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19 juillet 2010

TAF, 19 juillet 2010, B-892/2009 (d)

sic! 11/2010, p. 796 (rés.), « Heidiland / Heidi-Alpen » ; usage de la marque, bio, fromage, produits de luxe, forme ne divergeant pas essentiellement de la marque, brochure, étiquette, publicité, dégustation, livraison, vraisemblance, usage sérieux, usage par représentation, contrat de licence, indication de provenance, usage à titre de marque, délai, courrier, novae, témoin, recours ; art. 14 al. 1 lit. c PA, art. 11 al. 1, 2 et 3 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 32 LPM, art. 22 al. 3 OPM.

La période de cinq ans (art. 12 al. 1 LPM) pendant laquelle l’usage de la marque antérieure doit être rendu vraisemblable (art. 32 LPM) est à compter rétroactivement depuis la date à laquelle le défaut d’usage est allégué par le défendeur dans sa première réponse de la procédure d’opposition (art. 22 al. 3 OPM) et non pas depuis la date (antérieure) à laquelle le défaut d’usage est allégué par le (futur) défendeur dans un courrier au (futur) opposant (c. 3.4-3.5). Des novae peuvent être produits dans une procédure de recours devant le TAF contre une décision concernant une opposition (c. 4.2). Les adjonctions étant de nature descriptive, les formes « HEIDILAND Käse », « Bio VK Heidiland Käse », « Bio- Heidilandkäse » et « Heidiland Bio Käse » ne divergent pas essentiellement de la marque « HEIDILAND » au sens de l’art. 11 al. 2 LPM (c. 5.2). Des brochures et des étiquettes permettent de rendre vraisemblable l’usage – au sens de l’art. 11 al. 3 LPM (c. 5.3) – par une preneuse de licence (c. 6.6) de la marque « HEIDILAND » pour du fromage (classe 29) (c. 6.8-6.9). Le fromage concerné n’étant ni un produit de luxe ni un produit de consommation courante, un usage de la marque (art. 11 al. 1 LPM) d’intensité moyenne doit être rendu vraisemblable sur une certaine durée (c. 5.1 et 6.9). Des publicités dans des brochures touristiques des années 2004 à 2007, deux dégustations de 3 jours en 2005 et une seule livraison de 567 kg (sur un total de livraisons annuelles prétendu de plus de 20 tonnes) à un intermédiaire fin 2007 ne suffisent pas à rendre vraisemblable un usage sérieux de la marque « HEIDILAND » pour ce fromage (c. 6.9). En outre, dans l’indication « Heidiland Bio Käse », le signe « HEIDILAND » est compris comme une indication de provenance et n’est dès lors pas utilisé comme marque (propre à distinguer les produits d’une entreprise) (c. 5.1 in fine et 6.10). À la différence de l’IPI en procédure d’opposition, le TAF peut entendre des témoins en procédure de recours (art. 14 al. 1 lit. c PA). Le TAF y renonce en l’espèce (c. 4.3 et 7).

10 février 2011

TAF, 10 février 2011, B-3686/2010 (d)

sic! 5/2011, p. 320 (rés.), « Heidiland / Heidi Best of Switzerland » ; usage de la marque, usage à titre de marque, usage partiel, carte géographique, carte postale, déclaration, courrier, brochure, produits d’imprimerie, golf, SRIXON, emballage, pâtisserie, confiserie, slogan, chocolat, provenance commerciale, reconnaissance, vraisemblance, produit ou service accessoire, publicité, témoin, délai, contrat de licence, motivation de la décision, renvoi de l’affaire ; art. 35 PA, art. 11 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 32 LPM, art. 22 al. 3 OPM.

