Mot-clé

  • Indication

03 juin 2015

TAF, 3 juin 2015, B-5120/2013 (f)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, cercle des destinataires pertinent, spécialiste de la branche de l’automobile, degré d’attention moyen, degré d’attention accru, vocabulaire anglais de base, indian, motorcycle, indication géographique, nom géographique, règle de l’expérience, signe descriptif, besoin de libre disposition, recours partiellement admis, Inde, motocyclette, vêtements ; art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM ; cf. N 834 (TF, 4 décembre 2015, 4A_357/2015).

Les « motocyclettes et leurs pièces structurelles » en classe 12, s’adressent tant aux spécialistes de la branche qu’au grand public, dont il peut être attendu un degré d’attention accru. Les « vêtements, à savoir chemises, vestes, pantalons, gants, chapeaux, bavoirs et chaussures » en classe 25, s’adressent également tant aux spécialistes de la branche qu’au grand public, dont il ne peut cependant être attendu un degré d’attention accru (c. 5.2). Le mot anglais « indian » – contenu dans les deux signes examinés – est compris sans difficulté par les consommateurs (c. 6.1.1). Ce terme désigne, d’une part, l’Inde ou les régions d’Asie anciennement appelées Indes et, d’autre part, une ethnie établie en Amérique avant l’arrivée des Européens (c. 6.1.2). Dans le signe « INDIAN MOTORCYCLE », le terme « MOTORCYCLE » est compris par les consommateurs. Il convient donc de retenir que le signe « INDIAN MOTORCYCLE » signifie « moto indienne » (c. 6.2.1.1). L’Inde se place au 6e rang mondial des pays producteurs d’automobiles. Ce classement est d’ailleurs dominé par des pays asiatiques. Quand bien même les États-Unis seraient parmi les trois premiers producteurs d’automobiles, les Indiens d’Amérique n’ont aucun lien particulier avec cette industrie. De manière générale, l’importance démographique et économique de l’Inde fait passer à l’arrière-plan une éventuelle référence aux personnes issues d’une ethnie établie en Amérique – qui revêt avant tout une dimension historique. Le signe « INDIAN MOTORCYCLE » ne contient aucun élément renvoyant de manière claire aux Indiens d’Amérique. Dès lors, l’élément « INDIAN » associé à l’élément « MOTORCYCLE » est avant tout compris comme une référence à l’Inde (c. 6.2.1.2.1.1). Le fait que l’Inde ou les Indiens – d’Amérique ou d’Inde – ne jouissent d’aucune renommée particulière pour les produits revendiqués n’empêche pas que l’élément « INDIAN » soit considéré comme une indication de provenance (c. 6.2.1.2.1.3.1 – 6.2.1.2.1.3.3). La recourante échoue à faire valoir les différentes exceptions jurisprudentielles relatives à l’art. 47 al. 2 LPM (c. 6.2.1.2.1.4.1-6.2.1.2.1.6). À défaut de limiter la provenance des produits « motocyclettes et leurs pièces structurelles » en classe 12 à l’Inde, le signe « INDIAN MOTORCYCLE » est trompeur au sens de l’art. 2 lit. c LPM (c. 6.2.1.2.1.8). En revanche, ce signe n’est pas trompeur pour les « vêtements, à savoir chemises, vestes, pantalons, gants, chapeaux, bavoirs et chaussures » en classe 25, car si le signe laisse entendre que les motos proviennent d’Inde, il n’implique pas que les vêtements aient une telle provenance (c. 6.2.1.2.2). Dans le signe « Indian (fig.) », le terme « Indian » n’est pas associé à un autre terme et il est faiblement stylisé. Les consommateurs comprennent qu’il signifie « indien (ne) » (c. 6.2.2.1). Partant, les considérations concernant l’élément « Indian » établies pour le signe « INDIAN MOTORCYCLE » peuvent être reprises en relation avec le signe « Indian (fig.) ». En lien avec les produits de la classe 12 « motocyclettes et leurs pièces structurelles », le signe « Indian (fig.) » doit être considéré comme une référence à l’Inde (c. 6.2.2.2.1). Compte tenu de la place occupée par l’Asie dans l’industrie textile, le signe « Indian (fig.) » est également compris comme une référence à l’Inde pour les produits « vêtements, à savoir chemises, vestes, pantalons, gants, chapeaux, bavoirs et chaussures » en classe 25 (c. 6.2.2.2.2). La provenance des produits en classe 12 et 25 n’étant pas limitée à l’Inde dans la demande d’enregistrement, le signe « Indian (fig.) » doit être considéré comme propre à induire en erreur (c. 6.2.2.4). Le signe « INDIAN MOTORCYCLE » n’est pas descriptif pour les vêtements revendiqués en classe 25 (c. 7.1). Ce signe ne présente qu’un lien ténu avec les produits en cause, de sorte qu’il n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition absolu (c. 7.2). Le signe « INDIAN MOTORCYCLE» n’appartient pas au domaine public (c. 7.3). Au vu de ce qui précède, le recours concernant la marque « INDIAN MOTORCYCLE » est partiellement admis et l’enregistrement doit intervenir pour les produits revendiqués en classe 25 uniquement (c. 9.1). Le recours concernant le signe « Indian (fig.) » est rejeté (c. 9.2). [AC]

03 juillet 2015

TAF, 3 juillet 2015, B-6503/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, cercle des destinataires pertinent, spécialistes du domaine médical, nom géographique, indication de provenance, lieu de fabrication, lieu de production, imposition par l’usage, Luxor, Égypte, microscope ; art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 1 LPM.

Pour des « microscopes et appareils chirurgicaux pour la chirurgie ophtalmique », le cercle des destinataires est composé de médecins spécialisés dans la chirurgie oculaire (c. 4.1). Luxor est la septième plus grande ville d’Égypte, avec 400’000 à 600’000 habitants. Elle compte de nombreux monuments historiques, notamment le Temple de Luxor, listé au patrimoine mondial par l’UNESCO. L’Égypte, et Luxor en particulier, sont parmi les destinations préférées des touristes helvétiques. Luxor est donc compris comme une indication géographique par les destinataires. Ce d’autant, qu’il s’agit, dans le cas d’espèce, de personnes cultivées. Contrairement à l’avis de l’autorité précédente, Luxor n’est pas connue indirectement par le biais du Temple éponyme, mais bien en tant que ville. Il s’agit donc d’une indication géographique directe (c. 4.2). La recourante argue qu’en raison du niveau de formation et de spécialisation des destinataires, ceux-ci ne peuvent pas être trompés sur l’origine des produits. Il faut retenir que les connaissances pointues des destinataires ne portent pas sur le tissu économique égyptien et de Luxor en particulier. Quand bien même cela est invraisemblable, il n’est pas objectivement impossible que les produits revendiqués soient produits à Luxor (c. 5). L’élément « Lux » a une signification particulière pour les destinataires, mais le signe « LUXOR », considéré dans son ensemble, est clairement compris comme une indication de la provenance géographique. Il n’y a pas d’autres significations de ce signe suffisamment fortes pour paraître évidentes et s’imposer (c. 6-6.2). Lorsqu’il s’agit d’un signe trompeur, la notoriété acquise par la commercialisation du produit ne suffit pas, à elle seule, à écarter tout risque de tromperie. Pour démontrer qu’un signe a acquis une seconde signification (« secondary meaning ») par l’usage il faut, parmi différents indices, démontrer un usage de dix ans au moins (c. 7.2). La recourante a produit son chiffre d’affaires depuis 2011 – qui se monte à plusieurs millions pour la Suisse – ainsi que diverses publications ou brochures au sujet de son microscope. Cela prouve que le produit n’est pas inconnu des destinataires. Cependant, en matière de signes trompeurs, les critères sont plus élevés que pour les signes appartenant au domaine public. Par conséquent, ces moyens de preuve ne permettent pas de conclure que le signe « LUXOR » aurait acquis une seconde signification qui s’impose, pour les destinataires, par rapport l’indication géographique (c. 7.3). Le signe « LUXOR » ne bénéficie d’aucune exception dans le sens d’une signification symbolique, d’une autre signification prépondérante ou de l’imposition par l’usage (c. 7.4). Compte tenu du régime légal plus strict pour les signes trompeurs que pour les signes appartenant au domaine public, il faut admettre que c’est à raison que l’instance précédente a reconnu que le signe « LUXOR » serait compris comme une indication géographique de provenance par les destinataires (c. 8). Le recours est rejeté (c. 10.). [AC]

21 août 2015

TAF, 21 août 2015, B-3117/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, nom géographique, indication géographique, Allemagne, lieu de production, teuton, contenu significatif, cercle des destinataires pertinent, consommateur final, degré d’attention légèrement accru ; art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM ; cf. N 635 (TAF, 9 mai 2012, B-5658/2011 ; sic! 11/2012, p. 725 (rés.), « Frankonia (fig.) »).

