II Droit des marques et des indications de provenance

Procédure

Actions

14 mai 2007

TF, 14 mai 2007, 4C.52/2007 (d)

sic! 10/2007, p. 754-757, « Comcord » ; action, action en dommages-intérêts, gain manqué, preuve, dilution de la force distinctive ; art. 41 ss CO, art. 42 al. 1 CO, art. 55 al. 2 LPM.

L'action en dommages-intérêts basée sur le gain manqué n'est recevable que si le demandeur établit de manière quasi certaine avoir été en position de réaliser le gain manqué dont il réclame réparation. Refus de l'indemnité fixée par les juges de première instance en application de l'art. 42 al. 1 CO pour dilution de la force distinctive d'une marque.

20 septembre 2007

TF, 20 septembre 2007, 4A_185/2007 (f)

sic! 2/2008, p. 147-150, « SOS Serruriers » ; action, dommage, chiffre d’affaires, solidarité, instigateur, auteur principal, complice ; art. 41 CO, art. 42 CO, art. 50 CO.

L'estimation du dommage relève de l'appréciation des éléments de fait. Le dommage doit être fixé en appliquant la marge bénéficiaire moyenne du lésé au chiffre d'affaires réalisé par l'auteur du dommage pendant la durée de l'atteinte à la marque. Lorsque plusieurs auteurs ont causé ensemble un dommage, ils sont tenus solidairement de le réparer, sans qu'il faille distinguer entre l'instigateur, l'auteur principal et le complice.

13 décembre 2007

HG ZH, 13 décembre 2007, HG020324 (d)

sic! 6/2009, p. 411-416, « Puma » ; action, action en interdiction, action en cessation, action en fourniture de renseignements, action échelonnée, action en paiement, qualité pour défendre, risque de violation, risque de récidive, preuve, confiscation, destruction, canaux de distribution, importation parallèle ; art. 55 al. 1 lit. a, b et c LPM, § 189 ZPO/ZH.

Il existe un risque imminent de violation du droit à la marque (art. 55 al. 1 lit. a LPM) si une violation analogue du droit à la marque a déjà eu lieu (danger de récidive) ou si des indices laissent penser qu’une violation comparable aura lieu prochainement (danger de commission d’une première infraction) (c. 2.2.2). Celui qui allègue un danger de récidive doit en apporter la preuve, en démontrant par exemple que la défenderesse ne s’est pas approvisionnée auprès d’une source autorisée par le demandeur ou que les produits en cause sont des contrefaçons (c. 2.2.3). Un seul cas suffit (c. 2.2.5). Celui qui prétend que sa marque est contrefaite doit prouver qu’il est titulaire de la marque et que les prétendues contrefaçons proviennent de la défenderesse. Il doit en outre indiquer quelles sont les instructions de fabrication en vigueur dans ses centres de production, en particulier en ce qui concerne le label de sécurité, et comment il veille à leur respect. Il doit enfin prouver que c’est sans son accord que la défenderesse distribue les produits (c. 2.2.4). L’action en interdiction (Unterlassungsbegehren) (art. 55 al. 1 lit. a LPM) ne nécessite pas de faute du défendeur (c. 2.2.5). L’action en interdiction est admise en l’espèce (c. 2.2.6). Le rappel des produits et leur confiscation peuvent servir à l’exécution de l’action en interdiction (c. 2.3.1). L’action en cessation (art. 55 al. 1 lit. b LPM), qui peut conduire à la confiscation et à la destruction des produits, ne peut être admise que si la défenderesse distribue effectivement des produits mis en circulation sans l’accord de la demanderesse (c. 2.3.2). La demanderesse ne peut exiger le rappel des produits et leur confiscation si la défenderesse n’en revendique ni la propriété ni la possession au moment du dépôt de la demande (défaut de légitimation passive) (c. 2.3.3). L’action en fourniture de renseignements (art. 55 al. 1 lit. c LPM) ne peut pas être utilisée pour obtenir des informations au sujet des sources et des canaux de distribution d’importations parallèles (c. 2.4.2). Cette action ne permet d’obtenir de la défenderesse des renseignements qu’au sujet de son fournisseur direct (c. 2.4.3 et 2.4.5). L’action échelonnée (Stufenklage) permet d’introduire une action en paiement non chiffrée dans l’attente de la production des comptes. L’obligation de produire les comptes suppose la violation des droits de la demanderesse (c. 2.5.2). La demande de production des comptes fait l’objet d’un jugement partiel (§ 189 ZPO/ZH) (c. 2.5.4).