Lorsque l’IPI rejette une opposition en raison du non-usage de la marque opposante, le TAF se limite à examiner cette question et, s’il admet le recours, renvoie l’affaire à l’IPI afin qu’il examine la question du risque de confusion (c. 1.2). La période de cinq ans (art. 12 al. 1 LPM) pendant laquelle l’usage de la marque antérieure doit être rendu vraisemblable (art. 32 LPM) est à compter rétroactivement depuis la date à laquelle le défaut d’usage est allégué (art. 22 al. 3 OPM) par le défendeur (c. 3.1). Vu l’art. 22 al. 3 OPM, l’intimé ne peut pas, par la suite, revenir sur le fait qu’il a – en évoquant, dans sa réponse devant l’IPI, un usage partiel de la marque « HEIDILAND » en lien avec les produits de la classe 16 – reconnu l’usage de cette marque en lien avec des cartes pédestres et cyclistes (classe 16) (c. 5.1). L’IPI viole son devoir de motivation (art. 35 PA) s’il renonce à tenir compte d’un courrier d’une preneuse de licence du recourant en se limitant à évoquer un rapport de dépendance entre les parties à ce contrat (c. 5.2.3). Considérés en lien les uns avec les autres, la copie d’une carte postale (c. 5.2.2), ainsi qu’une déclaration (c. 5.2.1) et un courrier d’une preneuse de licence du recourant (c. 5.2.3) suffisent à rendre vraisemblable l’usage de la marque « HEIDILAND » en lien avec des cartes postales (classe 16), même si des éléments supplémentaires auraient été souhaitables (c. 5.2.3-5.2.4 et 5.5). Le TAF n’entend des témoins que sur la base d’allégations solidement étayées (c. 4.1, 5.4 et 8). L’usage d’une marque en relation avec un produit ou un service accessoire constitue un usage de la marque ; cet usage ne concerne toutefois pas le produit ou le service accessoire lui-même, mais uniquement le produit ou le service principal, dont le produit ou le service accessoire assure la promotion (c. 5.6.2). En l’espèce, l’utilisation de la marque « HEIDILAND » (pour faire de la publicité pour divers produits) dans des brochures ne constitue pas une utilisation de la marque en relation avec des « produits de l’imprimerie » (classe 16) (c. 5.6.2). Une marque peut en principe être valablement utilisée (art. 11 LPM), même si elle est combinée avec d’autres signes distinctifs (c. 6.4). Sur des balles et des gants de golf, la marque « SRIXON » ne peut se référer qu’à leur provenance commerciale tandis que la marque « HEIDILAND », également présente et combinée avec le logo d’un club de golf, ne constitue pas une utilisation en lien avec des balles et des gants de golf (classe 28), mais en lien avec les services de ce club de golf (qui ne font toutefois pas l’objet de la procédure) (c. 3.3 et 6.4). De même, sur des emballages de pâtisserie (classe 30), alors que le signe « Confiserie-Tea Room Hanselmann St. Moritz » se réfère à la provenance commerciale des produits, le slogan « Ferienregion HEIDILAND Sarganserland Walensee Wartau » est au mieux une référence à la région et ne constitue pas une utilisation à titre de marque du signe « HEIDILAND » (c. 7.1). Enfin, sur un emballage de chocolat (classe 30), le texte « Frohe Festtage wünscht das Heidiland Team », qui se réfère à un fournisseur de services et non pas à la provenance commerciale du chocolat, ne constitue pas non plus une utilisation à titre de marque du signe « HEIDILAND » (c. 7.2). L’affaire doit donc être renvoyée à l’IPI afin qu’il statue, dans un premier temps, sur la question de savoir si l’usage partiel de la marque « HEIDILAND » en lien avec des cartes pédestres et cyclistes et des cartes postales (classe 16) profite à l’ensemble des produits de la classe 16 revendiqués et, dans un second temps, sur la question du risque de confusion avec la marque « HEIDI Best of Switzerland » (c. 1.2, 5.1, 5.2.4, 5.7 et 8).

06 octobre 2011

TAF, 6 octobre 2011, B-4384/2011 (d)

Demande de révision, courrier, motif de révision, délai, avance de frais, restitution de délai, procédure d'opposition, preuve ; art. 24 PA, art. 67 al. 3 PA, art. 121 ss LTF, art. 45 LTAF, art. 47 LTAF.

La demande de révision de l'arrêt en question (TAF, 23 juin 2011, B-2572/2011 [non disponible sur le site Internet du TAF]) (le TAF qualifie et traite tout d'abord ainsi le courrier qui lui a été adressé), dont il est douteux qu'elle remplisse les exigences formelles (art. 47 LTAF, art. 67 al. 3 PA), est mal fondée, car il n'est pas évident que des dispositions de procédure aient été violées et qu'il existe un motif de révision (art. 45 LTAF, art. 121 ss LTF). Par ailleurs, le TAF n'entre pas en matière sur la demande de restitution du délai de paiement de l'avance de frais (le TAF interprète également ainsi le courrier qui lui a été adressé) dans la procédure B-2572/2011 (recours contre une décision par laquelle l'IPI admet une opposition) étant donné que le requérant n'a pas prouvé (par un certificat médical) qu'il a été empêché, sans sa faute, d'agir dans le délai fixé et qu'il n'a pas accompli le paiement omis dans les trente jours à compter de celui où l'empêchement a cessé (art. 24 PA).

