«
Tarif commun 7 » ; accès aux documents officiels, commission
arbitrale fédérale, tarifs des sociétés de gestion, cognition du
TAF, tarif contraignant pour les tribunaux; art. 2 al. 1 lit. a
LTrans, art. 3 al. 1 lit. a ch. 5 LTrans, art. 3 al. 1 lit. a ch. 6
LTrans, art. 6 al. 1 OLOGA, art. 7a al. 1 lit. a OLOGA, art. 8 al. 2
OLOGA, art. 46 LDA, art. 55 LDA, art. 58 LDA, art. 59 LDA, art. 1
ODAu, art. 2 al. 1 ODAu, art. 9 ODAu, art. 14 ODAu, art. 15 ODAu.
Ne
sont pas concernées par la présente procédure les activités
administratives de la CAF, par exemple relatives aux indemnités de
ses membres ou à la charge de travail du secrétariat, pour
lesquelles elle admet garantir un accès aux documents selon la
LTrans (c. 5). Il faut en revanche déterminer si la procédure
d’approbation des tarifs est exclue du champ d’application de
cette loi d’après son art. 3 al. 1 lit. a (c. 5.2). Le texte de la
disposition, qui représente le point de départ de toute
interprétation, ne permet pas de dire si la procédure d’approbation
tarifaire est exclue de ce champ d’application en tant que
procédure administrative au sens du chiffre 5 ou d’arbitrage au
sens du chiffre 6 (c. 5.3). D’un point de vue historique, les
travaux parlementaires ne permettent pas non plus de trancher la
question. Sur la base du Message, une partie de la doctrine considère
que les procédures des commissions arbitrales de l’administration
fédérale ne tombent pas sous le coup de la LTrans. Mais le Message
ne distingue pas entre les commissions arbitrales et les tribunaux
arbitraux proprement dits. Malgré sa désignation, la CAF n’est
pas un tribunal arbitral, notamment parce qu’elle ne représente
pas une alternative à la justice étatique. Les commissions
arbitrales, selon leur composition, peuvent être des autorités
administratives ou judiciaires, si bien qu’il ne faut pas les
exclure globalement du champ d’application de la Trans. Au surplus,
celle-ci a été adoptée avant la réforme de la justice de 2005,
qui a largement remplacé les commissions arbitrales et de recours
par le TAF, et qui a changé la position de la CAF dans le système
juridique. Les explications du Message et l’interprétation
historique ne sont donc pas déterminantes (c. 5.4). L’art. 3 al. 1
LTrans a pour but d’exclure l’application de la loi lorsque
d’autres dispositions légales règlent l’accès aux documents
officiels. En revanche, la LTrans s’applique aux procédures
administratives de première instance – sauf en ce qui concerne la
consultation du dossier au sens de l’art. 3 al. 1 lit. b – dès
que la décision est entrée en force. Il faut donc se demander si la
CAF est une autorité administrative décentralisée de première
instance ou un organe judiciaire (c. 5.5). Le TF, à plusieurs
reprises, a estimé que la CAF était une autorité judiciaire.
C’était cependant avant la réforme de l’organisation judiciaire
fédérale entrée en vigueur le 1er janvier 2007. Jusqu’à la fin
2006, les décisions de la CAF pouvaient faire l’objet d’un
recours direct au TF, et la compétence de celui-ci était limitée à
la violation du droit fédéral et à l’excès ou l’abus du
pouvoir d’appréciation. Il était en revanche en principe lié par
l’état de fait, conformément à l’art. 105 al. 2 OJ. Cette
situation a changé avec la réforme de la justice. Désormais, la
CAF est une commission fédérale au sens de l’art. 33 LTAF.