Pour les produits revendiqués en classes 12, 18, 20 et 24, le cercle des destinataires pertinent est composé de spécialistes, d’intermédiaires, de détaillants et des consommateurs finaux, en particulier de parents avec des enfants en bas âge. Ces destinataires font preuve d’un degré d’attention légèrement accru (c. 4). Au contraire du signe « FRANKONIA » (cf. N 635, vol. 2012-2013), le signe « TEUTONIA » fait référence à un terme latin encore compris aujourd’hui (c. 5.1). L’élément « TEUTONIA » est utilisé dans différents contextes, comme indication de l’origine germanique (c. 5.2). Les mots allemands « Teutone », « teutonisch », « Teutonismus » et « Teutonengrill », aujourd’hui encore usités, dérivent du terme latin « Teutonia » (c. 5.3). Les mots français « teuton /- onne », « teutonique » et « teutons » relatifs à l’origine germanique sont référencés dans les dictionnaires français (c. 5.4). Les termes italiens « Tèutone », « teutònico » également relatifs à l’origine germanique sont référencés dans les dictionnaires italiens (c. 5.5). Lors d’une recherche sur internet pour les termes « teuto/teuton », les résultats obtenus en allemand, français et italien se rapportent tous à l’Allemagne, aux Allemands ou à la langue allemande (c. 5.6). Même si « Teutonia » comme mot latin désignant l’Allemagne n’est plus courant, les termes qui en sont dérivés restent encore aujourd’hui utilisés et leur signification en rapport avec l’Allemagne est comprise par le cercle des destinataires pertinent. L’Allemagne est connue par le cercle des destinataires pertinent comme un lieu de fabrication et de production. Le signe « TEUTONIA » sera donc compris par ces destinataires comme une indication de provenance et est trompeur pour des produits ne provenant pas d’Allemagne (c. 5.7). Le recours est rejeté (c. 6). [AC]

11 novembre 2015

TAF, 11 novembre 2015, B-2925/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, cercle des destinataires pertinent, degré d’attention légèrement accru, nom géographique, indication de provenance, indication géographique, recours admis, domaine skiable, Cortina d’Ampezzo, sports d’hiver, Italie ; art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 1 LPM.

Pour les produits en classe 18 et 25, le cercle des destinataires pertinent est composé des consommateurs de produits en cuir, de chaussures et de chapeaux – soit les consommateurs moyens – ainsi que des intermédiaires et des détaillants de ces produits. Ils font preuve d’un degré d’attention légèrement accru. Leurs connaissances géographiques et en matière d’installation sportives diffèrent de manière importante (c. 4). Les deux mots du nom de la commune de « Cortina d’Ampezzo » peuvent être utilisés séparément et constituer des indications géographiques. Cependant le mot « Cortina » seul est moins usité et n’est pas employé officiellement (c. 5.2). La Suisse compte de nombreux domaines skiables. Il ne faut pas s’attendre au même volume touristique pour une station de ski à l’étranger que pour le tourisme estival (c. 5.3). Compte tenu de la faible notoriété du domaine skiable italien de « Cortina d’Ampezzo » (6000 habitants, capacité d’accueil de 5000 lits, un million de nuitées, un tiers du tourisme de l’Engadine) dans le domaine des sports d’hiver (malgré l’organisation des Jeux olympiques d’hiver 1956) et de la protection limitée qui est accordée à ce nom géographique en Italie même (le registre des marques italien compte 203 marques actives, dont 47 enregistrées ces 3 dernières années qui contiennent l’élément « Cortina »), l’élément « Cortina »n’apparaît pas comme digne de protection et ne suscite pas une association d’idées directe avec le nom géographique « Cortina d’Ampezzo » pour les produits revendiqués (c. 5.1-5.7). Le recours est admis et l’instance précédente doit procéder à l’enregistrement (c. 5.7). [AC]

04 décembre 2015

TF, 4 décembre 2015, 4A_357/2015 (f)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, indication géographique, nom géographique, règle d’expérience, devoir de motivation, violation du droit d’être entendu, indian, motorcycle, Inde, vêtements ; art. 29 al. 2 Cst., art. 35 PA, art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM ; cf. N 830 (TAF, 3 juin 2015, B-5120/2013)

Le TAF a considéré que le signe « INDIAN MOTORYCLE » ne crée pas « d’attente particulière » en ce qui concerne la provenance des vêtements (c. 3). Le TAF explique succinctement que la combinaison du substantif sans lien avec les produits « Motorcycle » avec le nom géographique « Indian » a pour effet d’écarter toute attente quant à la provenance des produits revendiqués (vêtements). Cette motivation est suffisante : le TAF n’a pas violé son devoir de motivation et, partant, il n’y a pas de violation du droit d’être entendu (c. 3.2). Le terme « Indian » peut renvoyer aux peuples autochtones des États-Unis d’Amérique ou d’Inde. Contrairement à l’avis du TAF, il faut admettre que le signe « INDIAN MOTORCYCLE » est ambivalent.Un nom géographique peut être utilisé dans un signe en combinaison avec un autre élément verbal, si ce dernier imprègne l’impression d’ensemble de la marque de telle sorte que le destinataire ne comprend pas le nom géographique comme une indication de la provenance des produits (c. 4.5). En considérant que le signe litigieux « n’implique pas obligatoirement » que les vêtements proviennent d’Inde, le TAF n’opère pas la subsomption dans la logique du système mis en place par le législateur. Le critère de l’« attente particulière » est étranger au système des indications de provenance (c. 5.1). Le nom géographique contenu dans le signe litigieux est parfaitement reconnaissable et peut être interprété comme une indication de provenance. Le TAF exclut l’application des six exceptions à la règle de l’expérience et semble en désigner une septième : l’ajout du terme « MOTORCYCLE» au nom géographique « INDIAN » préviendrait toute attente quant à la provenance des vêtements. (c. 5.2). Le substantif « MOTORCYCLE » n’est pas neutre. Au contraire, ce substantif définit les contours de la marque. Le signe présente une unité et ne peut pas suggérer aux consommateurs que les vêtements sur lesquels il est apposé proviendraient de l’Inde. Les vêtements en questions sont perçus comme de simples supports et le signe est considéré comme une référence à l’univers des motos ou à celui des motards. C’est une situation similaire au renvoi à un événement sportif ou culturel, qui est une exception connue de l’art. 47 al. 2 LPM. L’impression d’ensemble du signe est imprégnée à tel point par l’élément verbal « MOTORCYCLE », qu’il n’est pas question d’attente quant à la provenance des produits revendiqués. La conclusion du TAF peut être confirmée. Il ne faut cependant pas en déduire une nouvelle et septième exception à l’art. 47 LPM, en ce sens que l’utilisation d’un nom géographique doit systématiquement être admise lorsqu’il est combiné avec un substantif sans lien avec les produits revendiqués. Ces cas doivent toujours être tranchés en tenant compte des circonstances propres au cas particulier (c. 5.3). Le recours est rejeté et l’arrêt attaqué confirmé, par substitution des motifs qui précèdent (c. 6). [AC]

15 décembre 2015

TAF, 15 décembre 2015, B-1785/2014 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, nom géographique, indication de provenance, cercle des destinataires pertinent, spécialistes de la branche automobile, degré d’attention légèrement accru, lieu de fabrication, règle de l'expérience, risque de tromperie, automobile, Angleterre, Hyde Park ; art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM.

Le nom d’un parc public peut constituer une indication de provenance indirecte pour une localité, une région ou un quartier. Cependant, il ne suffit pas qu’il soit connu du cercle des destinataires pertinent. Bien plus, il faut que ce nom soit l’emblème généralement reconnu ou typique, associé une provenance particulière (c. 3.7). Pour les produits revendiqués en classe 12 : « Véhicules automobiles et leurs parties, comprises dans cette classe » ; et en classe 28 : « Modèles réduits de véhicules et leurs parties, comprises dans cette classe », le cercle des destinataires pertinent est composé de spécialistes de la branche automobile et du grand public. Le degré d’attention de ces destinataires est légèrement accru (c. 4). Hyde Park à Londres est l’un des parcs publics urbains les plus connus au monde. Il est régulièrement proposé par les agences de voyages aux touristes suisses,comme attraction touristique à Londres. Ce nom est donc connu des personnes ayant voyagé à Londres, qui prévoient de le faire ou qui se sont renseignées à ce sujet. Parmi celles-ci se trouvent des destinataires des produits revendiqués. Le nom Hyde Park désigne avant tout un lieu et constitue une indication géographique (c. 5.1). Pour les destinataires des produits revendiqués en classes 12 et 28 qui ne connaissent pas le parc en question, le signe « HYDE PARK » ne crée pas de risque de tromperie. Quant aux destinataires qui connaissent ce parc, ils ne peuvent pas raisonnablement être amenés à croire que cet espace vert soit le lieu de fabrication des produits revendiqués en classes 12 et 28. Il n’y a donc pas de risque que les destinataires considèrent le signe « HYDE PARK », comme une indication géographique concrète et directe de provenance des dits produits (c. 5.2.1). Hyde Park à Londres constitue, pour les produits en classes 12 et 28, précisément le type d’exception reconnu par le TF dans l’arrêt Yukon : aux yeux des destinataires, le lieu en question ne peut manifestement pas être considéré comme le lieu de fabrication des produits considérés. Il ne s’agit donc pas d’une indication de provenance directe (c. 5.2.2). Le signe « HYDE PARK » est nécessairement associé à un nom géographique anglophone. Hyde Park est connu d’une part importante du grand public et des destinataires. Ce lieu est immédiatement associé à Londres. Le signe « HYDE PARK » est donc indubitablement une indication géographique, jouissant d’une forte notoriété, qui est associée au parc éponyme ou à la ville de Londres (c. 6.3.3). Le signe « HYDE PARK » est donc un symbole, un emblème, de Londres, respectivement de l’Angleterre (c. 6.3.4). Compte tenu de cette association, le signe « HYDE PARK » est une indication de provenance indirecte (c. 6.3.5). La liste des produits revendiqués n’étant pas limitée aux produits provenant d’Angleterre, il existe un risque de tromperie (c. 6.4). Le signe « HYDE PARK » contient un nom géographique, constituant une indication de provenance indirecte de l’Angleterre. Les produits revendiqués ne sont pas limités à cette provenance. Le signe est trompeur. C’est à juste titre que l’enregistrement a été refusé. Le recours est rejeté (c. 8). [AC]

