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20 juin 2019

TAF, 20 juin 2019, B-2792/2017 (d)

sic ! 2/2020, p. 97 (rés.), « IGP » ; motif d’exclusion absolu, marque verbale, acronyme, indication géographique protégée, besoin de libre disposition absolu, restriction à certains produits ou services, indication géographique, usage à titre de marque, bonne foi, signe trompeur, recours rejeté ; art. 6quinquies CUP, art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. d LPM, art. 50 a LPM.

La recourante souhaite enregistrer le signe « IGP » pour divers produits en classes 2, 40 et 42 (c. A). L’instance précédente accepte son enregistrement pour les services revendiqués en classes 40 et 42, mais le refuse pour les produits revendiqués en classe 2, au motif que le signe « IGP » pouvant être compris comme la mention « indication géographique protégée » définie à l’article 50 a LPM, fait l’objet d’un besoin de libre disposition pour d’éventuels futurs concurrents (c. C). La recourante demande l’enregistrement du signe IGP pour l’ensemble des marchandises en classe 2 revendiquées à l’origine, alors que l’instance précédente s’est prononcée uniquement sur une liste restreinte dans la mesure où la possibilité d’une limitation aurait été seulement évoquée et pas proposée. Cette position est cependant contredite par les divers échanges entre les parties en cours de procédure. La limitation de la liste originelle des produits est donc valable (c. 1.2). D’un point de vue procédural, l’examen de l’ensemble des marchandises revendiquées à l’origine reviendrait à étendre l’objet du litige. L’extension de la liste des produits revendiqués à celle déposée à l’origine ne répond pas aux critères qui permettent exceptionnellement d’étendre l’objet du litige (c. 1.4). La recourante conteste l’existence d’un besoin de libre disposition absolu pour le signe « IGP », arguant qu’il est possible que celui-ci cohabite avec la mention « IGP », dans la mesure où la mesure où celle-ci est toujours utilisée en lien avec une indication géographique (c. 3.3). L’article 20 al. 1 de l'ordonannce sur les AOP ET IGP non agricoles ne requiert pas que la mention « IGP » soit toujours utilisée en lien avec une indication géographique. Il est donc possible d’utiliser la mention « IGP » seule sur un produit tant que celui-ci est décrit dans le registre des IGP. La situation est en tous points comparable avec les IGP agricoles, et de nombreux produits tels que la cuchaule, la damassine, la longeole, le vacherin mont-d-or ou le bolder sauerkäse permettent l’utilisation de la mention « AOP » sans faire référence directement à une indication géographique. Un risque de confusion entre la marque « IGP » et la mention « IGP » ne peut donc pas être exclu (c. 3.3.1). Si l’usage de la mention « IGP » n’est pas formellement un usage à titre de marque, la mention « IGP » remplit cependant de manière approximative tous les critères (caractère distinctif, usage sérieux et en Suisse) définissant un usage à titre de marque. Certes, une telle mention n’individualise pas les marchandises d’un unique producteur, mais crée une distinction entre les marchandises bénéficiant d’un enregistrement et les autres. La fonction individualisante est très proche de celle des marques (c. 3.3.2). L’usage du signe « IGP » peut en conséquence interférer avec l’usage du signe « IGP » en tant que mention (c. 3.3.3). L’instance précédente, en refusant de laisser la recourante démontrer l’imposition par l’usage du signe « IGP » au motif qu’il existe un besoin de libre disposition absolu pour les futurs concurrents, n’a pas violé les règles de la bonne foi (c. 4.3). En tout état de cause, l’intérêt public consistant à ne pas enregistrer les signes faisant l’objet d’un besoin de libre disposition absolu, ainsi que l’intérêt des concurrents à pouvoir continuer à utiliser ce signe sont prépondérants (c. 4.4). La recourante poursuit en concluant subsidiairement à l’enregistrement du signe « IGP » avec un disclaimer indiquant que le signe « IGP » ne sera pas utilisé avec des indications géographiques protégées. Ce type de mention n’est pas comparable à celle indiquant que les signes figuratifs contenant une croix ne seront pas utilisés avec du rouge ou du blanc. Il ne s’agit en effet pas de restreindre les possibilités de présenter le signe, mais bien de limiter les circonstances de son utilisation. Une telle limitation est très difficile à mettre en œuvre et ne peut être autorisée (c. 5.1). Une mention au registre excluant l’utilisation du signe pour les marchandises inscrites au registre des IGP n’est pas non plus envisageable. Certes, il s’agit d’une limitation liée aux qualités objectives des produits revendiqués, mais celle-ci n’exclut pas que le signe « IGP » soit compris comme une indication de provenance qui peut être trompeuse y compris pour des produits n’était pas inscrits au registre des IGP. Une telle limitation créerait une situation trompeuse au lieu de la régler (c. 5.2). L’instance précédente n’a pas violé les règles de procédure en ne prenant pas suffisamment en compte la durée d’utilisation du signe revendiquée au sens de l’article 6quinquies CUP, ni en rejetant un éventuel effet préjudiciel de décisions étrangères, ni en prévoyant le besoin des concurrents futurs de pouvoir utiliser la mention « IGP » alors que le paquet de législation « Swissness » n’était pas encore en vigueur au moment du dépôt. Le recours est rejeté (c. 7-8). [YB]

27 juin 2019

TAF, 27 juin 2019, B-5806/2017 (d)

sic ! 2/2020, p. 98 (rés.), « Merci » ; Motifs d’exclusion absolus, marque verbale, signe appartenant au domaine public, signe banal, indication publicitaire, besoin de libre disposition, signe laudatif, égalité de traitement, décision préjudicielle, recours rejeté ; art. 29 al. 2 Cst., art. 2 lit. a LPM.

MERCI

Enregistrement international N° 1’243’689 « MERCI »

Liste des produits et services revendiqués

Classe 35 : Services de vente en gros et au détail, en particulier services de vente par correspondance, également en ligne, portant sur tous les produits alimentaires, en particulier confiseries et chocolats.



Classe 38 : Transmissions électroniques de messages et d’images ; services de communication informatique.



Classe 40 : Impression photographique et photogravure ; impression et gravure de produits et de leurs conditionnements, en particulier avec photographies.



Classe 42 : Numérisation d’images, conception et développement de traitement d’image numériques.

Cercle des destinataires pertinent

Les services revendiqués en classe 35 s’adressent aux distributeurs spécialisés dans le commerce d’aliments, en particulier les confiseries et les chocolats.



Les services revendiqués en classe 38 et 42 s’adressent aux consommateurs finaux, mais aussi aux spécialistes de la branche de la télématique, de l’informatique ou du journalisme.



Enfin, les services revendiqués en classe 40 s’adressent aux commerçants, mais également aux consommateurs finaux (c. 4).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public, art. 2 lit. a LPM.

Conclusion

Le signe « MERCI » est compris dans toute la Suisse comme étant le mot français « merci » qui appartient au vocabulaire de base. Cependant, cela ne suffit pas pour le classer définitivement comme appartenant au domaine public. En effet, il est toujours nécessaire d’examiner l’existence d’un besoin de libre disposition en relation avec les produits ou services revendiqués (c. 6.1). Les services revendiqués se caractérisent par l’interaction entre le client et le fournisseur de la prestation. Il ne s’agit pas d’une simple opération, mais plus de plusieurs étapes entre lesquels le client exprime sa volonté. Dans ce contexte, le signe « MERCI » évoque plus une formule de politesse usuelle et attendue qu’une indication relative à la provenance industrielle d’un service (c. 6.2). Remercier un client appartient au discours publicitaire, et sa portée est plus vaste que l’expression de la politesse. Le remerciement sert à fidéliser le client, acquérir de nouveaux clients et plus généralement la promotion des affaires (c. 6.3). Un tel usage pourrait être interdit par la recourante si celle-ci était titulaire de la marque « MERCI ». Le signe « MERCI » doit en conséquence être laissé à la disposition des concurrents (c. 6.3). La recourante n’invoque aucune imposition par l’usage. Sa marque « MERCI » est certes connue en rapport avec le chocolat, mais cela n’influence pas la force distinctive originaire ou le besoin de libre disposition du signe « MERCI » (c. 6.4). La recourante invoque ensuite l’égalité de traitement (c. 7). Certaines des marques invoquées par la recourante sont trop anciennes ou ne sont pas comparables. Les marques « Merci Chef » et « Merci la mer » ne sont pas comparables, dans la mesure où ces signes divergent dans leur construction, leur signification ou les produits et services en lien avec lesquels ils sont revendiqués (c. 7.3). Le fait que la marque revendiquée ait été inscrite dans l’UE n’a pas d’effet préjudiciel sur la décision suisse (c. 8). Le recours est rejeté et l’enregistrement refusé. [YB]

08 mars 2021

TF, 8 mars 2021, 4A_361/2020 (d)

Motifs absolus d’exclusion, signe trompeur, indication de provenance, indication géographique, restriction à certains produits ou services, étendue de la protection, usage de la marque, pratique de l’Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle, Swissness, réel site administratif, Swiss Re, services immobiliers, services financiers, services d’assurances, recours rejeté ; art. 2 lit. c LPM, art. 11 al. 1 LPM, art. 12 al. 1 LPM, art. 47 al. 1 LPM, art. 47 al. 3 LPM, art. 49 al. 1 LPM, art. 49 al. 2 LPM, art. 52o OPM.