L’approbation des tarifs fait l’objet d’une décision au sens
de l’art. 5 PA et peut être attaquée au TAF. Ce dernier dispose
d’une pleine cognition et revoit aussi l’opportunité de la
décision, bien qu’il fasse preuve en pratique d’une certaine
réserve et qualifie la CAF dans ce contexte de « tribunal
spécialisé indépendant ». Alors que les commissions arbitrales et
de recours ont été pour la plupart abolies, la CAF a subsisté et a
été placée au même niveau qu’un office fédéral ou qu’une
commission extra-parlementaire. Ses décisions font l’objet d’un
système de triple instance, puisque les arrêts du TAF peuvent
encore faire l’objet d’un recours en matière de droit public au
TF. Un tel système avec trois tribunaux représenterait une
exception en droit administratif. Il faut donc réexaminer la
qualification d’autorité judiciaire de la CAF, ce d’autant que
la révision de la LDA en vigueur depuis le 1er avril 2020 a confirmé
les trois instances actuelles (c. 5.5.2). Selon une interprétation
systématique, la CAF est réglementée par les art. 55 ss LDA et 1
ss ODAu. Dans la LDA, les normes se trouvent au chapitre 5 du titre
4, sous l’intitulé « Surveillance des sociétés de gestion ».
Cela va dans le sens d’une qualification d’autorité
administrative de surveillance. Sous l’angle organisationnel, la
CAF est une commission extraparlementaire rattachée au DFJP,
énumérée à l’annexe 2 chiffre 2 de l’OLOGA pour ce qui
concerne la rémunération de ses membres. D’après l’art. 2 al.
1 ODAu, les règles sur les commissions extraparlementaires
s’appliquent aussi à la durée du mandat et à la démission des
membres de la CAF, lesquels sont nommés lors du renouvellement
d’ensemble des commissions extraparlementaires. Ces dernières sont
soit consultatives, soit décisionnelles, et elles appartiennent à
l’administration fédérale décentralisée d’après l’art. 7a
al. 1 lit. a OLOGA. A ce titre, d’après l’art. 2 al. 1 lit. a
LTrans, elles tombent dans le champ d’application personnel de
cette loi. Il n’est cependant pas exclu que des commissions
décisionnelles exerçant une activité judiciaire soient exclues du
champ d’application matériel de ladite loi, d’après l’art. 3
LTans (c. 5.5.3). Du point de vue procédural, la CAF décide en
chambre de cinq membres et après avoir entendu les parties
oralement, de manière semblable à une autorité judiciaire. Selon
l’art. 55 al. 3 LDA, elle ne prend en considération aucune
instruction pour ses décisions, le DFJP n’exerçant qu’une
surveillance administrative d’après l’art. 58 LDA. Mais une
telle indépendance ne suffit pas pour la qualifier d’autorité
judiciaire. Ainsi, la Commission de la concurrence, celle de la
communication ou la surveillance des marchés financiers fonctionnent
de manière indépendante, mais elles relèvent de l’administration
fédérale décentralisée. La question essentielle est plutôt de
savoir si le rôle principal de l’autorité est de régler des
différends ou de fonctionner comme autorité de surveillance dans
l’intérêt public (c. 5.5.4). La CAF exerce sa surveillance
uniquement sur les tarifs, tandis que le contrôle de la gestion
administrative et des autres obligations des sociétés de gestion
est exercé par l’IPI. Elle n’agit pas d’elle-même mais
vérifie seulement les tarifs qui lui sont présentés. Cela, de même
qu’une application limitée de la maxime officielle, va plutôt dans le sens d’une autorité judiciaire (c. 5.5.5). Mais la
procédure devant la CAF a pour objet l’approbation des tarifs et
non de régler des différends entre l’administration et des
particuliers. Historiquement, la CAF devait éviter que les sociétés
de gestion n’abusent de leur position de monopole. Elle n’était
donc pas un tribunal, mais une autorité administrative de contrôle
des prix. Par la révision de la LDA de 1989, le contrôle des abus a
été remplacé par un contrôle de l’équité des tarifs. Il a
désormais pour but un équilibre objectif des intérêts entre
ayants droit et utilisateurs, servant la sécurité juridique. Sous
de nombreux aspects, la procédure n’a pas pour objectif la
décision sur des questions litigieuses, mais plutôt l’approbation
de tarifs négociés si possible de manière consensuelle. Elle est
précédée de négociations entre les sociétés de gestion et les
