Disposition

          LDIP (RS 291)

28 octobre 2014

TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 (d)

sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie », mesures provisionnelles, mesures superprovisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, entrave à l’exécution, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 935 (TFB, 4 février 2015, S2014_008).

Les deux parties ayant leur siège aux États-Unis, les tribunaux suisses compétents pour prononcer des mesures provisoires sont les tribunaux ou les autorités suisses compétents au fond ou ceux du lieu d’exécution de la mesure au sens de l’art. 10 LDIP (c. 2.1). L’action au fond est une demande en cession selon l’art. 29 LBI de deux demandes de brevet suisses. Elle a été introduite devant le TFB le 25 septembre 2014. Les mesures provisoires requises visent à faire interdire tout acte de disposition éventuel des demandes de brevet en question et à faire porter la mention de la restriction du droit de disposer au registre des brevets. L’action en cession de l’art. 29 LBI est, aux côtés des actions portant sur la validité et l’inscription de droits de propriété intellectuelle, une action d’état au sens de l’art. 109 al. 1 LDIP qui se rapporte à l’existence du droit de propriété intellectuelle ou à son titulaire. En outre, la mesure doit être exécutée en Suisse puisque les autorités suisses qui tiennent le registre, soit l’IPI, sont requises d’y porter l’annotation d’une restriction du droit de disposer des demandes de brevet. La compétence du TFB à raison du lieu et à raison de la matière découle à la fois des art. 1, 10 et 109 al. 1 LDIP, ainsi que de l’art. 26 LTFB (c. 2.2). Le droit suisse est applicable selon l’art. 110 al. 1 LDIP (c. 2.3). Le TFB suit l’argumentaire de la demanderesse selon lequel un dommage difficilement réparable résulterait du fait que la défenderesse, en transférant les deux demandes de brevet à un tiers, rendrait plus difficile, si ce n’est absolument impossible, la mise en œuvre de l’action en cession. En cédant les demandes de brevet à un tiers, la défenderesse perdrait sa légitimité passive et l’introduction d’une nouvelle action en cession contre l’acquéreur des demandes de brevet s’imposerait, ce qui retarderait de manière importante la procédure et entraînerait une augmentation des coûts. Le TFB retient que l’octroi des mesures requises qu’il soit fait interdiction à la défenderesse de céder le droit à la délivrance des deux demandes de brevet litigieuses ou de leur apporter des modifications, est de nature à supprimer le risque d’entrave à l’exécution, en particulier en lien avec l’ordre supplémentaire donné à l’autorité qui tient le registre d’y porter cette restriction du droit de disposer. Le risque d’entrave à l’exécution ne peut être supprimé que par l’octroi de mesures provisionnelles immédiates sans audition préalable de la défenderesse, au sens de l’art. 265 al. 1 CPC. Pour le TFB, les mesures superprovisionnelles requises sont proportionnées et ne sont pas de nature à porter préjudice à la défenderesse si cette dernière ne peut pas momentanément transférer ou modifier les demandes de brevet déposées. La requête de mesures superprovisionnelles est ainsi admise et il est donné l’ordre à l’IPI, en vertu des art. 262 lit. c CPC et 105 al. 1 lit. d OBI de porter au registre les restrictions correspondantes au droit de disposer des demandes de brevet concernées (c. 4.2). Le TFB assortit, au titre de mesure d’exécution, l’interdiction de disposer des demandes de brevet, respectivement de les modifier, de la menace d’une amende d’ordre de CHF 5 000.- au sens de l’art. 236 al. 3 CPC en lien avec l’art. 343 al. 1 lit. b CPC. [NT]

04 février 2015

TFB, 4 février 2015, S2014_008 (d)

Mesures provisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, droit de réplique inconditionnel, formalisme excessif préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 934 (TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 ; sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie »).

L’arrêt du TFB du 4 février 2015 rendu dans la même cause que celui du TFB du 28 octobre 2014 porte sur des mesures provisoires, alors que le précédent visait à l’obtention de mesures superprovisionnelles. Il est renvoyé au résumé de l’arrêt du 28 octobre 2014 (cf. N 934 c. 2.1-c. 2.3) pour les considérants se rapportant au for, au droit applicable, ainsi qu’à la compétence matérielle du TFB qui sont identiques. Le TFB admet que lorsque les allégués d’une requête de mesures provisoires seraient identiques à ceux de l’action au fond dont les mesures provisoires visent à garantir l’exécution et qui a été déposée simultanément, il serait contraire au principe de l’interdiction du formalisme excessif d’exiger que ces allégués soient reproduits dans la demande de mesures provisoires et de refuser un renvoi à ceux de la demande principale (c. 11). Le droit de réplique inconditionnel vaut aussi dans les procédures de mesures provisionnelles. Il n’est toutefois tenu compte dans ce cadre que des prises de position de la demanderesse suscitées par les allégations de la défenderesse. Les explications de la défenderesse qui iraient au-delà ne sont pas prises en considération (c. 11). [NT]

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

07 octobre 2015

TFB, 7 octobre 2015, O2013_006 (d)

Compétence internationale, droit applicable, internationalité, droit international privé, vraisemblance, action en nullité, divulgation antérieure, revendication, interprétation de la revendication, homme de métier, nouveauté, moyens de preuve, preuve, prise en considération de décisions étrangères, limitation de revendications, répartition des frais de justice ; art. 22 ch. 4 CL, art. 28 LBI, art. 107 al. 1. lit. f CPC, art. 1 al. 2 LDIP ; cf. N 936 (TFB, 11 février 2015, S2014_001 ; sic! 9/2015, p. 522-525, « Dibenzothiazepinderivat »).

Le TFB applique le droit international privé suisse à un état de fait international (c. 2.1 et 2.2 ; cf. N 936). Il rappelle également que l’action en nullité d’un brevet appartient à toute personne qui peut justifier d’un intérêt juridique (art. 28 LBI, c. 2.3). Concernant l’usage antérieur, il convient de distinguer entre la façon dont l’invention aurait effectivement été divulguée et la question de savoir si l’objet divulgué est effectivement couvert par les revendications. Pour déterminer si une divulgation a effectivement eu lieu, il faut établir une chaîne d’éléments substantifiés qui permette d’établir concrètement qui, avant la date de priorité, a rendu public quel objet technique, à quel moment et dans quelles conditions. La certitude absolue ne peut pas être exigée. Il suffit que le tribunal n’ait plus de doutes sérieux quant à la réalité des faits allégués ou que les doutes qui demeurent apparaissent légers. Cette preuve peut se faire de différentes manières : en fournissant une facture ou un bulletin de livraison à un tiers non tenu au secret, daté, pour autant qu’un lien concret puisse être établi avec l’objet technique en question (par ex. un numéro d’identification tel que le numéro de la machine) ; en soumettant un document qui permette d’attribuer un enseignement technique spécifique à l’objet en question (tel que, par exemple, un dessin technique qui porte un numéro d’identification ou auquel ce dernier peut être clairement attribué, que ce soit directement ou indirectement) (c. 4.1.1. et 4.1.2.). La preuve de l’état du développement technique de l’objet appartient également au demandeur (c. 4.1.3). L’interprétation d’une revendication qui se fonde sur la description de l’invention doit se faire au travers des yeux de l’homme de métier et à la lumière de l’état de la technique, des désavantages qui en découlent et de la solution que le brevet se propose d’apporter (c. 4.2.2.2). Prise en compte de décisions de l’OEB et de décisions étrangères (c. 4.2.2.3). Le Tribunal fédéral des brevets peut restreindre les revendications (c. 5). La limitation substantielle des revendications par la défenderesse entraîne un désistement d’action proportionnelle du demandeur (c. 6). Une limitation répétée des revendications par la défenderesse qui n’est pas considérée comme nécessaire par le tribunal entraînera une répartition des frais défavorable à la défenderesse (c. 6). [DK]

29 décembre 2017

TFB, 29 décembre 2017, S2017_008 (d) (mes. prov.)

Compétence internationale ; mesures provisionnelles ; art. 11 Protocole sur la compétence judiciaire et la reconnaissance de décisions portant sur le droit à l'obtention du brevet européen, art. 2 al. 1 CL, art. 23 al. 1 lit. b LTFB, art. 26 al. 1 et 2 LTFB, art. 1 LDIP.

Le demandeur, une personne physique, a sa résidence en France. La défenderesse est une société anonyme ayant son siège en Suisse. Il s’agit ainsi d’un état de fait international. La LDIP s’applique ainsi à la question de la compétence (art. 1 LDIP). D’après l’art. 1 al. 2 LDIP, les traités internationaux sont réservés. Dans le présent cas, il s’agit de la Convention sur le brevet européen (CBE, RS 0.232.142.2), du Protocole sur la compétence judiciaire et la reconnaissance de décisions portant sur le droit à l'obtention du brevet européen (Protocole sur la reconnaissance, RS 0232.142.22) et de la Convention de Lugano (RS 0.275.12). Dans la mesure où la CBE et le Protocole sur la reconnaissance sont applicables, ils priment la Convention de Lugano, conformément à l'art. 11 du Protocole sur la reconnaissance. En ce qui concerne le droit à la demande de brevet européen, seule la CBE est applicable. Conformément à l'article 2 du Protocole sur la reconnaissance, le déposant d'un brevet européen dont le siège est situé dans un État contractant à la CBE doit être attrait devant les tribunaux de cet État contractant.  Dans le cas d’espèce, la défenderesse, basée en Suisse, est titulaire de la demande de brevet européen objet du litige. La compétence à raison du lieu du Tribunal fédéral des brevets est donc donnée en ce qui concerne la demande et l’évaluation du droit à la demande du brevet européen. Les autres dépôts litigieux doivent être jugés par les tribunaux du domicile des défendeurs, selon les règles de compétence de l’art. 2 al. 1 CL. Le Tribunal fédéral des brevets est donc compétent pour le différend objet du cas d’espèce, tant à raison du lieu que de la matière (art. 26 al. 2 LTFB). Cela vaut également pour les mesures provisionnelles (art. 1 al. 2 LDIP, combiné avec art. 31 CL et art. 26 al. 1 et 2 LTFB). Conformément à l'art. 23 al. 1 lit. b LTFB, le président, en tant que juge unique, décide des demandes de mesures provisionnelles (c.3). [DK]

07 janvier 2015

TF, 7 janvier 2015, 4A_442/2014 (f)

sic! 4/2015, p. 255-259, « Mécanisme de déclenchement » ; droit à la délivrance du brevet, for, internationalité, brevet, montre, titularité du brevet, domicile du défendeur, lieu du domicile du défendeur, contrat tacite, interprétation du contrat, transfert du droit à la délivrance du brevet, réelle et commune intention des parties, territorialité ; art. 105 al. 2 LTF, art. 1 al. 2 CO, art. 18 al. 1 CO, art. 332 al. 1 CO, art. 3 LBI, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 14 al. 1 CPC, art. 2 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 al. 3 LDIP, art. 122 LDIP.

Lorsqu’une action tend seulement à faire contraindre le défendeur à accomplir des démarches juridiques destinées au transfert du brevet, le jugement le condamnant n’exerce qu’une influence médiate sur la titularité de ce bien immatériel et la contrainte ne résulte que de la menace d’une sanction pénale à infliger par les autorités suisses. Cette action n’est pas clairement exclue par l’art. 109 al. 1 LDIP. Elle n’est visée par aucune disposition spécifique de la loi, de sorte que les tribunaux suisses du lieu du domicile du défendeur sont compétents par l’effet de l’art. 2 LDIP (c. 2). Lorsque les deux parties ont leur siège ou domicile en Suisse et que le défendeur a fourni ses services dans ce pays, le droit suisse est applicable à leurs relations contractuelles conformément aux art. 110 al. 3 et 122 LDIP (c. 3). L’inventeur peut valablement transférer à une autre personne le droit d’introduire une demande de brevet, puis de devenir titulaire du brevet, avant même le dépôt d’une telle demande. Ce transfert n’est soumis à aucune condition de forme. Déjà avant l’achèvement de l’invention et la naissance du droit au brevet correspondant, l’inventeur peut convenir avec une autre personne que ce droit lui appartiendra d’emblée; c’est le régime ordinairement prévu par l’art. 332 al. 1 CO dans les relations entre travailleurs et employeurs. L’inventeur peut d’ailleurs aussi s’obliger valablement et par avance à exécuter, le moment venu, les actes éventuellement nécessaires à un transfert du droit au brevet (c. 4). En cas de litige sur la portée d’un accord intervenu entre l’inventeur et une autre personne revendiquant le droit au brevet, le juge doit au premier chef s’efforcer de déterminer conformément à l’art. 18 al. 1 CO leur réelle et commune intention, ce qui relève de la constatation des faits. Au stade des déductions à opérer sur la base d’indices, lesquelles relèvent elles aussi de la constatation des faits, le comportement que les cocontractants ont adopté dans l’exécution de leur accord peut éventuellement dénoter de quelle manière ils l’ont eux-mêmes compris et révéler ainsi leur réelle et commune intention (c. 4). Le comportement du défendeur, qui a personnellement concouru à ce que les droits de propriété intellectuelle afférents à la création au développement de laquelle il a collaboré soient acquis par la demanderesse – en souscrivant un acte de cession de ces droits, en répondant aux demandes d’instructions du mandataire de la demanderesse et en consentant ainsi de manière implicite au moins au fait que cette dernière dépose la demande de brevet correspondant à l’invention concernée – dénote avec certitude qu’il admettait, selon sa propre conception de la collaboration rémunérée par la demanderesse, que les droits de propriété intellectuelle se rapportant à la création à laquelle il avait collaboré, revenaient à cette dernière. Pour le TF, le défendeur a ainsi implicitement admis que le droit à la délivrance du brevet appartenait d’emblée à la demanderesse ou que, à défaut, en particulier pour les brevets américains, ils devaient lui être transférés avec son concours. Le TF procède d’office en application de l’art. 105 al. 2 LTF à cette constatation de fait qui pour lui s’impose (c. 5). L’acquisition de droits de propriété intellectuelle en contrepartie d’une rémunération peut faire l’objet d’un contrat tacitement, mais valablement conclu entre les parties, conformément à l’art. 1 al. 2 CO. Il importe peu que le lien entre la rémunération versée et l’invention considérée ne ressorte peut-être pas clairement du libellé des factures établies par le défendeur. Ce contrat englobe tous les brevets d’invention afférents au mécanisme concerné, y compris celui faisant l’objet du litige. Il autorise la demanderesse à exiger le transfert de ce brevet aussi, quelle que soit la qualification des relations contractuelles nouées entre les parties (c. 5). [NT]