28 juillet 2015

TAF, 28 juillet 2015, B-4294/2014 (d)

Irrecevabilité, recours, délai de recours, restitution de délai, courrier, notification irrégulière, registre des conseils en brevets, poste, présomption ; art. 20 al. 2bis PA, art. 24 al. 1 PA, art. 50 al. 1 PA ; cf. N 942 (TF, 13 décembre 2015, 2C_713/2015).

Non-entrée en matière sur un recours contre une décision de l’IPI de refus d’inscription au registre des conseils en brevets, déposé au-delà du délai de 30 jours de l’art. 50 al. 1 PA. Le recourant, qui prétend n’avoir jamais reçu d’avis de courrier recommandé de la poste, n’est pas parvenu à rendre suffisamment vraisemblable une notification irrégulière de la décision attaquée puisqu'il devait s'attendre à un envoi de l'IPI, le courrier est réputé avoir été reçu sept jours après la tentative de délivrance infructueuse (c. 1.5). [SR]

13 décembre 2015

TF, 13 décembre 2015, 2C_713/2015 (d)

Irrecevabilité, recours, délai de recours, restitution de délai, courrier, notification, poste, présomption, registre des conseils en brevets ; art. 20 al. 2bis PA, art. 50 al. 1 PA, art. 109 LTF ; cf. N 941 (TAF, 28 juillet 2015, B-4294/2014 ; arrêt du TAF dans cet affaire).

Le recours s’avérant manifestement infondé, il est traité selon la procédure simplifiée de l’art. 109 LTF, avec une motivation sommaire et un renvoi aux considérants de la décision attaquée (c. 2). Le recourant soutient qu’il n’a jamais reçu d’avis de courrier recommandé de la poste consécutif à une tentative infructueuse de délivrance d’une décision de l’IPI de refus d’inscription au registre des conseils en brevets. L’instance précédente a refusé d’entrer en matière sur le recours, en considérant que le recourant n’a fourni aucun indice concret permettant de rendre suffisamment vraisemblable une notification irrégulière de la décision attaquée et que, puisqu’il devait s’attendre à un envoi de l’IPI, le courrier est réputé avoir été reçu sept jours après la tentative de délivrance infructueuse (c. 3.2). Selon l’art. 20 al. 2bis PA et la jurisprudence du Tribunal fédéral, un envoi recommandé est réputé avoir été délivré au plus tard sept jours après avoir été reçu par l’office postal de l’emplacement du destinataire, pour autant qu’une tentative infructueuse de distribution ait été effectuée, accompagnée d’une invitation à retirer l’envoi, et que le destinataire ait dû s’attendre à recevoir le courrier (Zustellfiktion). En matière d’envois recommandés, il existe une présomption réfragable selon laquelle l’employé postal a remis un avis de tentative de distribution infructueuse dans la boîte postale, et a correctement enregistré la date de remise. Cela est notamment aussi valable lorsque l’envoi est enregistré dans le système électronique de recherche Track & Trace de la Poste, avec lequel il est possible de suivre l’envoi jusqu’à ce qu’il parvienne dans la zone de réception du destinataire. La présomption ne peut être renversée que par la fourniture d’indices concrets d’une erreur de l’office postal (c. 3.3). Le TAF a correctement appliqué la jurisprudence fédérale, le recourant n’étant pas parvenu à fournir de tel indice (c. 3.4). Le recours est rejeté (c. 4). [SR]

22 mai 2014

HG ZH, 22 mai 2014, HE 140063 (d) (mes. prov.)

Concurrence déloyale, droit d’auteur, mesures provisionnelles, programme d’ordinateur, compatibilité, Windows, contrat de vente, transfert de droits d’auteur, vraisemblance, dommage, expertise, exploitation d’une prestation d’autrui, indication publicitaire inexacte, dénigrement, courrier ; art. 16 al. 1 LDA, art. 17 LDA, art. 2 LCD, art. 3 al. 1 lit. a LCD, art. 3 al. 1 lit. b LCD, art. 3 al. 1 lit. d LCD, art. 5 lit. a LCD, art. 5 lit. c LCD.