associations d’utilisateurs. Dans leur requête à la CAF, les
sociétés doivent décrire le déroulement de ces négociations et
la Présidente ou le Président vérifie qu’elles aient été
menées avec la diligence nécessaire. Ces règles, parfois orientées
vers la conciliation, ne correspondent pas à celles gouvernant
l’activité d’un organe judiciaire, qui doit dire le droit. Au
surplus, dans le cadre du contrôle de l’équité, la CAF doit
respecter l’autonomie tarifaire des sociétés de gestion et leur
donner la possibilité de modifier les clauses tarifaires qui ne
peuvent pas être approuvées, conformément à l’art. 15 ODAu. Si
plusieurs solutions sont possibles, il n’appartient pas à la CAF
d’imposer celle qui lui paraît préférable, contre l’avis des
sociétés de gestion. La règle de l’art. 15 ODAu ne va pas dans
le sens d’une activité judiciaire. Si le tarif est litigieux, la
CAF a aussi la possibilité de le modifier elle-même, conformément
à l’art. 59 al. 2 LDA, ce qu’elle fait fréquemment. Mais cela
n’est pas le propre d’une autorité judiciaire : les autorités
d’approbation peuvent aussi ne donner qu’une autorisation
partielle ou assortie de conditions. Au surplus, la CAF ne tranche
pas les prétentions litigieuses entre sociétés de gestion et
utilisateurs : même si le juge civil ne peut pas revoir l’équité
des tarifs d’après l’art. 59 al. 3 LDA, il doit veiller à ce
qu’il n’en découle aucun droit à rémunération incompatible
avec la loi. Les aspects de doit matériel ne sont examinés qu’à
titre préjudiciel par la CAF. Enfin, la procédure devant la CAF n’a
pas pour objet de trancher un litige entre l’administration et des
particuliers, les sociétés de gestion étant des personnes morales
de droit privé. La surveillance des tarifs est toutefois une
activité étatique, si bien que la requête d’accès aux documents
officiels ne concerne pas uniquement l’activité d’acteurs
privés. Elle concerne la fonction de surveillance de la CAF en tant
qu’autorité d’approbation, le contrôle étatique visant
l’équité par un équilibre des intérêts si possible consensuel,
et non l’application du droit dans des cas litigieux comme
tribunal. Cela vaut en tout cas lorsque les parties sont d’accord
sur le tarif, comme en l’espèce (c. 5.5.6). En revanche, la
composition paritaire de la CAF ne va pas a priori à l’encontre
d’une qualification d’instance judiciaire : sur les cinq membres
qui prennent les décisions, trois sont indépendants. Et le Conseil
des Etats a expressément relevé que la présence de représentants
d’intérêts ne violait pas le droit à un juge indépendant.
Cependant, le fait que le ou la président-e ait voix prépondérante
en cas d’égalité, d’après l’art. 14 al. 3 ODAu, est atypique
pour un tribunal et va dans le sens d’une autorité administrative
(c. 5.5.7). On peut en dire de même de la désignation des membres
de la CAF, qui a lieu par nomination du Conseil fédéral, et non par
élection de l’Assemblée fédérale, cela en même temps que pour
les membres des commissions extraparlementaires. Les critères de
nomination fixés l’art. 1 al. 1 ODAu seraient d’ailleurs
inhabituels pour une instance judiciaire (c. 5.5.8). Enfin, la
publicité des débats de la CAF n’est pas assurée et ses
décisions ne sont publiées que de manière limitée selon l’art.
5 al. 1 ODAu. Au regard de l’art. 30 al. 3 Cst, cela plaide
également contre une qualification d’autorité judiciaire (c.
5.6). En résumé, la CAF a certes une position juridique
différenciée. Mais elle doit être qualifiée d’autorité de
surveillance, et est seulement partiellement comparable à une
autorité judiciaire, cela sur des points accessoires. En ce qui
concerne le champ d’application matériel de la LTrans, la
procédure d’approbation des tarifs ne peut pas être considérée
comme une procédure judiciaire. Il n’y a d’ailleurs pas de
disposition légale spéciale concernant l’accès aux documents du
dossier. Cette procédure n’est donc pas exclue du champ
d’application de la LTrans d’après l’art. 3 al. 1 lit. a ch. 5
et 6 de cette loi. Elle en fait partie en tant que procédure
administrative de première instance (c. 5.7). L’affaire doit donc
être renvoyée à la CAF pour qu’elle examine en particulier si le
droit d’accès doit être limité, différé ou refusé en
application de l’art. 7 LTrans (c. 6). [VS]