CO (RS 220)

- Art. 1

-- al. 2

- Art. 332

-- al. 1

- Art. 18

-- al. 1

CPC (RS 272)

- Art. 14

-- al. 1

- Art. 5

-- al. 1 lit. a

LBI (RS 232.14)

- Art. 3

LDIP (RS 291)

- Art. 122

- Art. 2

- Art. 109

-- al. 1

-- al. 2

- Art. 110

-- al. 3

LTF (RS 173.110)

- Art. 105

-- al. 2

05 janvier 2015

HG AG, 5 janvier 2015, HSU.2014.68/DP/mv (d) (mes. prov.)

sic! 7-8/2015, p. 449-455, « Totenkopf-Tatoo » ; mesures provisionnelles, droit international privé, vraisemblance, œuvre de service, montre, présomption de la qualité d’auteur, principe du créateur, risque de récidive, précision des conclusions, œuvre, double création, préjudice irréparable, urgence, péremption du droit d’agir, principe de la proportionnalité ; art. 2 ch. 1 CL, art. 60 ch. 1 CL, art. 332 al. 1 CO, art. 2 al. 1 LDA, art. 6 LDA, art. 8 LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 261 al. 1 CPC, art. 343 al. 1CPC, art. 10LDIP, art. 109 al. 2LDIP, art. 110 al. 1LDIP, art. 129 LDIP, art. 292 CP.

La CL prévoit une compétence internationale des tribunaux suisses pour prononcer des mesures provisionnelles. Au niveau national, la compétence locale se détermine d’après l’art. 10 LDIP, qui l’attribue soit aux tribunaux compétents au fond, soit aux tribunaux du lieu d’exécution de la mesure (c. 2.2). Comme l’intimée a son siège à Genève, il existe une compétence internationale des tribunaux suisses pour se prononcer sur le fond, d’après les art. 2 ch. 1 et 60 ch. 1 CL (c. 2.3). Au niveau national, les art. 109 al. 2 et 129 LDIP prévoient la compétence des tribunaux du lieu de l’acte ou du résultat. Comme le requérant a rendu vraisemblable que les montres litigieuses pouvaient être commandées à Wettingen et étaient livrées depuis là, la compétence des tribunaux argoviens est donnée (c. 2.4). Pour obtenir une interdiction par voie de mesures provisionnelles, le requérant doit rendre vraisemblable que les conditions de l’art. 261 al. 1 CPC sont remplies (c. 4). Une allégation est vraisemblable lorsque le juge n’est pas totalement convaincu de sa véracité, mais qu’il la considère comme globalement vraie, quand bien même tous les doutes ne peuvent être écartés. Certains éléments doivent parler pour les faits prétendus, même si le tribunal compte encore avec l’éventualité qu’ils puissent ne pas être réalisés (c. 5). D’après l’art. 110 al. 1 LDIP, les droits de la propriété intellectuelle sont régis par le droit de l'État pour lequel la protection de la propriété intellectuelle est revendiquée (c. 6.2.1). Le principe connu en droit anglais du « work for hire », selon lequel le droit d’auteur appartient originairement à l’employeur ou au mandant du créateur, n’est donc pas applicable en l’espèce (c. 6.2.2). L’art. 8 LDA prévoit une présomption légale de la qualité d’auteur et un renversement du fardeau de la preuve: celui qui est indiqué comme auteur sur l’exemplaire de l’œuvre ou au moment de sa publication bénéficie de la protection de la LDA, jusqu’à preuve du contraire. D’après le principe du créateur de l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre et l’art. 332 al. 1 CO n’est pas applicable (c. 6.3.1). Le requérant a ainsi la légitimation active (c. 6.3.3). Ses conclusions sont suffisamment précises et il faut retenir un risque de récidive, car il est rendu vraisemblable que l’intimée fabrique et commercialise les montres visées par l’interdiction (c. 6.4.2). Pour déterminer si la tête de mort dessinée par le requérant est protégée, il est décisif de savoir s’il s’agit d’une création de l’esprit humain ayant un caractère individuel. C’est l’individualité de l’œuvre qui est déterminante, pas celle de l’auteur (c. 6.5.2). L’intimée n’est pas parvenue à rendre vraisemblable qu’il existait d’autres créations semblables à celle du requérant, avant que celui-ci ne réalise la sienne. Cette dernière à la qualité d’œuvre au sens de l’art. 2 LDA (c. 6.5.3). Quant à lui, le requérant a rendu vraisemblable que sa tête de mort, sur les montres litigieuses, était reconnaissable dans son caractère individuel. L’allégation de l’intimée, selon laquelle elle se serait inspirée de crânes en sucre mexicains, sans connaître l’œuvre du requérant, n’est pas suffisamment motivée pour pouvoir juger d’une éventuelle double création (c. 6.6.3). Il est notoire que les actions en dommages-intérêts, dans le domaine de la propriété intellectuelle, sont souvent très coûteuses et difficiles à mener. De plus, il paraît vraisemblable qu’une menace de dilution du droit d’auteur pèse sur le requérant, en raison des actes illicites, ce qui pourrait aussi nuire à sa réputation. La condition du préjudice difficile à réparer est donc réalisée (c. 7.3 et 7.4). L’urgence existe lorsqu’un procès ordinaire durerait clairement plus longtemps qu’une procédure de mesures provisionnelles. Une éventuelle péremption du droit d’agir se juge d’après la durée du procès au fond (c. 8.2). En l’espèce, le requérant a attendu environ un an avant de demander des mesures provisionnelles. Cela est clairement inférieur au temps nécessaire pour obtenir un jugement au fond, si bien que la condition de l’urgence est réalisée (c. 8.3 et 8.4). L’interdiction provisionnelle doit toutefois satisfaire au principe de la proportionnalité: elle se limitera à ce qui est nécessaire (c. 9 et 9.1). L’interdiction de mettre en circulation les montres litigieuses et de les promouvoir est proportionnée, mais pas celle de les garder en stock (c. 9.3.2). Comme mesures d’exécution, la menace de la peine prévue à l’art. 292 CP et l’amende d’ordre selon l’art. 343 al. 1 lit. b CPC sont appropriées (c. 10). [VS]

CL (RS 0.275.12)

- Art. 60

-- ch. 1

- Art. 2

-- ch. 1

CO (RS 220)

- Art. 332

-- al. 1

CP (RS 311.0)

- Art. 292

CPC (RS 272)

- Art. 343

-- al. 1

- Art. 261

-- al. 1

LDA (RS 231.1)

- Art. 8

- Art. 6

- Art. 62

-- al. 1 lit. a

- Art. 2

-- al. 1

LDIP (RS 291)

- Art. 10

- Art. 109

-- al. 2

- Art. 129

- Art. 110

-- al. 1

22 janvier 2014

AG BS, 22 janvier 2014, ZK.2014.3 (AG.2014.98) (d) (mes.prov.)

Conditions de la protection du design, mesures provisionnelles, instance cantonale unique, internationalité, for, droit international privé, urgence, délai de péremption, nouveauté en droit des designs, originalité en droit des designs, élément caractéristique essentiel, impression générale, souvenir à court terme, caractère techniquement nécessaire, besoin de libre disposition, étendue de la protection, charnière, parois de douche ; art. 2 LDes, art. 4 lit. c LDes, art. 8 LDes, art. 21 LDes, art. 29 LDes, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 5 al. 2 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 10 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP.

L’instance cantonale unique compétente en vertu de l’art. 5 al. 1 lit. a CPC pour connaître des litiges portant sur des droits de propriété intellectuelle, y compris en matière de nullité, de titularité, de licence, de transfert et de violation de ces droits, l’est aussi selon l’art. 5 al. 2 CPC pour statuer sur les mesures provisionnelles requises avant litispendance (c. 1.1). Selon l’art. 10 LDIP, sont compétents pour prononcer des mesures provisoires les tribunaux ou les autorités suisses qui sont compétents au fond (lit. a), ou les tribunaux ou les autorités suisses du lieu d’exécution de la mesure (lit. b). La demanderesse fait valoir une violation de droits de propriété intellectuelle pour laquelle la compétence internationale est déterminée par l’art. 109 al. 2 LDIP. Les actions portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle peuvent ainsi être intentées devant les tribunaux suisses du domicile du demandeur, ou à défaut ceux du lieu de l’acte ou du résultat. Pour les charnières de cloisons de douche qui seront effectivement présentées dans le cadre de l’exposition internationale Swissbau se tenant à Bâle (et pour celles-là uniquement), Bâle est bien un lieu de résultat fondant la compétence à raison du lieu des tribunaux bâlois (c. 1.2). Pour que des mesures provisionnelles puissent être ordonnées dans le cadre de l’art. 261 al. 1 CPC, il est nécessaire de rendre vraisemblable l’existence d’une prétention de nature civile fondée sur le droit civil matériel, que cette prétention est l’objet d’une atteinte ou risque de l’être et que cette atteinte causerait un préjudice difficilement réparable au titulaire de la prétention. L’art. 261 CPC ne mentionne pas explicitement l’exigence d’une urgence temporelle, ni non plus celle de proportionnalité, les mesures prises ne devant pas aller plus loin que ce qui est nécessaire à la protection de la prétention rendue vraisemblable (c. 2). Il y a urgence lorsque la procédure ordinaire (jusqu’à la décision de l’autorité de dernière instance dans la mesure où un recours est doté d’effet suspensif) durerait clairement plus longtemps que la procédure sur mesures provisionnelles. Les mesures provisionnelles supposent ainsi l’existence d’une urgence relative, les mesures superprovisionnelles, elles, une urgence particulière. Le fait pour un demandeur d’avoir traîné ou attendu pour agir ne conduit en principe au rejet de la requête que si des mesures superprovisionnelles sont demandées. Des mesures provisionnelles peuvent-elles être requises tant et aussi longtemps que demeure le risque que la prétention ne puisse plus être exécutée à temps ou complètement, notamment lorsque de nouvelles atteintes sont à craindre. La passivité n’est assimilée, en lien avec des mesures provisionnelles, à une attente constitutive d’abus de droit, qu’après un temps extrêmement long. Un délai, comme en l’espèce de quelques mois (3-4 mois), ne suffit pas à lever l’urgence relative des mesures provisionnelles, et ne saurait être assimilé à une attente constitutive d’abus de droit (c. 3.2). Pour déterminer l’originalité des charnières pour parois de douche concernées, il convient de comparer l’impression d’ensemble qu’elles dégagent de celle résultant pour leurs acquéreurs potentiels des éléments caractéristiques essentiels des charnières préexistantes (c. 4.3). L’exigence d’originalité implique que le design considéré se différencie par l’impression d’ensemble qu’il suscite de manière objective de ce qui était déjà connu. Un design nouveau et original peut tout à fait être banal s’il se distingue du point de vue de son impression d’ensemble, soit par des éléments caractéristiques essentiels, clairement de ce qui préexistait. La Cour considère que tel est le cas pour la charnière pour paroi de douche de la demanderesse dont elle admet à la foi l’originalité et la nouveauté (c. 4.3.2). Pour que la protection du droit du design entre en ligne de compte, il faut aussi que la forme choisie ne soit pas exclusivement conditionnée par la technique. Le besoin de libre disposition doit ainsi être pris en compte et découle de l’absence de liberté dans la détermination des formes retenues. Le droit exclusif découlant d’un enregistrement de design ne peut et ne doit limiter la concurrence dans le choix de la forme de ses produits que dans la mesure où la forme enregistrée n’est pas la simple expression du but utilitaire recherché et dictée par la fonctionnalité de l’objet de telle façon qu’il ne subsiste aucune liberté de création pour atteindre l’effet technique voulu. Un besoin général de libre disposition doit être nié tant qu’il existe des solutions alternatives permettant d’atteindre le même effet technique. L’existence de formes alternatives suffit pour justifier la protection du design. Des charnières de parois de douche peuvent revêtir une multitude de formes différentes, lesquelles ne sont dès lors pas exclusivement imposées par leur fonction au sens de l’art. 4 lit. c LDes (c. 4.4). Les exigences en matière d’examen de l’originalité au sens de l’art. 2 LDes sont les mêmes que celles concernant la détermination du champ de protection au sens de l’art. 8 LDes. L’impression d’ensemble de l’utilisateur intéressé est ainsi à nouveau déterminante. Il ne s’agit pas de procéder à une comparaison simultanée des designs en cause pour mettre en évidence des ressemblances ou des différences de détail. Le juge doit se concentrer sur les éléments caractéristiques essentiels qui déterminent l’impression d’ensemble et les apprécier en fonction de sa conception propre. De simples différences de détail ne suffisent pas pour que les designs puissent coexister. C’est en fonction du souvenir à court terme que l’acquéreur potentiel conserve des charnières concernées qu’il doit être tranché. La Cour considère que les charnières de la défenderesse reprennent justement l’élément caractéristique essentiel de celles de la demanderesse. La différence de quelques millimètres dans la mesure de la fente des charnières ne modifie pas l’impression d’ensemble qui en résulte. Il en va de même pour les autres détails dans les proportions et la forme des différents éléments constitutifs des charnières, qui ne peuvent être relevés qu’après une comparaison attentive et simultanée des produits, et ne sont pas susceptibles de demeurer dans le souvenir que l’acquéreur potentiel gardera à court terme des deux charnières (c. 5.4). [NT]

Charnière de douche
Charnière de douche

28 octobre 2014

TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 (d)

sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie », mesures provisionnelles, mesures superprovisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, entrave à l’exécution, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 935 (TFB, 4 février 2015, S2014_008).