09 mars 2009

TF, 9 mars 2009, 4A_529/2008 (f)

sic! 9/2009, p. 607-609, « Produits cosmétiques » ; action, action en interdiction, action en prévention de trouble, action en cessation, intérêt pour agir, risque de récidive, présomption, fardeau de la preuve, preuve ; art. 8 CC, art. 55 al. 1 lit. a et b LPM, art. 9 al. 1 lit. a LCD.

Un intérêt suffisant existe pour justifier une action en interdiction de trouble lorsque le défendeur a déjà commis des atteintes dont la répétition n'est pas à exclure ou s'il y a des indices concrets qu'il va commettre de telles atteintes. Le danger de répétition est présumé si le défendeur a déjà commis de telles violations et qu'il ne reconnaît pas les droits du demandeur ou nie à tort que les actes qu'on lui reproche portent atteinte à ces droits. Cette présomption est réfragable et ne vaut que pour le risque d'une répétition future des actes incriminés. Elle ne libère pas le demandeur du fardeau de la preuve complet des atteintes qu'il allègue avoir déjà subies. Celui qui entend faire cesser une atteinte identifiée à son droit à la marque qui perdure n'agit pas en prévention de trouble au sens de l'art. 55 al. 1 lit. a LPM, mais en cessation de l'atteinte au sens de l'art. 55 al. 1 lit. b LPM. C'est dès lors à lui d'établir, en vertu de l'art. 8 CC, que les produits censés contrefaire sa marque ont été fabriqués par les défendeurs et que les défendeurs sont bien les auteurs de l'atteinte.

12 octobre 2009

TF, 12 octobre 2009, 4A_205/2009 (d)

sic! 3/2010, p. 171-172, « Notebooks » ; action, action en constatation, action en constatation de la nullité d’une marque, tribunal civil, droit au nom, concurrence déloyale ; art. 52 LPM, art. 58 al. 3 LPM, art. 2 ss LCD.

Une action qui a pour objet la nullité d'une marque est une action civile au sens de l'art. 58 al. 3 LPM. Elle doit par conséquent être portée devant l'instance cantonale unique prescrite, peu importe que la nullité soit invoquée sur la base du droit des marques, du droit au nom ou du droit contre la concurrence déloyale (c. 2.1). La nullité d'une marque basée sur un dépôt fait en violation des art. 2 ss LCD peut être invoquée dans le cadre d'une action en constatation (négative) au sens de l'art. 52 LPM (c. 2.1).

27 janvier 2010

TF, 27 janvier 2010, 4A_330/2008 (d)

ATF 136 III 102 ; sic! 6/2010, p. 436-438, « Yello / Yallo » ; action, action en constatation de la nullité d'une marque, intérêt pour agir, usage de la marque, classe de produits ou services ; art. 12 LPM, art. 52 LPM.

L'intérêt juridiquement protégé à la constatation de la nullité d'une marque doit être important. Un tel intérêt existe lorsque les relations juridiques entre les parties sont incertaines et que l'incertitude sur leur existence et leur contenu peut être balayée par la constatation (c. 3.1). La constatation de la nullité pour défaut d'usage ne requiert pas la preuve d'un intérêt spécifique. L'intérêt au libre choix de la marque suffit en règle générale, car celui-ci ne doit pas être entravé par des marques nulles suite à leur défaut d'usage. Un intérêt juridiquement protégé peut exceptionnellement faire défaut si, d'emblée, la demanderesse est dans l'impossibilité d'utiliser le signe concerné. L'intérêt juridiquement protégé à la constatation de la nullité d'une marque ne peut être restreint aux mêmes classes de produits que celles pour lesquelles la marque de la demanderesse est enregistrée. La constatation de la nullité frappe au contraire la marque attaquée dans la mesure concernée par les causes de nullité soulevées (c. 3.4).