28 février 2014

HG BE, 28 février 2014, HG 13 116 SUN CAB (d) (mes. prov.)

sic! 10/2014, p. 634-637, « Converse All Star » ; droits conférés par la marque, concurrence déloyale, risque de confusion, indication publicitaire inexacte, mesures provisionnelles, vraisemblance, fardeau de la preuve, contrefaçon, importation parallèle, canaux de distribution, épuisement, chaussures, baskets, numéros de série, étiquette, fournisseur, OTTO’S ; art. 8 CC, art. 13 LPM, art. 3 al. 1 lit. b LCD, art. 3 lit. d LCD, art. 152 CPC, art. 156 CPC.

Les demanderesses requièrent qu’il soit interdit au discounter OTTO’S de diffuser diverses baskets prétendument falsifiées de marque Converse All Star, et que leur soient communiquées des informations sur les canaux de distribution. Elles indiquent que les chaussures litigieuses comportent des numéros de série ne figurant pas dans leur base de données. La défenderesse soutient que les baskets constituent des marchandises originales ayant fait l’objet d’importations parallèles. Tant que l’existence d’une contrefaçon n’est pas établie, l’intérêt de la défenderesse à ce que l’identité de ses fournisseurs ne soit pas révélée prime sur les intérêts des demanderesses à ce que leurs droits de parties soient respectés de manière intégrale et illimitée (c. 5c). En vertu de l’art. 8 CC, il incombe aux demanderesses d’établir la vraisemblance des faits qu’elles allèguent (c. 7). Le principe de l’épuisement ne s’applique qu’aux marchandises originales, et non aux contrefaçons. Le titulaire d’une marque qui prétend qu’elle a été contrefaite doit supporter le fardeau de la preuve de son affirmation (c. 9e). Il incombe par conséquent d’abord aux demanderesses de rendre vraisemblable que les chaussures litigieuses constituent des contrefaçons. Elles ne peuvent déduire du principe de l’épuisement qu’il incomberait préalablement à la défenderesse de rendre vraisemblable que les chaussures litigieuses ont été mises en circulation avec leur consentement. Un tel fardeau de la preuve ne serait concevable que si les demanderesses avaient affirmé et rendu vraisemblable que ces marchandises constitueraient des originaux, mis en circulation sans leur consentement (c. 9f). Le simple fait que les numéros de série imprimés sur les étiquettes apposées sur les chaussures ne figurent pas dans la base de données des demanderesses ne suffit pas à rendre vraisemblable l’existence d’une contrefaçon. Pour rendre vraisemblable l’existence de faux, il s’agit plutôt d’établir l’existence de divergences dans les propriétés spécifiques du produit. Dans la mesure où des numéros de série ne servent qu’au contrôle d’un système de distribution, même leur modification n’est pas condamnable en droit des marques (c. 13b). Des documents confidentiels retenus par les demanderesses, qui auraient selon elles pu rendre vraisemblable la contrefaçon, ne peuvent être pris en compte dans la présente procédure de mesures provisionnelles. Les demanderesses auraient pu les verser au dossier en requérant que les mesures nécessaires à la sauvegarde de leurs intérêts soient prises, en vertu de l’art. 156 CPC (c. 13c). La défenderesse parvient à rendre vraisemblable que la plupart des chaussures litigieuses ne constitue pas des contrefaçons (c. 14-15). Les demanderesses ne parviennent pas à rendre vraisemblable qu’il s’agit de faux (c. 15). Elles ne parviennent pas non plus à rendre vraisemblable que la défenderesse ait émis des affirmations inexactes ou ait créé un risque de confusion au sens des art. 3 lit. b et d LCD (c. 16d). Pour ces motifs, les requêtes de mesures provisionnelles sont rejetées (c. 17). [SR]

22 mai 2014

HG ZH, 22 mai 2014, HE 140063 (d) (mes. prov.)

Concurrence déloyale, droit d’auteur, mesures provisionnelles, programme d’ordinateur, compatibilité, Windows, contrat de vente, transfert de droits d’auteur, vraisemblance, dommage, expertise, exploitation d’une prestation d’autrui, indication publicitaire inexacte, dénigrement, courrier ; art. 16 al. 1 LDA, art. 17 LDA, art. 2 LCD, art. 3 al. 1 lit. a LCD, art. 3 al. 1 lit. b LCD, art. 3 al. 1 lit. d LCD, art. 5 lit. a LCD, art. 5 lit. c LCD.

La défenderesse a mis sur le marché « Princess », un logiciel concurrent du logiciel « Diamond » que diffuse la demanderesse. Dans des lettres adressées à des clients des deux parties, elle prétend que son logiciel constitue une amélioration de celui de la demanderesse, et soutient que ce dernier, jusqu’à sa version 4.9, ne fonctionne que de manière limitée avec Windows 7 et plus du tout avec les versions ultérieures du système d’exploitation. La conclusion par la demanderesse d’un contrat de vente avec une société anonyme rend à tout le moins vraisemblable que ses droits d’auteur ont été transférés à cette dernière. Elle n’expose pas, dans sa demande, sur quoi reposerait sa légitimation active, et sa demande de mesures provisionnelles doit être rejetée sur ce point (c. 7). Les captures d’écran qu’elle a fournies ne permettent pas au tribunal d’apprécier si le logiciel « Diamond » a été repris d’une manière qui pourrait constituer une violation du droit d’auteur ou l’exploitation d’une prestation d’autrui. Il s’agit d’une question technique qui doit, même dans le cadre d’une procédure de mesures provisionnelles, être soumise à un expert. Puisque la demanderesse n’a pas requis d’expertise, il faut considérer, indépendamment de la question de la titularité des droits, qu’une violation du droit d’auteur n’a pas été rendue vraisemblable (c. 8). L’affirmation de la défenderesse, dans le titre des courriers qu’elle a adressés, selon laquelle « Diamond » s’appelle dorénavant « Princess », suggère que « Princess » succède à « Diamond », ce qui est manifestement inexact. Il s’agit vraisemblablement d’un dénigrement au sens de l’art. 3 al. 1 lit. a LCD et d’une indication inexacte au sens de l’art. 3 al. 1 lit. b LCD. La simple indication d’une incompatibilité d’une ancienne version de « Diamond » avec Windows 7 et 8 est également trompeuse et dénigrante, car elle éveille l’impression fausse d’une incompatibilité générale, alors que la nouvelle version du programme est bel et bien compatible avec le système d’exploitation. Ces affirmations paraissent non seulement illicites, mais elles sont également susceptibles de causer des dommages matériels et immatériels à la demanderesse, et doivent donc être interdites à titre provisionnel (c. 8). [SR]

08 août 2014

TAF, 8 août 2014, B-4820/2012 (f)

sic! 2/2015, p. 95-107, « Absinthe » (Claudia Maradan : Remarques) ; Absinthe, Fée Verte, La Bleue, dénomination traditionnelle, indication de provenance indirecte, sondage, droit d’être entendu, nom générique, preuve, fardeau de la preuve, moyens de preuve, interprétation d’une étude démoscopique ; art. 29 al. 2 Cst., art. 12 PA, art. 14 al. 1 lit. d LAgr, art. 16 al. 1 LAgr, art. 16 al. 2 LAgr, art. 1 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 3 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 3 al. 2 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 4 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 4 al. 3 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 5 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 6 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 6 al. 3 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 8 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 10 al. 2 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 10 al. 3 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 11 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 12 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP et art. 12 al. 2 Ordonnance sur les AOP et les IGP.