Les deux parties ayant leur siège aux États-Unis, les tribunaux suisses compétents pour prononcer des mesures provisoires sont les tribunaux ou les autorités suisses compétents au fond ou ceux du lieu d’exécution de la mesure au sens de l’art. 10 LDIP (c. 2.1). L’action au fond est une demande en cession selon l’art. 29 LBI de deux demandes de brevet suisses. Elle a été introduite devant le TFB le 25 septembre 2014. Les mesures provisoires requises visent à faire interdire tout acte de disposition éventuel des demandes de brevet en question et à faire porter la mention de la restriction du droit de disposer au registre des brevets. L’action en cession de l’art. 29 LBI est, aux côtés des actions portant sur la validité et l’inscription de droits de propriété intellectuelle, une action d’état au sens de l’art. 109 al. 1 LDIP qui se rapporte à l’existence du droit de propriété intellectuelle ou à son titulaire. En outre, la mesure doit être exécutée en Suisse puisque les autorités suisses qui tiennent le registre, soit l’IPI, sont requises d’y porter l’annotation d’une restriction du droit de disposer des demandes de brevet. La compétence du TFB à raison du lieu et à raison de la matière découle à la fois des art. 1, 10 et 109 al. 1 LDIP, ainsi que de l’art. 26 LTFB (c. 2.2). Le droit suisse est applicable selon l’art. 110 al. 1 LDIP (c. 2.3). Le TFB suit l’argumentaire de la demanderesse selon lequel un dommage difficilement réparable résulterait du fait que la défenderesse, en transférant les deux demandes de brevet à un tiers, rendrait plus difficile, si ce n’est absolument impossible, la mise en œuvre de l’action en cession. En cédant les demandes de brevet à un tiers, la défenderesse perdrait sa légitimité passive et l’introduction d’une nouvelle action en cession contre l’acquéreur des demandes de brevet s’imposerait, ce qui retarderait de manière importante la procédure et entraînerait une augmentation des coûts. Le TFB retient que l’octroi des mesures requises qu’il soit fait interdiction à la défenderesse de céder le droit à la délivrance des deux demandes de brevet litigieuses ou de leur apporter des modifications, est de nature à supprimer le risque d’entrave à l’exécution, en particulier en lien avec l’ordre supplémentaire donné à l’autorité qui tient le registre d’y porter cette restriction du droit de disposer. Le risque d’entrave à l’exécution ne peut être supprimé que par l’octroi de mesures provisionnelles immédiates sans audition préalable de la défenderesse, au sens de l’art. 265 al. 1 CPC. Pour le TFB, les mesures superprovisionnelles requises sont proportionnées et ne sont pas de nature à porter préjudice à la défenderesse si cette dernière ne peut pas momentanément transférer ou modifier les demandes de brevet déposées. La requête de mesures superprovisionnelles est ainsi admise et il est donné l’ordre à l’IPI, en vertu des art. 262 lit. c CPC et 105 al. 1 lit. d OBI de porter au registre les restrictions correspondantes au droit de disposer des demandes de brevet concernées (c. 4.2). Le TFB assortit, au titre de mesure d’exécution, l’interdiction de disposer des demandes de brevet, respectivement de les modifier, de la menace d’une amende d’ordre de CHF 5 000.- au sens de l’art. 236 al. 3 CPC en lien avec l’art. 343 al. 1 lit. b CPC. [NT]

04 février 2015

TFB, 4 février 2015, S2014_008 (d)

Mesures provisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, droit de réplique inconditionnel, formalisme excessif préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 934 (TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 ; sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie »).

L’arrêt du TFB du 4 février 2015 rendu dans la même cause que celui du TFB du 28 octobre 2014 porte sur des mesures provisoires, alors que le précédent visait à l’obtention de mesures superprovisionnelles. Il est renvoyé au résumé de l’arrêt du 28 octobre 2014 (cf. N 934 c. 2.1-c. 2.3) pour les considérants se rapportant au for, au droit applicable, ainsi qu’à la compétence matérielle du TFB qui sont identiques. Le TFB admet que lorsque les allégués d’une requête de mesures provisoires seraient identiques à ceux de l’action au fond dont les mesures provisoires visent à garantir l’exécution et qui a été déposée simultanément, il serait contraire au principe de l’interdiction du formalisme excessif d’exiger que ces allégués soient reproduits dans la demande de mesures provisoires et de refuser un renvoi à ceux de la demande principale (c. 11). Le droit de réplique inconditionnel vaut aussi dans les procédures de mesures provisionnelles. Il n’est toutefois tenu compte dans ce cadre que des prises de position de la demanderesse suscitées par les allégations de la défenderesse. Les explications de la défenderesse qui iraient au-delà ne sont pas prises en considération (c. 11). [NT]

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

09 décembre 2011

TF, 9 décembre 2011, 4A_692/2011 (d)

Action, action en fourniture de renseignements, violation d’un brevet, cause à caractère pécuniaire, droit international privé, droit étranger, arbitraire, décision étrangère, contrat, prescription, délai, abus de droit ; art. 96 lit. b LTF, art. 2 al. 2 CC, art. 18 LDIP, art. 117 al. 2 et 3 LDIP, art. 148 LDIP, § 199 al. 1 dBGB.

En vertu des art. 117 al. 2 et 3 et 148 LDIP, le droit allemand est applicable à la demande de renseignements litigieuse (c. 2). D'après l'art. 96 lit. b LTF, dans une affaire pécuniaire, un recours ne peut être formé que pour application arbitraire (c. 2.2) du droit étranger désigné par le droit international privé suisse (c. 2.1). Les recourantes ont été condamnées en Allemagne, dans le cadre d'un jugement constatant la violation d'un brevet, à fournir à B. des renseignements portant sur la commercialisation de cartouches d'encre (c. A). Ne constitue pas une application arbitraire du § 199 al. 1 dBGB le fait de considérer que le délai de prescription (de 3 ans) — auquel est soumis le droit à des renseignements (au sujet d'informations auxquelles les recourantes n'avaient pas accès dans le cadre de leurs rapports contractuels avec l'intimée) litigieux (c. 3) — a commencé à courir le 31 décembre 2003, c'est-à-dire à la fin de l'année durant laquelle le jugement allemand a été rendu et durant laquelle les recourantes ont donc eu connaissance du fondement de leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée. N'y change rien le fait que B. n'ait (par écrit), que le 25 février 2008, invité les recourantes à faire valoir leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée (c. 3.1-3.2). En application de l'art. 18 LDIP et vu que la cause présente un lien suffisant avec la Suisse, c'est conformément au droit suisse (art. 2 al. 2 CC) que doit être jugée la question de savoir si l'exception de prescription est soulevée de manière abusive par l'intimée (c. 4.1). En l'occurrence, le comportement de l'intimée n'est pas constitutif d'un abus de droit (c. 4.2).

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

11 septembre 2014

KG GR, 11 septembre 2014, ZK2 13 11 (d)

sic! 2/2015 p. 93-94, « Army Knife (fig.) » ; action en constatation de la nullité d’une marque, non entrée en matière, qualité pour défendre, personnalité juridique, titularité de la marque, registre étranger, reconnaissance d’une décision, déclaration sous serment, preuve, réinscription au registre du commerce, registre du commerce, radiation d’une marque ; art. 52 LPM, art. 59 al.1 CPC, art. 59 al. 2 lit. c CPC, art. 60 CPC, art. 66 CPC, art. 29 al. 1 lit. a LDIP, art. 29 al. 1 lit. b LDIP.

L’action en constatation de la nullité d’une marque, au sens de l’art. 52 LPM, est intentée contre son titulaire. Si la marque est enregistrée au nom d’une personne morale qui a été radiée du registre du commerce, il faut en principe requérir la réinscription de cette dernière avant de pouvoir intenter une action en constatation contre elle. Ce n’est que lorsque la réinscription est impossible, par exemple parce qu’elle n’est pas prévue dans le pays de la société radiée, qu’on peut y renoncer et que l’action peut être dirigée contre tout éventuel titulaire de la marque (c. 3). Tel n’est pas le cas en l’espèce, et la société attaquée n’a dès lors pas la capacité d’être partie (c. 3b). Par conséquent, le tribunal doit rendre une décision de non-entrée en matière (c. 3c). Par ailleurs, pour la reconnaissance de la décision de radiation du registre de l’État étranger, l’attestation d’entrée en force prévue par l’art. 29 al. 1 lit. b LDIP doit émaner d’une autorité de cet État. Une déclaration sous serment n’est pas suffisante pour établir la preuve de l’entrée en force de la décision (c. 4). [SR]

11 septembre 2014

KG GR, 11 septembre 2014, ZK2 13 11 (d)

sic! 2/2015 p. 93-94, « Army Knife (fig.) » ; action en constatation de la nullité d’une marque, non entrée en matière, qualité pour défendre, personnalité juridique, titularité de la marque, registre étranger, reconnaissance d’une décision, déclaration sous serment, preuve, réinscription au registre du commerce, registre du commerce, radiation d’une marque ; art. 52 LPM, art. 59 al.1 CPC, art. 59 al. 2 lit. c CPC, art. 60 CPC, art. 66 CPC, art. 29 al. 1 lit. a LDIP, art. 29 al. 1 lit. b LDIP.

L’action en constatation de la nullité d’une marque, au sens de l’art. 52 LPM, est intentée contre son titulaire. Si la marque est enregistrée au nom d’une personne morale qui a été radiée du registre du commerce, il faut en principe requérir la réinscription de cette dernière avant de pouvoir intenter une action en constatation contre elle. Ce n’est que lorsque la réinscription est impossible, par exemple parce qu’elle n’est pas prévue dans le pays de la société radiée, qu’on peut y renoncer et que l’action peut être dirigée contre tout éventuel titulaire de la marque (c. 3). Tel n’est pas le cas en l’espèce, et la société attaquée n’a dès lors pas la capacité d’être partie (c. 3b). Par conséquent, le tribunal doit rendre une décision de non-entrée en matière (c. 3c). Par ailleurs, pour la reconnaissance de la décision de radiation du registre de l’État étranger, l’attestation d’entrée en force prévue par l’art. 29 al. 1 lit. b LDIP doit émaner d’une autorité de cet État. Une déclaration sous serment n’est pas suffisante pour établir la preuve de l’entrée en force de la décision (c. 4). [SR]

02 décembre 2011

OG ZH, 2 décembre 2011, LK110002-0/U (d)

sic! 6/2012, p. 378-386, « Le-Corbusier-Möbel IV » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, individualité, Le Corbusier, auteur, coauteur, imitation, contrat de vente, abus de droit, usage privé, droit de mise en circulation, publicité, dommage, remise du gain, concurrence déloyale ; art. 42 al. 2 CO, art. 10 al. 2 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 100 LDIP, art. 118 LDIP

Vu l'ATF 113 II 190, les modèles de meubles LC2, LC3 et LC4 sont protégés par la LDA ; tel n'est en revanche pas le cas du modèle LC1 (c. V.1.2-V.1.3). Par ailleurs, selon l'Obergericht ZH, les modèles LC6 (Fig. 2a) et LC7 (Fig. 2b) sont protégés par la LDA, car leurs éléments ne sont pas purement fonctionnels (c. V.1.4-V.1.5). Heidi Weber n'a ni la qualité d'auteur d'une œuvre indépendante ou dérivée (c. 2.1) ni la qualité de coauteur des meubles en cause, car elle n'a procédé (avec l'accord de « Le Corbusier ») sur ces meubles qu'à des modifications mineures (simplifications pour la production en série, modifications d'ordre pratique, choix de nouveaux matériaux) qui n'ont pratiquement pas d'incidence sur leur design (c. V.2.2-V.2.3). La vente, par les défendeurs (italiens), d'imitation de meubles « Le Corbusier » à des acheteurs suisses est régie par le droit italien (art. 100 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat, avec la fabrication de la chose ou avec son acquisition par le vendeur. Il ne peut donc pas être considéré que les défendeurs — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent (art. 10 al. 2 lit. b LDA) des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. V.3.2.1-V.3.2.2). Peut rester ouverte la question de savoir si un acquéreur de ces meubles (qui, selon la LDA, violent les droits de la demanderesse) peut, en Suisse, se prévaloir de l'exception d'usage privé (c. V.3.2.2 in fine). Bien que la vente elle-même ne constitue pas une violation de la LDA (c. V.3.3.3), les défendeurs violent l'art. 10 al. 2 lit. b LDA en proposant à la vente en Suisse (grâce, notamment, à l'envoi de prospectus avec des prix en francs suisses à des adresses en Suisse, ainsi qu'à l'utilisation d'un site Internet en allemand consultable en Suisse) ces imitations de meubles (LC2, LC3, LC4, LC6 et LC7) (c. V.3.3.2). Du fait qu'ils ne font pas de publicité avec le nom « Le Corbusier » (et parfois même sans l'abréviation LC), qu'ils ne laissent pas entendre que leurs produits sont ceux de la demanderesse et qu'ils ont les mêmes coûts de production et de publicité que la demanderesse, les défendeurs ne violent pas la LCD (c. VI.1), en particulier l'art. 3 lit. d LCD, en lien avec le modèle LC1 (c. VI.2). Le fait que le défendeur 1 ait détruit des pièces nécessaires au calcul du dommage doit être apprécié en sa défaveur au sens de l'art. 42 al. 2 CO (c. VII.2.1-VII.2.2). Dans la fixation du dommage (art. 42 al. 2 CO), il convient de prendre en compte un bénéfice net de 10 % du prix de vente final des meubles, ce qui prend en considération le fait que les défendeurs ont les mêmes coûts que la demanderesse et le fait que l'absence de frais de licence pour les défendeurs est compensée par les prix plus bas pratiqués par les défendeurs (c. VII.2.4.2). Vu que ce ne sont que les actes de publicité qui sont illicites et qu'ils touchent avant tout les acheteurs individuels (et non les revendeurs), il convient d'estimer à 62 % du bénéfice net le gain à restituer à la demanderesse et de réduire encore légèrement ce montant afin de tenir compte du fait que d'éventuelles ventes du modèle LC1 ne violent ni la LDA ni la LCD (c. VII.2.4.3).