25 mars 2010

HG SG, 25 mars 2010, HG.2008.137 (d)

sic! 11/2010, p. 789-794, « Refoderm » (KaiserMarkus, Anmerkung) ; action, action en interdiction, for, nom de domaine, refoderm.ch, Suisse, organe de fait, fondé de procuration, qualité pour défendre, intérêt pour agir, risque de récidive, risque de confusion, droits conférés par la marque, épuisement, importation parallèle, produits cosmétiques, produit périmé, frais et dépens ; art. 55 al. 3 CC, art. 13 al. 2 LPM, art. 55 al. 1 lit. a LPM, art. 3 lit. d LCD, art. 129 al. 2 a LDIP.

Au sens de l’art. 129 al. 2 aLDIP, le lieu du résultat de la violation du droit des marques par l’utilisation d’un nom de domaine se situe là où le site Internet correspondant est accessible (c. II.1). Il se situe en Suisse lorsque le nom de domaine (« www.refoderm.ch ») – enregistré en Suisse – permet d’accéder, en Suisse, à un site Internet offrant des produits au public suisse. Peu importe que l’intimée, titulaire du nom de domaine, ait autorisé un tiers à l’utiliser et ne l’ait pas utilisé elle-même (c. II.1). En tant qu’organe de fait, celui qui assume une tâche essentielle dans une société anonyme – en l’occurrence, un fondé de procuration – est personnellement responsable de ses fautes au sens de l’art. 55 al. 3 CC et a ainsi qualité pour défendre (c. III.1). Dans une action en interdiction (Unterlassungsbegehren) (art. 55 al. 1 lit. a LPM), un intérêt suffisant est donné lorsque le défendeur a déjà commis les actes litigieux par le passé et en conteste l’illicéité. Un danger de récidive ne peut être exclu que si le défendeur s’est formellement engagé à ne pas commettre les actes litigieux. Si les défendeurs se limitent à renoncer au nom de domaine « www.refoderm.ch » grâce auquel ils ont offert au public des produits « Refoderm » par le passé, le titulaire de la marque « Refoderm » garde un intérêt à agir contre eux (c. III.2). En vertu de l’art. 13 al. 2 LPM (et de l’art. 3 lit. d LCD), le titulaire de la marque « Refoderm » peut interdire aux défendeurs 1 et 2 d’utiliser cette marque comme nom de domaine pour commercialiser des produits « Refoderm ». La présence de la raison sociale de la défenderesse 1, en haut à droite du site Internet « www.refoderm.ch », ne suffit pas à écarter, à elle seule, un risque de confusion (c. III.3). Le principe de l’épuisement n’est pas absolu : il n’empêche pas le titulaire d’une marque d’interdire l’importation parallèle et la commercialisation en Suisse de ses produits cosmétiques originaux périmés (c. III.4). Du fait que les défendeurs 2 et 3 avaient clairement manifesté leur intention de monnayer le nom de domaine litigieux et qu’ils n’avaient ensuite pas informé le demandeur qu’ils avaient renoncé à ce nom de domaine, le demandeur ne peut pas être considéré, dans la répartition des frais, comme partie succombante en ce qui concerne la conclusion tendant au transfert du nom de domaine (c. IV).

09 juillet 2010

HG ZH, 9 juillet 2010, HG080097 (d)

sic! 1/2011, p. 39-42, « Wunder-Baum » ; action, action en fourniture de renseignements, marque tridimensionnelle, désodorisant, arbre, signe appartenant au domaine public, marque imposée, presse, risque de récidive, droits conférés par la marque, confiscation, destruction, dommage, contrat de licence ; art. 42 al. 2 CO, art. 13 al. 2 lit. b et e LPM, art. 55 al. 1 lit. a, b et c LPM, art. 57 LPM.