En vertu de l’art. 3 al. 1 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP, peut être enregistré comme indication géographique, le nom d’une région, d’un lieu ou, dans des cas exceptionnels, d’un pays qui sert à désigner un produit agricole ou un produit agricole transformé originaire de cette région, de ce lieu ou de ce pays (lit. a), dont une qualité déterminée, la réputation, ou une autre caractéristique peut être attribuée à cette origine géographique (lit. b), et qui est produit, transformé ou élaboré dans une aire géographique délimitée (lit. c). Les dénominations traditionnelles des produits agricoles ou des produits agricoles transformés qui remplissent les conditions fixées à l’art. 3 al. 1 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP peuvent être enregistrées comme indication géographique (art. 3 al. 2 Ordonnance sur les AOP et les IGP) (c. 4.2.1). Selon l’art. 16 al. 3 phrase 2 LAgr, les noms génériques ne peuvent être enregistrés comme appellations d’origine ou indications géographiques. L’art. 4 al. 2 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP ajoute que, par nom générique, on entend la dénomination d’un produit qui, bien que se rapportant au lieu où ce produit a été initialement élaboré ou commercialisé, est devenue un nom commun qui le désigne. Enfin, selon l’art. 4 al. 3 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP, pour déterminer si un nom est devenu générique, on tient compte de tous les facteurs entrant en ligne de compte, notamment de l’opinion des producteurs et des consommateurs, particulièrement dans la région où le nom a son origine (c. 5.1). L’art. 6 al. 1 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP prévoit que la demande d’enregistrement doit prouver que les conditions fixées par l’Ordonnance sur les AOP et les IGP pour l’obtention d’une appellation d’origine ou de l’indication géographique sont remplies et en particulier contenir les éléments prouvant que la dénomination n’est pas générique (art. 6 al. 2 lit. c de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP). Le fardeau de la preuve du caractère non générique de la dénomination à enregistrer revient donc au groupement demandeur (c. 5.2.1). Si l’étude démoscopique constitue un élément important en vue d’établir qu’une dénomination n’est pas générique, elle n’est que l’un des éléments à prendre en considération. D’autres moyens de preuves comme les dictionnaires, articles de presse ou d’autres publications entrent aussi en ligne de compte (c. 5.2.2). L’art. 4 al. 2 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP ne décrit pas l’ensemble des cas de noms génériques. Il peut par conséquent exister des noms génériques qui, dès l’origine, ont un caractère générique sans l’être devenus à la suite d’un processus évolutif. Ce qui est décisif est le caractère générique ou non générique de la dénomination en cause au moment du dépôt de la demande d’enregistrement litigieuse. Peu importe que le caractère générique ou non générique ait existé depuis toujours ou qu’il soit le résultat d’une évolution (c. 5.3.2). Plus le nombre de personnes interrogées est élevé, plus le résultat d’une étude démoscopique est fiable. Une base de 1000 personnes au minimum est recommandée par les spécialistes et adoptée comme référence par la jurisprudence. Mais ce sont, parmi l’ensemble des personnes interrogées, uniquement celles qui connaissaient la dénomination en cause qui doivent servir de base à l’interprétation de l’étude démoscopique. C’est donc pour chaque dénomination en cause, en fonction du nombre de personnes qui connaît cette dénomination (et non pas en fonction de l’ensemble des personnes interrogées) que doit être calculée la proportion de personnes qui lui associe telle ou telle origine particulière (c. 5.4.1.2.2). Lorsqu’il s’agit de déterminer si une dénomination est dénuée de caractère générique, une importance particulière doit être donnée à la spontanéité des personnes interrogées. Le risque existe autrement que la succession des questions de l’étude démoscopique pousse les personnes interrogées à trouver une origine au produit (c. 5.4.2.4.2.1). Il est ainsi fortement critiquable d’additionner des réponses fournies de manière spontanée à des réponses données de manière assistée. Les résultats assistés ne sauraient en effet être mis sur le même plan que les résultats spontanés, principalement en raison du fait que la force probante des résultats assistés ne peut être aussi élevée que celle des résultats spontanés (c. 5.4.3.2). L’échantillon utilisé pour une étude démoscopique doit être composé de personnes provenant de l’ensemble des régions de notre pays. Le TAF indique qu’il aurait en l’espèce été nécessaire de procéder à trois études démoscopiques distinctes et d’interroger pour chacune des trois dénominations un groupe de personnes séparé (c. 5.4.4.3). L’art. 4 al. 3 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP invite à prendre en considération l’ensemble des éléments pertinents et ne saurait être interprété comme donnant un poids particulier à l’un d’eux. La mention de l’opinion des producteurs et des consommateurs n’y change rien. Et la valeur exemplative ne remet pas en cause l’affirmation principale de la disposition selon laquelle il s’agit de tenir compte de tous les facteurs pertinents. Il en résulte que l’opinion des producteurs et des consommateurs de la région où la dénomination a son origine doit être confrontée à l’ensemble des circonstances et ne saurait être décisive à elle seule. Comme les effets de l’enregistrement d’une AOP ou d’une IGP touchent le territoire de la Suisse dans son ensemble, il n’y a pas de raison d’accorder un quelconque privilège à l’opinion des producteurs et des consommateurs de l’aire géographique concernée. Il s’agit au contraire de s’assurer que, dans toute la Suisse, la dénomination en cause n’a pas un caractère générique. L’art. 16 LAgr ne donne d’ailleurs aucune indication qui permettrait de donner un poids particulier à une région (c. 5.4.5.3). À la différence de ce qui concerne la Damassine pour laquelle le Jura était mentionné, tous les dictionnaires consultés par le TAF donnent une définition géographiquement neutre du terme « Absinthe ». Il s’agit là d’un indice important du caractère générique de cette dénomination. Les sources très anciennes ne rattachent pas non plus la dénomination « Absinthe » à une origine géographique particulière. Enfin, dans la littérature plus récente, ainsi que dans les beaux-arts, la dénomination « Absinthe » est également utilisée comme un nom générique (c. 5.5.1.1). L’art. 85 de l’Ordonnance du DFI du 29 novembre 2013 sur les boissons alcooliques (RS 817.022.110) entrée en vigueur le 1er janvier 2014 comporte une définition de l’absinthe qui lui donne un statut de générique et ne fait en aucun cas référence à une provenance géographique quelconque. Elle englobe donc n’importe quel produit qui présente les caractéristiques énumérées, quel que soit le lieu dans lequel il est fabriqué. Cela constitue un indice fort du caractère générique de la dénomination « Absinthe » qui est comprise comme telle par le public (c. 5.5.1.4.2). L’art. 32ter aCst. accepté en votation populaire le 5 juillet 1908 ne contenait aucun élément selon lequel la dénomination « Absinthe » aurait désigné une boisson ayant une provenance géographique particulière. Au contraire, cette disposition visait clairement à interdire un type de boisson désigné par la dénomination « Absinthe » (c. 5.5.1.4.2). Le fait qu’au total sur le plan suisse 21% des personnes connaissant la dénomination « Absinthe » l’associent spontanément au Val-de-Travers est relativement faible et ne saurait être « compensé » par le fait que 67% des personnes provenant du canton de Neuchâtel connaissent la dénomination « Absinthe » et l’associent spontanément au Val-de-Travers. Le caractère générique de la dénomination « Absinthe » ne saurait ainsi être nié. Une indication de provenance indirecte a en outre plus facilement tendance à être perçue comme un nom générique qu’une indication de provenance directe. Par ailleurs, plus l’aire géographique est restreinte, plus les exigences en matière de « non-généricité » se doivent d’être élevées. En effet, si une dénomination est réservée à une région très limitée et qu’il est par conséquent interdit aux producteurs des autres régions (c’est-à-dire aux producteurs de pratiquement toute la Suisse) de l’utiliser, il doit être d’autant plus évident que cette dénomination constitue une référence à cette région très limitée (c. 5.5.1.8). Le TAF en déduit que la dénomination « Absinthe » doit être qualifiée de nom générique au sens de l’art. 16 al. 3 phrase 2 LAgr et de l’art. 4 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP et qu’elle ne peut par conséquent être enregistrée comme IGP. La même conclusion s’impose pour le TAF à propos des dénominations « Fée Verte » et la « Bleue » puisque dans les dictionnaires dans lesquels elle est mentionnée, la dénomination « Fée Verte » est utilisée comme synonyme de la dénomination « Absinthe » et qu’elle est désignée comme l’expression la plus universellement répandue pour parler du produit (c. 5.5.2.2). Le TAF met ainsi en balance le pourcentage relativement faible (33%) sur le plan suisse de personnes connaissant cette dénomination qui l’associent spontanément au Val-de-Travers avec le fait que les définitions des dictionnaires et le dossier historique mettent clairement en évidence le fait que la dénomination « Fée Verte » est un synonyme de la dénomination « Absinthe » et le fait qu’elle a un caractère universel (c. 5.5.2.3). Pour la dénomination « la Bleue », le TAF relève qu’elle est aussi utilisée comme synonyme de la dénomination « Absinthe » dans les dictionnaires sans référence à sa provenance géographique particulière (c. 5.5.3.1), et que le pourcentage (35%) à nouveau relativement faible de personnes associant spontanément sur le plan suisse la dénomination « La Bleue » au Val-de-Travers, contre 79% des personnes provenant du canton de Neuchâtel, mis en balance avec les définitions se trouvant dans les dictionnaires et le dossier historique permet d’aboutir à la conclusion que cette dénomination doit également être qualifiée de nom générique (c. 5.5.3.3). À titre de comparaison, le TAF relève que plus de la moitié (57,7%) des personnes connaissant « spontanément » la Damassine sur le plan suisse ont rattaché le terme « Damassine » à une eau-de-vie et près des deux tiers (64%) ont indiqué le canton du Jura comme son lieu de production actuel, plus de la moitié des sondés (55,3%) ayant dit personnellement attendre que la « Damassine » provienne du canton du Jura (c. 5.6.1.1.1). Enfin, étant donné que le caractère générique des dénominations en cause exclut leur enregistrement en tant qu’IGP, la question de savoir si elles peuvent être qualifiées de dénominations traditionnelles au sens de l’art. 3 al. 2 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP peut rester ouverte (c. 6). Les recours sont admis. [NT]