En avril 2017, la défenderesse, Swiss Re Ltd, a déposé la marque « SWISS-RE – WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT » pour des services financiers, immobiliers et d’assurances (classe 36). L’IPI a refusé l’enregistrement du signe, notamment au motif qu’il était trompeur, en raison des attentes qu’il éveillait quand à la provenance des services fournis. Selon l’IPI, l’enregistrement n’était possible qu’avec une limitation de la liste de services aux services de provenance suisse. Le Tribunal administratif fédéral a admis le recours de Swiss Re et a ordonné l’enregistrement sans restriction des services mentionnés à la provenance suisse. Selon l’art. 2 lit. c LPM, les signes propres à induire en erreur sont exclus de la protection des marques (c. 2). Un signe est propre à induire en erreur notamment s'il contient ou est constitué d’une indication géographique qui fait croire à tort aux destinataires que les produits ou services qu’il désigne proviennent du pays ou du lieu auquel l’indication se réfère (c. 2.1). Une indication de provenance est une référence directe ou indirecte à la provenance géographique des produits ou des services, y compris la référence à des propriétés ou à la qualité, en rapport avec la provenance (art. 47 al. 1 LPM). L'art. 47 al. 3 LPM interdit notamment l'utilisation d'indications de provenance inexactes (lit. a) et de marques en relation avec des produits ou services d'une autre provenance, s'il en résulte un risque de tromperie (lit. c). Selon la jurisprudence, de telles indications sont susceptibles de créer un risque de tromperie au sens de l’art. 2 lit. c LPM (c. 2.2). Compte tenu des intérêts publics en jeu, la règle selon laquelle l’IPI doit en principe enregistrer une marque en cas de doute et laisser la décision finale au juge civil ne s’applique pas dans l’évaluation du risque de tromperie au sens de l’art. 2 lit. c LPM. Par ailleurs, l’exactitude des indications de provenance est examinée de manière plus stricte que les autres faits trompeurs au sens de cette disposition. Même lorsqu’une indication de provenance peut être utilisée de manière correcte, le motif absolu d’exclusion de l’art. 2 lit. c LPM s’applique dès qu’il existe une possibilité qu’elle soit utilisée pour des produits provenant d’un autre lieu (c. 2.3). Il convient de noter que même si les développements futurs prévisibles peuvent être pris en compte dans la procédure d’enregistrement, une simple probabilité minime qu’une indication de provenance suisse puisse s’avérer trompeuse à l’avenir, par exemple en raison d’un changement de circonstances, ne suffit pas à établir un motif absolu d’exclusion au sens de l’art. 2 lit. c LPM (c. 2.4). Si l’on admet comme l’instance précédente que le signe « SWISS RE – WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT » constitue une indication de la provenance suisse des services de la défenderesse, il convient d’examiner si elle est exacte (c. 4). Selon l’art. 49 al. 1 LPM, l’indication de la provenance d’un service est exacte si elle correspond au siège de la personne qui fournit le service (lit. a) et si un réel site administratif de cette personne est sis dans le même pays (lit. b). Si une société mère remplit les conditions de la lettre a et si elle-même ou une filiale réellement contrôlée par elle et domiciliée dans le même pays remplit l’exigence visée à la lettre b, l’indication de provenance est également exacte pour les services de même nature fournis par les filiales et succursales étrangères de la société mère (art. 49 al. 2 LPM) (c. 4.1). En matière de produits, la pratique établie de longue date de l’IPI, admise par le Tribunal fédéral, est de n’enregistrer les marques contenant une indication géographique qu’avec l’ajout d’une mention dans la liste des produits revendiqués selon laquelle ces derniers doivent provenir du pays auquel se réfère l’indication de provenance. L’IPI ne disposant pas, dans le cadre de la procédure d’enregistrement, d’informations concrètes sur l’usage (actuel ou futur) du signe déposé, on peut admettre l’existence d’un risque de tromperie si une indication de provenance est enregistrée comme marque sans limiter la liste des produits. Cette restriction de la liste de produits a un effet préventif en minimisant de facto le risque de tromperie, et affecte directement l’étendue de la protection de la marque, qui dépend des produits revendiqués (art. 11 al. 1 LPM). L’usage du signe avec des produits d’une autre provenance ne constitue pas un usage de la marque et peut entraîner la perte du droit à la marque conformément à l’art. 12 al. 1 LPM (c. 5.1). Une partie de la doctrine a formulé quelques critiques à l’encontre de la jurisprudence du Tribunal fédéral (c. 5.2). L’IPI invite le Tribunal fédéral à confirmer que cette jurisprudence, qui n’est pas contestée par les parties, s’applique également aux services (c. 5.3). Lors des délibérations parlementaires relatives au projet de loi « Swissness », entré en vigueur le 1er janvier 2017, la conseillère fédérale Sommaruga a explicitement évoqué dans deux interventions la crainte que d’importants prestataires de services tels que Swiss Re puissent apparaître comme des sociétés suisses. Dans le cadre de cette révision, le Conseil fédéral a concrétisé la notion de « réel site administratif » à l’art. 52o OPM, pertinente pour déterminer la provenance d’un service selon l’art. 49 al. 1 lit. b LPM. L’IPI a annoncé qu’elle adoptera en matière de services la même pratique qu’elle adoptait jusqu’alors en matière de produits (c. 6). Comme l’a reconnu à juste titre le Tribunal administratif fédéral, cette adaptation va trop loin. La limitation de la liste des produits aux produits de provenance suisse vise à éliminer le risque, même abstrait, de tromperie sur la provenance géographique. Toutefois, s'il n'y a pas de risque de tromperie dès le départ, il n'y a aucune raison de restreindre la liste des produits ou des services. Tel est le cas en l'espèce : comme le Tribunal administratif fédéral l'a constaté de manière contraignante, sans réelle contestation de l’IPI, les conditions de l'art. 49 al. 1 LPM sont remplies, puisque le siège de la défenderesse est incontestablement en Suisse, de même que son réel site administratif. Les services qu'elle propose proviennent donc de Suisse au sens du droit des marques. L'indication de provenance est exacte au sens de l’art. 49 al. 1 LPM. Le signe « SWISS RE - WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT » est donc, même s'il devait être compris comme une indication de provenance, admissible au sens des art. 2 lit. c et 47 al. 3 LPM, et doit être inscrit au registre des marques (c. 7.1). Le traitement différent des marques selon qu'elles revendiquent une protection pour des produits ou des services est une conséquence des définitions conceptuellement différentes de la provenance pour les produits (art. 48 et suivants LPM) et pour les services (art. 49 LPM). En matière de produits, le caractère trompeur d’un signe dépend des produits pour lesquels il est utilisé, dont l’IPI n’a naturellement pas connaissance au moment de l’enregistrement. L’origine des services, en revanche, dépend du lieu dans lequel le prestataire de services a son siège social et est actif (art. 49 al. 1 LPM). En principe, tous les services fournis par le déposant ont la même provenance géographique, et le risque de tromperie peut être évalué concrètement au moment de l'enregistrement. Le fait que la marque puisse être transférée ou faire l'objet d'une licence à une date ultérieure (à une personne qui pourrait ne pas remplir les conditions de l'art. 49 LPM), comme l'objecte l'IPI, ne change rien pour le Tribunal administratif fédéral, d'autant plus que l'IPI n'a de toute façon aucune possibilité d'influencer l'usage d'une marque une fois celle-ci enregistrée. Il va de soi que l'enregistrement d'une indication de provenance en tant que marque ne change rien au fait qu'elle ne peut pas, par la suite, être utilisée de manière incorrecte. En particulier, l'utilisation d'une marque en relation avec des produits ou des services de provenance étrangère n'est pas autorisée si elle entraîne un risque de tromperie (art. 47 al. 3 lit. a et c LPM). (c. 7.2.1). Contrairement à l’IPI, le Tribunal administratif fédéral considère que la charge de travail requise pour l’examen au regard des critères spécifiés dans la réforme « Swissness » n’apparait pas fondamentalement plus importante que sous l’ancien droit. S’il existe un doute sur la question de savoir si les critères de l’art. 49 al. 1 LPM sont remplis, une restriction de la liste des services doit selon lui être faite. En cas de litige, la question de savoir s’il existe une activité administrative effective suffisante en Suisse dans un cas d’espèce relève de la compétence du juge. Le Tribunal administratif fédéral a ainsi montré une voie praticable. La position de l’IPI de faire dépendre l’enregistrement de toutes les marques de service avec indication de provenance d’une restriction géographique de la liste des services à titre de mesure de précaution et sans examen, même si l'indication de provenance est correcte et qu'il n'y a pas de risque pertinent de tromperie, est trop peu différenciée. Elle ne peut pas non plus être justifiée par le souci d'éviter un effort d'examen excessif. En outre, contrairement à ce que soutient l’IPI, on ne voit pas en quoi la limitation géographique des services seulement dans certains cas devrait affecter l’égalité et la sécurité juridiques (c. 7.2.2). La conclusion de l'instance précédente selon laquelle le signe « SWISS RE - WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT » n'est pas trompeur en ce qui concerne les services revendiqués et que, pour cette raison, il doit bénéficier d'une protection illimitée de la marque n'est ainsi pas critiquable. C'est à juste titre qu’elle a ordonné l’enregistrement du signe au registre des marques sans aucune limitation géographique de la liste des services (c. 7.4). Le recours est rejeté (c. 8). [SR]

01 décembre 2020

TF, 1er décembre 2020, 4A_235/2020 (d)

sic! 2021, p. 252-261, « Viagogo » ; concurrence déloyale, indication publicitaire fallacieuse, indication publicitaire inexacte, méthode de vente particulièrement agressive, légitimation active, intérêt public, territorialité, cercle des destinataires pertinent, consommateur moyen, degré d’attention accru, indication de prix, nom de domaine, site Internet, adresse électronique, vente de billets, Google AdWords, Viagogo, recours rejeté ; art. 2 LCD, art. 3 al. 1 lit. b LCD, art. 3 al. 1 lit. h LCD, art. 9 al. 1 LCD, art. 9 al. 2 LCD, art. 10 al. 3 LCD.