Dans le domaine des désodorisants, la forme d'arbre de la marque tridimensionnelle « Wunder-Baum » de la demanderesse est originale et, même si elle devait être qualifiée de signe appartenant au domaine public (ce qui n'est pas le cas), elle devrait être considérée comme s'étant imposée comme marque pour les désodorisants concernés (c. V.2.1). Bien que les défenderesses se soient engagées à ne pas renouveler l'envoi (dans un magazine publicitaire) de désodorisants en forme d'arbre, elles n'ont pas reconnu l'illicéité de l'envoi déjà effectué; il existe dès lors un risque de récidive, qui rend une violation du droit à la marque (art. 13 al. 2 lit. b et e LPM) imminente au sens de l'art. 55 al. 1 lit. a LPM (c. V.3). La confiscation et la destruction (art. 57 LPM, en lien avec l'art. 55 al. 1 lit. b LPM) des magazines restants suite à l'envoi déjà effectué par les défenderesses n'est pas nécessaire vu leur nombre restreint et le fait que l'ancienne raison sociale de l'une des défenderesses figure sur les désodorisants en forme d'arbre qu'ils contiennent (c. V.4). L'action en fourniture de renseignements (art. 55 al. 1 lit. c LPM) ne permet d'obtenir d'un défendeur des renseignements qu'au sujet de son fournisseur direct (c. V.5). Le montant du dommage subi par la demanderesse ne peut pas résulter de pures suppositions sur un hypothétique développement futur, mais doit se fonder sur une comparaison concrète entre la valeur de la marque avant et après sa violation (c. V.6.4.2). Dans la détermination du montant du dommage (art. 42 al. 2 CO) par analogie avec une licence, le pourcentage (15 ) du chiffre d'affaires net perçu par la demanderesse dans un contrat de licence existant ne doit pas être appliqué au prix de vente net pratiqué par le preneur de licence de ce contrat, mais au prix de vente net pratiqué par la défenderesse (c. V.6.4.3).

Fig. 156 – Wunder-Baum(3D)
Fig. 156 – Wunder-Baum(3D)

02 décembre 2010

TF, 2 décembre 2010, 4A_516/2010 (d)

sic! 5/2011, p. 315-318, « Zurich Trust Forum » ; action, action en constatation, action en constatation négative, action en constatation de la nullité d’une marque, intérêt pour agir, incertitude, risque de violation, raison de commerce, notoriété, réputation, Zurich ; art. 52 LPM.

La personne qui reçoit un avertissement donné par un titulaire de droits de propriété intellectuelle a un intérêt juridique à intenter une action en constatation négative (non-violation de ces droits de propriété intellectuelle) (art. 52 LPM) pour autant qu’il ne puisse pas être exigé d’elle qu’elle reste dans l’incertitude, par exemple parce qu’elle est menacée d’une action en justice (c. 5.1- 5.4). Les exigences relatives à l’intérêt juridique sont moins élevées pour les actions en nullité (d’une marque) que pour les autres cas d’actions en constatation (c. 5.5). La réserve générale (« Geltendmachung von sämtlichen Ansprüchen ») contenue dans les avertissements de l’intimée ne constitue pas une menace suffisamment concrète (d’actions tendant à des réparations financières) pour donner lieu à une incertitude (c. 6). Les recourantes ne peuvent pas se prévaloir d’une incertitude dont elles sont à l’origine et dont elles ont sciemment pris le risque en enregistrant les raisons de commerce « Zurich Trust Forum GmbH » et « Zurich Trust Forum X. » ainsi que la marque « Zurich Trust Forum » alors qu’elles avaient préalablement été averties par l’intimée (Zürich Versicherungs-Gesellschaft AG) d’un risque de violation de ses droits (si elles enregistraient des signes commençant par « Zurich »), alors que, même sans cet avertissement, elles devaient – vu la notoriété de l’intimée et le secteur d’activité similaire suggéré par l’élément « Trust Forum » – connaître ce risque et alors qu’elles n’avaient pas encore fait de grands investissements ni ne s’étaient bâti de réputation (c. 7.2). Dans une action en constatation négative, il convient également de prendre en considération les intérêts de l’intimée – dont la marque « Zurich » a une valeur incomparablement élevée par rapport à la marque des recourantes – à décider si et quand elle souhaite faire valoir ses droits (c. 5.1-5.2 et 7.3). Peut rester ouverte la question de savoir si le défaut d’intérêt juridique des recourantes peut également être justifié par le fait que l’action en nullité de la marque est à leur disposition (c. 7.4).

08 août 2011

TF, 8 août 2011, 4A_39/2011 et 4A_47/2011 (d)

sic! 2/2012, p. 109-113, « Go Fast II » ; action, action en cession du droit à la marque, action en constatation de la nullité d’une marque, action en cessation, nom de domaine, transfert de nom de domaine, concurrence déloyale ; art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 4 LPM, art. 53 LPM, art. 55 al. 2 LPM, art. 9 al. 1 lit. b LCD.