Cst. (RS 101)

- Art. 29

-- al. 2

LAgr (RS 910.1)

- Art. 14

-- al. 1 lit. d

- Art. 16

-- al. 1

-- al. 2

Ordonnance sur les AOP et les IGP (RS 910.12)

- Art. 12

-- al. 2

-- al. 1

- Art. 11

-- al. 1

- Art. 5

-- al. 1

- Art. 1

-- al. 1

- Art. 10

-- al. 3

-- al. 2

- Art. 3

-- al. 2

- Art. 8

- Art. 4

-- al. 3

-- al. 1

- Art. 6

-- al. 3

-- al. 1

PA (RS 172.021)

- Art. 12

12 avril 2016

TF, 12 avril 2016, 4A_443/2015 (d)

Concurrence déloyale, publicité comparative, indication de prix, comparaison de prix, garantie de prix, publicité superlative, indication publicitaire inexacte, indication publicitaire fallacieuse, principe de véracité, cercle des destinataires pertinent, recours partiellement admis ; art. 112 al. 1 lit. b LTF, art. 112 al. 3 LTF, art. 3 al. 1 lit. b LCD, art. 3 al. 1 lit. e LCD.

Ne peut être inexact que ce dont la véracité est vérifiable. Seules des allégations factuelles peuvent être vérifiées. Ne constituent pas des allégations factuelles, au sens des art. 3 al. 1 lit. b et lit. e LCD, les publicités dont le caractère excessif (racoleur) est reconnaissable, les déclarations d’ordre général, les promesses de bonheur et les purs jugements de valeur, qui n’ont pas de noyau de vérité et ne sont pas objectivement vérifiables. Pour déterminer si l’on est en présence d’une indication fallacieuse, la compréhension objective des cercles de destinataires pertinents, dotés d’une expérience, d’une compétence et d’une attention moyennes est déterminante. Il est à cet égard nécessaire et suffisant qu’un nombre non négligeable de destinataires soient susceptibles d’être trompés ou induits en erreur (c. 2.2). Les indications de prix doivent être véridiques. Lorsque les prix sont mis en rapports avec ceux de concurrents, le principe de véracité doit être respecté, que les prix soient présentés comme les moins chers (publicité superlative) ou comme moins chers. Cela suppose que les biens ou services en cause soient comparables sur les plans quantitatif et qualitatif (c. 2.3). Comme les indications de prix sont particulièrement propices à influencer les comportements des consommateurs, la jurisprudence a toujours posé des critères stricts en matière de comparaisons de prix (c. 2.3.1). Elle se montre très réservée lorsqu’il s’agit de qualifier une publicité d’allégation racoleuse reconnaissable (c. 2.3.2). Les exigences sont particulièrement strictes lorsqu’un publicitaire compare les prix de son offre ou de ses prestations avec ceux de l’ensemble de la concurrence. Les indications de prix qui font usage de superlatifs ou placent leur auteur dans une position unique (Alleinstellungswerbung) doivent respecter le principe de véracité. Les indications de prix qui sont comprises par le public, faisant usage d’une attention moyenne, comme signifiant que certains produits, ou que l’ensemble des prestations offertes sont moins chers que ceux de la concurrence, à qualité égale, ne sont licites que lorsque tel est réellement le cas. Cela s’applique à toutes les offres de concurrents visées par l’allégation, et suppose que les prix des produits concurrents sur lesquels la comparaison repose soient connus. Les indications de prix doivent être exactes au moment de la publication. Il faut en outre tenir compte du fait que les prix de la concurrence peuvent changer et sont de ce fait susceptibles de rendre l’indication de prix inexacte. Enfin, une promesse de remboursement ne fait pas perdre son caractère trompeur à une allégation inexacte (2.3.3). En l’espèce, l’instance précédente a interdit à la recourante d’utiliser dans sa publicité les termes « Tiefstpreisgarantie », « Best Price » (isolément) et « garantierter Dauertiefstpreis » (c. 3). Ces trois termes n’ont pas de signification en eux-mêmes. Ils ne peuvent être compris, et leur véracité ne peut être appréciée qu’en relation avec une offre spécifique de biens ou de services, en comparaison avec ceux de la concurrence (c. 3.1). Le jugement attaqué ne permet pas de déterminer dans quel contexte et pour quelles offres la recourante utilise les termes litigieux. En particulier, le jugement ne constate pas si et de quelle manière la recourante vante par les termes litigieux l’ensemble de son offre (c. 3.2). Les constatations de l’instance inférieure n’indiquent pas que la recourante ait visé l’ensemble de son offre par l’emploi des termes litigieux. Il manque dans la décision attaquée des constatations factuelles desquelles on pourrait déduire que les consommateurs moyennement attentifs pourraient comprendre les publicités comme indiquant que la recourante propose à tout moment, ou au moins à un moment déterminé, des prix inférieurs pour l’ensemble de son offre à ceux de l’ensemble de la concurrence. L’interdiction étendue et générale d’utiliser ces concepts dans la publicité des recourantes, prononcée en première instance, repose pourtant sur l’admission de cette hypothèse (c. 3.3). Selon l’art. 112 al. 1 lit. b LTF, les décisions qui peuvent faire l’objet d’un recours devant le Tribunal fédéral doivent contenir les motifs déterminants de fait et de droit (c. 4). On ne peut en l’espèce déduire des considérants du jugement attaqué suffisamment de constatations factuelles, qui permettraient de comprendre de quelle situation réelle l’instance précédente est partie, quels éléments de fait elle a considéré comme pertinents, et lesquels elle a tenu pour avérés (c. 4.3). Les constatations du jugement attaqué ne sont pas non plus suffisantes pour écarter la demande reconventionnelle de la recourante (c. 4.4). Selon l’art. 112 al. 3 LTF, le jugement attaqué doit donc être annulé, et la cause doit être renvoyée à l’instance précédente pour nouveau jugement (c. 5). [SR]

18 avril 2016

TF, 18 avril 2016, 6B_597/2015 (f)

Concurrence déloyale, coauteur, indication publicitaire fallacieuse, méthode de ventre particulièrement agressive, organe, organe de fait, marque, publicité, voyance ; art. 3 al. 1 lit. b LCD, art. 3 al. 1 lit. c LCD, art. 3 al. 1 lit. h LCD, art. 3 al. 1 lit. i LCD, art. 23 LCD.

Les recourants, agissant comme organes de droit ou de fait de plusieurs sociétés, ont participé activement à la diffusion et à la distribution de publicités mensongères par des publipostages à des clients en France. Ces publicités contenant des offres signées du nom d’une pseudo-voyante, faisaient croire à leurs destinataires qu’ils obtiendraient richesse, bonheur et santé, moyennant souvent une participation financière. Selon la cour cantonale, ces publicités étaient trompeuses, car elles faisaient croire aux consommateurs que le nom utilisé correspondait à une voyante domiciliée en Suisse, alors qu’il s’agissait en fait d’une marque propriété d’une société argentine. Les destinataires de la publicité étaient également leurrés sur la réalisation de gains rapides et donc sur les prestations fournies. En outre, les publicités consacraient des méthodes de vente agressive prohibées (c. 1.2.1). Selon la jurisprudence, le coauteur est celui qui collabore intentionnellement et de manière déterminante avec d’autres personnes dans la décision de commettre une infraction, dans son organisation ou son exécution, au point d’apparaître comme l’un des participants principaux. La seule volonté ne suffit pas : il faut que le coauteur participe effectivement à la prise de décision, à l’organisation ou à la réalisation de l’infraction (c. 1.3.2). En l’espèce, les recourants n’ont pas envoyé les publipostages litigieux et ne les ont pas non plus élaborés. Leur activité s’est limitée à fournir une adresse en Suisse et à gérer le « service après-vente » de la marque. Le seul fait de fournir une adresse en Suisse pour l’envoi des commandes et d’avoir consenti à ce que dite adresse figure sur les publipostages litigieux ne peut suffire à justifier l’application de la LCD. Par ce seul acte, les recourants n’ont en effet pas contribué de manière essentielle à la diffusion des publipostages litigieux. Leurs actes sont intervenus postérieurement à l’infraction de diffusion du publipostage, alors qu’elle était déjà consommée (c. 1.3.3). Le recours est admis (c. 3). [SR]

LCD (RS 241)

- Art. 23

- Art. 3

-- al. 1 lit. h

-- al. 1 lit. i

-- al. 1 let. c

-- al. 1 lit. b

08 juin 2017

TAF, 8 juin 2017, B-5004/2014 (f)

« Clos d’Ambonnay », boissons alcoolisées, vins, champagne, spiritueux, cercle des destinataires pertinent, indication de provenance directe, motifs d’exclusion absolus, règle de l’expérience, domaine public, besoin de libre disposition, territorialité, décision étrangère, Directives de l’IPI ; art. 6quinquies lit. B ch. 2 CUP, art. 6quinquies lit. B ch. 3 CUP, art. 22 ch. 1 ADPIC, art. 22 ch. 3 ADPIC, art. 23 ch. 2 ADPIC, art. 2 lit. a LPM, art. 30 al. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 1 LPM, art. 47 al. 2 LPM.