La défenderesse a mis sur le marché « Princess », un logiciel concurrent du logiciel « Diamond » que diffuse la demanderesse. Dans des lettres adressées à des clients des deux parties, elle prétend que son logiciel constitue une amélioration de celui de la demanderesse, et soutient que ce dernier, jusqu’à sa version 4.9, ne fonctionne que de manière limitée avec Windows 7 et plus du tout avec les versions ultérieures du système d’exploitation. La conclusion par la demanderesse d’un contrat de vente avec une société anonyme rend à tout le moins vraisemblable que ses droits d’auteur ont été transférés à cette dernière. Elle n’expose pas, dans sa demande, sur quoi reposerait sa légitimation active, et sa demande de mesures provisionnelles doit être rejetée sur ce point (c. 7). Les captures d’écran qu’elle a fournies ne permettent pas au tribunal d’apprécier si le logiciel « Diamond » a été repris d’une manière qui pourrait constituer une violation du droit d’auteur ou l’exploitation d’une prestation d’autrui. Il s’agit d’une question technique qui doit, même dans le cadre d’une procédure de mesures provisionnelles, être soumise à un expert. Puisque la demanderesse n’a pas requis d’expertise, il faut considérer, indépendamment de la question de la titularité des droits, qu’une violation du droit d’auteur n’a pas été rendue vraisemblable (c. 8). L’affirmation de la défenderesse, dans le titre des courriers qu’elle a adressés, selon laquelle « Diamond » s’appelle dorénavant « Princess », suggère que « Princess » succède à « Diamond », ce qui est manifestement inexact. Il s’agit vraisemblablement d’un dénigrement au sens de l’art. 3 al. 1 lit. a LCD et d’une indication inexacte au sens de l’art. 3 al. 1 lit. b LCD. La simple indication d’une incompatibilité d’une ancienne version de « Diamond » avec Windows 7 et 8 est également trompeuse et dénigrante, car elle éveille l’impression fausse d’une incompatibilité générale, alors que la nouvelle version du programme est bel et bien compatible avec le système d’exploitation. Ces affirmations paraissent non seulement illicites, mais elles sont également susceptibles de causer des dommages matériels et immatériels à la demanderesse, et doivent donc être interdites à titre provisionnel (c. 8). [SR]

13 juin 2017

TAF, 13 juin 2017, B-2592/2016 (d)

sic! 12/2017, p. 744 (rés.), « iMessage » ; motifs d’exclusion absolus, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, force distinctive originaire, imposition comme marque, marque imposée, anglais, grand public, adolescent, adulte, degré d'attention légèrement accru, message, informatique, Internet, programme d’ordinateur, services de télécommunication, service de messagerie digitale, courrier électronique; art. 2 lit. a LPM.

iMessage

Liste des produits et services revendiqués

Classe 9 : ordinateurs, périphériques d’ordinateur, terminaux d’ordinateur ; matériel informatique, disques de stockage, supports de données magnétiques, logiciels informatiques, publications électroniques (téléchargeables), téléphones sans fil, téléphones mobiles, puces informatiques.



Classe 38: télécommunications, services de télécommunications et de communication électronique, courrier électronique (e-mail).



Classe 42: fourniture de logiciels non téléchargeables, service de conseil en matière de logiciels informatiques, service de conseil relatif à la conception de matériel informatique, location de matériel et de logiciels informatiques.

Cercle des destinataires pertinent

Les « ordinateurs et leurs composants, les publications électroniques, les téléphones mobiles et les logiciels » revendiqués en classe 9 sont destinés aux jeunes et aux adultes, qui connaissent bien ces appareils. Ils sont achetés avec un degré d'attention accru (c. 4.3.1). Il en va de même pour les produits et services à examiner en classe 38 (c. 4.3.2). En revanche, pour les services technologiques de la classe 42, ceux-ci s'adressent non seulement au grand public, mais aussi à tous les types et à toutes les tailles d'entreprises. Étant donné que les services utilisés dans la classe 42 ne se limitent pas seulement aux besoins quotidiens, mais qu'ils possèdent une connotation professionnelle plus forte, il faut considérer que les destinataires accordent un degré d'attention un peu plus élevé lorsqu'ils utilisent ces services (c. 4.3.3).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public (art. 2 lit. a LPM).