La société Viagogo, défenderesse, exploite une plateforme de revente de billets en ligne, sur laquelle elle n’agit pas en tant que vendeuse, mais permet des transactions entre utilisateurs moyennant une rémunération. Elle est titulaire du domaine www.viagogo.com, ainsi que de nombreuses sous-pages spécifiques à différents pays. Les prix des billets sont fixés par les vendeurs, et servent de base pour le calcul des frais perçus par la société. Lorsqu’un utilisateur effectue une recherche de billets et consulte une offre, il lui est indiqué que d’autres personnes regardent la même offre et que les billets sont très demandés. Après que l’utilisateur ait confirmé sa volonté d’acheter un billet, un compte à rebours apparaît. La Confédération suisse, recourante (représentée par le Secrétariat d’Etat à l’économie), considère que le comportement de la défenderesse tombe sous le coup de la LCD et de l’ordonnance sur l’indication des prix (OIP). Elle reproche à l’instance précédente d’avoir violé l’art. 10 al. 3 LCD, en posant des exigences trop élevées quant à la preuve de la légitimation active (c. 4). L’art. 10 al. 3 LCD prévoit que la Confédération peut intenter les actions prévues à l’art. 9 al. 1 et 2 LCD si elle le juge nécessaire à la protection de l’intérêt public (c. 4.1). L’introduction du droit de la Confédération d’intenter une action visait à prévenir les pratiques déloyales commises à partir de la Suisse, et non à introduire de manière générale l’applicabilité extraterritoriale de la LCD. La Confédération a pour mission de protéger la réputation de la Suisse à l’étranger, et non d’appliquer le droit suisse de la concurrence déloyale dans le monde entier, sans conditions préalables, en ce qui concerne les offres en ligne qui sont exploitées par des entreprises établies en Suisse. On ne saurait reprocher à l’instance inférieure une violation du droit fédéral lorsqu’elle a considéré que l’offre Internet mondiale de la défenderesse ne suffisait pas en elle-même à fonder la capacité d’ester en justice de la recourante. L’instance précédente a nié cette capacité concernant l’absence d’adresse électronique dans l’impressum, l’utilisation de l’expression « pas de file d’attente » dans les publicités Google et l’absence de fourniture des coordonnées des fournisseurs commerciaux, en considérant qu’il n’existait pas d’intérêt public, concernant ces problématiques, à agir sur le fondement de l’art. 10 al. 3 LCD. C’est à tort que la recourante soutient que le simple fait que la plateforme soit accessible à un grand nombre de personnes sur Internet suffit à fonder sa légitimation active (c. 4.2-4.5). Selon le jugement attaqué, les destinataires sont des consommateurs du monde entier qui achètent des billets pour des évènements sur Internet à des fins privées. Le consommateur moyen n’est pas averti, mais dispose d’un niveau de connaissances normal. Etant donné que l’achat d’un billet se fait de manière consciente, l’instance précédente considère qu’on peut admettre un degré d’attention assez élevé (c. 5.1). La recourante ne parvient pas à démontrer que l’instance précédente aurait violé le droit fédéral par ces considérations. Notamment, le fait que l’achat d’un billet pour un évènement ne représente pas un « investissement particulièrement important » ne conduit pas à un faible niveau d’attention du consommateur moyen (c. 5.2). Contrairement à ce que considère le jugement attaqué, la recourante soutient que la défenderesse a adopté un comportement trompeur tombant sous le coup des art. 2 et 3 al. 1 lit. b LCD (c. 7). La juridiction inférieure a constaté que, lors de recherches en ligne sur Google, la défenderesse apparaissait souvent avant même les canaux de distribution officiels, que ce soit de manière naturelle ou au moyen d’annonces Google. Sur le site www.viagogo.ch, la société indique notamment que les prix sont fixés par les vendeurs et peuvent être supérieurs ou inférieurs au prix d’origine, ainsi que le fait que les billets peuvent avoir été achetés à l’origine par un tiers. La recourante critique notamment les déclarations qui figurent dans les annonces Google, la position de la défenderesse dans les résultats de recherche, ainsi que le fait qu’elle ne rendrait pas les utilisateurs suffisamment attentifs à son caractère de simple plateforme de revente, et non de canal de vente officiel. Le jugement attaqué ne considère pas ces comportements comme déloyaux (c. 7.1.1). Il faut partir du principe que les destinataires moyens ne sont vraisemblablement pas familiers avec le détail du fonctionnement des recherches sur Internet, et qu’il est douteux qu’ils connaissent l’influence des AdWords sur les résultats de recherche. En revanche, la recourante ne parvient pas à invalider l'hypothèse de l'instance précédente selon laquelle il est reconnaissable pour les destinataires moyens que les annonces sont des annonces payantes, qui apparaissent généralement avant les résultats de recherche, et selon laquelle ils sont en mesure de distinguer les annonces marquées en conséquence des autres résultats de recherche. Contrairement à ce que soutient la recourante, on ne voit donc pas pourquoi de telles annonces seraient propres à faire croire au destinataire moyen qu’il a affaire au vendeur officiel de billets. Il ne peut être reproché à l’instance précédente de violer l’art. 3 al. 1 lit. b LCD ou l’art. 2 LCD (c. 7.1.2). Le jugement attaqué nie l’existence d’un devoir d’information sur les faits que les billets peuvent être personnalisés ou libellés à un autre nom et qu’ils ne donnent pas toujours accès à l’évènement. Selon lui, le destinataire moyen perçoit le site de l’intimée comme une plateforme de revente, et est bien conscient, lorsqu’il y achète des billets, que l’accès à un évènement peut poser des problèmes. Il ne s’attend pas à recevoir d’indications sur d’éventuels problèmes, car ces indications ne sont pas habituelles. Par conséquent, l’absence d’information ne constitue pas, selon l’instance précédente, un comportement déloyal (c. 7.2.1). La recourante ne peut être suivie lorsqu’elle affirme que le destinataire moyen ne reconnaît pas qu’il a affaire à une plateforme de revente, ce qui entraînerait une obligation d’information (c. 7.2.2). Pour ce motif, on ne peut non plus admettre qu’il existe une obligation d’informer sur les prix des autres vendeurs (c. 7.3), et la recourante ne parvient pas non plus à prouver la déloyauté de l’allégation « prix bas » dans les annonces Google de la défenderesse (c. 8.2). L’instance précédente a constaté que le prix réel à payer n’était pas indiqué dès le départ. Au début du processus de commande, un prix pour les billets était affiché, qui n'incluait pas encore les frais de livraison, la TVA et les frais de réservation, ajoutés par la suite. Le fait que ces éléments étaient exclus du prix initial était expressément indiqué. Selon son texte même, l’art. 3 al. 1 lit. b LCD vise aussi les indications de prix. Le jugement attaqué considère que le consommateur moyen s’intéresse, en matière de prix, au prix réel à payer. Par conséquent, ce prix doit être connu avant la conclusion du contrat. Selon l’instance précédente, il n’existe pas de pratique commerciale exigeant que le prix réel à payer soit indiqué au début du processus de vente en ligne, et l’ajout ultérieur de suppléments constitue une pratique répandue. Le consommateur moyen connaissant, au moment de la décision finale d’achat, le prix qu’il devra effectivement payer, il n’y a selon elle aucun risque de tromperie ou d’induction en erreur en raison de l’indication d’un prix initial inférieur. Le consommateur moyen comprend que, dans ce type de vente (contrairement, par exemple, à une vente dans un magasin physique) le prix initialement affiché ne correspond pas au prix définitif (c. 9.1). La recourante ne parvient pas à démontrer en quoi ces considérations seraient contraires au droit fédéral (c. 9.2). Elle reproche enfin au jugement attaqué d’avoir nié l’existence de méthodes de vente particulièrement agressives au sens de l’art. 3 al. 1 lit. h LCD (c. 10). L’instance précédente a constaté que la défenderesse utilisait sur son site les mentions « les billets sont très demandés », « il ne reste que quelques billets », « les billets sont presque tous vendus » et, sur certaines pages, un compte à rebours. La société indiquait en outre le nombre de billets disponibles, sans préciser s’ils étaient épuisés sur les autres sites de vente, mais en indiquant, lorsqu’on cliquait sur la rubrique appropriée, que l’information ne concernait que la plateforme. Selon l’instance précédente, l’utilisation d’un compte à rebours, indiquant la durée pendant laquelle les billets sélectionnés sont réservés à l’utilisateur, est habituelle pour ce type de vente, et la restriction de la durée de réservation de billets est nécessaire lorsque les billets font l’objet d’une demande particulièrement élevée, afin de garantir le bon déroulement du processus de vente. Ces éléments ne doivent par conséquent pas être qualifiés, selon elle, de méthodes de vente particulièrement agressives. Il est vrai qu’ils peuvent inciter le consommateur moyen à ne pas traîner au moment d’effectuer un achat, et qu’ils peuvent ainsi à tout le moins être désagréables pour lui, mais le consommateur est habitué à ce type de pratiques, usuelles dans le secteur, et ne se sent donc pas mis sous pression. Selon l’instance précédente, le consommateur moyen n’est pas influencé en ce qui concerne le choix de l’évènement et la décision d’achat elle-même. Il ne conclut pas le contrat en raison de la méthode de vente, mais en définitive toujours en raison de l’objet de l’achat. Il ne se trouve pas dans une situation de contrainte qui entrave sensiblement sa liberté de choix, et il sait également que des billets sont encore disponibles sur le marché secondaire auprès d'autres fournisseurs. Lorsqu'il recherche un produit, il visite ces plateformes en ligne de son propre chef. Il n'est pas pris par surprise ou mis sous pression, comme c'est le cas notamment pour le démarchage à domicile ou pour la vente par téléphone. Par conséquent, le comportement de la défenderesse ne tombe selon le jugement attaqué pas sous le coup de l’art. 3 al. 1 lit. h LCD. Il ne constitue pas non plus une tromperie au sens de l’art. 3 al. 1 lit. b LCD ou une violation de l’art. 2 LCD, les informations fournies n’ayant pas créé une impression fausse ou ambigüe quant à la disponibilité des billets (c. 10.1). La recourante ne parvient là encore pas à démontrer que les considérations du jugement attaqué son erronées (c. 10.2). Le recours est rejeté (c. 11). [SR]

04 octobre 2017

TAF, 4 octobre 2017, B-7230/2015 (f)

sic! 4/2018 « Cosmoparis » (rés.), p. 201 ; Motifs d’exclusion absolus, marque figurative, mode, signe appartenant au domaine public, consommateur moyen, degré d’attention moyen, spécialiste, degré d’attention accru, nom géographique, Paris, indication géographique, signe trompeur, indication de provenance, égalité de traitement, limitation de revendication, recours rejeté, lieu de production ; art. 8 al. 1 Cst., art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM.

COSMOPARIS

Enregistrement international n°1’133’939 « COSMOPARIS »


Enregistrement international n°1’133’939 « COSMOPARIS »

Liste des produits et services revendiqués

Liste des produits et services revendiqués :



Classe 18 : Sacs à main, Portefeuilles ;



Classe 25 : Chaussures pour hommes et pour femmes.

