifaires pertinentes aussi les revenus publicitaires réalisés par des tiers mandatés par la SSR. Mais ce principe a été appliqué à des degrés divers dans les différents tarifs jusqu’à présent, bien que la jurisprudence récente de la CAF ait clairement tendance à limiter les déductions, voire à les abolir. Un changement de système peut conduire à une augmentation des redevances dues, mais celle-ci doit en général être échelonnée pour éviter une augmentation abrupte. Dans ce contexte, une limitation à 15% (au lieu de 40%) de la déduction des frais d’acquisition de la publicité est équitable, mais la déduction doit être forfaitaire. Cela s’impose aussi en raison d’une comparaison avec d’autres tarifs et du fait que la SSR a prétendu ne pas avoir de droit de regard sur la comptabilité de la régie publicitaire Admeira. De plus, les recettes respectives de chaque société pourraient être difficiles à établir car la SSR détient partiellement Admeira. En revanche, l’argument selon lequel cette dernière serait une société de conseil et apporterait des prestations allant au-delà de la simple acquisition de la publicité n’est pas démontré. Il ne peut être retenu car la SSR a violé son devoir de collaboration en procédure, aussi en ce qui concerne la valeur de ces prestations complémentaires. Au surplus, les diffuseurs qui acquièrent eux-mêmes la publicité de doivent pas être défavorisés par rapport à ceux qui recourent à des tiers (c. 8.3). La notion de programmes « musicaux », comme celle d’émissions « musicales », est incertaine. Mais il est justifié d’exclure des bases tarifaires les revenus de la vente de programmes qui ne contiennent pas de musique. Ces revenus ne sont pas occasionnés par l’utilisation de la musique (c. 8.4). L’application de l’art. 22c LDA ne dépend pas d’un critère temporel. Il n’est donc pas justifié de limiter l’octroi du droit de mise à disposition aux utilisations ayant lieu dans un délai de 7 jours dès la première diffusion de l’émission. En revanche, l’importance économique différenciée des diverses modalités de la mise à disposition peut être prise en compte dans la fixation de la redevance (c. 9.1). S’agissant de l’obligation d’annoncer le code ISRC, la SSR a refusé une disposition tarifaire semblable à celle du tarif commun S. Comme elle n’a pas non plus adapté ses systèmes informatiques de sorte à pouvoir déclarer ce code – contrairement aux assurances qu’elle avait données lors de la précédente procédure d’approbation tarifaire – une disposition tarifaire contraignante paraît justifiée. Mais la SSR doit disposer d’un délai pour s’adapter au nouveau système. Le projet de nouvel art. 51 al. 1 LDA, qui oblige les utilisateurs à faire leurs déclarations sous forme électronique et dans un format permettant un traitement automatique, peut être vu comme une concrétisation dans la loi de la jurisprudence actuelle. Il est équitable que le tarif mette à la charge de la SSR les frais de recherche occasionnés par une violation de son devoir de déclarer le code ISRC. C’est Swissperform qui aura la charge de la preuve concernant cette violation (c. 9.2.1). Vu les nombreuses difficultés auxquelles elle a apparemment été confrontée avec les déclarations de la SSR, il est légitime que Swissperform dispose de plus de 30 jours pour contester ces déclarations. Mais cette possibilité ne peut pas être illimitée dans le temps, et le délai doit être fixé à 90 jours pour les déclarations « qui ne sont pas manifestement erronées ». Il est de plus disproportionné que Swissperform puisse considérer comme protégé tout enregistrement déclaré de manière lacunaire ou incomplète, sans considération des circonstances de chaque cas (c. 9.2.2). [VS]

LDA (RS 231.1)

- Art. 40

- Art. 35

-- al. 1

- Art. 22c

- Art. 59

- Art. 51

- Art. 45

-- al. 1

- Art. 60

PA (RS 172.021)

- Art. 7

-- al. 1

- Art. 32

-- al. 2

- Art. 13

-- al. 1

-- al. 1

- Art. 12

01 février 2016

HG ZH, 1er février 2016, HG150137-O (d)

sic! 9/2016, p. 457 ss, « Geschätzte Kopier- und Verwaltungsvergütungen » ; tarifs des sociétés de gestion, devoir d’informer les sociétés de gestion, estimation de la redevance, frais administratifs ; art. 46 LDA, art. 47 LDA, art. 51 LDA.

Les utilisateurs d’oeuvres ont un devoir de renseigner les sociétés de gestion selon l’art. 51 LDA. Lorsque celui-ci n’est pas respecté, les dispositions des tarifs communs 8 et 9 permettent à ProLitteris d’estimer les données nécessaires à la facturation. L’estimation est considérée comme reconnue si l’utilisateur ne fournit pas les informations voulues dans les 30 jours. En outre, la société de gestion peut réclamer un supplément pour ses frais administratifs (c. 5.2). [VS]

« Tarif commun 4i » ; tarif des sociétés de gestion, équité du tarif, durée de validité du tarif, prolongation automatique, devoir de négocier, pouvoir de cognition de la CAF ; art. 19 LDA, art. 20 LDA, art. 40 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA.