Selon l’art. 47 al. 1 LPM, par indication de provenance, on entend toute référence directe ou indirecte à la provenance géographique des produits ou des services, y compris la référence à des propriétés ou à la qualité, en rapport avec la provenance (c. 2.1). Ne sont toutefois pas des indications de provenance au sens de l’art. 47 al. 1 LPM les noms ou signes géographiques qui ne sont pas considérés par les milieux intéressés – c’est-à-dire les clients potentiels – comme une référence à la provenance des produits  ou des services (art. 47 al. 2 LPM, c. 2.2.1). Appartiennent au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM, les indications génériques ou descriptives, les signes banals, les signes libres et les indications de provenance (c. 3.2.1.4). Si la force distinctive s’apprécie au regard de la perception des cercles de consommateurs déterminants, le besoin de libre disposition dépend des besoins des concurrents (c. 3.2.1.6). L’art. 2 lit. c LPM exclut quant à lui de la protection les signes propres à induire en erreur (c. 3.2.2.1). Tel est notamment le cas lorsqu’un signe contient une indication géographique ou consiste exclusivement en une telle indication qui amène les intéressés à croire que les produits ou les services commercialisés en relation avec ce signe proviennent du pays ou du lieu en cause, alors que tel n’est en réalité pas le cas. L’usage d’indications de provenance inexactes est interdit selon l’art. 47 al. 3 lit. a LPM (c. 3.2.2.2). Lorsqu’une marque comporte un nom géographique ou se compose exclusivement d’un nom géographique, elle incite en principe à penser que le produit en relation avec lequel elle est utilisée vient du lieu indiqué. C’est un fait d’expérience que la désignation géographique éveille chez le consommateur l’idée que le produit qu’elle couvre vient du pays désigné. La mention d’un nom géographique est donc habituellement comprise comme une indication de provenance. L’art. 47 al. 1 LPM définissant de manière large la notion d’indication de provenance, la mention d’un nom géographique suffit en principe (c. 3.2.2.3). Un signe est exclu de la protection dès qu’il existe un risque de tromperie pour les clients potentiels, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’établir que des consommateurs se sont effectivement trompés. Un signe n’est en revanche pas propre à induire en erreur lorsque le nom géographique qu’il contient possède manifestement un caractère fantaisiste ou lorsque, pour d’autres motifs, il n’est pas compris comme une indication de provenance (c. 3.2.2.4). Le caractère trompeur d’une dénomination géographique ne doit pas être examiné de manière abstraite, mais doit être apprécié à l’aune de toutes les circonstances particulières du cas d’espèce. Dans ce contexte, il convient de prendre en compte la notoriété du mot en tant que référence géographique et marque ; il faut également prendre en considération les rapports effectifs et étroits entre cette référence et les secteurs des produits revendiqués et entre la forme de la marque et les indications additionnelles qui peuvent accroître ou éliminer les risques de tromperie (c. 3.2.2.5). Lorsqu’un mot comporte plusieurs significations, il faut rechercher celle qui, pour le consommateur suisse moyen, s’impose le plus naturellement à l’esprit en tenant compte de la nature du produit en cause. N’est pas considéré comme une indication de provenance le signe dont le contenu géographique n’est pas reconnaissable parce qu’une autre signification s’y rattache de manière plus étroite et, partant, modifie l’impression d’ensemble d’une manière telle que l’indication de provenance s’efface devant l’autre signification (c. 3.2.2.6). Les produits alcoolisés de la classe 33 revendiqués en l’espèce s’adressent au grand public suisse âgé de plus de 16 ans, respectivement 18 ans, qui fait preuve d’un degré d’attention moyen mais plutôt superficiel. Ces produits sont également destinés au spécialiste de la branche qui fait lui preuve d’un degré d’attention accru (c. 4.2). Il ressort de l’ATF 117 II 327 « Montparnasse » que, dans le cadre de l’examen du motif absolu d’exclusion qui correspond à l’actuel art. 2 lit. a LPM, le TF n’opère pas de réelle distinction entre les notions de défaut de force distinctive et de besoin de libre disposition. Pour le TF, si l’indication géographique « Montparnasse » est dépourvue de la force distinctive nécessaire, elle appartient au domaine public et le TF se limite à préciser que le domaine public est soumis à un besoin de libre disposition. Le TF utilise donc les notions de défaut de force distinctive, de besoin de libre disposition et de domaine public comme des synonymes. Par conséquent, lorsque le TF arrive à la conclusion que le signe « Montparnasse » n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition, il indique simplement que ce signe ne souffre pas d’un défaut de force distinctive ou qu’il n’appartient pas au domaine public (c. 6.2.1.1). En se référant à l’ATF 117 II 327 « Montparnasse », la majorité de la doctrine considère que les autorités suisses ne sauraient en principe refuser de protéger en tant que marque un signe qui correspond à un nom géographique issu d’un Etat étranger si ce signe est enregistré comme marque dans cet Etat étranger (c. 6.2.2). Dans l’ATF 117 II 327 « Montparnasse », c’est bien – en application du principe de la territorialité – de la perception du public suisse que part le raisonnement du TF. S’il est possible que la perception du public du pays d’origine ne soit pas la même que celle du public suisse, il convient toutefois d’admettre que c’est en connaissance de cause que dans l’ATF 117 II 327 « Montparnasse », le TF se réfère fondamentalement à l’imposition du signe comme marque dans son pays d’origine afin de justifier sa protection à titre de marque en Suisse. L’enregistrement d’une marque imposée est une exception au principe de l’art. 2 lit. a LPM selon lequel les signes appartenant au domaine public sont exclus de la protection à titre de marque. Un signe peut ainsi être enregistré en tant que marque imposée même s’il souffre d’un défaut de force distinctive et/ou s’il est frappé d’un besoin de libre disposition. La solution que le TF adopte dans l’ATF 117 II 327 « Montparnasse » a pour but de protéger le public suisse contre le risque de tromperie. En effet, l’utilisation du signe « Montparnasse » étant réservée en France à la société recourante « S.T. Dupont SA », son utilisation en Suisse en lien avec des produits français est propre à induire en erreur si ces produits ne sont pas fabriqués par la société recourante « S.T. Dupont SA » (c. 6.2.3.2). Rien n’indique qu’à l’heure actuelle le TF et le Tribunal administratif fédéral auraient renoncé à suivre la voie tracée par l’ATF 117 II 327 « Montparnasse », ni que cet arrêt serait devenu obsolète avec l’entrée en vigueur le 1er avril 1993 de l’actuelle LPM. Il ne peut par ailleurs pas être considéré que cette jurisprudence accorde à une entreprise un avantage commercial qui serait de nature à fausser la libre concurrence. Le fait que l’avis contraire de l’autorité inférieure apparaisse dans ses Directives 2014 et 2017 n’est pas déterminant, puisque les Directives de l’IPI ne sont qu’un instrument de travail qui ne lient ni l’autorité inférieure, ni les tribunaux. Il convient donc de retenir que, pour qu’un signe principalement perçu comme un nom géographique étranger n’appartienne pas au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM, il suffit que ce même signe fasse, pour les mêmes produits ou services, l’objet – en faveur de la personne qui demande la protection de ce signe en tant que marque en Suisse – d’un seul enregistrement en tant que marque dans l’Etat étranger dont provient le nom géographique. Peu importe ainsi que ce signe soit dépourvu de force distinctive en Suisse (c. 6.2.4). En vue de l’examen, sous l’angle de l’art. 2 lit. a et c LPM, d’un signe correspondant à un signe géographique étranger, il convient dans un premier temps de déterminer si les cercles des consommateurs suisses concernés perçoivent ce signe comme un nom géographique (c. 8). S’il n’est pas perçu comme un nom géographique, le signe ne peut pas être compris comme une indication de provenance. Il ne peut par conséquent pas être descriptif de la provenance des produits et des services revendiqués et appartenir de ce fait au domaine au sens de l’art. 2 lit. a LPM (c. 8.1.1). Le fait qu’un signe ne soit pas perçu comme un nom géographique (étranger) n’est toutefois pas suffisant pour retenir que ce signe n’appartient pas au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM. Il pourrait néanmoins être dénué de force distinctive (et/ou être frappé d’un besoin de libre disposition) en raison d’une signification non géographique dominante (voir sur point c. 8.1.2 à 8.1.4), et appartenir de ce fait au domaine public (voir sur ce point c. 9.1). Il peut cependant en tout cas être retenu qu’un signe qui correspond à un nom géographique étranger, mais qui, en Suisse, n’est pas perçu comme un nom géographique (étranger) n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition en Suisse (en raison du fait qu’il correspond à un nom géographique étranger) si ce même signe ou, du moins, un signe dans lequel le nom géographique en cause prédomine, fait pour les mêmes produits ou services l’objet d’un seul enregistrement en tant que marque dans l’Etat étranger dont provient le nom géographique (c. 8.1.5). S’il n’est pas perçu comme un nom géographique, un signe ne peut pas être descriptif de la provenance des produits et des services revendiqués et appartenir de ce fait au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM. Il ne peut pas non plus être propre à induire en erreur quant à la provenance des produits et des services revendiqués au sens de l’art. 2 lit. c LPM (c. 8.2). Si le signe est perçu comme un nom géographique, il convient tout d’abord de déterminer si cette signification n’est pas écartée par une autre signification dominante. Lorsqu’un mot est susceptible d’avoir plusieurs significations, il faut en effet rechercher celle qui s’impose le plus naturellement à l’esprit en tenant compte de la nature du produit en cause (c. 9). In casu, le TAF retient, en application de l’arrêt du TF 4A_6/2013 du 16 avril 2013 « Wilson » que le signe « Clos d’Ambonnay » - qui correspond à un nom géographique étranger mais qui n’est pas principalement perçu comme tel – n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition en Suisse (en raison du fait qu’il correspond à un nom géographique étranger) du moment que ce même signe fait, pour les mêmes produits ou services, l’objet d’un seul enregistrement en tant que marque dans l’Etat étranger dont provient le nom géographique (c. 9.1). Si un signe n’est pas principalement perçu comme un nom géographique, c’est également en vertu des règles habituelles qu’il s’agit de déterminer si sa signification dominante entraîne l’exclusion de sa protection au sens de l’art. 2 lit. c LPM (c. 9.2). Du fait que le champ d’application de l’ATF 117 II 327 « Montparnasse » est limité aux signes perçus comme des noms géographiques étrangers, il faut encore examiner si le signe en cause est principalement perçu comme un nom géographique étranger. Ainsi, en présence d’un nom géographique qui existe tant en Suisse qu’à l’étranger, il s’agit de déterminer laquelle des significations est prédominante pour le cercle des consommateurs suisses concerné (c. 10). Si c’est une signification géographique renvoyant à la Suisse qui prédomine, c’est-à-dire si le signe n’est pas principalement perçu comme un nom géographique étranger, l’ATF 117 II 327 « Montparnasse » ne s’applique pas. Dans un tel cas, il convient d’admettre que c’est en vertu des règles habituelles qu’il s’agit de déterminer si le signe doit être exclu de la protection au sens de l’art. 2 lit. a LPM. In casu, le signe « Clos d’Ambonnay » ne désigne aucun lieu situé en Suisse, de sorte que l’application de la jurisprudence « Montparnasse » se justifie (c. 10.1). Si un signe est principalement perçu comme un nom géographique suisse, c’est également en vertu des règles habituelles qu’il convient de déterminer si le signe doit être exclu de la protection au sens de l’art. 2 lit. c LPM (c. 10.2). Enfin, si un signe est principalement perçu comme un nom géographique étranger par les cercles de consommateurs suisses concernés, l’ATF 117 II 327 « Montparnasse »  permet de retenir qu’il n’appartient pas au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM sur la base du seul fait que ce même signe fait, pour les mêmes produits ou services, l’objet – en faveur de la personne qui demande la protection de ce signe en tant que marque en Suisse – d’un seul enregistrement en tant que marque dans l’Etat étranger dont provient le nom géographique (voir c. 11.1.1 à 11.1.3). Le TAF note encore que dans l’ATF 117 II 327 « Montparnasse » qui porte sur la protection du signe « Montparnasse » en Suisse, le fait que la recourante « S.T. Dupont SA » ait son siège à Paris, dans le quartier de Montparnasse, ne paraît pas avoir de portée particulière. Il peut dès lors être considéré que le domicile ou le siège de la personne en cause n’est pas déterminant et qu’il pourrait donc être situé dans un Etat tiers (c. 11.1.3). Si un signe est principalement perçu comme un nom géographique étranger, l’ATF 117 II 327 « Montparnasse » permet par ailleurs de retenir qu’il n’est pas propre à induire en erreur au sens de l’art. 2 lit. c LPM si sa protection à titre de marque n’est revendiquée que pour des produits fabriqués dans l’Etat étranger dont provient le nom géographique (c. 11.2). Pour le TAF, il ne fait in casu aucun doute qu’au moins pour les spécialistes et une partie du grand public, le signe « Clos d’Ambonnay » est principalement perçu comme la désignation d’un vignoble ou d’un domaine de la commune française d’Ambonnay, c’est-à-dire comme un nom géographique étranger (c. 12.3.3.1). En France, pour les produits revendiqués dans le cas d’espèce, l’utilisation du signe « Clos d’Ambonnay » est réservée à la seule recourante. Par conséquent, si le signe « Clos d’Ambonnay » est principalement perçu comme la désignation d’un vignoble ou d’un domaine de la commune française d’Ambonnay, sa protection ne saurait être exclue par l’art. 2 lit. a LPM, en vertu de la jurisprudence « Montparnasse » (c. 13.1.4). Si le signe « Clos d’Ambonnay » est principalement perçu comme un nom de fantaisie, il n’appartient dès lors pas au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM (c. 13.2.3). Pour le TAF donc, que le signe « Clos d’Ambonnay » soit principalement perçu comme la désignation d’un vignoble ou d’un domaine de la commune française d’Ambonnay ou comme un nom de fantaisie, il ne saurait appartenir au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM (c. 13.3.1). Le signe « Clos d’Ambonnay » n’est au surplus pas propre à induire en erreur au sens de l’art. 2 lit. c LPM puisque la provenance de tous les produits de la classe pour lesquels la marque fait l’objet d’une demande d’enregistrement en Suisse est limitée à Ambonnay France (c. 14.1). L’enregistrement du signe « Clos d’Ambonnay » ne saurait non plus être contraire au droit en vigueur au sens de l’art. 2 lit. d LPM puisque sa protection en tant que marque ne peut pas être exclue par l’art. 22 ch. 3 ADPIC, ni non plus par l’art. 23 ch. 2 ADPIC (c. 15.2). Le recours est admis. [NT]

