sic!
6/2021, p. 334-337, « GAV » ; Concurrence déloyale,
légitimation active, association, convention collective de travail,
médias, recours admis ; art. 9 al. 1 LCD, art. 10 al. 2 lit. a LCD.
La
recourante est une association ayant pour but de défendre et de
promouvoir les intérêts idéaux, économiques et déontologiques
des indépendants et des entreprises de l'artisanat, du commerce, des
services et de l'industrie. En l’espèce, elle se plaint de médias
ayant critiqué la manière dont l’un de ses membres a appliqué
une convention collective de travail. Le recours porte sur sa
légitimation active (c. 2). Selon l'art. 9 al. 1 LCD, celui qui, par
un acte de concurrence déloyale, subit une atteinte dans sa
clientèle, son crédit ou sa réputation professionnelle, ses
affaires ou ses intérêts économiques en général ou celui qui en
est menacé peut demander au juge de l’interdire si elle est
imminente, de la faire cesser si elle dure encore ou d’en constater
le caractère illicite, si le trouble qu’elle a créé subsiste.
Sont ainsi légitimés à agir les sujets de droit qui participent
eux-mêmes à la concurrence économique et qui peuvent faire valoir
leurs propres intérêts économiques, à condition qu’ils aient un
intérêt direct à assurer ou à améliorer leur position dans la
concurrence par le succès de l'action (c. 2.1). Les associations
professionnelles ou économiques que leurs statuts autorisent à
défendre les intérêts de leurs membres peuvent également intenter
les actions prévues à l’art. 9 al. 1 LCD (art. 10 al. 2 lit. a
LCD). On vise ici des groupements dotés de la personnalité
juridique, dont les membres participent à la concurrence et se
réunissent par intérêt économique. L'art. 10 al. 2 let. a LCD
confère aux associations professionnelles ou économiques, à
certaines conditions, un droit d'action propre et autonome. Le droit
d'agir de l'association n'est donc pas dérivé du droit des membres
dont l'association économique défend les intérêts. C'est pourquoi
les « intérêts économiques » de l'art. 10 al. 2 let. a
LCD ne désignent pas les intérêts économiques individuels qui,
selon l'art. 9 al. 1 LCD, habiliteraient les membres à intenter une
action individuelle. En conséquence, l'association n’a ni à
alléger ni à prouver que ses membres auraient parallèlement
qualité pour agir. La notion d’ « intérêts
économiques » est large. Elle vise les intérêts dans le
domaine économique en général, ce qui délimite le champ
d’application par rapport aux intérêts purement idéologiques,
scientifiques ou sociaux. Par ailleurs, les intérêts dont il est
ici question doivent être ceux des membres, ce qui implique une
certaine collectivité de ces intérêts. L'association ne peut pas
représenter les intérêts économiques individuels d’un seul
membre à sa place. L'association peut également faire valoir, par
son action, les intérêts collectifs d'une petite partie seulement
de ses membres, étant donné que, selon le texte et le but de la
norme, il n'est pas nécessaire que tous les membres, la majorité ou
une partie importante d’entre eux soient concernés. Même si
l'acte de concurrence déloyale n'est dirigé que contre un seul
membre de l'association, les intérêts d'autres membres de cette
dernière peuvent aussi être touchés (c. 2.2). Il n’est pas
nécessaire d’alléguer et de prouver une atteinte réelle aux
intérêts économiques d’un membre de l’association. Il suffit
qu’une menace d’une atteinte imminente soit étayée. Si l’auteur
du trouble a déjà agi, mais que le trouble ne s’est pas encore
produit, c’est l’aptitude objective de l’acte à provoquer une
distorsion de concurrence qui est déterminant. La question de savoir
si cette aptitude objective existe en l’espèce devra être
examinée par l’instance précédente (c. 3.2.3). Dans le cas
d’espèce, il faut admettre que l’intérêt économique touché
n’est pas seulement l’intérêt économique d’un des membres de
l’association, mais qu’il s’agit plutôt d’un intérêt
collectif suffisant des membres de l’association, que celle-ci est
légitimée à défendre (c. 3.3). La cause est renvoyée à
l’instance précédente pour nouveau jugement (c. 4). [SR]