Cercle des destinataires pertinent

Les produits revendiqués s’adressent au consommateur moyen qui fait preuve d’un degré d’attention moyen, et aux spécialistes qui font preuve d’un degré d’attention accru (c. 6.2).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public, art. 2 lit. a LPM, signe trompeur, art. 2 lit. c LPM

Conclusion

Le signe « COSMOPARIS » est purement verbal. Composé de 4 syllabes, il n’a pas de signification propre, mais peut aisément être décomposé, comme le mot « cosmopolis » en un préfixe « COSMO » et un radical « PARIS » (c. 8.1-8.3.2). Sur le plan sémantique, l’élément « COSMO- » fait référence au cosmos (c. 8.4.1). Le radical « PARIS » peut faire référence au pluriel du mot « pari » ou à un nom de famille rare, mais c’est surtout la capitale de la France, et c’est cette signification qui sera retenue par le public pertinent (c. 8.5 et 8.10). La combinaison des éléments « COSMO » et « PARIS » n’a pas de signification particulière, mais le public y verra plus facilement une référence géographique au pluriel du mot « pari » (c. 8.6). L’élément « COSMO » n’est pas de nature à éclipser l’élément « PARIS » (c. 8.7.2-8.9). Celui-ci éveillera donc des attentes quant à la provenance géographique des produits pour les consommateurs (c. 8.7.4). La ville de Paris entretient un rapport très étroit avec la mode (c. 9.2), et son utilisation en tant que marque peut être trompeuse (c. 9.5). Certes, la mondialisation a pour effet de délocaliser les lieux de production des produits revendiqués vers l’Asie notamment, mais sans pour autant permettre d’écarter le fait que la mention d’un nom géographique soit habituellement comprise comme une indication de provenance (c. 10.2.2). Au surplus, la production de produits correspondant à ceux que revendique la recourante n’a pas cessé à Paris, et celle-ci entretient un lien particulier avec la mode (c. 10.2.3-10.2.4). Paris n’est pas un lieu inhabité (c. 10.3), n’est pas utilisé pour distinguer un modèle particulier (c. 10.4) et ne s’est pas imposé comme marque (c. 10.5), ni n’est entré dans le langage courant (c. 10.6). Aucune des exceptions à la règle d’expérience selon laquelle la mention d’un nom géographique est comprise comme une indication de provenance n’est réalisée (c. 10.7). La recourante invoque l’égalité de traitement, mais les marques qu’elle invoque sont revendiquées pour d’autres produits, et ne sont pas construites de la même manière, avec un préfixe et un radical (c. 11.3). Le recours est rejeté, c’est à juste titre que l’instance précédente a refusé l’enregistrement (c. 12), dans la mesure où la recourante n’est pas disposée à accepter de revendiquer sa marque uniquement pour des produits provenant de France (c. 9.4.1). [YB]

11 décembre 2017

TAF, 11 décembre 2017, B-5145/2015 (f)

sic! 5/2018 «The SwissCellSpa Exerience (fig.)/Swisscell» (rés.), p. 244 ; Motifs d’exclusion relatifs, cercle des destinataires pertinent, grand public, degré d’attention moyen, similarité des signes, similarité des produits et services, similarité des signes sur le plan graphique, similarité des signes sur le plan sonore, similarité des signes sur le plan sémantique, complémentarité, indication de provenance, force distinctive moyenne, force distinctive faible, risque de confusion direct, légitimation passive, qualité pour recourir, objet du litige ; art. 62 PA, art. 3 al. 1 lit. c LPM.

Marque(s) attaqué(s)
Marque(s) opposante(s)

SWISSCELL

swisscellspa.jpg

Classe 3 : « Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices ; préparations [sic] pour la peau ; tous les produits précités de provenance suisse. »



Classe 5 : « Substances diététiques à base de ou contenant de [sic] placenta de mouton ; substances diététiques à base de ou contenant de [sic] placenta végétal ; substances diététiques à base de ou contenant des extraits de poisson ; vitamines ; préparations de vitamines ; compléments vitaminés ; compléments alimentaires pour la santé ; compléments et suppléments nutritionnels à usage médical ; produits pharmaceutiques pour les soins de la peau ; compléments alimentaires minéraux ; produits pharmaceutiques [sic] pour la thérapie par des cellules vivantes ; produits pharmaceutiques et vétérinaires ; produits hygiéniques pour la médecine ; substances diététiques [sic] à usage médical, aliments pour bébés ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour plomber les dents et pour empreinte [sic] dentaires ; désinfectants ; produits pour la destruction des animaux nuisibles ; fongicides, herbicides ; tous les produits précités de provenance suisse. »



Classe 44 : « Services médicaux ; services vétérinaires ; soins d’hygiène et de beauté pur [sic] êtres humains ou pour animaux ; services d’agriculture, d’horticulture et de sylviculture. »

Classe 3 : « Cosmétiques, savons, parfumerie, huiles essentielles ; déodorants corporels ; crèmes, laits, lotions, gels, poudres, sérums, masques et gommages à usage cosmétique pour les soins du visage et du corps ; crèmes, lotions et sérums restructurant à usage cosmétique ; préparations cosmétiques pour l’amincissement ; préparations cosmétiques pour la douche et/ou le bain ; laits, gels et huiles de bronzage et après-soleil ; produits de maquillage ; produits de démaquillage ; produits dépilatoires ; produits pour le soin et le nettoyage des cheveux, notamment shampooings, crèmes, masques, sérums, mousses ; teinture pour les cheveux ; tous les produits précités de provenance suisse. »



Classe 35 : « Services de publicité ; services rendus par un franchiseur, à savoir aide dans l’exploitation ou la direction d’entreprises commerciales, mise à disposition de savoir-faire commercial [franchisage], les services précités dans le domaine des soins d’hygiène et de beauté ; mise à disposition d’informations sur Internet en matière de produits de beauté à des fins de publicité et de vente. »



Classe 41 : « Cours et formation dans le domaine des soins d’hygiène et de beauté ; cours et formation pour l’utilisation et l’application de produits cosmétiques ; cours et formation pour le personnel de vente de produits cosmétiques. »



Classe 44 : « Soins d’hygiène et de beauté pour êtres humains ; services de spa, services de saunas, services de massage, services de manucure, services de pédicure, services de maquillage ; services de physiothérapie ; instituts de beauté ; conseils en matière de soins d’hygiène et de beauté ; mise à disposition d’informations sur Internet en matière de soins de beauté ; conseils en matière d’alimentation. »

Contenu de la décision

Produits faisant l’objet de l’opposition

Dans sa duplique auprès de l’instance précédente, la marque attaquée demande que sa demande soit limitée aux produits suivants :



Classe 3 : « Cosmétiques, préparations [sic] pour la peau ; tous les produits précités de provenance suisse. »



Classe 5 : « Substances diététiques à base de ou contenant de [sic] placenta de mouton ; substances diététiques à base de ou contenant de [sic] placenta végétal ; substances diététiques à base de ou contenant des extraits de poisson ; compléments alimentaires pour la santé ; compléments et suppléments nutritionnels à usage médical ; produits pharmaceutiques pour les soins de la peau ; compléments alimentaires minéraux ; produits pharmaceutiques pour la thérapie par des cellules vivantes ; produits pharmaceutiques ; substances diététiques [sic] à usage médical ; tous les produits précités de provenance suisse. » (c. A.b.e.b).

L’instance précédente admet l’opposition pour les produits en classe 3 et la rejette pour les produits en classe 5 (c. A.b.f)

Cercle des destinataires pertinent et degré d’attention des consommateurs

Les services d’hygiène en classe 44 s’adressent avant tout au grand public qui fait preuve d’un degré d’attention moyen (c. 5.2.1). Les produits cosmétiques revendiqués en classe 3 sont destinés au grand public. La jurisprudence est partagée en lien avec le degré d’attention des consommateurs. La question peut être laissée ouverte dans la mesure où c’est le degré d’attention des consommateurs des services de la marque opposante qui est déterminant (c. 5.2.2.2-5.2.2.3).

Identité/similarité des produits et services

Les services de soins d’hygiène et de beauté sont fournis soit dans des locaux indépendants, soit dans des locaux appartenant à des structures offrant d’autres services, tandis que les produits cosmétiques en classe 3 sont vendus dans des boutiques plus ou moins spécialisées ou des grandes surfaces (c. 6.3.1). Bien qu’il s’agisse d’une part de produits et d’autre part de services, ceux-ci partagent de nombreux points communs. Ils impliquent un même savoir-faire et répondent à un même besoin. Bien qu’ils ne soient pas substituables, et n’appartiennent pas à la même classe selon la classification de Nice ils entretiennent un rapport étroit de complémentarité et partagent les mêmes canaux de distribution. L’ancienne jurisprudence rendu par la CREPI puis le TAF retenant qu’une similarité entre produits cosmétiques et sois d’hygiène n’existe que si la marque opposante jouit d’un degré élevé de notoriété et qu’il existe une forte similarité entre les signes n’est pas pertinente dans la mesure où de telles considérations ne font pas partie des indices énumérés par la jurisprudence (c. 6.3.2) (c. 6.3.3.3). Les produits cosmétiques ne sont pas seulement des accessoires nécessaires aux prestations de soin et d’hygiène (c. 6.3.4). Les produits et services revendiqués peuvent être considérés comme similaires (c. 6.3.6).

Similarité des signes

Les éléments graphiques de la marque opposante ne sont pas frappants. L’élément principal est donc l’élément verbal « SwissCellSpa », repris dans la marque attaquée (c. 8.1.1.2). Les éléments « The », et « Swiss » appartiennent au vocabulaire anglais de base contrairement au terme « Cell », qui est cependant très proche de du début des mots correspondants en allemand, français et italien et qui, sans être descriptifs, ne sont pas complètement étrangers aux domaines des services et des produits revendiqués (c. 8.2.1.1-8.2.1.3). Les éléments communs « Swiss » et « cell » seront compris de la même manière pour chaque signe. Ceux-ci sont donc similaires sur le plan sémantique (c. 8.2-8.2.1.4). Au niveau sonore, les deux signes seront perçus comme des uns ensemble de mots anglais, leur prononciation sera identique pour le sous-élément « SwissCell » (c. 8.3.2). La marque attaquée reprend à l’identique les deux premiers sous-éléments de la marque opposante. De plus, les éléments « Swiss » et « Cell » sont accolés dans chaque marque. Une forte similarité doit dès lors être admise (c. 10.2.4).

Force distinctive des signes opposés

Force distinctive de la marque attaquée


L’élément « Swiss » dispose d’une force distinctive faible, tandis que l’élément « cell » dispose d’une force distinctive moyenne (c. 9.2-9.2.1.2). Dans son ensemble le signe « SWISSCELL » dispose d’une force distinctive moyenne (c. 9.2.2 et 11.3.2).



Force distinctive de la marque opposante et champ de protection



Les éléments « the » « swiss » et « experience » sont descriptifs. Seul élément « cell » dispose d’une force distinctive moyenne (c. 9.1-9.1.4 et 11.3.1).

Risques de confusion admis ou rejetés / motifs

La forte similarité des signes ainsi que la similarité des produits et services et la force distinctive normale des signes revendiqués permettent de retenir un risque de confusion direct, malgré un degré d’attention moyen des destinataires. Le TF peut laisser ouverte la question de savoir si l’usage de la marque opposante a été rendu vraisemblable pour une partie ou pour l’ensemble des services revendiqués en classe 3 ou 44 (c. 12.3.2).