ADPIC (RS 0.632.20)

- Art. 23

-- ch. 2

- Art. 22

-- ch. 1

-- ch. 3

CUP (RS 0.232.04)

- Art. 6quinquies

-- lit. B ch. 3

-- lit. B ch. 2

LPM (RS 232.11)

- Art. 47

-- al. 2

-- al. 1

- Art. 30

-- al. 2 lit. c

- Art. 2

-- lit. a

30 août 2017

TAF, 30 août 2017, B-1428/2016 (d)

sic! 2/2018, p. 63 (rés.), «DEUTSCHER FUSSBALL-BUND (fig.) », ; motifs d’exclusion absolus, signe trompeur, signe contraire au droit en vigueur, signe appartenant au domaine public, nom géographique, indication géographique, indication de provenance, réputation, restriction à certains produits ou services, patronyme, raison sociale, Allemagne, Deutscher, aigle, association sportive, logo, football, cercle des destinataires pertinent, consommateur final, intermédiaires, spécialistes, degré d'attention normal, impression d'ensemble, changement de pratique de l’Institut, intérêt légitime, merchandising, recours admis ; art. 2 al. 4 Traité CH-D (1967), art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM.


DEUTSCHER FUSSBALL-BUND.PNG

DEUTSCHER FUSSBALL-BUND (fig.)

Liste des produits et services revendiqués

Une large palette de produits en classes 3, 5, 8, 9, 11, 12, 14, 16, 18, 20, 21, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33 et 34 (Etat de fait A.).