Fig. 2a – Table LC6
Fig. 2a – Table LC6
Fig. 2b – Chaise LC7
Fig. 2b – Chaise LC7

02 mai 2011

TF, 2 mai 2011, 4A_78/2011 (d)

sic! 9/2011, p. 504-509, « Le-Corbusier-Möbel III » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, meuble, individualité, Le Corbusier, imitation, contrat de vente, action en interdiction, action en cessation, abus de droit, conclusion, concurrence déloyale ; art. 2 al. 1 LDA, art. 2 al. 2 lit. f LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 62 al. 1 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 3 lit. e LCD, art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP.

À l'exception du remplacement de la condition de l'originalité par celle de l'individualité (c. 2.1), la définition de l'œuvre (art. 2 al. 1 LDA) n'a pas été modifiée par la LDA de 1992 (c. 2.4). Il n'y a pas de raison de revenir sur la décision du TF (ATF 113 II 190) selon laquelle le siège LC 1 ne présente pas un degré d'individualité suffisant (il est similaire à deux sièges créés antérieurement par des tiers) pour être qualifié d'œuvre (des arts appliqués [art. 2 al. 2 lit. f LDA]) et être protégé par la LDA (c. 2.4). Dans le cadre d'une action en interdiction (art. 62 al. 1 lit. a LDA) ou en cessation (art. 62 al. 1 lit. b LDA), le demandeur doit indiquer précisément ce qui doit être interdit au défendeur. Le juge est lié par les conclusions du demandeur (c. 3.2). En l'espèce, la vente, par les intimés (italiens), d'imitation de divers meubles « Le Corbusier » à des clients suisses est régie par le droit italien (art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat déjà. Il ne peut donc pas être considéré que les intimés — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. 3.4). Doit dès lors être rejetée la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de vendre en Suisse (« in der Schweiz zu verkaufen ») ces imitations de meubles (c. 3.4-3.7). Est en revanche admise la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de proposer au public, en particulier à la vente via Internet, ces meubles en Suisse (c. 3.3). La LCD ne prohibe en principe pas l'imitation. Si elle interdit l'utilisation de prestations dans des circonstances particulières relevant de la concurrence, elle ne protège pas pour autant ces prestations en tant que telles (c. 4.1). Du fait que, dans leur publicité pour l'imitation du siège LC 1, ils ne se réfèrent pas à « Le Corbusier », ni n'utilisent son nom, ni ne font allusion à la série de meubles « LC », ni ne font usage des expressions « Original-Qualität » ou « klassische Ausführung », les intimés ne violent pas l'art. 3 lit. d et e LCD (c. 4.2).

07 janvier 2015

TF, 7 janvier 2015, 4A_442/2014 (f)

sic! 4/2015, p. 255-259, « Mécanisme de déclenchement » ; droit à la délivrance du brevet, for, internationalité, brevet, montre, titularité du brevet, domicile du défendeur, lieu du domicile du défendeur, contrat tacite, interprétation du contrat, transfert du droit à la délivrance du brevet, réelle et commune intention des parties, territorialité ; art. 105 al. 2 LTF, art. 1 al. 2 CO, art. 18 al. 1 CO, art. 332 al. 1 CO, art. 3 LBI, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 14 al. 1 CPC, art. 2 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 al. 3 LDIP, art. 122 LDIP.

Lorsqu’une action tend seulement à faire contraindre le défendeur à accomplir des démarches juridiques destinées au transfert du brevet, le jugement le condamnant n’exerce qu’une influence médiate sur la titularité de ce bien immatériel et la contrainte ne résulte que de la menace d’une sanction pénale à infliger par les autorités suisses. Cette action n’est pas clairement exclue par l’art. 109 al. 1 LDIP. Elle n’est visée par aucune disposition spécifique de la loi, de sorte que les tribunaux suisses du lieu du domicile du défendeur sont compétents par l’effet de l’art. 2 LDIP (c. 2). Lorsque les deux parties ont leur siège ou domicile en Suisse et que le défendeur a fourni ses services dans ce pays, le droit suisse est applicable à leurs relations contractuelles conformément aux art. 110 al. 3 et 122 LDIP (c. 3). L’inventeur peut valablement transférer à une autre personne le droit d’introduire une demande de brevet, puis de devenir titulaire du brevet, avant même le dépôt d’une telle demande. Ce transfert n’est soumis à aucune condition de forme. Déjà avant l’achèvement de l’invention et la naissance du droit au brevet correspondant, l’inventeur peut convenir avec une autre personne que ce droit lui appartiendra d’emblée; c’est le régime ordinairement prévu par l’art. 332 al. 1 CO dans les relations entre travailleurs et employeurs. L’inventeur peut d’ailleurs aussi s’obliger valablement et par avance à exécuter, le moment venu, les actes éventuellement nécessaires à un transfert du droit au brevet (c. 4). En cas de litige sur la portée d’un accord intervenu entre l’inventeur et une autre personne revendiquant le droit au brevet, le juge doit au premier chef s’efforcer de déterminer conformément à l’art. 18 al. 1 CO leur réelle et commune intention, ce qui relève de la constatation des faits. Au stade des déductions à opérer sur la base d’indices, lesquelles relèvent elles aussi de la constatation des faits, le comportement que les cocontractants ont adopté dans l’exécution de leur accord peut éventuellement dénoter de quelle manière ils l’ont eux-mêmes compris et révéler ainsi leur réelle et commune intention (c. 4). Le comportement du défendeur, qui a personnellement concouru à ce que les droits de propriété intellectuelle afférents à la création au développement de laquelle il a collaboré soient acquis par la demanderesse – en souscrivant un acte de cession de ces droits, en répondant aux demandes d’instructions du mandataire de la demanderesse et en consentant ainsi de manière implicite au moins au fait que cette dernière dépose la demande de brevet correspondant à l’invention concernée – dénote avec certitude qu’il admettait, selon sa propre conception de la collaboration rémunérée par la demanderesse, que les droits de propriété intellectuelle se rapportant à la création à laquelle il avait collaboré, revenaient à cette dernière. Pour le TF, le défendeur a ainsi implicitement admis que le droit à la délivrance du brevet appartenait d’emblée à la demanderesse ou que, à défaut, en particulier pour les brevets américains, ils devaient lui être transférés avec son concours. Le TF procède d’office en application de l’art. 105 al. 2 LTF à cette constatation de fait qui pour lui s’impose (c. 5). L’acquisition de droits de propriété intellectuelle en contrepartie d’une rémunération peut faire l’objet d’un contrat tacitement, mais valablement conclu entre les parties, conformément à l’art. 1 al. 2 CO. Il importe peu que le lien entre la rémunération versée et l’invention considérée ne ressorte peut-être pas clairement du libellé des factures établies par le défendeur. Ce contrat englobe tous les brevets d’invention afférents au mécanisme concerné, y compris celui faisant l’objet du litige. Il autorise la demanderesse à exiger le transfert de ce brevet aussi, quelle que soit la qualification des relations contractuelles nouées entre les parties (c. 5). [NT]

CO (RS 220)

- Art. 1

-- al. 2

- Art. 332

-- al. 1

- Art. 18

-- al. 1

CPC (RS 272)

- Art. 14

-- al. 1

- Art. 5

-- al. 1 lit. a

LBI (RS 232.14)

- Art. 3

LDIP (RS 291)

- Art. 122

- Art. 2

- Art. 109

-- al. 1

-- al. 2

- Art. 110

-- al. 3

LTF (RS 173.110)

- Art. 105

-- al. 2

28 octobre 2014

TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 (d)

sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie », mesures provisionnelles, mesures superprovisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, entrave à l’exécution, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 935 (TFB, 4 février 2015, S2014_008).

Les deux parties ayant leur siège aux États-Unis, les tribunaux suisses compétents pour prononcer des mesures provisoires sont les tribunaux ou les autorités suisses compétents au fond ou ceux du lieu d’exécution de la mesure au sens de l’art. 10 LDIP (c. 2.1). L’action au fond est une demande en cession selon l’art. 29 LBI de deux demandes de brevet suisses. Elle a été introduite devant le TFB le 25 septembre 2014. Les mesures provisoires requises visent à faire interdire tout acte de disposition éventuel des demandes de brevet en question et à faire porter la mention de la restriction du droit de disposer au registre des brevets. L’action en cession de l’art. 29 LBI est, aux côtés des actions portant sur la validité et l’inscription de droits de propriété intellectuelle, une action d’état au sens de l’art. 109 al. 1 LDIP qui se rapporte à l’existence du droit de propriété intellectuelle ou à son titulaire. En outre, la mesure doit être exécutée en Suisse puisque les autorités suisses qui tiennent le registre, soit l’IPI, sont requises d’y porter l’annotation d’une restriction du droit de disposer des demandes de brevet. La compétence du TFB à raison du lieu et à raison de la matière découle à la fois des art. 1, 10 et 109 al. 1 LDIP, ainsi que de l’art. 26 LTFB (c. 2.2). Le droit suisse est applicable selon l’art. 110 al. 1 LDIP (c. 2.3). Le TFB suit l’argumentaire de la demanderesse selon lequel un dommage difficilement réparable résulterait du fait que la défenderesse, en transférant les deux demandes de brevet à un tiers, rendrait plus difficile, si ce n’est absolument impossible, la mise en œuvre de l’action en cession. En cédant les demandes de brevet à un tiers, la défenderesse perdrait sa légitimité passive et l’introduction d’une nouvelle action en cession contre l’acquéreur des demandes de brevet s’imposerait, ce qui retarderait de manière importante la procédure et entraînerait une augmentation des coûts. Le TFB retient que l’octroi des mesures requises qu’il soit fait interdiction à la défenderesse de céder le droit à la délivrance des deux demandes de brevet litigieuses ou de leur apporter des modifications, est de nature à supprimer le risque d’entrave à l’exécution, en particulier en lien avec l’ordre supplémentaire donné à l’autorité qui tient le registre d’y porter cette restriction du droit de disposer. Le risque d’entrave à l’exécution ne peut être supprimé que par l’octroi de mesures provisionnelles immédiates sans audition préalable de la défenderesse, au sens de l’art. 265 al. 1 CPC. Pour le TFB, les mesures superprovisionnelles requises sont proportionnées et ne sont pas de nature à porter préjudice à la défenderesse si cette dernière ne peut pas momentanément transférer ou modifier les demandes de brevet déposées. La requête de mesures superprovisionnelles est ainsi admise et il est donné l’ordre à l’IPI, en vertu des art. 262 lit. c CPC et 105 al. 1 lit. d OBI de porter au registre les restrictions correspondantes au droit de disposer des demandes de brevet concernées (c. 4.2). Le TFB assortit, au titre de mesure d’exécution, l’interdiction de disposer des demandes de brevet, respectivement de les modifier, de la menace d’une amende d’ordre de CHF 5 000.- au sens de l’art. 236 al. 3 CPC en lien avec l’art. 343 al. 1 lit. b CPC. [NT]

04 février 2015

TFB, 4 février 2015, S2014_008 (d)

Mesures provisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, droit de réplique inconditionnel, formalisme excessif préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 934 (TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 ; sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie »).