Divers

Le transfert de la marque opposante ou attaquée en cours d’opposition n’a pas d’influence sur la légitimation active ou passive (c. 1.3). En l’espèce, la recourante demeure partie à la procédure. Étant contractuellement tenue de garantir l’existence de la marque attaquée envers le cessionnaire, elle dispose toujours de la qualité pour recourir (c. 1.4).



Dans son recours, la marque attaquée limite l’objet de la contestation à l’opposition admise par l’instance précédente pour les produits revendiqués en classe 3 (c. 2.2-2.2.2.1).



L’intimée, en revanche, n’a pas déposé de recours contre la décision attaquée, en particulier lorsque celle-ci rejette l’opposition pour les produits revendiqués en classe 5 (c. 2.2.2.2). Le fait de conclure dans sa réponse au recours à l’annulation de cette partie de la décision est tardif (c. 2.2.2.2). Le TAF ne peut modifier la décision attaquée au sens de l’article 62 PA pour se lancer dans l’examen d’une partie de la décision attaquée qui n’est pas comprise dans l’objet du litige (c. 3.3.3).

Conclusion : le signe attaqué est enregistré / refusé

Le recours est rejeté, et l’opposition admise pour les produits revendiqués en classe 3.[YB]

15 mars 2016

TAF, 15 mars 2016, B-4710/2014 (d)

sic! 6/2016, p. 348 (rés.)

 « SH Messe (fig.); TG Messe (fig.)»; Motifs d’exclusion absolus, marque figurative, signe appartenant au domaine public, signe banal, signe descriptive, indication géographique, signe trompeur, cercle des destinataires pertinent, égalité de traitement, allemande ; art. 8 Cst., art. 2 lit. a LPM.

SHMESSE (fig.) 

Demande d’enregistrement N°62039/2011 « SHMESSE (fig.) »


Demande d’enregistrement N°62039/2011 « SHMESSE (fig.) »

Liste des produits et services revendiqués

Classe 35 : Büroarbeiten; Sammeln von Daten in Computerdatenbanken.



Classe 38 : Telekommunikation; Übermittlung von Daten und Informationen in Computernetzwerken und sonstigen elektronischen Medien, Telekommunikation mittels Plattformen und Portalen im Internet; Bereitstellung des Zugriffs auf Programme der Da-tenverarbeitung im Internet; Bereitstellung des Zugriffs auf Daten und Informationen im Internet und sonstigen elektronischen Medien, insbesondere in Handels- und Geschäftsangelegenheiten und im Bereich Werbung.



Classe 41 :

Veröffentlichung und Herausgabe von Publikationen (ausgenommen für Werbezwecke), insbesondere von Zeitschriften, auch über das Internet und sonstige elektronischen Medien.



Classe 42 : Erstellen von Programmen für die Datenverarbeitung; Wissenschaftliche und technologische Dienstleistungen und Forschungsarbeiten im Bereich des Messewesens; Konstruktionsplanung; elektronische Datenspeicherung.

Cercle des destinataires pertinent

Les « messe » sont des évènements regroupant de nombreuses entreprises, associations et organismes publics différents. Le cercle des destinataires pertinent est ainsi un très large public adulte (c. 4.3).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public, art. 2 lit. a LPM.

Conclusion

Le mot allemand « messe » fait référence à une exposition au caractère commercial proposant une offre globale d’un ou plusieurs secteurs industriels. Les « messe » ont lieu régulièrement d’un point de vue temporel et géographique. Les clients sont habitués à faire un lien entre le lieu géographique et l’exposition elle-même (c. 4.2). Associés à l’élément « MESSE », les éléments « SH- » et « TG- » sont interprétés comme des indications géographiques (c. 4.4). Les signes revendiqués sont descriptifs pour les produits revendiqués en classe 16, dans la mesure où ceux-ci font référence à leur lieu de vente ou à leur contenu. Pour les services revendiqués, les destinataires verront sans effort particulier une allusion à l’origine géographique de l’exposition en question (c. 4.5). La recourante invoque l’égalité de traitement. Les marques invoquées par la recourante ne sont cependant pas comparables dans la mesure où elles contiennent des éléments graphiques ou verbaux supplémentaires (c. 5). C’est à juste titre que l’instance précédente a rejeté l’enregistrement pour les produits revendiqués. Le recours est rejeté (c.7). [YB]

25 mai 2020

TAF, 25 mai 2020, B-5011/2018 (d)

Motif d’exclusion absolu, marque figurative, signe trompeur, immobilier, services d’assurances, services financiers, droit à un procès équitable, nom géographique, indication de provenance, obligation de motiver, motivation de la décision, vocabulaire anglais de base, swiss, slogan, signe laudatif, swissness, secondary meaning, recours admis ; art. 29 Cst. art. 2 lit. c LPM, art. 47 al. 2 LPM, art. 49 al. 1 LPM ; cf. N° 1225 (arrêt du TF dans cette affaire).

SWISS RE - WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT

Demande d'enregistrement 54931/2017


Demande d’enregistrement N° 54931/2017 « SWISS RE – WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT »

Liste des produits et services revendiqués

Classe 36 : Geldgeschäfte ; Immobilienwesen ; Finanzwesen ; Versicherungswesen.

Cercle des destinataires pertinent

Les services revendiqués s’adressent aux spécialistes ainsi qu’à un large public intéressé par les assurances et les services financiers (c. 4).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe trompeur, art. 2 lit. c LPM.

Conclusion

La recourante considère que son droit à un procès équitable a été violé. L’instance précédente n’aurait pas motivé sa décision selon laquelle aucune exception permettant de ne pas considérer un nom géographique comme une indication de provenance trompeuse, en particulier pour les services (c. 2.1). L’instance précédente peut se contenter de motiver les points essentiels à sa décision. En l’espèce elle se contente de retenir que la constellation d’exceptions prévues par la jurisprudence à l’article 47 al. 2 LPM n’est pas réalisée sans s’attarder sur les arguments de la recourante. Elle n’examine pas en détail non plus si la demande d’enregistrement respecte les règles de l’article 49 LPM. Il s’agit bien d’une violation du droit à un procès équitable (c. 2.3-2.4). Celle-ci peut toutefois être guérie par le TAF (c. 2.5). Le caractère trompeur d’une désignation géographique doit être examiné à la lumière des circonstances du cas particulier (c. 3.5). Le signe revendiqué est composé (c. 5). Celui-ci peut être divisé en deux parties, « SWISS RE » qui correspond à la raison sociale de la recourante, et le slogan « WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT ». Le mot « swiss » appartient au vocabulaire anglais de base et est compris sans effort comme le substantif « Suisse » ou l’adjectif « suisse ». Il s’agit d’une indication de provenance géographique claire, également en lien avec les produits revendiqués (c. 5.2). L’élément « RE » correspond au préfixe « re » qui signifie « à nouveau » ou « en retour ». L’élément « SWISS RE » sera ainsi compris par les destinataires pertinents comme « réassurance suisse » (c. 5.3). L’élément « WE MAKE THE WORLD MORE RESILIENT » est un slogan laudatif qui n’efface pas l’élément « SWISS RE », bien visible et en première position (c. 5.5). L’utilisation du mot « swiss » est ainsi considérée par les destinataires comme une indication de provenance géographique claire (c. 5.6). En l’espèce, la recourante respecte les conditions prévues par l’article 49 al. 1 LPM et n’est en conséquence pas trompeuse (c. 6.3). Certes, la législation antérieure au projet « swissness » prévoyait que l’autorité pouvait ajouter d’autres conditions à l’enregistrement d’une marque contenant une indication géographique qu’elle considérait comme trompeuse. Mais cette disposition a été supprimée par le projet qui a pour but de renforcer la protection des indications de provenance suisses ainsi que la sécurité du droit (c. 6.2). Avec la réforme « swissness », l’instance précédente a modifié sa pratique en lien avec l’enregistrement de marques géographiques pour des services, notamment en exigeant de manière préventive de limiter la liste des services revendiqués aux services provenant du lieu en question (c. 6.4). Un tel durcissement n’est pas nécessaire. L’instance précédente doit, comme auparavant, déterminer si l’indication géographique répond aux critères de l’article 49 al. 1 LPM. Une limitation de la liste des services revendiqués peut être envisagée en cas de doute, par exemple pour des indications géographiques étrangères (6.4). En l’espèce, le signe revendiqué n’est pas trompeur dans la mesure où il respecte les critères de l’article 49 al. 1 (c. 6.5). Il n’est dès lors pas nécessaire d’examiner si le signe revendiqué a acquis un « secondary meaning » propre à ôter le caractère potentiellement trompeur du signe (c. 7). Le recours est admis (c. 8). [YB]

25 août 2021

TAF, 25 août 2021, B-2608/2019 (d)

Motifs d’exclusion absolus, signe trompeur, indication de provenance, procédure, qualité pour agir, qualité pour recourir en matière d’enregistrement de marque, décision, égalité de traitement, garantie de l’accès au juge, opposition, procédure de radiation ; art. 8 Cst., art. 29a Cst., art. 31 LTAF, art. 32 LTAF, art. 5 PA, art. 44 PA, , art. 48 al. 1 lit. a PA, art. 48 al. 1 lit. b PA, art. 48 al. 1 lit. c PA, art. 2 lit. c LPM, art. 3 LPM, art. 35a LPM, art. 52 LPM, art. 59c LBI, art. 10 Ordonnance sur les AOP et les IGP.