Conclusion

Le mot anglais « message » possède une définition très similaire à celle du mot français « message ». En relation avec les produits et services revendiqués, le mot « message » prend avant tout une signification technique et électronique (c. 6.1). Les produits et services en classes 9, 38 et 42 sont étroitement liés avec des messages sur Internet ». Le signe « iMessage » ne permet donc pas d'individualiser ces produits et services, puisque les destinataires y verront une référence au contenu ou aux fonctionnalités des produits et services revendiqués (c. 6.2). Le signe « iMessage » n'est pas originairement distinctif (c. 6.3). Compte tenu des dépenses publicitaires très élevées, de l'important nombre de produits vendus qui utilisent le signe examiné à titre de marque et de la connaissance générale que les produits d'Apple ne sont pas moins connus en Suisse romande et au Tessin qu'en Suisse allemande, il convient d'admettre l'imposition comme marque du signe « iMessage » pour une partie des services revendiqués en classe 38 (dont les services listés dans l’extrait ci-dessus). (c. 7.6). Le recours doit être partiellement admis concernant ces services (c. 7.6). [AC]


27 octobre 2021

TF, 27 octobre 2021, 4A_265/2021 (d)

sic! 4/2022, p. 163-166, « Flüssigkeitsstrahl » ; concurrence déloyale, mise en demeure, dénigrement, brevet, juge de formation technique, étendue de la protection, revendication, interprétation de la revendication, interprétation d’un brevet, homme de métier, état de la technique liquide, connaissances techniques, doctrine des équivalents, imitation, droit d’être entendu, arbitraire, courrier, courrier électronique, recours rejeté ; art. 9 Cst., art. 29 Cst., art. 69 al. 1 CBE 2000, art. 51 al. 2 LBI, art. 51 al. 3 LBI, art. 66 lit. a LBI, art. 3 al. 1 lit. a LCD, art. 9 al. 2 LCD.