L’arrêt du TFB du 4 février 2015 rendu dans la même cause que celui du TFB du 28 octobre 2014 porte sur des mesures provisoires, alors que le précédent visait à l’obtention de mesures superprovisionnelles. Il est renvoyé au résumé de l’arrêt du 28 octobre 2014 (cf. N 934 c. 2.1-c. 2.3) pour les considérants se rapportant au for, au droit applicable, ainsi qu’à la compétence matérielle du TFB qui sont identiques. Le TFB admet que lorsque les allégués d’une requête de mesures provisoires seraient identiques à ceux de l’action au fond dont les mesures provisoires visent à garantir l’exécution et qui a été déposée simultanément, il serait contraire au principe de l’interdiction du formalisme excessif d’exiger que ces allégués soient reproduits dans la demande de mesures provisoires et de refuser un renvoi à ceux de la demande principale (c. 11). Le droit de réplique inconditionnel vaut aussi dans les procédures de mesures provisionnelles. Il n’est toutefois tenu compte dans ce cadre que des prises de position de la demanderesse suscitées par les allégations de la défenderesse. Les explications de la défenderesse qui iraient au-delà ne sont pas prises en considération (c. 11). [NT]

07 avril 2014

HG ZH, 7 avril 2014, HG110271 (d)

Usage privé, droit international privé, transfert de droits d’auteur, principe du traitement national, principe du créateur, compétence exclusive, droits non soumis à un enregistrement, violation des droits de propriété intellectuelle, recueil, revue, articles scientifiques, service de livraison de documents, appareil pour la confection de copies, envoi électronique, copie numérique, copie papier, bibliothèque, tiers chargé d'effectuer une reproduction, action en interdiction, qualité pour agir des sociétés de gestion, tarifs des sociétés de gestion, interprétation conforme à la constitution, méthodes d’interprétation, interprétation conforme au droit international, triple test, exemplaire d’œuvre disponible sur le marché ; art. 5 ch. 1 CB, art. 9 ch. 2 CB, art. 2 ch. 1 CL, art. 22 ch. 4 CL, art. 4 LDA, art. 6 LDA, art. 19 al. 2 LDA, art. 19 al. 3 lit. a LDA, art. 19 al. 3bis LDA, art. 20 LDA, art. 46 LDA, art. 59 al. 3 LDA, art. 62 al. 1 LDA, art. 70 LDA, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 LDIP ; cf. N 787 (TF, 28 novembre 2014, 4A_295/2014 [ATF 140 III 616] ; sic! 3/2015, p. 155-164, « Bibliothekslieferdienst »).

La compétence exclusive prévue par l’art. 22 ch. 4 CL n’est pas applicable aux litiges concernant des droits non soumis à un enregistrement. Par conséquent, la compétence générale de l’art. 2 ch. 1 CL s’applique. D’après l’art. 109 al. 2 LDIP, les tribunaux suisses du domicile du défendeur sont compétents pour connaître des actions portant sur la violation des droits de propriété intellectuelle (c. 1.1). D’après l’art. 5 al. 1 lit. a CPC, c’est le droit cantonal qui détermine le tribunal qui fonctionne comme instance cantonale unique pour les affaires de propriété intellectuelle (c. 1.2). Le transfert aux demanderesses des droits sur différents articles scientifiques, ou l’octroi à celles-ci d’une licence exclusive, a été prouvé par les contrats produits (c. 1.3). En revanche, la question de savoir si ces demanderesses disposent des droits sur les revues contenant lesdits articles est incertaine et il faut préalablement déterminer quelle est la loi applicable à cette question (c. 1.4). D’après l’art. 110 al. 1 LDIP, les droits de propriété intellectuelle sont régis par la loi de l’État pour lequel la protection est demandée (lex loci protectionis). L’art. 5 al. 1 CB prévoit en outre le principe du traitement national, selon lequel les ayants droit étrangers bénéficient des mêmes droits que les nationaux. En l’espèce, la question de l’existence des droits d’auteur se juge d’après la loi du pays de protection. Comme les demanderesses invoquent la protection du droit d’auteur suisse, c’est le droit suisse qui est applicable (c. 2.1.1). La loi du pays de protection est aussi applicable aux prétendues violations des droits de propriété intellectuelle, de même qu’aux effets de ces droits (contenu, limite et protection). D’après l’art. 110 al. 2 LDIP en revanche, s’agissant des conséquences juridiques d’une violation, les parties peuvent toujours convenir, après l'événement dommageable, de l'application du droit du for aux prétentions résultant de l’acte illicite. Mais en l’espèce, les demanderesses invoquent aussi la loi du pays de protection pour les actions en interdiction qu’elles font valoir. L’art. 110 al. 2 LDIP n’est donc pas applicable (c. 2.1.2). En résumé, le droit suisse gouverne l’ensemble du litige (c. 2.1.3). Seule une personne physique peut acquérir originairement des droits d’auteur. D’après l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre. Une cession des droits d’auteur à l’employeur doit être alléguée et prouvée. Le droit suisse ne connaît aucun transfert automatique des droits d’auteur à l’employeur. Il est possible que les revues contenant les divers articles scientifiques soient des recueils au sens de l’art. 4 LDA. Toutefois, les demanderesses n’ont pas suffisamment allégué détenir les droits sur ces revues (c. 2.2.1). Par conséquent, il faut seulement examiner en l’espèce si les droits sur les différents articles ont été violés (c. 2.2.2). Une action en interdiction nécessite un intérêt à la protection actuel et suffisant. Les conclusions doivent viser des actes concrets et doivent être formulées de manière suffisamment précise pour que les autorités d’exécution puissent reconnaître les actes interdits au défendeur (c. 2.4.1). Les droits à rémunération pour l’usage privé ne peuvent être exercés que par les sociétés de gestion agréées. La qualité pour agir de ces dernières découle de la loi (art. 20 al. 2 LDA) et ne nécessite aucun fondement contractuel avec les ayants droit. Les sociétés de gestion doivent établir des tarifs (art. 46 LDA). Une fois approuvés par la CAF, ceux-ci lient le juge d’après l’art. 59 al. 3 LDA. Le juge civil doit cependant vérifier que les tarifs ne prévoient pas de droits à rémunération contraires à la loi (c. 2.5). Le TF s’est prononcé en faveur d’un pluralisme pragmatique des méthodes d’interprétation et refuse de les hiérarchiser selon un ordre de priorité. Si plusieurs interprétations sont possibles, il faut donner la préférence à celle qui correspond le mieux à la Constitution. Une interprétation conforme à la Constitution ne peut toutefois pas contredire le texte clair d’une disposition légale. Pour l’interprétation d’une limite au droit d’auteur, il faut tenir compte des droits constitutionnels en cause, en particulier de la garantie de la propriété et des libertés de communication, de même que des traités internationaux, en particulier du test des trois étapes (c. 2.6.2.1). Une œuvre offerte à la vente par Internet est disponible sur le marché au sens de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA (c. 2.6.2.2). Le point de vue du Message de 1989, selon lequel les différents articles d’une revue ne seraient pas des exemplaires d’œuvres au sens de cette dernière disposition, ne paraît plus soutenable vu l’évolution technologique. Il faut opter pour une interprétation conforme aux réalités d’aujourd’hui lorsque les différents articles scientifiques peuvent être acquis individuellement par les consommateurs par voie électronique. L’avis du Message, selon lequel seule la copie intégrale [de la revue] ferait concurrence à la distribution de l’œuvre, n’est plus actuel: le consommateur moyen s’intéresse aujourd’hui beaucoup plus aux différents articles qu’à la revue entière. Ces articles sont donc des exemplaires d’œuvres au sens de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA (c. 2.6.2.3.3). Cette disposition ne protège pas seulement la première exploitation de l’œuvre. Il y a reproduction de la totalité ou de l’essentiel des exemplaires d’œuvres, au sens de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA, lorsque l’acquisition d’un exemplaire complet devient inintéressante pour le consommateur moyen. Le fait que le layout ou la numérotation des pages soient changés n’est pas déterminant (c. 2.6.2.4). Vu les travaux préparatoires de 1989, il se justifie de retenir comme seul critère déterminant pour l’application de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA celui de la mise en concurrence directe des prestations de l’éditeur: les copies qui font concurrence directement à ces prestations ne doivent pas être admises. Le service de livraison de documents exploité par la défenderesse représente bien une telle concurrence (c. 2.6.4). En revanche, en application de ce critère, les copies réalisées par les consommateurs dans les locaux d’une bibliothèque, au moyen des appareils mis à disposition par cette bibliothèque, doivent rester admissibles. Sinon, les libertés constitutionnelles de communication seraient compromises, de même que l’équilibre des intérêts entre les exploitants et la collectivité. Le but de l’art. 19 al. 2 LDA est de permettre à celui qui ne dispose pas d’un appareil de reproduction de réaliser les copies grâce à l’aide d’un tiers. Exiger que ce dernier fasse partie du cercle privé de la personne concernée ne paraît ni praticable ni suffisant. Dans ce cadre, la personne qui réalise une copie numérique, par exemple au moyen d’un scanner installé par une bibliothèque, peut certainement aussi se faire envoyer cette copie à son adresse électronique, bien que l’art. 19 al. 2 LDA ne concerne que l’acte de reproduction. Mais l’exploitation d’un service de livraison de documents, comprenant l’envoi des copies moyennant paiement d’un émolument, ne fait pas partie des activités habituelles d’une bibliothèque. Cela représente une concurrence directe pour les services en ligne des éditeurs et porte atteinte à l’exploitation normale des œuvres au sens du test des trois étapes (c. 2.6.5). La situation ne serait différente que si les copies étaient réalisées par les personnes visées par l’art. 19 al. 1 LDA elles-mêmes, grâce à un appareil mis à disposition par la bibliothèque. En effet, avec un service de livraison de documents, la bibliothèque fait concurrence aux éditeurs en réclamant une rémunération et en offrant aux consommateurs la possibilité de gagner du temps, comme s’ils recouraient aux services en ligne des éditeurs. Il est conforme à l’équilibre des intérêts voulu par le législateur d’exiger des consommateurs qu’il se rendent physiquement dans les locaux d’une bibliothèque pour pouvoir librement réaliser les copies (c. 2.6.6). L’art. 19 al. 3bis LDA n’a pas pour effet de rendre illicites les services en ligne payants des éditeurs et ces derniers ne se rendent pas coupables de l’infraction prévue à l’art. 70 LDA. Au demeurant, par son service de livraison de documents, la défenderesse copie sur demande les articles litigieux et les envoie en PDF par voie électronique à la personne qui les a commandés. Cette prestation n’est pas couverte par l’art. 19 al. 3bis LDA car elle n’est pas identique à celle d’un service comme iTunes. Au surplus, il n’y a pas de consultation au sens de cette disposition, et les œuvres n’ont pas été mises à disposition licitement (c. 2.7.2). La vente d’articles scientifiques isolés par Internet fait partie de l’exploitation normale de l’œuvre au sens du test des trois étapes. Pour savoir s’il est porté atteinte à celle-ci, le nombre de copies réalisées par la défenderesse n’est pas déterminant et peut d’ailleurs considérablement varier selon l’intérêt des consommateurs (c. 2.9.3). Il est possible que les intérêts des auteurs et des éditeurs divergent parfois. Mais l’intérêt légitime des premiers à ce que leurs œuvres scientifiques soient largement diffusées est suffisamment sauvegardé par le fait que les consommateurs ont la possibilité de réaliser des copies dans les locaux des bibliothèques, même si les éditeurs commercialisent les articles en ligne, et par le fait qu’ils peuvent utiliser ces offres en ligne (c. 2.9.4). [VS]

05 janvier 2015

HG AG, 5 janvier 2015, HSU.2014.68/DP/mv (d) (mes. prov.)

sic! 7-8/2015, p. 449-455, « Totenkopf-Tatoo » ; mesures provisionnelles, droit international privé, vraisemblance, œuvre de service, montre, présomption de la qualité d’auteur, principe du créateur, risque de récidive, précision des conclusions, œuvre, double création, préjudice irréparable, urgence, péremption du droit d’agir, principe de la proportionnalité ; art. 2 ch. 1 CL, art. 60 ch. 1 CL, art. 332 al. 1 CO, art. 2 al. 1 LDA, art. 6 LDA, art. 8 LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 261 al. 1 CPC, art. 343 al. 1CPC, art. 10LDIP, art. 109 al. 2LDIP, art. 110 al. 1LDIP, art. 129 LDIP, art. 292 CP.