En novembre 2018, les deux parties déposent chacune une demande d’enregistrement de la marque « HISPANO SUIZA » pour des produits en classe 12. L’instance précédente a admis la marque de l’intimée avec une limitation de la liste des produits revendiqués, et provisoirement rejeté la demande de la recourante. Celle-ci a par la suite déposé une demande de radiation contre l’enregistrement de la marque de l’intimée. Elle a également fait opposition à son enregistrement. La présente décision ne porte que sur la procédure d’enregistrement de la marque de l’intimée (état de fait A.). Le 16 avril 2019, la marque « HISPANO SUIZA » est enregistrée pour des produits en classe 12 et publiée sur Swissreg (état de fait B – B.e.). La recourante s’oppose à la décision de l’IPI d’enregistrer la marque de l’intimée et demande son annulation auprès du TAF. Elle fait valoir que l’enregistrement d’une marque est une décision au sens de l’art. 5 PA, qu’en tant que tiers à la procédure elle n’a pas pu participer à celle-ci et qu’ayant déposé une demande d’enregistrement pour un signe identique, elle est particulièrement touchée par la décision (état de fait D.). Le TAF examine librement les questions relatives à l’entrée en matière (c. 1). Selon l’art. 31 LTAF, le TAF connaît des recours contre les décisions au sens de l’art. 5 PA (c. 1.1). La décision d’enregistrement d’une marque par l’IPI est une décision au sens de l’art. 5 PA (c. 1.2). L’intimée et l’instance précédente contestent la capacité pour des tiers de recourir contre l’enregistrement d’une marque (c. 2.2). La LPM ne prévoirait pas la possibilité pour des tiers de recourir contre l’enregistrement et une telle possibilité était exclue dans l’ancien droit. En outre, la LPM, contrairement à l’art. 59c LBI ou à l’art. 10 de l’ordonnance sur les AOP et les IGP, ne prévoit pas de procédure d’opposition fondée sur des motifs d’exclusion absolus. L’art. 52 LPM donne la compétence exclusive au juge civil pour juger de la nullité ou de l’illégalité d’une marque. En outre, le recours selon l’art 44 PA n’est pas envisageable, dans la mesure où l’action civile garantit le droit constitutionnel à une voie de droit. Le fait que la décision d’enregistrer une marque ne fasse pas partie de la liste des exceptions de l’art. 32 LTAF ne serait pas pertinent (c. 2.3). Pour le TAF, l’art. 29a Cst garantit à chaque personne le droit d’être jugée par une autorité judiciaire en cas de litige. L’art. 44 PA a été introduit dans le but de combler les lacunes concernant l’accès au juge (c. 2.4). Le fait que la LPM soit muette concernant le droit pour des tiers de contester l’enregistrement d’une marque devant le TAF n’est pas pertinent. C’est en effet l’art. 31 LTAF qui a remplacé les diverses voies de recours alors mentionnées dans les lois spéciales, telles que la LPM, ouvrant en principe une voie de recours contre les décisions au sens de l’art. 5 PA. L’absence de disposition spécifique dans la LPM, contrairement à l’OAOP-IGP ou la LBI ne permet pas de déduire, en positif ou en négatif, l’absence de compétence du TAF lorsque les tiers contestent l’enregistrement d’une marque. Les références à l’ancien droit ne sont plus pertinentes, la justice et l’organisation judiciaire fédérale ayant été réformées en profondeur entre-temps (c. 2.5). Le droit en vigueur ne contient aucune disposition excluant le recours d’un tiers au TAF contre la décision de l’instance précédente d’enregistrer une marque. La jurisprudence ne s’y oppose pas non plus. Le fait qu’il existe des procédures d’opposition ou de radiation qui poursuivent des buts différents, n’exclue pas non plus la compétence du TAF en la matière. Enfin, le recours à la voie civile n’exclut pas fondamentalement le recours administratif ; la tenue des registres publics étant de nature administrative et devant être en principe examinée uniformément dans le cadre de la procédure administrative (c. 2.6). Le nombre de marques enregistrées et le risque qu’un afflux de recours contre les enregistrements ne vienne saper la légitimité du juge civil ne jouent pas de rôle dans l’examen de la compétence du TAF (c. 2.7). En conséquence, le TAF est compétent pour juger du présent recours (c. 2.8). Lors de la procédure d’enregistrement, les tiers n’ont aucune possibilité d’y participer avant la publication de l’enregistrement dans Swissreg. La protection juridique contre l’enregistrement d’une marque ne saurait être liée à la participation à la procédure (c. 3.4). En l’espèce, la recourante s’est manifestée dès qu’elle a eu la possibilité de le faire (c. 3.2). Concernant l’art. 48 al. Lit. b PA, la recourante doit démontrer un intérêt personnel qui se distingue de l’intérêt général des autres citoyens. La simple crainte d’une concurrence accrue n’est pas suffisante. Le besoin d’une protection spécifique et qualifiée doit être nécessaire. Le concurrent doit donc démontrer en quoi la décision de l’instance précédente traite ses concurrents de manière privilégiée. L’intérêt général à l’application correcte du droit ne fonde pas la qualité pour recourir (c. 3.5.1). En l’espèce, le fait que la recourante porte le signe « hispano Suiza » dans sa raison sociale, qu’elle dispose de nombreuses marques étrangères avec ces éléments et qu’elle ait déposé une demande d’enregistrement en Suisse pour la marque « HISPANO SUIZA » la met certes dans un rapport de concurrence avec l’intimée, mais ne permet pas de conclure qu’elle est spécialement atteinte par la décision (c. 3.5.2). La recourante considère qu’elle est particulièrement touchée parce que l’instance précédente a admis à tort la protection en la limitant aux produits d’origine espagnole. L’éventuelle application erronée du droit ne confère pas la qualité pour recourir à la recourante. De plus, celle-ci n’a pas de proximité particulière concernant les indications de provenance « HISPANO » et « SUIZA », qui présuppose en règle générale que le recourant soit mieux habilité que le déposant à utiliser un signe (c.3.5.3). En conséquence, la recourante n’est pas matériellement lésée par la décision de l’instance inférieure. L’éventuelle révocation de l’enregistrement n’aurait pas pour effet de conduire à l’enregistrement de sa propre marque. De plus, l’enregistrement ne l’empêche pas de continuer à utiliser sa raison sociale, ni ne constitue une entrave économique (c. 3.5.6). La recourante invoque l’égalité de traitement, arguant que la demande de l’intimée a été privilégiée par l’instance précédente. Certes, les deux parties ont déposé une demande d’enregistrement pour la même marque verbale et pour des produits identiques. Chacune des parties a reçu la même objection de la part de l’instance précédente concernant le caractère trompeur du signe et les différences de traitement résultent du fait que l’intimée a demandé un examen accéléré, ce que n’a pas fait la recourante. La manière dont l’intimée a utilisé les moyens procéduraux à sa disposition ne constitue pas une inégalité de traitement (c. 3.5.4). La recourante ne parvient pas à justifier sa légitimation pour recourir. Le TAF n’entre donc pas en matière sur le recours (c. 3.5.6 et 3.5.7). Les procédures engagées par les concurrents contre les enregistrements qui se limitent à faire valoir des motifs absolus d’exclusion doivent satisfaire à des exigences de légitimation plus strictes que pour une procédure d’opposition, soit une proximité particulière avec l’affaire litigieuse et un intérêt de protection de droit public (c. 3.5.8). [YB]

26 août 2021

TAF, 26 août 2021, B-2597/2020 (f)

Demande de radiation d’une marque, action en radiation d’une marque, défaut d’usage, fardeau de la preuve, fait négatif, preuve du défaut d’usage, vraisemblance, principe de l’épuisement, nom géographique, indication de provenance géographique, limitation des revendications, usage par représentation, usage pour l’exportation, recours partiellement admis ; art. 35b al.1 lit. a LPM, art. 47 al. 2 LPM.

L’intimée a déposé auprès de l’instance précédente entre autres une demande de radiation totale pour les marques « U UNIVERSAL GENEVE » (enregistrement N°329720 du 3 avril 1984 pour des montres, leurs parties et des bijoux en classe 14), et « UNIVERSAL GENEVE » (enregistrement N°410354 du 30 mai 1994 pour en particulier des montres en classe 14) (c. A – A.c). La titulaire des marques en cause recourt contre la décision de radiation de l’IPI (c. A.d). Selon l’art. 35b al. 1 let. a LPM, c’est au requérant de rendre vraisemblable le défaut d’usage de la marque attaquée. Comme il s’agit d’un fait négatif, la preuve directe ne peut être apportée (c. 5.1.1). Dans une telle configuration, le requérant doit rendre, au moyen d’un faisceau d’indices, non seulement possible mais aussi probable le fait que la marque n’est plus utilisée (c. 5.1.2). Si le requérant rend vraisemblable le non-usage de la marque, et qu’en même temps le titulaire rend vraisemblable cet usage, la demande de radiation doit être rejetée (c. 5.3). Les deux marques étant déposées pour des produits en classe 14 uniquement, les services que la recourante prétend offrir ne sont pas protégés. Le principe de l’épuisement s’applique également au droit des marques, en particulier lorsqu’il s’agit de démontrer l’usage sérieux de la marque. A ce titre, la recourante ne peut se prévaloir de l’activité des maisons de vente aux enchères pour elle-même (c. 6.2.2). Les marques en cause contiennent le nom géographique « GENEVE » (c. 7 – 7-2.2). Les limitations quant à l’aire géographique des produits revendiqués ont un effet direct sur le champ de protection de la marque. L’usage de la marque en lien avec des produits provenant d’un autre pays n’entre pas en ligne de compte (c. 6.2.3). En l’espèce, l’élément « GENEVE » doit être considéré comme une indication de provenance au sens de l’art. 47 LPM (c. 7.3.2). Compte tenu de la restriction inscrite au registre des marques, les produits revendiqués par les deux marques doivent remplir les critères applicables à des produits de provenance suisse pour se revendiquer de provenance genevoise (c. 7.3.2). Concernant les montres, la révision de l’ordonnance sur l’utilisation du nom « Suisse » pour les montres n’est en l’espèce pas applicable (c. 7.4.1). Les éléments de preuve déposés par la recourante permettent de constater que les mouvements étaient suisses, tout comme l’assemblage et le contrôle des montres. Celles-ci peuvent donc rendre vraisemblable l’usage de la marque (c. 7.4.2). Concernant les parties de montre, la recourante ne présente aucune facture d’acquisition et ne parvient pas à rendre l’usage vraisemblable (c. 7.5.2). Les factures de la société ETA pour des mouvements de montres acquis durant la période de référence permettent cependant d’attester la provenance suisse pour les mouvements de montre (c. 7.5.3). Toutes les montres ont été vendues en Asie (c. 8.3.2.1). Les parties de montres sont quant à elles commercialisées en Suisse et, s’agissant de biens économiquement indépendants, sont compatibles avec l’usage pour l’exportation des montres, au contraire des mouvements (c. 8.3.2.2). La condition d’exclusivité est ainsi remplie pour les montres (c. 8.3.2.3). Concernant la condition d’utilisation hors de la sphère interne du titulaire de la marque, le fait qu’un transfert ait lieu à l’intérieur du groupe d’entreprise dont le titulaire fait partie n’est pas décisif si le produit est sorti du groupe pour être proposé à la vente par une filiale étrangère (c. 9.1 – 9.2.2). Les marques ont bien été utilisées telles qu’enregistrées (10.1.2), sauf pour les mouvements de montres pour lesquels il est exclu de retenir un usage sérieux (c. 10.1.3). Les factures déposées par la recourante sont régulières et conséquentes (pour des ventes de montres dans un segment de prix supérieur). Le TAF retient donc le sérieux de l’usage pour les montres (c. 10.2.2). Contrairement à l’avis de l’instance précédente, la recourante parvient à démontrer l’usage sérieux de ses marques en lien avec des montres. La décision de radier l’enregistrement pour les parties de montres est cependant confirmée (c. 12.1). Le recours est partiellement admis (c. 12.2).[YB]

02 juin 2021

TAF, 2 juin 2021 B-497/2019 (f)

Absinthe, eau-de-vie, boissons alcoolisées, indication géographique protégée, Fée verte, La Bleue, association, qualité pour agir des associations, Office fédéral de l’agriculture, preuve, fardeau de la preuve, IGP, opposition, groupement de producteurs, groupement représentatif, représentativité ; art. 1 LAlc, art. 5 al. 1 Ordonnance sur les AOP et les IGP, art. 5 al. 2 let. b Ordonnance sur les AOP et les IGP ; cf N°959, TAF, 8 août 2014, B-4820/2020 (f).