Cercle des destinataires pertinent

Étant donné la large palette de produits revendiqués, il peut être considéré que le cercle des destinataires pertinent est composé des consommateurs finaux, des intermédiaires et des spécialistes des différents domaines. Les consommateurs finaux ne font pas preuve d'un degré d'attention accru (c. 4)

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signes propres à induire en erreur (art. 2 lit. c LPM)

Conclusion

Il n'est pas contesté entre les parties que le terme allemand « deutscher » est perçu comme une indication géographique et que, par conséquent, le signe examiné est perçu comme une indication de provenance au sens de l'art. 47 LPM (c. 5). L'autorité précédente considère que la présence dans le signe examiné d'une représentation d'un aigle – susceptible d'être confondu avec l'aigle héraldique allemand – lui confère per se le caractère d'indication de provenance indirecte, et exclut ainsi le signe examiné du champ d'application de l'exception pour les associations sportives (c. 5.1). Cependant, l'IPI se fourvoie lorsqu'elle examine l'élément figuratif de manière isolée et qu'elle lui attribue, de plus, une importance considérable. Quand bien même l'aigle du signe examiné pourrait être confondu avec l'aigle héraldique allemand et que le signe contient l'élément « DEUTSCHER », l'élément verbal « FUSSBALL-BUND » domine l'impression d'ensemble. Les destinataires y voient en conséquence le logo d'une association sportive. La grande notoriété de la sélection nationale allemande contribue également à ce résultat. Les destinataires s'intéressent dans un second temps seulement à la provenance des produits, mais ils ne s’attendent pas particulièrement à une provenance d'Allemagne des produits revendiqués, car ils reconnaissent le logo de l'association sportive. L'IPI admet elle-même que le signe examiné ne suscite aucune fausse attente en lien avec l'indication de provenance (c. 5.2). Ainsi, dans l'application de l'exception en faveur des associations sportives, l'impression d'ensemble est déterminante, et un élément figuratif ne doit pas être apprécié séparément. Le signe « DEUTSCHER FUSSBALL-BUND (fig.) » ne suscite aucune fausse attente quant à la provenance des produits, quel que soit le risque de confusion de l'élément figuratif de l'aigle avec l'aigle héraldique allemand (c. 5.3). L'IPI argue que l’exception en faveur des associations sportives ne s'applique pas aux produits qui jouissent d'une réputation particulière (voitures allemandes, bières, vins et spiritueux allemands, etc.) (c. 6). La newsletter de l'IPI « changement de pratique de l’IPI concernant l’examen des marques contenant une désignation protégée par un traité bilatéral utilisée sous une forme modifiée » est une ordonnance administrative qui n'est pas une source du droit administratif et ne lie donc pas le TAF (c. 6.2). La réputation particulière d’un produit ne doit être examinée que pour déterminer si une exception aux attentes en rapport avec les indications de provenance existe. Le signe examiné est perçu comme le logo d'une association sportive, même pour les produits qui jouissent d'une réputation particulière, et n’est pas compris comme une indication de provenance (c. 6.2). Il n’est pas contesté que, par le biais du Traité entre la Confédération Suisse et la République fédérale d’Allemagne sur la protection des indications de provenance et d’autres dénominations géographiques (RS 0.232.111.191.36), l'élément « DEUTSCHER » est réservé exclusivement à des produits provenant d'Allemagne (c. 6.3). L'art. 2 al. 4 du Traité prévoit que les dispositions de l'accord ne s'appliquent pas à l'usage de patronymes homonymes à des indications géographiques et s'il existe un intérêt légitime à l'utilisation de ce patronyme. Le signe « DEUTSCHER FUSSBALL-BUND (fig.) » peut bénéficier de cette disposition. Par ailleurs, pour la demanderesse, il existe un intérêt légitime à pouvoir organiser un merchandising. Ainsi, le signe « DEUTSCHER FUSSBALLBUND (fig.) » ne suscite pas de fausses attentes au regard de la provenance des produits, même sans restreindre la liste des produits (c. 6.3). Le signe examiné n'est ni trompeur, ni contraire au droit en vigueur pour les produits revendiqués. Il n'appartient pas plus au domaine public. Le recours est admis et le signe doit être admis à l'enregistrement (c.7). [AC]

22 août 2016

TAF, 22 août 2016, B-1295/2015 (d)

sic! 2/2017 (rés.) « IBEROGAST », p. 69 ; motifs  d’exclusion absolus, signe contraire au droit, cercle des destinataires pertinent, consommateur moyen, spécialistes du domaine médical, pharmacien, indication de provenance, impression d’ensemble, risque de confusion admis, Espagne, produits pharmaceutiques ; art. 2 al. 1 Traité CH-E (1974), art. 4 al. 2 Traité CH-E (1974), art. 5 Traité CH-E (1974), art. 2 lit. d LPM.

IBEROGAST

Liste des produits et services revendiqués

Classe 5 : « Préparations pharmaceutiques; Compléments alimentaires et nutritionnels; Préparations pour les soins de santé à des fins médicales; produits diététiques et produits à usage médical; compléments diététiques de fibres alimentaires; compléments probiotiques; Compléments alimentaires à usage diététique et médical ».

Cercle des destinataires pertinent

D’une part, les consommateurs moyens et d’autre part, les spécialistes du domaine médical et les pharmaciens (c. 6.1).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe contraire au droit en vigueur, art. 2 lit. d LPM.

Conclusion

L’indication de provenance « Iberia » jouit d’une protection absolue par le biais de l’art. 2 al. 1 du Traité entre la Confédération suisse et l'État espagnol sur la protection des indications de provenance, des appellations d'origine et des dénominations similaires (RS 0.232.111.193.32). Selon l’art. 4 al. 2 de ce même traité, les dérivés espagnols ou dans l’une des langues nationales suisses du terme « Iberia » sont également protégés (c. 2.7.1). Le signe doit donc être refusé à l’enregistrement en raison de l’élément « IBERO » (c. 5.1). [AC]

03 octobre 2017

TAF, 3 octobre 2017, B-7196/2015 (d)

Motifs d’exclusion absolus, signe appartenant au domaine public, signe descriptif, cercle des destinataires pertinent, consommateur final, spécialistes de la branche du tabac, tabac, couleur, magenta, signe laudatif, indication publicitaire, besoin de libre disposition, force distinctive, recours admis ; art. 2 lit. a LPM.

MAGENTA

Liste des produits et services revendiqués

Classe 34: Tabac, brut ou manufacturé; produits de tabac; succédanés du tabac, à usage non médicinal et non curatif; cigarettes; cigarettes électroniques; liquides pour cigarettes électroniques; articles pour fumeurs, briquets pour cigarettes; cendriers; allumettes.

Cercle des destinataires pertinent

Le signe « Magenta » est revendiqué pour les produits du tabac et les produits connexes. Ces produits s'adressent aux consommateurs de plus de 16 ans ainsi qu'aux détaillants spécialisés (c. 3.1).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public, art. 2 lit a LPM

Conclusion

La marque verbale « Magenta » est une désignation de couleur. Magenta correspond à la couleur rouge aniline, un rouge clair/rouge bleuté. Le mot est utilisé aussi bien en allemand qu’en italien. Il peut donc être présumé que le magenta est également perçu par les destinataires comme une désignation de couleur. À défaut, le signe « MAGENTA » est alors compris comme un mot de fantaisie sans autre signification (c. 3.2). Selon le TF, un signe appartient généralement au domaine public s’il se réfère au type ou à la forme de l'emballage, mais pas s'il s'agit d’éléments graphiques ou de couleurs, car les possibilités sont innombrables (ATF 103 Ib 268 c. 3a ; ATF 106 II 245 c. 2d ; ATF 116 II 609 c. 2) (c. 4.2). Le critère de « l’influence sur la décision d'achat » utilisé par l’autorité précédente pour distinguer si un signe appartient ou non au domaine public n’est pas pertinent, dans la mesure où l’autorité précédente comprend l'expression « influencer la décision d'achat » au sens du caractère laudatif d'un signe. Le signe « MAGENTA » ne possède aucun caractère laudatif. Il convient d'examiner si le signe « MAGENTA » désigne le type ou la forme d'emballage des produits revendiqués (c. 4.3). En ce qui concerne un éventuel caractère descriptif de l'emballage des produits revendiqués, le TF ne s'est pas opposé à la marque « Red & White » pour des cigarettes, même si l'emballage était en rouge et blanc (ATF 103 Ib 268 c. 3b). Il ne peut en être autrement dans cette affaire. Quand bien même l'emballage des produits revendiqués serait de couleur magenta, cela n’est pas contestable sur la base du droit des marques. L’autorité précédente elle-même constate une grande variété des couleurs possible pour les produits revendiqués (c. 4.4). En ce qui concerne les indications relatives aux caractéristiques des biens revendiqués, il convient de noter qu'ils sont généralement considérés comme appartenant au domaine public s'ils sont caractéristiques de la catégorie de produits considérée. Le fait qu'il soit possible de concevoir des produits dans une certaine couleur n'est pas en soi une indication de la nature des produits, qui en ferait un signe descriptif appartenant au domaine public. L’autorité précédente a constaté que bien que pour les cigarettes, les couleurs blanc pour le papier et beige pour le filtre, ainsi que style bois et tête rouge pour les allumettes peuvent être considérées comme caractéristiques, il existe une grande variété de couleurs parmi les produits revendiqués. La couleur magenta n'est pas plus représentée que d'autres couleurs et ne peut donc pas être considérée comme caractéristique ou d'une importance particulière pour ces produits (c. 4.5). L'examen d'une marque verbale avec une désignation de couleur diffère de l’examen d’une marque de couleur, qui se fonde sur d'autres critères, éventuellement plus stricts (c. 4.5). La désignation de couleur magenta n'est pas descriptive pour les marchandises revendiquées et n'appartient donc pas au domaine public (c. 4.5). Il n’y a pas de besoin de libre disposition pour la désignation de couleur magenta pour les produits revendiqués (c. 4.6). Le recours est admis (c. 5). [AC]