La CL prévoit une compétence internationale des tribunaux suisses pour prononcer des mesures provisionnelles. Au niveau national, la compétence locale se détermine d’après l’art. 10 LDIP, qui l’attribue soit aux tribunaux compétents au fond, soit aux tribunaux du lieu d’exécution de la mesure (c. 2.2). Comme l’intimée a son siège à Genève, il existe une compétence internationale des tribunaux suisses pour se prononcer sur le fond, d’après les art. 2 ch. 1 et 60 ch. 1 CL (c. 2.3). Au niveau national, les art. 109 al. 2 et 129 LDIP prévoient la compétence des tribunaux du lieu de l’acte ou du résultat. Comme le requérant a rendu vraisemblable que les montres litigieuses pouvaient être commandées à Wettingen et étaient livrées depuis là, la compétence des tribunaux argoviens est donnée (c. 2.4). Pour obtenir une interdiction par voie de mesures provisionnelles, le requérant doit rendre vraisemblable que les conditions de l’art. 261 al. 1 CPC sont remplies (c. 4). Une allégation est vraisemblable lorsque le juge n’est pas totalement convaincu de sa véracité, mais qu’il la considère comme globalement vraie, quand bien même tous les doutes ne peuvent être écartés. Certains éléments doivent parler pour les faits prétendus, même si le tribunal compte encore avec l’éventualité qu’ils puissent ne pas être réalisés (c. 5). D’après l’art. 110 al. 1 LDIP, les droits de la propriété intellectuelle sont régis par le droit de l'État pour lequel la protection de la propriété intellectuelle est revendiquée (c. 6.2.1). Le principe connu en droit anglais du « work for hire », selon lequel le droit d’auteur appartient originairement à l’employeur ou au mandant du créateur, n’est donc pas applicable en l’espèce (c. 6.2.2). L’art. 8 LDA prévoit une présomption légale de la qualité d’auteur et un renversement du fardeau de la preuve: celui qui est indiqué comme auteur sur l’exemplaire de l’œuvre ou au moment de sa publication bénéficie de la protection de la LDA, jusqu’à preuve du contraire. D’après le principe du créateur de l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre et l’art. 332 al. 1 CO n’est pas applicable (c. 6.3.1). Le requérant a ainsi la légitimation active (c. 6.3.3). Ses conclusions sont suffisamment précises et il faut retenir un risque de récidive, car il est rendu vraisemblable que l’intimée fabrique et commercialise les montres visées par l’interdiction (c. 6.4.2). Pour déterminer si la tête de mort dessinée par le requérant est protégée, il est décisif de savoir s’il s’agit d’une création de l’esprit humain ayant un caractère individuel. C’est l’individualité de l’œuvre qui est déterminante, pas celle de l’auteur (c. 6.5.2). L’intimée n’est pas parvenue à rendre vraisemblable qu’il existait d’autres créations semblables à celle du requérant, avant que celui-ci ne réalise la sienne. Cette dernière à la qualité d’œuvre au sens de l’art. 2 LDA (c. 6.5.3). Quant à lui, le requérant a rendu vraisemblable que sa tête de mort, sur les montres litigieuses, était reconnaissable dans son caractère individuel. L’allégation de l’intimée, selon laquelle elle se serait inspirée de crânes en sucre mexicains, sans connaître l’œuvre du requérant, n’est pas suffisamment motivée pour pouvoir juger d’une éventuelle double création (c. 6.6.3). Il est notoire que les actions en dommages-intérêts, dans le domaine de la propriété intellectuelle, sont souvent très coûteuses et difficiles à mener. De plus, il paraît vraisemblable qu’une menace de dilution du droit d’auteur pèse sur le requérant, en raison des actes illicites, ce qui pourrait aussi nuire à sa réputation. La condition du préjudice difficile à réparer est donc réalisée (c. 7.3 et 7.4). L’urgence existe lorsqu’un procès ordinaire durerait clairement plus longtemps qu’une procédure de mesures provisionnelles. Une éventuelle péremption du droit d’agir se juge d’après la durée du procès au fond (c. 8.2). En l’espèce, le requérant a attendu environ un an avant de demander des mesures provisionnelles. Cela est clairement inférieur au temps nécessaire pour obtenir un jugement au fond, si bien que la condition de l’urgence est réalisée (c. 8.3 et 8.4). L’interdiction provisionnelle doit toutefois satisfaire au principe de la proportionnalité: elle se limitera à ce qui est nécessaire (c. 9 et 9.1). L’interdiction de mettre en circulation les montres litigieuses et de les promouvoir est proportionnée, mais pas celle de les garder en stock (c. 9.3.2). Comme mesures d’exécution, la menace de la peine prévue à l’art. 292 CP et l’amende d’ordre selon l’art. 343 al. 1 lit. b CPC sont appropriées (c. 10). [VS]

CL (RS 0.275.12)

- Art. 60

-- ch. 1

- Art. 2

-- ch. 1

CO (RS 220)

- Art. 332

-- al. 1

CP (RS 311.0)

- Art. 292

CPC (RS 272)

- Art. 343

-- al. 1

- Art. 261

-- al. 1

LDA (RS 231.1)

- Art. 8

- Art. 6

- Art. 62

-- al. 1 lit. a

- Art. 2

-- al. 1

LDIP (RS 291)

- Art. 10

- Art. 109

-- al. 2

- Art. 129

- Art. 110

-- al. 1

07 novembre 2013

TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 (d)

sic! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II » ; for, compétence matérielle, droit transitoire, dispositions transitoires, entrée en vigueur, effet rétroactif, moyens de preuve, lieu de l’acte, lieu du résultat, action en fourniture de renseignements, produits érotiques, préservatif ; art. 109 al. 2 LDIP, art. 191 al. 1 LDIP, art. 197 al. 2 LDIP ; cf. N 415 (vol. 2007-2011 ; KG SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 ; sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter /Harry Popper (fig.) ») et N 902 (TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014 ; arrêt du TF dans cette affaire).

C’est à juste titre que l’autorité précédente a considéré que dans le cadre d’une action portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle, la détermination du lieu de l'acte ou du résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP ne concernait que la compétence de l’autorité et non le bien-fondé de l’action (c. 2.2). Cependant, c’est à tort que cette autorité a appliqué le régime de droit transitoire de l’art. 196 al. 1 LDIP à des questions de compétence au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP. L’art. 197 LDIP, qui établit le régime de droit transitoire relatif aux questions de compétence, prévoit que le nouveau droit s’applique dès son entrée en vigueur avec effet rétroactif. L’erreur de l’autorité de première instance l’a conduite à refuser, en violation du droit fédéral, une partie des moyens de preuves établissant les actes contrefaisants et leur résultat qui étaient soumis par la demanderesse, au motif qu’ils étaient antérieurs à l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP. Pour cette raison déjà, la décision attaquée doit être révoquée et l’affaire renvoyée à l’autorité précédente pour un nouvel examen (c. 2.3). L’autorité de première instance aurait dû examiner les moyens de preuve suggérant que des livraisons et des ventes avaient été réalisées dans le canton de Schwyz (après l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP), car la livraison et la vente de marchandises contrefaites peuvent constituer des actes ou un résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP (c. 2.4). [AC]

26 janvier 2015

TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014 (d)

Marque combinée, action en constatation de la nullité d’une marque, action en remise du gain, action en dommage et intérêts, action en cessation, action en interdiction, action en fourniture de renseignements, décision intermédiaire, décision incidente, produits pornographiques, préservatif, valeur litigieuse, valeur litigieuse minimale, constatation des faits, arbitraire, arbitraire dans la constatation des faits, appréciation des preuves, administration des preuves, libre appréciation des preuves, fardeau de la preuve, déclaration incomplète, droit d’être entendu, grief irrecevable, interpellation du tribunal, interprétation d’un témoignage, témoin, for ; art. 29 al. 2 Cst., art. 30 Cst., art. 42 al. 1 LTF, art. 42 al. 2 LTF, art. 74 al. 2 lit. b LTF, art. 92 al. 1 LTF, art. 95 LTF, art. 99 LTF, art. 105 al. 1 LTF, art. 106 al. 1 LTF, art. 8 CC, art. 53 CPC, art. 56 CPC, art. 153 CPC, art. 154 CPC, art. 157 CPC, art. 172 CPC, art. 109 al. 2 LDIP, cf. N 415 (vol. 2007-2011 ; Kantonsgericht SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 ; sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) » ; arrêt du tribunal cantonal schwyzois dans cette affaire) et N 900 (TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 ; sic! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II »).

Un recours en matière civile interjeté contre une décision incidente portant sur la compétence du tribunal au sens de l’art. 92 al. 1 LTF est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 lit. b LTF) (c. 1.1). Le TF ne peut rectifier ou compléter la constatation des faits effectuée par l’autorité précédente que s’ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l’art. 95 LTF. De façon manifestement inexacte signifie arbitraire. Il faut en outre que la correction du vice soit décisive pour le sort de la procédure (art. 97 al. 1 LTF). La partie qui attaque les constatations de faits de l’autorité précédente doit démontrer clairement et de manière substantielle en quoi ces conditions sont remplies. Dans la mesure où elle désire compléter l’état de fait, cette partie doit démontrer, pièces à l’appui, qu’elle avait déjà allégué les faits relevants en question et proposé les moyens de preuves correspondants, conformément à la procédure devant l’autorité précédente. Des faits nouveaux et des preuves nouvelles ne peuvent être présentés que si la décision de l’autorité précédente en donne l’occasion au sens de l’art. 99 al. 1 LTF, ce qui doit être exposé précisément dans le recours (c. 1.3). La recourante qui qualifie de contradictoires et manifestement inexacts les propos tenus par les témoins au vu des exploits échangés dans la procédure cantonale et du comportement adopté dans cette procédure par le représentant de la partie adverse, et qui accessoirement remet en question la crédibilité du témoin, exerce des griefs de nature appellatoire concernant l’appréciation des preuves effectuée par l’autorité précédente, sur lesquels le TF n’entre pas en matière (c. 2.1.2). Du moment que, contrairement à ce que soutient la recourante, la déclaration du témoin n’était ni peu claire, ni contradictoire, ni non plus manifestement incomplète, il n’est pas non plus évident que le tribunal aurait dû, en application par analogie de l’art. 56 CPC, donner l’occasion au témoin, par des questions ciblées, de clarifier et de compléter sa déclaration (c. 2.2.2). L’autorité précédente a ainsi retenu, sans violer le droit fédéral, qu’il ne pouvait qu’être raisonnablement déduit du témoignage intervenu que le témoin confirmait avoir vu et acheté dans la filiale du canton de Schwyz un paquet de préservatifs du type de celui litigieux (c. 2.2.3). La recourante adresse des griefs purement appellatoires concernant le résultat de l’administration des preuves opérée par l’autorité précédente. Elle ne démontre pas qu’une offre de preuves qu’elle aurait proposée régulièrement et en temps utile aurait été refusée, ni non plus dans quelle mesure l’autorité précédente se serait considérée de manière inadmissible comme liée, dans son administration des preuves, par des règles de preuves formelles. La recourante méconnaît en particulier le fait que le principe de la libre appréciation des preuves de l’art. 157 CPC ne change rien au fait que le résultat de l’appréciation des preuves effectuée par l’autorité précédente lie le TF. L’art. 157 CPC n’a ainsi pas pour conséquence que l’appréciation des preuves en elle-même constituerait une question de droit soumise au libre examen du TF selon l’art. 95 CPC. L’art. 8 CC ne prescrit pas par quels moyens les faits doivent être clarifiés, ni comment le résultat de l’administration des preuves doit être apprécié. La recourante n’établit enfin pas lequel de ses arguments concrets aurait été omis par l’autorité précédente, de sorte qu’elle aurait été empêchée, en violation de son droit d’être entendue, de faire valoir son point de vue dans la procédure. Le TF confirme ainsi que l’autorité précédente a retenu, sans violation du droit fédéral, sa compétence à raison du lieu (c. 3.2). [NT]

22 janvier 2014

AG BS, 22 janvier 2014, ZK.2014.3 (AG.2014.98) (d) (mes.prov.)

Conditions de la protection du design, mesures provisionnelles, instance cantonale unique, internationalité, for, droit international privé, urgence, délai de péremption, nouveauté en droit des designs, originalité en droit des designs, élément caractéristique essentiel, impression générale, souvenir à court terme, caractère techniquement nécessaire, besoin de libre disposition, étendue de la protection, charnière, parois de douche ; art. 2 LDes, art. 4 lit. c LDes, art. 8 LDes, art. 21 LDes, art. 29 LDes, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 5 al. 2 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 10 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP.