L'art. 53 LPM, qui permet de demander la cession du droit à la marque au lieu de faire constater la nullité de son enregistrement, ne peut pas servir de base juridique pour le transfert d'un nom de domaine (c. 8.5.1 et 9.1). Quant à l'art. 9 al. 1 lit. b LCD, il ne prévoit pas expressément que des mesures positives puissent être ordonnées pour faire cesser une violation. Toutefois, le TF a déjà estimé qu'il était possible d'ordonner au défendeur de faire les déclarations nécessaires pour que le nom de domaine puisse être transféré au demandeur (c. 9.2). En l'espèce cependant, il n'est pas nécessaire d'ordonner le transfert des noms de domaine, puisque l'ordre judiciaire de les radier et la défense d'en déposer de nouveaux (comprenant la désignation litigieuse) suffisent pour faire cesser le trouble (c. 9.3).

21 octobre 2011

CJ GE, 21 octobre 2011, C/22832/2010 (f)

sic! 3/2012, p. 191-197, « Tech Line (fig.) » (Schlosser Ralph, Remarque) ; action, action en constatation de la nullité d’une marque, action en cessation, demande reconventionnelle, intérêt pour agir, incertitude, titulaire de la marque, conclusion subsidiaire, Tech Line Electronica, technologie, appareils électroniques, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, concurrence déloyale ; art. 2 lit. a LPM, art. 3 al. 1 LPM, art. 52 LPM, art. 2 LCD, art. 3 lit. d LCD, art. 9 LCD.

L’action en constatation de l’art. 52 LPM est ouverte à toute personne disposant d’un intérêt suffisant, notamment lorsqu’une incertitude juridique affecte les relations entre les parties (c. 4.1.2). En l’espèce, la titularité de la dénomination « Tech Line » étant incertaine, le demandeur dispose d’un intérêt suffisant pour solliciter la constatation de la nullité de la marque enregistrée par la partie adverse. En dérogation au principe de subsidiarité, cet intérêt subsiste malgré les conclusions prises par le demandeur en cessation de trouble, car la constatation de la nullité pourrait constituer un motif permettant de faire droit auxdites conclusions (c. 4.1.3). Le signe « Tech Line (fig.) », formé de deux désignations génériques, est descriptif pour des gammes/lignes de produits techniques/technologiques, catégories auxquelles appartiennent les produits concernés de la classe 9 (appareils d’enregistrement, de transmission et de lecture audio et vidéo) (c. 4.2.1-4.2.6). Dès lors que l’enregistrement du signe « Tech Line (fig.) » est nul (c. 4.2.7), la situation entre les parties est claire et la défenderesse n’a aucun intérêt digne de protection à requérir, par demande reconventionnelle, la constatation de la nullité du signe « Tech Line Electronica (fig.) » (c. 5.1-5.2). Les conclusions en cessation de trouble du demandeur sont rejetées, car celui-ci ne peut se baser ni sur le droit des marques (c. 6.1-6.2.1) ni sur le droit de la concurrence (c. 6.2.2-6.2.3) pour interdire à la défenderesse d’utiliser une dénomination appartenant au domaine public (c. 6.3).

Fig. 157a – Tech Line Electronica (fig.) (demandeur)
Fig. 157a – Tech Line Electronica (fig.) (demandeur)
Fig. 157b – Tech Line (fig.) (défenderesse)
Fig. 157b – Tech Line (fig.) (défenderesse)

11 janvier 2012

TC VD, 11 janvier 2012, 8/2012/DCA (f)

sic! 5/2013, p. 300- 304, « Tara Jarmon » ; marque verbale, enseigne, raison de commerce, Tara Jarmon, Tarjarmo, risque de confusion admis, action en dommages-intérêts, acte illicite, faute, dommage, preuve, dilution de la force distinctive, gain manqué, contrat de licence, contrat de franchise ; art. 8 CC, art. 29 al. 2 CC, art. 41 CO, art. 42 al. 2 CO, art. 84 al. 1 CO, art. 55 al. 2 LPM, art. 9 al. 3 LCD ; cf. N 735

(TF, 6 février 2013, 4A_460/2012 ; arrêt du TF dans cette affaire).