La demanderesse, titulaire d’un brevet concernant un procédé de production d’un jet de liquide en vue de l’usinage d’une pièce, reproche à l’intimée une violation de son brevet. En février 2018, elle a adressé deux courriers de mise en demeure à des partenaires commerciaux de la défenderesse, les menaçant de poursuites civiles et pénales pour leur participation, en se fondant uniquement sur une demande de brevet de la défenderesse, sans savoir quels produits cette dernière produisait et vendait en réalité. En mai 2020, durant la procédure en contrefaçon de brevet qu’elle avait ouverte contre l’intimée, la demanderesse a adressé un courriel d’avertissement à une autre de ses partenaires commerciales, alors même que le juge spécialisé avait rendu, en mai 2020, un avis concluant à la non-violation. L’étendue de la protection conférée par un brevet est déterminée par les revendications (art. 51 al. 2 LBI et art. 69 al. 1 CBE 2000). Les instructions techniques décrites dans les revendications doivent être interprétées de la manière dont l’homme du métier les comprend. Le point de départ de toute interprétation est leur texte. La description et les dessins doivent aussi être pris en compte (art. 51 al. 3 LBI et art. 69 al. 1 2ème phrase CBE 2000). Les connaissances techniques générales constituent également un moyen d’interprétation en tant qu’état de la technique liquide. La description et les dessins ne servent qu'à interpréter la revendication dans la mesure où le texte n'est pas clair, mais et non à la compléter. Le titulaire du brevet doit donc décrire précisément l'objet de l'invention dans la revendication, et supporte le risque d'une définition incorrecte, incomplète ou contradictoire (c. 2.1). Le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) exige que l'autorité entende effectivement les arguments des parties, les examine et en tienne compte dans sa décision. Il en découle l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision. Elle n'est pas tenue de se déterminer en détails sur chacun des points soulevés par les parties, ni de réfuter expressément chaque argument. Elle peut au contraire se limiter aux points essentiels pour la décision. La motivation doit toutefois être rédigée de manière à ce que les personnes concernées puissent se rendre compte de la portée de la décision et la porter en toute connaissance de cause devant l'instance supérieure. Dans ce sens, il faut au moins mentionner brièvement les considérations qui ont conduit l’autorité à prendre sa décision. Le droit d'être entendu comprend aussi le droit de la partie concernée de s’exprimer dans une procédure susceptible de modifier sa situation juridique, ainsi que de fournir, en temps utile et dans la forme prescrite, des preuves pertinentes (c. 3.1.1). Selon la jurisprudence, l’arbitraire (art. 9 Cst.) ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération, ou même qu’elle serait préférable, mais seulement du fait que la décision attaquée est manifestement insoutenable, clairement en contradiction avec la situation effective, qu'elle viole de manière flagrante une norme ou un principe juridique incontesté ou qu'elle contrevient de manière choquante à l'idée de justice. En outre, le Tribunal fédéral n'annule une décision que si elle est arbitraire non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (c. 3.1.2). L'instance précédente a fondé son appréciation de l'utilisation de l’invention brevetée (par imitation au sens de l’art. 66 lit. a LBI) sur la doctrine des équivalents, développée par la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui recourt aux éléments de l’équivalence de la fonction, de l’évidence et de l’équivalence. Elle est arrivée à la conclusion qu’il n’y a pas en l’espèce d’imitation de l’invention brevetée (c. 3.2). La recourante ne peut être suivie lorsqu’elle affirme que l’instance précédente n’a pas tenu compte de ses allégations et des moyens de preuve présentés. Il n’y a pas en l’espèce de violation du droit d’être entendu (c. 3.3). Le reproche d’arbitraire est lui aussi infondé, et la conclusion de l’instance précédente selon laquelle il n’y a pas d’utilisation de l’invention brevetée par des moyens équivalents est maintenue (c. 3.4). Même si des mises en demeures peuvent être fréquentes dans certains secteurs, il n’en reste pas moins qu’une accusation injustifiée de violation d’un droit de propriété intellectuelle peut constituer un dénigrement au sens de l’art. 3 al. 1 lit. a LCD (c. 6.2). L’avertissement injustifié doit être distingué de la défense justifiée contre les violations des droits de propriété intellectuelle. L’enregistrement d’un brevet autorise son titulaire à le défendre contre les violations commises par des tiers, et l’application de la LCD ne doit pas limiter les possibilités d’action de celui qui, de bonne foi, veut faire valoir ses droits réels ou supposés. A cet égard, il ne faut pas considérer comme une violation du principe de la bonne foi le fait qu'au moment de l'avertissement, l'incertitude régnait encore quant à l'existence ou à la violation du brevet invoqué, puis que la nullité ou la non-violation a été constatée lors du procès qui a suivi. Le titulaire du brevet agit toutefois de manière déloyale lorsqu'il sait qu'il n'y a pas de contrefaçon ou qu'il doit au moins avoir des doutes sérieux quant à la véracité de l’accusation de contrefaçon. Il convient de noter que l’admissibilité des avertissements adressés à des tiers doit être soumise à des exigences plus strictes que celle des avertissements adressés aux auteurs directs de violations (c. 6.3). C’est à juste titre que l’instance précédente s’est fondée sur le fait que la recourante a donné l’impression, dans ses lettres de février 2018, de connaître la technologie prétendument contrefaisante de manière suffisamment précise pour qu’une appréciation en droit des brevets soit possible, alors qu’elle ne se fondait en réalité que sur la demande de brevet de la défenderesse. Compte tenu des circonstances de fait, c’est à juste titre que l’instance précédente a considéré que la demanderesse devait avoir des doutes sérieux quand à l’exactitude de son accusation de violation de son brevet. Les courriers adressés en 2018 à des partenaires commerciaux de la défenderesse, qui présentaient clairement un caractère de mise en demeure en raison de leur référence aux sanctions civiles et pénales encourues en raison d’éventuels actes de participation, ne constituaient pas, selon les règles de la bonne foi, une mesure de défense justifiée pour la protection du brevet. C’est d’autre part à juste titre que l’instance précédente a considéré que la demanderesse devait avoir des doutes sérieux quant à son allégation de violation de son brevet au moment de l’envoi de son courriel, en mai 2020, dans lequel elle menaçait un autre partenaire commercial de la défenderesse sans mentionner l’avis du juge expert (c. 6.4). L’instance précédente a considéré que les lettres et le courriel violaient l’art. 3 lit. a LCD, et que les intimées étaient en droit, en vertu de l’art. 9 al. 2 LCD, d’exiger une clarification vis-à-vis de tous les destinataires (c. 7.1), impliquant l’obligation de les informer de l’issue de la procédure, et d’en obtenir copie. Cette sanction n’est pas disproportionnée (c. 7.3). Le recours est rejeté (c. 8). [SR]