L’instance cantonale unique compétente en vertu de l’art. 5 al. 1 lit. a CPC pour connaître des litiges portant sur des droits de propriété intellectuelle, y compris en matière de nullité, de titularité, de licence, de transfert et de violation de ces droits, l’est aussi selon l’art. 5 al. 2 CPC pour statuer sur les mesures provisionnelles requises avant litispendance (c. 1.1). Selon l’art. 10 LDIP, sont compétents pour prononcer des mesures provisoires les tribunaux ou les autorités suisses qui sont compétents au fond (lit. a), ou les tribunaux ou les autorités suisses du lieu d’exécution de la mesure (lit. b). La demanderesse fait valoir une violation de droits de propriété intellectuelle pour laquelle la compétence internationale est déterminée par l’art. 109 al. 2 LDIP. Les actions portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle peuvent ainsi être intentées devant les tribunaux suisses du domicile du demandeur, ou à défaut ceux du lieu de l’acte ou du résultat. Pour les charnières de cloisons de douche qui seront effectivement présentées dans le cadre de l’exposition internationale Swissbau se tenant à Bâle (et pour celles-là uniquement), Bâle est bien un lieu de résultat fondant la compétence à raison du lieu des tribunaux bâlois (c. 1.2). Pour que des mesures provisionnelles puissent être ordonnées dans le cadre de l’art. 261 al. 1 CPC, il est nécessaire de rendre vraisemblable l’existence d’une prétention de nature civile fondée sur le droit civil matériel, que cette prétention est l’objet d’une atteinte ou risque de l’être et que cette atteinte causerait un préjudice difficilement réparable au titulaire de la prétention. L’art. 261 CPC ne mentionne pas explicitement l’exigence d’une urgence temporelle, ni non plus celle de proportionnalité, les mesures prises ne devant pas aller plus loin que ce qui est nécessaire à la protection de la prétention rendue vraisemblable (c. 2). Il y a urgence lorsque la procédure ordinaire (jusqu’à la décision de l’autorité de dernière instance dans la mesure où un recours est doté d’effet suspensif) durerait clairement plus longtemps que la procédure sur mesures provisionnelles. Les mesures provisionnelles supposent ainsi l’existence d’une urgence relative, les mesures superprovisionnelles, elles, une urgence particulière. Le fait pour un demandeur d’avoir traîné ou attendu pour agir ne conduit en principe au rejet de la requête que si des mesures superprovisionnelles sont demandées. Des mesures provisionnelles peuvent-elles être requises tant et aussi longtemps que demeure le risque que la prétention ne puisse plus être exécutée à temps ou complètement, notamment lorsque de nouvelles atteintes sont à craindre. La passivité n’est assimilée, en lien avec des mesures provisionnelles, à une attente constitutive d’abus de droit, qu’après un temps extrêmement long. Un délai, comme en l’espèce de quelques mois (3-4 mois), ne suffit pas à lever l’urgence relative des mesures provisionnelles, et ne saurait être assimilé à une attente constitutive d’abus de droit (c. 3.2). Pour déterminer l’originalité des charnières pour parois de douche concernées, il convient de comparer l’impression d’ensemble qu’elles dégagent de celle résultant pour leurs acquéreurs potentiels des éléments caractéristiques essentiels des charnières préexistantes (c. 4.3). L’exigence d’originalité implique que le design considéré se différencie par l’impression d’ensemble qu’il suscite de manière objective de ce qui était déjà connu. Un design nouveau et original peut tout à fait être banal s’il se distingue du point de vue de son impression d’ensemble, soit par des éléments caractéristiques essentiels, clairement de ce qui préexistait. La Cour considère que tel est le cas pour la charnière pour paroi de douche de la demanderesse dont elle admet à la foi l’originalité et la nouveauté (c. 4.3.2). Pour que la protection du droit du design entre en ligne de compte, il faut aussi que la forme choisie ne soit pas exclusivement conditionnée par la technique. Le besoin de libre disposition doit ainsi être pris en compte et découle de l’absence de liberté dans la détermination des formes retenues. Le droit exclusif découlant d’un enregistrement de design ne peut et ne doit limiter la concurrence dans le choix de la forme de ses produits que dans la mesure où la forme enregistrée n’est pas la simple expression du but utilitaire recherché et dictée par la fonctionnalité de l’objet de telle façon qu’il ne subsiste aucune liberté de création pour atteindre l’effet technique voulu. Un besoin général de libre disposition doit être nié tant qu’il existe des solutions alternatives permettant d’atteindre le même effet technique. L’existence de formes alternatives suffit pour justifier la protection du design. Des charnières de parois de douche peuvent revêtir une multitude de formes différentes, lesquelles ne sont dès lors pas exclusivement imposées par leur fonction au sens de l’art. 4 lit. c LDes (c. 4.4). Les exigences en matière d’examen de l’originalité au sens de l’art. 2 LDes sont les mêmes que celles concernant la détermination du champ de protection au sens de l’art. 8 LDes. L’impression d’ensemble de l’utilisateur intéressé est ainsi à nouveau déterminante. Il ne s’agit pas de procéder à une comparaison simultanée des designs en cause pour mettre en évidence des ressemblances ou des différences de détail. Le juge doit se concentrer sur les éléments caractéristiques essentiels qui déterminent l’impression d’ensemble et les apprécier en fonction de sa conception propre. De simples différences de détail ne suffisent pas pour que les designs puissent coexister. C’est en fonction du souvenir à court terme que l’acquéreur potentiel conserve des charnières concernées qu’il doit être tranché. La Cour considère que les charnières de la défenderesse reprennent justement l’élément caractéristique essentiel de celles de la demanderesse. La différence de quelques millimètres dans la mesure de la fente des charnières ne modifie pas l’impression d’ensemble qui en résulte. Il en va de même pour les autres détails dans les proportions et la forme des différents éléments constitutifs des charnières, qui ne peuvent être relevés qu’après une comparaison attentive et simultanée des produits, et ne sont pas susceptibles de demeurer dans le souvenir que l’acquéreur potentiel gardera à court terme des deux charnières (c. 5.4). [NT]

Charnière de douche
Charnière de douche

07 janvier 2015

TF, 7 janvier 2015, 4A_442/2014 (f)

sic! 4/2015, p. 255-259, « Mécanisme de déclenchement » ; droit à la délivrance du brevet, for, internationalité, brevet, montre, titularité du brevet, domicile du défendeur, lieu du domicile du défendeur, contrat tacite, interprétation du contrat, transfert du droit à la délivrance du brevet, réelle et commune intention des parties, territorialité ; art. 105 al. 2 LTF, art. 1 al. 2 CO, art. 18 al. 1 CO, art. 332 al. 1 CO, art. 3 LBI, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 14 al. 1 CPC, art. 2 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 al. 3 LDIP, art. 122 LDIP.

Lorsqu’une action tend seulement à faire contraindre le défendeur à accomplir des démarches juridiques destinées au transfert du brevet, le jugement le condamnant n’exerce qu’une influence médiate sur la titularité de ce bien immatériel et la contrainte ne résulte que de la menace d’une sanction pénale à infliger par les autorités suisses. Cette action n’est pas clairement exclue par l’art. 109 al. 1 LDIP. Elle n’est visée par aucune disposition spécifique de la loi, de sorte que les tribunaux suisses du lieu du domicile du défendeur sont compétents par l’effet de l’art. 2 LDIP (c. 2). Lorsque les deux parties ont leur siège ou domicile en Suisse et que le défendeur a fourni ses services dans ce pays, le droit suisse est applicable à leurs relations contractuelles conformément aux art. 110 al. 3 et 122 LDIP (c. 3). L’inventeur peut valablement transférer à une autre personne le droit d’introduire une demande de brevet, puis de devenir titulaire du brevet, avant même le dépôt d’une telle demande. Ce transfert n’est soumis à aucune condition de forme. Déjà avant l’achèvement de l’invention et la naissance du droit au brevet correspondant, l’inventeur peut convenir avec une autre personne que ce droit lui appartiendra d’emblée; c’est le régime ordinairement prévu par l’art. 332 al. 1 CO dans les relations entre travailleurs et employeurs. L’inventeur peut d’ailleurs aussi s’obliger valablement et par avance à exécuter, le moment venu, les actes éventuellement nécessaires à un transfert du droit au brevet (c. 4). En cas de litige sur la portée d’un accord intervenu entre l’inventeur et une autre personne revendiquant le droit au brevet, le juge doit au premier chef s’efforcer de déterminer conformément à l’art. 18 al. 1 CO leur réelle et commune intention, ce qui relève de la constatation des faits. Au stade des déductions à opérer sur la base d’indices, lesquelles relèvent elles aussi de la constatation des faits, le comportement que les cocontractants ont adopté dans l’exécution de leur accord peut éventuellement dénoter de quelle manière ils l’ont eux-mêmes compris et révéler ainsi leur réelle et commune intention (c. 4). Le comportement du défendeur, qui a personnellement concouru à ce que les droits de propriété intellectuelle afférents à la création au développement de laquelle il a collaboré soient acquis par la demanderesse – en souscrivant un acte de cession de ces droits, en répondant aux demandes d’instructions du mandataire de la demanderesse et en consentant ainsi de manière implicite au moins au fait que cette dernière dépose la demande de brevet correspondant à l’invention concernée – dénote avec certitude qu’il admettait, selon sa propre conception de la collaboration rémunérée par la demanderesse, que les droits de propriété intellectuelle se rapportant à la création à laquelle il avait collaboré, revenaient à cette dernière. Pour le TF, le défendeur a ainsi implicitement admis que le droit à la délivrance du brevet appartenait d’emblée à la demanderesse ou que, à défaut, en particulier pour les brevets américains, ils devaient lui être transférés avec son concours. Le TF procède d’office en application de l’art. 105 al. 2 LTF à cette constatation de fait qui pour lui s’impose (c. 5). L’acquisition de droits de propriété intellectuelle en contrepartie d’une rémunération peut faire l’objet d’un contrat tacitement, mais valablement conclu entre les parties, conformément à l’art. 1 al. 2 CO. Il importe peu que le lien entre la rémunération versée et l’invention considérée ne ressorte peut-être pas clairement du libellé des factures établies par le défendeur. Ce contrat englobe tous les brevets d’invention afférents au mécanisme concerné, y compris celui faisant l’objet du litige. Il autorise la demanderesse à exiger le transfert de ce brevet aussi, quelle que soit la qualification des relations contractuelles nouées entre les parties (c. 5). [NT]

CO (RS 220)

- Art. 1

-- al. 2

- Art. 332

-- al. 1

- Art. 18

-- al. 1

CPC (RS 272)

- Art. 14

-- al. 1

- Art. 5

-- al. 1 lit. a

LBI (RS 232.14)

- Art. 3

LDIP (RS 291)

- Art. 122

- Art. 2

- Art. 109

-- al. 1

-- al. 2

- Art. 110

-- al. 3

LTF (RS 173.110)

- Art. 105

-- al. 2

24 avril 2007

TF, 24 avril 2007, 4C.40/2007 (i)

sic! 11/2007, p. 822-824, « Zero / Zerorh+ fig.) II » ; for, internationalité, action en constatation de la non-violation d’une marque, droit des brevets d’invention, délit, dommage, lunettes, vêtements ; art. 5 ch. 1 et 3 CL, art. 16 ch. 4 CL, art. 109 al. 3 LDIP.

La CL s’applique aux causes qui ont un caractère international et détermine directement aussi la compétence interne lorsqu’une partie est attraite devant les tribunaux d’un État différent de celui dans lequel se trouve son siège ou son domicile (c. 7.1). Lorsque l’action n’a pas pour objet la validité d’une marque ou de son enregistrement, mais porte, comme en l’espèce, sur la constatation d’une non-violation du droit à la marque d’un tiers du fait de l’utilisation d’un signe donné, l’application de l’art. 16 ch. 4 CL (litiges en matière d’inscription ou de validité des brevets) n’entre pas en ligne de compte, pas plus que celle de l’art. 109 al. 3 LDIP, qui ne pourrait intervenir qu’en complément à l’art. 16 ch. 4 CL (c. 7.2). Pour les délits et les quasi-délits, l’art. 5 ch. 3 CL institue, comme for alternatif au for ordinaire du domicile du défendeur, le for du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire. Le dommage considéré est celui découlant de toute responsabilité non contractuelle au sens de l’art. 5 ch. 1 CL. Sont ainsi visées par l’art. 5 ch. 3 CL les actions qui ont trait à une violation des droits de propriété intellectuelle (c. 7.3). L’application de l’art. 5 ch. 3 CL à une action en constatation négative de droit découle de la notion même de fait dommageable, qui est l’acte lésant les droits d’un tiers et pas ses conséquences patrimoniales. Ce qui compte n’est donc pas le dommage au sens étroit en tant que préjudice économique, mais l’acte qui le provoque et le lieu de survenance de celui-ci. Dans les actions concernant la violation de droits de propriété intellectuelle, le fait dommageable est l’acte qui lèse les droits en question et pas le préjudice patrimonial subi par leurs titulaires (c. 7.4.1). En l’espèce, le fait dommageable, résidant dans l’utilisation de la marque « Zerorh+ (fig.) » sur des lunettes et des vêtements sportifs, est intervenu au Tessin. Ce fait dommageable suffit pour fonder la compétence du tribunal, indépendamment de la question de savoir où un dommage économique s’est lui éventuellement matérialisé (c. 7.6).

Zerorh+ (fig.)
Zerorh+ (fig.)

07 avril 2014

HG ZH, 7 avril 2014, HG110271 (d)

Usage privé, droit international privé, transfert de droits d’auteur, principe du traitement national, principe du créateur, compétence exclusive, droits non soumis à un enregistrement, violation des droits de propriété intellectuelle, recueil, revue, articles scientifiques, service de livraison de documents, appareil pour la confection de copies, envoi électronique, copie numérique, copie papier, bibliothèque, tiers chargé d'effectuer une reproduction, action en interdiction, qualité pour agir des sociétés de gestion, tarifs des sociétés de gestion, interprétation conforme à la constitution, méthodes d’interprétation, interprétation conforme au droit international, triple test, exemplaire d’œuvre disponible sur le marché ; art. 5 ch. 1 CB, art. 9 ch. 2 CB, art. 2 ch. 1 CL, art. 22 ch. 4 CL, art. 4 LDA, art. 6 LDA, art. 19 al. 2 LDA, art. 19 al. 3 lit. a LDA, art. 19 al. 3bis LDA, art. 20 LDA, art. 46 LDA, art. 59 al. 3 LDA, art. 62 al. 1 LDA, art. 70 LDA, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 LDIP ; cf. N 787 (TF, 28 novembre 2014, 4A_295/2014 [ATF 140 III 616] ; sic! 3/2015, p. 155-164, « Bibliothekslieferdienst »).