Tant la LPM (art. 55 al. 2 LPM) que la LCD (art. 9 al. 3 LCD), ou encore les dispositions sur le droit au nom (art. 29 al. 2 CC), réservent l’art. 41 CO concernant la réparation des dommages subis du fait de leur violation (c. VII.d). L’acte illicite résulte en l’espèce du risque de confusion entre la raison de commerce de la défenderesse et la marque de la demanderesse (c. VII.b.a qui renvoie au c. V.c). En continuant d’exploiter une boutique à l’enseigne « Tara Jarmon », alors qu’aucun contrat n’était conclu avec les titulaires de la marque correspondante, et en créant une société dont la raison sociale « Tarjarmo » ressemble à cette marque, les défenderesses ont commis une faute (c. VII.b.b). L’utilisation abusive de l’enseigne « Tara Jarmon », ainsi que de la raison sociale « Tarjarmo » par les défenderesses est propre à faire naître un risque de confusion en lien de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par les demanderesses (c. VII.b.c). Le dommage peut consister en une réduction d’actifs, un accroissement des passifs ou un gain manqué. Il correspond à la différence entre l’état du patrimoine après la survenance de l’événement dommageable, et l’état dans lequel ce patrimoine aurait été sans cet événement. Concernant la preuve du dommage conformément à l’art. 8 CC, il ne saurait être exigé du lésé davantage que d’alléguer et d’établir toutes les circonstances démontrant la survenance d’un dommage et permettant de l’évaluer dans les limites de ses possibilités et de ce que l’on peut raisonnablement attendre de lui. Si le lésé ne réussit pas à établir la preuve du montant du dommage, le juge doit déterminer équitablement, en considération du cours ordinaire des choses, l’étendue, mais également l’existence du dommage. La perturbation du marché et la dilution du caractère distinctif de la marque sont des éléments que le juge prend en compte dans son appréciation, respectivement sa détermination, du dommage. En l’espèce, l’utilisation de la marque « Tara Jarmon » par les défenderesses, alors qu’elles n’y étaient pas autorisées, a empêché les demanderesses d’accorder à des tiers l’autorisation d’ouvrir et d’exploiter une boutique « Tara Jarmon » à Genève et les a empêchées de poursuivre leur utilisation de cette marque en cette ville. Le manque à gagner ainsi subi par les demanderesses doit être calculé en fonction de la marge brute moyenne annuelle réalisée par les défenderesses lorsqu’elles étaient autorisées à utiliser la marque à Genève (soit pendant les années 2000 à 2003). Les frais d’une campagne publicitaire liée à l’ouverture d’une nouvelle boutique « Tara Jarmon » autorisée par les demanderesses, plus de trois ans après que l’usage abusif par les défenderesses ait cessé, ne peuvent pas être uniquement mis en relation avec cette utilisation abusive de la marque. Seul le remboursement d’une partie de ceux-ci (10 000 francs) peut ainsi être alloué aux demanderesses en application de l’art. 42 al. 2 CO (c. VII.b.d). En vertu de l’art. 84 al. 1 CO, le paiement d’une dette qui a pour objet une somme d’argent se fait en moyens de paiement ayant cours légal dans la monnaie due. Il convient ainsi de rejeter une conclusion présentée en francs suisses, alors que la prétention aurait dû être exprimée en monnaie étrangère. Dans le cas d’espèce, l’atteinte à la marque a eu lieu en Suisse et la perturbation du public est intervenue sur le marché genevois. Elle doit donc être réparée en francs suisses, alors que le dommage relatif au gain manqué a touché le patrimoine de la demanderesse domiciliée en France et doit être arrêté en Euros, comme le précisaient les conclusions de cette dernière (c. VII.c). [NT]

06 février 2013

TF, 6 février 2013, 4A_460/2012 (f)

Marque verbale, acte illicite, faute, Tara, Tarjarmo, établissement des faits, arbitraire dans la constatation des faits, rectification de l’état de fait, contrat de franchise, contrat de licence, action en interdiction, intérêt pour agir, risque de récidive, action en dommages intérêts, gain manqué, dommage, preuve ; art. 97 al. 1 LTF, art. 105 al. 2 LTF, art. 41 CO, art. 42 al. 2 CO, art. 55 al. 1 lit. a LPM ; cf. N 734 (Tribunal cantonal VD, 11 janvier 2012, 8/2012/DCA ; sic! 5/2013, p. 300-304, «Tara Jarmon» ; arrêt du Tribunal cantonal vaudois dans cette affaire).