Tandis que l’équité de la redevance se détermine d’après l’art. 60 LDA, les autres dispositions du tarif relèvent d’une libre appréciation de la CAF d’après l’art. 59 al. 1 LDA (c. 3). Sous l’angle du contrôle de l’équité, la CAF doit aussi examiner la charge diachronique du tarif pour les utilisateurs (c. 4). La CAF n’a pas de jurisprudence bien établie en ce qui concerne les clauses tarifaires prévoyant une prolongation automatique du tarif pour une durée illimitée. L’équité de la durée de validité du tarif doit être examinée de cas en cas, en fonction du système tarifaire, des faits qui l’ont déterminé et de leur caractère durable ou au contraire changeant (c. 4.2). En l’espèce, le tarif contient une clause selon laquelle il se prolonge automatiquement d’année en année, sauf résiliation donnée par une partie au moins une année à l’avance. La durée de validité initiale de deux ans pourrait donc rester lettre morte et le tarif pourrait se prolonger à l’infini, sans que la CAF puisse à nouveau vérifier son équité. Cela paraît problématique, d’autant que les parties au tarif se sont réservées d’étendre ce dernier à d’autres appareils permettant la copie privée (c. 4.3). Les tendances en matière de copie privée sont en constante évolution. En particulier, les appareils ont des capacités de stockage de plus en plus grandes, et les prix sont en baisse. Il n’est donc pas garanti que le tarif soit toujours équitable dans cinq ou dix ans. Le besoin de flexibilité et de prévisibilité à long terme des parties est certes légitime. Mais, dans un environnement en mutation, il est difficilement compatible avec le devoir de négocier des sociétés de gestion, prévu par l’art. 46 al. 2 LDA, et de faire approuver le tarif par la CAF comme exigé par les art. 40 et 46 al. 2 LDA. L’admissibilité d’une clause de prolongation automatique dépend des circonstances et il s’impose en l’espèce de limiter son effet dans le temps, afin que les sociétés de gestion et les associations d’utilisateurs examinent à l’échéance si le tarif correspond toujours aux circonstances (c. 4.4). Il y a un certain déséquilibre entre les parties, s’agissant de la possibilité de résiliation. Les sociétés de gestion sont spécialisées dans les questions de gestion collective, ce qui n’est pas le cas des utilisateurs. Tendanciellement, il n’est pas à exclure que les sociétés de gestion n’aient aucun intérêt à résilier le tarif. De leur côté, les utilisateurs, moins organisés, pourraient oublier de procéder à une telle résiliation dans les délais. Et, s’ils le font, ce sera à eux de démontrer que le tarif est devenu inéquitable si les sociétés de gestion veulent le prolonger (c. 4.5). La limitation dans le temps de la prolongation automatique obligera les parties, à l’échéance, à examiner si le tarif est encore actuel. En cas de réponse affirmative, une requête de prolongation pourra être adressée à la CAF selon une procédure relativement simple et peu coûteuse (c. 4.6). Cette démarche peut être exigée pour éviter le risque d’un tarif inéquitable. Le mécontentement des parties concernant l’actuelle procédure d’approbation tarifaire, soumise à un système de triple instance et impliquant des décisions de renvoi aux autorités inférieures, n’est pas une raison d’instaurer une clause de prolongation automatique illimitée contournant le devoir de négocier et de soumettre les tarifs à la CAF. Une telle clause n’est pas équitable au sens de l’art. 59 al. 1 LDA (c. 4.7). L’accord des parties ne restreint pas la cognition de la CAF. Toutefois, cette dernière ne modifie qu’avec retenue un tarif sur lequel les parties sont d’accord. Sinon personne n’aurait de raisons de faire des concessions dans les négociations tarifaires et de rechercher une solution de compromis. Cependant, en l’espèce, il ne s’agit pas de modifier une disposition matérielle du tarif, mais uniquement sa durée de validité. Le droit d’être entendu au sens de l’art. 59 al. 2 LDA a été respecté et les sociétés de gestion ont accepté que la CAF modifie elle-même le tarif si elle devait l’estimer inéquitable. La CAF décide donc de limiter la prolongation automatique d’année en année, au plus tard jusqu’à fin 2020. Ainsi, le tarif aura une durée maximale de quatre ans (c. 4.8). [VS]

« Tarif commun K » ; tarif des sociétés de gestion, équité du tarif, durée de validité du tarif, prolongation automatique, devoir de négocier, pouvoir de cognition de la CAF ; art. 40 LDA, art. 46 al. 2 LDA, art. 59 LDA, art. 60 LDA ; cf. N 1067 (CAF, 8 décembre 2016)

Même motivation que CAF, 8 décembre 2016, « Tarif commun 4i » (N 1067). En l’espèce, le marché des concerts et des spectacles serait en évolution parce que les recettes des sociétés de gestion ont continuellement augmenté ces dernières années, comme les coûts des organisateurs. De plus, ces derniers ont émis des doutes sur le tarif. Ces facteurs justifieraient une limitation dans le temps de la prolongation automatique, pour que les parties examinent à l’échéance si le tarif correspond toujours aux circonstances (c. 4.4). [VS]