La notion de « producteurs » au sens de l’art. 5 al. 1 de l’Ordonnance sur les AOP et les IGP englobe les producteurs, les transformateurs et les élaborateurs. Elle correspond à la notion d’« opérateurs » que l’OFAG utilise pour désigner l’ensemble des acteurs qui interviennent dans la création d’un produit, jusqu’à ce que celui-ci porte la dénomination protégée. (c. 4.1.1). Cette notion très connotée commercialement correspond au but de l’ordonnance. Dans ce cadre, un producteur au sens de l’ordonnance est celui qui contribue à la création du produit dans la perspective de sa commercialisation et pas celui qui le créée uniquement à des fins personnelles (c. 4.1.2.1 et 4.1.2.2). Un groupement est « représentatif », au sens de l’art 5 de l’ordonnance, lorsqu’il reflète de manière appropriée chaque catégorie d’acteurs intervenant dans la création du produit et dont les intérêts économiques sont touchés par la demande d’enregistrement (c. 4.2.1.1). L’art. 5 al. 2 Ordonnance sur les AOP et les IGP prévoit notamment qu’un groupement est représentatif si ses membres représentent au moins 60% des acteurs au sein de chacune des catégories d’opérateurs correspondant aux principaux stades de création du produit (c. 4.2.2). Pour une indication géographique, le groupement ne doit pas être représentatif de tous les stades de la production mais au moins de ceux qui doivent se dérouler dans l’aire géographique déterminée. (c. 4.2.3 – 4.2.3.2). Le fardeau de la preuve de la représentativité incombe au demandeur qui supporte les conséquences de leurs absences ou de leur insuffisance (c. 5.1.1 – 5.1.3). La commercialisation de l’absinthe, en tant que boisson distillée, est régie par la LAlc et son ordonnance. Ainsi, le droit de fabriquer et de rectifier les boissons distillées appartient à la Confédération et fait l’objet de concessions (c. 6.2). Celles-ci sont regroupées en trois catégories : Les distilleries professionnelles, les distilleries à façon (qui ne travaillent pas pour leur propre compte mais distillent les produits d’autres opérateurs), et les distilleries agricoles (qui concernent la production non industrielle d’eau-de-vie à partir de matière provenant exclusivement de la récolte indigène ou cueillie à l’état sauvage par le producteur) (c. 6 – 6.3.2). Le Cahier des charges divise la production de l’appellation « Absinthe du Val-de-Travers » en six étapes (macération, distillation, coloration, réduction, aération et filtration) (c. 7.1.2). Il est ainsi possible de distinguer, au sein du groupement représentatif les producteurs au sens strict (qui cultivent et sèchent les plantes) et les transformateurs et élaborateurs (qui procèdent aux étapes de transformation décrites dans le cahier des charges) (c. 7.2.1.2 – 7.2.2). En l’espèce, l’instance précédente a estimé que l’intimée (l’association des Artisans-distillateurs d’Absinthe du Val-de-Travers) était représentative dans la mesure où elle regroupait 18 concessions professionnelles ou à façon sur un total de 29 (c. 8). Elle se focalise ainsi uniquement sur l’étape de distillation (c. 9). Si cette étape doit bien être prise en compte, les autres n’en sont pas moins importantes dans la mesure où elles sont décrites dans le cahier des charges et doivent avoir lieu dans l’aire déterminée. En particulier, l’Absinthe comporte une étape de macération qui laisse dans une certaine mesure à chaque élaborateur la possibilité de suivre la recette transmise de génération en génération dans une cadre familial. (c. 9.1 – 9.1.2.2). Ceux-ci contribuent ainsi fortement à donner des caractéristiques propres au produit. L’intimée elle-même concède que son cahier des charges vise à prendre en compte la grande diversité aromatique aujourd’hui présente (c. 9.2.1 – 9.2.1.2). Ainsi, même s’ils ne distillent pas eux-mêmes, les acteurs qui produisent de l’absinthe en participant aux diverses étapes du Cahier des charges contribuent de manière déterminante à la production d’absinthe (c. 9.2.2). L’Ordonnance sur les AOP et les IGP ne vise que les entités qui interviennent avec une intention commerciale (c. 10.2), ce qui exclut les particuliers qui ne produisent que pour leur consommation personnelle (c. 10.2.1.1). Il ne faut cependant pas en déduire automatiquement que ceux qui ne procèdent pas eux-mêmes à la distillation n’ont pas d’intentions commerciales (c. 10.2.1.2). De plus, certains producteurs agissent commercialement bien qu’ils recourent à une distillerie à façon (c. 10.2.2.1). La LAlc, en soumettant la distillation à l’octroi de concessions, n’empêche pas qu’un élaborateur soit considéré comme un producteur au sens de l’art. 5 al. 2 let. b Ordonnance sur les AOP et les IGP (c. 10.2.2.3). C’est le nombre de producteurs et non pas la quantité d’absinthe qu’ils écoulent sur le marché qui est déterminant (c. 10.2.2.4). Les « petits producteurs » ne constituent pas une catégorie très aléatoire et volatile. Ceux-ci sont en effet assujettis à l’impôt et quantifiables. Ils doivent être intégrés au calcul de la représentativité (c. 10.3 – 10.3.2.2). Si l’autorité ne requiert pas un état des lieux détaillé et exhaustif du marché, elle s’attend à ce que leur activité soit documentée dans le cadre de l’examen de la représentativité de l’intimée (c. 10.3.3.1). En résumé, tous les opérateurs qui contribuent de manière déterminante à la création de l’absinthe sans nécessairement procéder eux-mêmes à la distillation entrent en ligne de compte dans l’examen du caractère représentatif de l’intimée, pour autant qu’ils aient une activité commerciale (c. 11). En se limitant à prendre en compte le nombre de concessions, l’autorité n’a pas tenu compte suffisamment des collèges professionnels pertinents au sens de l’art 5 al. 2 let. b Ordonnance sur les AOP et les IGP (c. 12.1.1.1). Ce seul chiffre ne permet pas de dresser un panorama fidèle de la production d’absinthe (c. 12.1.2). Au surplus, le nombre de concessions n’est pas pertinent dans la mesure où certaines entités disposent à la fois de concessions professionnelles et à façon. Certains distillateurs à façon offrent leurs services à de nombreux commettants mais ne sont considérés que comme un seul et même acteur (c. 12.1.3.1 – 12.1.3.3). C’est donc à tort que l’instance précédente a admis la représentativité de l’intimée. La décision attaquée doit être annulée (c. 12.2 – 12.2.2). L’affaire est renvoyée à l’autorité inférieure afin qu’elle rende une nouvelle décision sur l’opposition formulée par les recourante (c. 13 – 13.2.2). [YB]

09 février 2021

TAF, 9 février 2021, B-827/2018 et B-1565/2018 (d)

Motifs d’exclusion absolus, procédure d’enregistrement, marque verbale, marque figurative, signe trompeur, indication géographique, indication de provenance, croix, Croix-Rouge, signe contraire à l’ordre public, signe contraire au droit en vigueur, risque de confusion, impression d’ensemble, Plus, Suisse ; art. 2 let. d LPM, art. 1 LPAP.

L’instance précédente rejette l’enregistrement des marques « SWISS+CLSUIV » (demande d’enregistrement N° 54597/2016) et « SWISS+CLUSIVE (fig.) » (demande d’enregistrement N° 54598/2016) pour divers produits et services en classes 10, 20, 24 et 35. Malgré l’acceptation, pour la recourante, de restreindre géographiquement sa marque aux produits provenant de Suisse afin d’éviter que le signe ne soit trompeur, l’instance précédente considère que les signes revendiqués seraient contraires au droit en vigueur : la LPENCR interdisant l’utilisation des emblèmes de la Croix-Rouge ou de signes susceptibles d’être confondus avec ceux-ci (c. A — B. c). Selon l’instance précédente, le signe « + » est compris non pas comme un signe mathématique, mais comme une croix. Sans revendication de couleur, celle-ci peut être rouge et porter à confusion (art. 3 al. 1 LPENCR). Pour juger si cet élément reprend un signe absolument protégé, celui-ci doit être considéré en lui-même sans tenir compte des autres éléments (c. 3.2). Il ne faut en principe pas se fonder sur l’impression d’ensemble qui ne joue un rôle que dans des cas exceptionnels (c. 3.3). En l’espèce, les éléments « SWISS » et « CLUSIV » ne permettent pas d’interpréter l’élément « + » comme le symbole de l’addition. Une telle interprétation briserait en effet le flux phonétique entre les deux éléments verbaux (c. 4.2). Par contre, l’élément « + » peut également faire référence au drapeau suisse. Une telle perception lui attribue en effet une signification autonome dans le cadre de l’impression d’ensemble globale du signe et constitue une exception à l’interdiction de principe. En l’espèce, l’élément « + » est encadré par les éléments « SWISS » et « CLUSIV ». Dans ce contexte, le signe « + » n’est pas reconnu comme l’emblème de la Croix-Rouge, mais bien comme une référence à la provenance industrielle des produits et services revendiqués. Dans la mesure où le public pertinent ne voit pas l’emblème de la Croix-Rouge, mais une croix suisse dans les signes revendiqués, il s’agit d’une exception à l’interdiction fondamentale d’utiliser un tel signe (c. 5.1). Le raisonnement du TAF s’applique mutatis mutandis à la marque figurative « SWISS+CLUSIV (fig.). En particulier, le fait que le signe « + » soit séparé en deux n’influence pas le fait que, lié à l’élément « SWISS », celui-ci sera perçu comme une croix suisse (c. 6 – 6.9). Le recours est admis (c. 7). [YB]

02 septembre 2019

TAF, 2 septembre 2019, B-3234/2017 (d)

Sic! 4/2020, p. 190 (rés.) "Weissenstein" ; Motifs d’exclusion absolus, marque verbale, signe trompeur, cercle des destinataires pertinent, degré d’attention légèrement accru, vêtements, nom géographique, indication géographique, indication de provenance directe, indication de provenance indirecte, swissness, recours admis ; art. 2 lit. c LPM.