La partie recourante, qui entend remettre en cause les constatations de l'autorité précédente, doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée. Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF) (c. 1.4). En vertu de l'art. 55 al. 1 lit. a LPM, la personne qui risque de subir une violation de son droit à la marque peut demander au juge de l'interdire si elle est imminente. Le demandeur doit disposer d'un intérêt à l'action. Cela suppose la menace directe d'un acte illicite. Le comportement du défendeur doit donc laisser craindre sérieusement une violation imminente des droits du demandeur. Un intérêt suffisant doit être reconnu si le défendeur a déjà commis une telle atteinte dont la répétition n'est pas à exclure. En règle générale, le danger de répétition des actes incriminés est présumé lorsque le défendeur conteste l'illicéité de son comportement. Pour renverser cette présomption, il ne suffit pas de cesser les agissements en cause dans la perspective du procès, tout en continuant, dans la procédure, à défendre leur caractère licite. Un intérêt à l'action en interdiction peut donc être retenu lorsque la partie contre laquelle celle-ci est dirigée conteste l'illicéité de son comportement dans la procédure (c. 3.3). Constitue une faute le fait de continuer à exploiter un magasin sous l'enseigne « Tara Jarmon » malgré l'absence de contrat de franchise et en dépit des mises en demeure de cesser une telle utilisation (c. 4.2). L'exploitation d'un magasin sous l'enseigne « Tara Jarmon » par une personne non autorisée était, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, de nature à empêcher l'ouverture d'une autre boutique avec la même enseigne dans une ville de la grandeur de Genève. Le montant des dommages-intérêts correspond au manque à gagner du titulaire de la marque calculé sur la base de la marge moyenne qu'il avait touchée les années précédentes en relation avec le magasin exploité par le défendeur lorsqu'il y était autorisé. Il est conforme au cours ordinaire des choses et à l'expérience générale de la vie qu'une nouvelle boutique soit en mesure de réaliser un chiffre d'affaires comparable à celui du magasin précédent (c. 4.3). [NT]

10 juillet 2013

TF, 10 juillet 2013, 4A_100/2013 (f)

sic! 11/2013, p. 718-720, « Noir Mat » ; recours en matière civile, instance cantonale unique, marque, raison de commerce, enseigne, nom de domaine, action en constatation de la nullité d’une marque, établissement des faits, rectification de l’état de fait, enregistrement abusif, intention déloyale, confusion, mauvaise foi, notoriété ; art. 42 al. 1 LTF, art. 42 al. 2 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 75 al. 2 lit. a LTF, art. 97 al. 1 LTF, art. 105 al. 1 LTF, art. 105 al. 2 LTF, art. 108 al. 1 lit. b LTF, art. 162 al. 5 ORC, art. 31 al. 2 LPM, art. 2 LCD, art. 3 LCD.