« WEISSENSTEIN »

Demande d’enregistrement N° 63753/2015 « WEISSENSTEIN »


Demande d’enregistrement N° 63753/2015 « WEISSENSTEIN »

Liste des produits et services revendiqués

Classe 25 : Bekleidungsstücke, Schuhwaren, Kopfbedeckungen ; Classe 35 : Detailhandel mit Textilwaren.

Cercle des destinataires pertinent

Les produits revendiqués s’adressent au grand public qui fera preuve d’un degré d’attention légèrement accru (c. 5).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe trompeur, art. 2 lit. c LPM.

Conclusion

Le signe « WEISSENSTEIN » est compris par les destinataires comme un sommet de la chaîne du Jura proche de la ville de Soleure (c. 6.1). Ceux-ci ne s’attendent cependant pas à ce que les produits revendiqués soient réalisés sur le Weissenstein. Il ne s’agit donc pas d’une indication de provenance directe (c. 6.2.1). L’instance précédente considère cependant qu’il s’agit d’une indication de provenance indirecte, raison pour laquelle l’enregistrement doit être limité aux produits provenant de Suisse (c. 6.2.2). Une indication de provenance indirecte est trompeuse lorsqu’elle présente un lien suffisamment étroit avec un lieu géographique, l‘indication devenant alors un symbole de cette provenance spécifique. En conséquence, toutes les indications indirectes ne sont pas nécessairement trompeuses. Le lien entre l’indication indirecte et le lieu géographique doit donc être suffisamment intense pour le public pertinent (c. 6.3.2). Une indication géographique, quand bien même celle-ci ferait référence à une région précise, n’est pas trompeuse pour les produits et services provenant du pays dans lequel est située la région en question. Il n’existe pas de motif légitimant le fait de ne pas appliquer cette pratique au territoire suisse. Ainsi, l’étendue d’une indication de provenance faisant référence indirectement une région suisse est limitée à la Suisse et non à la région en question (c. 6.3.3). Cette conception est renforcée par le fait que, pour écarter le risque pour un signe d’être trompeur, il suffit de limiter la liste des produits et services revendiqués à ceux fabriqués dans le pays dans lequel est situé la région, la ville ou le quartier auquel il est fait référence (c. 6.3.5). L’instance précédente a conclu que le signe « WEISSENSTEIN » était une indication de provenance indirecte, car ce sommet est connu du public régional. C’est la notoriété du Weissenstein pour l’ensemble de la Suisse qui était déterminante. En l’espèce, le Weissenstein n’est pas assez connu du public pour constituer une indication de provenance indirecte (c. 6.3.6). Cette conception est renforcée par le fait que, selon le projet Swissness, la limitation de l’utilisation d’une indication de provenance à une région ou une localité est soumise à des conditions supplémentaires. Une telle limitation présuppose de plus qu’il existe une indication de provenance. Le signe « WEISSENSTEIN » n’étant pas une indication géographique pour la Suisse, il n’y a pas lieu d’envisager sa protection en tant qu’indication régionale (c. 6.3.7). Le signe « WEISSENSTEIN » n’est donc pas une indication géographique indirecte. Il n’y a donc pas lieu d’exiger de la recourante qu’elle restreigne le champ de protection de sa marque aux produits de provenance suisse. Le recours est admis et l’instance précédente priée d’enregistrer la marque « WEISSENSTEIN » pour l’ensemble des produits revendiqués (c. 7). [YB]

02 octobre 2019

TAF, 2 octobre 2019, B-854/2018 (d)

Sic! 4/2020, p. 199 (rés.) « Grand Basel » ; Motifs d’exclusion absolus, marque verbale, signe appartenant au domaine public, cercle des destinataires pertinent, entreprises, associations, organismes publics, nom géographique, indication de provenance géographique, indication géographique directe, recours rejeté ; art. 2 lit. a LPM.

« GRAND BASEL »

Demande d’enregistrement N° 51554/2017 « GRAND BASEL »


Demande d’enregistrement N° 51554/2017 « GRAND BASEL »

Liste des produits et services revendiqués

Classe 35 : Organisation und Durchführung von Ausstellungen, Messen und Veranstaltungen für wirtschaftliche und Werbezwecke; alle vorgenannten Dienstleistungen schweizerischer Herkunft.



Classe 41 : Organisation und Durchführung von Ausstellungen, Messen und Veranstaltungen für kulturelle und Unterrichtszwecke; Organisation und Durchführung von Kongressen; alle vorgenannten Dienstleistungen schweizerischer Herkunft.

Cercle des destinataires pertinent

Le cercle des destinataires pertinent est composé d’entreprises, d’associations et d’organismes publics (c. 4).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe appartenant au domaine public, art. 2 lit. a LPM.

Conclusion

Le signe revendiqué est composé de deux éléments. Le mot « BASEL », compris aisément comme la ville suisse au bord du Rhin du même nom et le mot « grand », pouvant être compris comme un adjectif de langue française indiquant les dimensions importantes du nom qu’il qualifie ou un adjectif de langue anglaise signifiant « magnifique » (c. 5.2). En lien avec le nom d’un lieu, l’adjectif français « grand » fait référence au lieu en question ainsi qu’à son agglomération. C’est de cette manière que le cercle des destinataires pertinents comprendra le signe « GRAND BASEL » (c. 5.3). Contrairement à l’avis de la recourante, le signe « GRAND BASEL » ne sera pas compris comme « superbe Bâle », mais bien comme une indication relative à l’origine géographique des services revendiqués. Le fait que le nom de la ville de Bâle soit en allemand n’influencera pas la compréhension des destinataires francophones qui connaissent bien l’appellation germanophone de cette ville (c. 5.3). Le signe revendiqué est une indication géographique directe et aucune exception n’est en l’espèce envisageable afin d’en permettre l’enregistrement. C’est à juste titre que l’instance précédente a refusé l’enregistrement. Le recours est rejeté (c. 5.4 et 5.5). [YB]

08 octobre 2019

TAF, 8 octobre 2019, B-2150/2019 (d)

Sic! 4/2020, p. 200 (rés.), « esmara see you IN PARIS (fig.) » ; Motifs d’exclusion absolus, marque figurative, marque verbale, bijouterie, bijoux, joaillerie, vêtements, cercle des destinataires pertinent, spécialiste de la joaillerie, grand public, détaillant, signe trompeur, signe appartenant au domaine public, indication de provenance géographique, nom géographique, recours rejeté ; art. 2 lit. a LPM.

« esmara see you IN PARIS »

Demande d’enregistrement IR N° 1’328’088 « esmara see you IN PARIS »


Demande d’enregistrement IR N° 1’328’088 « esmara see you IN PARIS »

Liste des produits et services revendiqués

Classe 14 : Articles de bijouterie ; parures [articles de bijouterie] ; strass (articles de bijouterie de fantaisie); colliers.



Classe 18 : Sacs d'usage courant ; sacs à dos ; trousses de toilette (vides) ; parapluies.



Classe 25 : Vêtements ; articles chaussants ; articles de chapellerie ; vêtements de dessus, costumes, complets, blazers, chemisiers, tuniques, chemises, tops, pantalons en denim, pantalons, leggings, robes longues, jupes, pull-overs, sweat-shirts, vestes de survêtement, cardigans, gilets, combinaisons [vêtements], vestes [vêtements], manteaux ; vêtements de dessous et sous-vêtements de jour et de nuit, gaines ; ceinturons ; justaucorps-bodies ; bustiers, soutiens-gorge, corsets, corsages, tee-shirts soutiens-gorge, tops, corsages, négligés, culottes, combinaisons, pantalons jazz, pantalons hipsters, strings, shortys, boxers (caleçons), maillots de corps, vêtements de lit et vêtements de nuit, collants, bas, chaussettes, débardeurs, chemises de nuit, grenouillères, robes de chambre, jupons, articles vestimentaires pour la natation, maillots de bain, bikinis ; semelles intérieures pour articles chaussants ; bottes, bottines, sandales ; fichus ; foulards.

Cercle des destinataires pertinent

Les bijoux revendiqués en classe 14 s’adressent à un large public, mais également aux spécialistes tels que les joailliers.



Les produits revendiqués en classe 18 et 25 sont des biens d’usage courant s’adressant à un large public mais également aux intermédiaires et aux commerçants de détail (c. 4).

Motif absolu d’exclusion examiné 

Signe trompeur, art. 2 lit. c LPM.

Conclusion

Le signe revendiqué combine des éléments verbaux et figuratifs. L’élément « esmara », occupant la première ligne, fait référence à la ville marocaine de Semara. Le public pertinent y verra cependant un signe fantaisiste (c. 6.1). La seconde ligne est composée de l’élément « see you in », formule d’adieu facilement compréhensible, d’une représentation de la tour Eiffel ainsi que du signe Paris, aisément compris comme faisant référence à la ville de Paris (c. 6.2). La recourante ne parvient pas à démontrer que le signe « PARIS » est perçu comme une indication de provenance industrielle au lieu d’une indication géographique (c. 7.1). L’élément « PARIS » n’est, combiné avec le signe « esmara », pas non plus perçu comme indiquant une série de produits (c. 7.2). L’impression d’ensemble laissée par le signe revendiqué ne permet pas non plus d’exclure la perception par le public de l’élément « PARIS » comme une indication géographique. Certes, la formule d’adieu utilisée implique généralement que l’on ajoute un lieu à la fin de « see you in », mais cela ne permet pas encore de modifier la perception de l’élément « PARIS » par les destinataires. De plus, la ville de Paris est réputée pour la joaillerie et la mode, rendant l’indication de provenance géographique plus vraisemblable (c. 7.3). Le signe revendiqué est donc trompeur dans la mesure où il peut être utilisé en lien avec des produits ne provenant pas de France. Le recours est rejeté (c. 7.4). [YB]