Lorsque le droit fédéral prévoit une instance cantonale unique, le recours en matière civile est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 lit. b LTF) et, contrairement à la règle générale (art. 75 al. 2 LTF), le tribunal supérieur désigné comme autorité cantonale de dernière instance n'a pas à statuer sur recours (art. 75 al. 2 lit. a LTF) (c. 1.1). Compte tenu de l'exigence de motivation de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 lit. b LTF), le TF n'examine en principe que les griefs invoqués. Il n'est pas tenu de traiter toutes les questions juridiques qui se posent lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (c. 1.3). Le TF conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La recourante qui entend remettre en cause les constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui retenu dans la décision attaquée. Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF) (c. 1.4). Celui qui dépose à titre de marque un signe déjà utilisé par un tiers ne pourra se prévaloir de son enregistrement s'il a agi avec une intention déloyale. Pour déterminer le caractère abusif ou non d'un enregistrement, le tribunal doit apprécier l'ensemble des faits. Il s'agit de définir l'intention, au moment du dépôt, de celui qui est devenu titulaire de l'enregistrement. Il faut tenir compte des buts et motifs du déposant à ce moment-là. Des circonstances postérieures au dépôt peuvent être prises en compte si elles permettent de fournir des indices quant à l'intention du titulaire au moment du dépôt de la marque. Savoir quelle était l'intention de la recourante au moment du dépôt de la marque en Suisse est une question de fait, et non de droit. Le même raisonnement peut être appliqué mutatis mutandis s'agissant de son intention lors de la réquisition d'inscription d'une raison de commerce (c. 2.2). Parmi les indices permettant d'admettre le caractère frauduleux d'un enregistrement, le TF mentionne le fait que le déposant connaissait les activités de celui dont il a repris les éléments distinctifs dans sa marque; le fait que ce dernier ait disposé d'une clientèle importante et exploité une enseigne réputée avec laquelle le déposant a toujours entretenu la confusion (en particulier en recevant à plusieurs reprises du courrier et des téléphones destinés à l'exploitant de l'enseigne, sans jamais l'en tenir informé). L'enregistrement d'un nom de domaine similaire à l'enseigne, avant même le dépôt de la marque litigieuse, est aussi un indice pris en compte par le TF. Enfin, la modification du but social de celui qui a déposé la marque litigieuse pour se rapprocher de celui de l'exploitant de l'enseigne est également un indice pertinent (c. 2.3). L'absence d'opposition à une demande d'inscription d'une raison de commerce au registre du commerce n'exclut pas une action ultérieure devant un juge civil. En matière de raison de commerce, le renvoi devant un tribunal est d'ailleurs explicitement prévu par le législateur (art. 162 al. 5 ORC). Il en va de même en matière de marque en cas d'absence d'opposition dans le délai de trois mois prévu par l'art. 31 al. 2 LPM. Le juge civil peut en effet être actionné en tout temps ; même à considérer qu'une opposition aurait été formée devant l'IPI, le juge civil ne serait d'ailleurs pas lié par la décision prise par l'IPI (c. 2.4). [NT]

LCD (RS 241)

- Art. 3

- Art. 2

LPM (RS 232.11)

- Art. 31

-- al. 2

LTF (RS 173.110)

- Art. 108

-- al. 1 lit. b

- Art. 75

-- al. 2 lit. b

-- al. 2 lit. a

- Art. 42

-- al. 2

-- al. 1

- Art. 105

-- al. 1

-- al. 2

- Art. 97

-- al. 1

- Art. 74

-- al. 2 lit. b

ORC (RS 221.411)

- Art. 162

-- al. 5

11 septembre 2014

KG GR, 11 septembre 2014, ZK2 13 11 (d)

sic! 2/2015 p. 93-94, « Army Knife (fig.) » ; action en constatation de la nullité d’une marque, non entrée en matière, qualité pour défendre, personnalité juridique, titularité de la marque, registre étranger, reconnaissance d’une décision, déclaration sous serment, preuve, réinscription au registre du commerce, registre du commerce, radiation d’une marque ; art. 52 LPM, art. 59 al.1 CPC, art. 59 al. 2 lit. c CPC, art. 60 CPC, art. 66 CPC, art. 29 al. 1 lit. a LDIP, art. 29 al. 1 lit. b LDIP.

L’action en constatation de la nullité d’une marque, au sens de l’art. 52 LPM, est intentée contre son titulaire. Si la marque est enregistrée au nom d’une personne morale qui a été radiée du registre du commerce, il faut en principe requérir la réinscription de cette dernière avant de pouvoir intenter une action en constatation contre elle. Ce n’est que lorsque la réinscription est impossible, par exemple parce qu’elle n’est pas prévue dans le pays de la société radiée, qu’on peut y renoncer et que l’action peut être dirigée contre tout éventuel titulaire de la marque (c. 3). Tel n’est pas le cas en l’espèce, et la société attaquée n’a dès lors pas la capacité d’être partie (c. 3b). Par conséquent, le tribunal doit rendre une décision de non-entrée en matière (c. 3c). Par ailleurs, pour la reconnaissance de la décision de radiation du registre de l’État étranger, l’attestation d’entrée en force prévue par l’art. 29 al. 1 lit. b LDIP doit émaner d’une autorité de cet État. Une déclaration sous serment n’est pas suffisante pour établir la preuve de l’entrée en force de la décision (c. 4). [SR]