La compétence exclusive prévue par l’art. 22 ch. 4 CL n’est pas applicable aux litiges concernant des droits non soumis à un enregistrement. Par conséquent, la compétence générale de l’art. 2 ch. 1 CL s’applique. D’après l’art. 109 al. 2 LDIP, les tribunaux suisses du domicile du défendeur sont compétents pour connaître des actions portant sur la violation des droits de propriété intellectuelle (c. 1.1). D’après l’art. 5 al. 1 lit. a CPC, c’est le droit cantonal qui détermine le tribunal qui fonctionne comme instance cantonale unique pour les affaires de propriété intellectuelle (c. 1.2). Le transfert aux demanderesses des droits sur différents articles scientifiques, ou l’octroi à celles-ci d’une licence exclusive, a été prouvé par les contrats produits (c. 1.3). En revanche, la question de savoir si ces demanderesses disposent des droits sur les revues contenant lesdits articles est incertaine et il faut préalablement déterminer quelle est la loi applicable à cette question (c. 1.4). D’après l’art. 110 al. 1 LDIP, les droits de propriété intellectuelle sont régis par la loi de l’État pour lequel la protection est demandée (lex loci protectionis). L’art. 5 al. 1 CB prévoit en outre le principe du traitement national, selon lequel les ayants droit étrangers bénéficient des mêmes droits que les nationaux. En l’espèce, la question de l’existence des droits d’auteur se juge d’après la loi du pays de protection. Comme les demanderesses invoquent la protection du droit d’auteur suisse, c’est le droit suisse qui est applicable (c. 2.1.1). La loi du pays de protection est aussi applicable aux prétendues violations des droits de propriété intellectuelle, de même qu’aux effets de ces droits (contenu, limite et protection). D’après l’art. 110 al. 2 LDIP en revanche, s’agissant des conséquences juridiques d’une violation, les parties peuvent toujours convenir, après l'événement dommageable, de l'application du droit du for aux prétentions résultant de l’acte illicite. Mais en l’espèce, les demanderesses invoquent aussi la loi du pays de protection pour les actions en interdiction qu’elles font valoir. L’art. 110 al. 2 LDIP n’est donc pas applicable (c. 2.1.2). En résumé, le droit suisse gouverne l’ensemble du litige (c. 2.1.3). Seule une personne physique peut acquérir originairement des droits d’auteur. D’après l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre. Une cession des droits d’auteur à l’employeur doit être alléguée et prouvée. Le droit suisse ne connaît aucun transfert automatique des droits d’auteur à l’employeur. Il est possible que les revues contenant les divers articles scientifiques soient des recueils au sens de l’art. 4 LDA. Toutefois, les demanderesses n’ont pas suffisamment allégué détenir les droits sur ces revues (c. 2.2.1). Par conséquent, il faut seulement examiner en l’espèce si les droits sur les différents articles ont été violés (c. 2.2.2). Une action en interdiction nécessite un intérêt à la protection actuel et suffisant. Les conclusions doivent viser des actes concrets et doivent être formulées de manière suffisamment précise pour que les autorités d’exécution puissent reconnaître les actes interdits au défendeur (c. 2.4.1). Les droits à rémunération pour l’usage privé ne peuvent être exercés que par les sociétés de gestion agréées. La qualité pour agir de ces dernières découle de la loi (art. 20 al. 2 LDA) et ne nécessite aucun fondement contractuel avec les ayants droit. Les sociétés de gestion doivent établir des tarifs (art. 46 LDA). Une fois approuvés par la CAF, ceux-ci lient le juge d’après l’art. 59 al. 3 LDA. Le juge civil doit cependant vérifier que les tarifs ne prévoient pas de droits à rémunération contraires à la loi (c. 2.5). Le TF s’est prononcé en faveur d’un pluralisme pragmatique des méthodes d’interprétation et refuse de les hiérarchiser selon un ordre de priorité. Si plusieurs interprétations sont possibles, il faut donner la préférence à celle qui correspond le mieux à la Constitution. Une interprétation conforme à la Constitution ne peut toutefois pas contredire le texte clair d’une disposition légale. Pour l’interprétation d’une limite au droit d’auteur, il faut tenir compte des droits constitutionnels en cause, en particulier de la garantie de la propriété et des libertés de communication, de même que des traités internationaux, en particulier du test des trois étapes (c. 2.6.2.1). Une œuvre offerte à la vente par Internet est disponible sur le marché au sens de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA (c. 2.6.2.2). Le point de vue du Message de 1989, selon lequel les différents articles d’une revue ne seraient pas des exemplaires d’œuvres au sens de cette dernière disposition, ne paraît plus soutenable vu l’évolution technologique. Il faut opter pour une interprétation conforme aux réalités d’aujourd’hui lorsque les différents articles scientifiques peuvent être acquis individuellement par les consommateurs par voie électronique. L’avis du Message, selon lequel seule la copie intégrale [de la revue] ferait concurrence à la distribution de l’œuvre, n’est plus actuel: le consommateur moyen s’intéresse aujourd’hui beaucoup plus aux différents articles qu’à la revue entière. Ces articles sont donc des exemplaires d’œuvres au sens de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA (c. 2.6.2.3.3). Cette disposition ne protège pas seulement la première exploitation de l’œuvre. Il y a reproduction de la totalité ou de l’essentiel des exemplaires d’œuvres, au sens de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA, lorsque l’acquisition d’un exemplaire complet devient inintéressante pour le consommateur moyen. Le fait que le layout ou la numérotation des pages soient changés n’est pas déterminant (c. 2.6.2.4). Vu les travaux préparatoires de 1989, il se justifie de retenir comme seul critère déterminant pour l’application de l’art. 19 al. 3 lit. a LDA celui de la mise en concurrence directe des prestations de l’éditeur: les copies qui font concurrence directement à ces prestations ne doivent pas être admises. Le service de livraison de documents exploité par la défenderesse représente bien une telle concurrence (c. 2.6.4). En revanche, en application de ce critère, les copies réalisées par les consommateurs dans les locaux d’une bibliothèque, au moyen des appareils mis à disposition par cette bibliothèque, doivent rester admissibles. Sinon, les libertés constitutionnelles de communication seraient compromises, de même que l’équilibre des intérêts entre les exploitants et la collectivité. Le but de l’art. 19 al. 2 LDA est de permettre à celui qui ne dispose pas d’un appareil de reproduction de réaliser les copies grâce à l’aide d’un tiers. Exiger que ce dernier fasse partie du cercle privé de la personne concernée ne paraît ni praticable ni suffisant. Dans ce cadre, la personne qui réalise une copie numérique, par exemple au moyen d’un scanner installé par une bibliothèque, peut certainement aussi se faire envoyer cette copie à son adresse électronique, bien que l’art. 19 al. 2 LDA ne concerne que l’acte de reproduction. Mais l’exploitation d’un service de livraison de documents, comprenant l’envoi des copies moyennant paiement d’un émolument, ne fait pas partie des activités habituelles d’une bibliothèque. Cela représente une concurrence directe pour les services en ligne des éditeurs et porte atteinte à l’exploitation normale des œuvres au sens du test des trois étapes (c. 2.6.5). La situation ne serait différente que si les copies étaient réalisées par les personnes visées par l’art. 19 al. 1 LDA elles-mêmes, grâce à un appareil mis à disposition par la bibliothèque. En effet, avec un service de livraison de documents, la bibliothèque fait concurrence aux éditeurs en réclamant une rémunération et en offrant aux consommateurs la possibilité de gagner du temps, comme s’ils recouraient aux services en ligne des éditeurs. Il est conforme à l’équilibre des intérêts voulu par le législateur d’exiger des consommateurs qu’il se rendent physiquement dans les locaux d’une bibliothèque pour pouvoir librement réaliser les copies (c. 2.6.6). L’art. 19 al. 3bis LDA n’a pas pour effet de rendre illicites les services en ligne payants des éditeurs et ces derniers ne se rendent pas coupables de l’infraction prévue à l’art. 70 LDA. Au demeurant, par son service de livraison de documents, la défenderesse copie sur demande les articles litigieux et les envoie en PDF par voie électronique à la personne qui les a commandés. Cette prestation n’est pas couverte par l’art. 19 al. 3bis LDA car elle n’est pas identique à celle d’un service comme iTunes. Au surplus, il n’y a pas de consultation au sens de cette disposition, et les œuvres n’ont pas été mises à disposition licitement (c. 2.7.2). La vente d’articles scientifiques isolés par Internet fait partie de l’exploitation normale de l’œuvre au sens du test des trois étapes. Pour savoir s’il est porté atteinte à celle-ci, le nombre de copies réalisées par la défenderesse n’est pas déterminant et peut d’ailleurs considérablement varier selon l’intérêt des consommateurs (c. 2.9.3). Il est possible que les intérêts des auteurs et des éditeurs divergent parfois. Mais l’intérêt légitime des premiers à ce que leurs œuvres scientifiques soient largement diffusées est suffisamment sauvegardé par le fait que les consommateurs ont la possibilité de réaliser des copies dans les locaux des bibliothèques, même si les éditeurs commercialisent les articles en ligne, et par le fait qu’ils peuvent utiliser ces offres en ligne (c. 2.9.4). [VS]

08 février 2019

TF, 8 février 2019, 4A_433/2018 (d)

« Blocage de sites internet illicites » ; action en cessation, blocage de sites internet, fournisseur d’accès, responsabilité du fournisseur d’accès, solidarité, acte illicite, acte de participation, causalité adéquate, intérêt digne de protection, droit d’auteur, précision des conclusions, usage privé, piraterie ; art. 8 WCT, art. 42 al. 2 LTF, art. 76 al. 1 lit. b LTF, art. 106 al. 2 LTF, art. 4 CC, art. 28 CC, art. 50 CO, art. 19 al. 1 lit. a LDA, art. 24a LDA, art. 62 al. 1 LDA, art. 62 al. 3 LDA, art. 110 LDIP.

La recourante a un intérêt digne de protection à l’annulation ou à la modification de la décision. Son recours en matière civile est donc recevable, sous réserve qu’il soit suffisamment motivé (c. 1.1). Le droit d’auteur ne connait pas de disposition comme l’art. 66 lit. d LBI ou l’art. 9 al. 1 LDes qui traiterait des actes de participation. L’art. 50 CO ne règle pas seulement la responsabilité solidaire pour la réparation d’un dommage, mais il constitue la base légale de la responsabilité civile des participants. Cette disposition peut être invoquée non seulement en cas d’action réparatoire, mais aussi en cas d’action en cessation. Les normes particulières du droit de la personnalité – art. 28 al. 1 CC – ou des droits réels ne sont pas applicables en droit d’auteur. Comme l’action en dommages-intérêts, l’action en cessation suppose une violation du droit d’auteur et un rapport de causalité adéquate entre la contribution du participant attaqué et cette violation (c. 2.2.1). Les clients de l’intimée, auxquels celle-ci confère l’accès à Internet, n’accomplissent aucune violation du droit d’auteur en consommant des films : l’exception d’usage privé est applicable, même si ces films ont été mis à disposition illicitement. Il ne peut donc pas y avoir de responsabilité de l’intimée pour un acte de participation (c.2.2.2). La protection de la LDA s’étend aussi aux actes commis à l’étranger mais produisant leurs effets en Suisse (c. 2.2.3). La question est de savoir si l’intimée, qui fournit l’accès à Internet, répond selon l’art. 50 al. 1 CO pour une participation à la mise à disposition illicite des films. Le rapport de causalité adéquate doit être apprécié dans chaque cas particulier selon les règles du droit et de l’équité au sens de l’art. 4 CC. Il implique donc un jugement de valeur. Pour qu’une participation soit adéquate, il faut un rapport suffisamment étroit avec l’acte illicite (c. 2.3.1). La prestation de l’intimée se limite à fournir un accès automatisé à Internet. Elle n’offre pas à ses clients des contenus déterminés. Les copies temporaires qu’implique son activité sont licites d’après l’art. 24a LDA. La déclaration commune concernant l’art. 8 WCT exclut que la fourniture d'installations techniques constitue un acte principal de communication au public ; elle n’empêche toutefois pas une responsabilité pour participation secondaire. En l’espèce, les auteurs principaux des violations ne sont pas clients de l’intimée et n’ont aucune relation avec elle. L’acte de mise à disposition est accompli déjà lorsque les films sont placés sur Internet de sorte à pouvoir être appelés aussi depuis la Suisse. L’intimée ne contribue pas concrètement à cet acte. Admettre le contraire sur la base de l’art. 50 al. 1 CO conduirait à retenir une responsabilité de tous les fournisseurs d’accès en Suisse, pour toutes les violations du droit d’auteur commises sur le réseau mondial. Une telle responsabilité « systémique », impliquant des devoirs de contrôle et d’abstention sous la forme de mesures techniques de blocage d’accès, serait incompatible avec les principes de la responsabilité pour acte de participation. Il n’y a donc aucun rapport de causalité adéquat avec les violations, justifiant une action en cessation. Une implication des fournisseurs d’accès dans la lutte contre le piratage nécessiterait une intervention du législateur (c. 2.3.2). [VS]

26 septembre 2007

TF, 26 septembre 2007, 4A_142/2007 (f)

sic! 3/2008, p. 200-204, « DVDs » ; droits d’auteur, film, exploitation en cascade de films, DVD, contrat de licence, qualité pour agir du preneur de licence, dommage ; art. 41 CO, art. 12 al. 1bis LDA, art. 110 al. 1 LDIP.

La mise en location ou en vente, dans des villes suisses où les films sont encore exploités en salle, de DVDs de ces films est contraire au principe de l'exploitation en cascade des films et viole l'art. 12 al. 1bis LDA. Le preneur de licence chargé d'exploiter le film en salle a la qualité pour agir lorsque le contrat de licence prévoit qu'il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher que le film ne soit piraté sur le territoire concédé. La mise à disposition de DVDs, alors que le film n'est pas encore ou vient juste d'être diffusé au cinéma, est dans une relation de causalité adéquate avec le dommage constitué par la perte des recettes qui doit être fixé ex æquo et bono lorsque le défendeur refuse de collaborer à l'administration des preuves et de déposer les pièces comptables en sa possession. Il n'est ainsi pas arbitraire de considérer, sur la base d'une statistique de l'Office fédéral de la statistique, qu'il y a en moyenne deux spectateurs de perdus par DVD loué ou vendu et que le distributeur suisse d'un film peut prétendre à une redevance de 43 % du prix du billet de cinéma.

12 janvier 2010

TF, 12 janvier 2010, 4A_203/2009 (f)

ATF 136 III 232 ; sic! 5/2010, p. 341-348, « M6 III » ; medialex 2/2010, p. 109 (rés.) ; droits d’auteur, droit de diffusion, M6, satellite, théorie de l’État d’émission, théorie de la réception, oeuvre audiovisuelle, intégrité de l’oeuvre, publicité, concurrence déloyale, qualité pour agir du preneur de licence ; art. 10 al. 1 LDA, art. 10 al. 2 lit. d LDA, art. 11 al. 1 lit. a LDA, art. 110 al. 1 LDIP.

Le droit suisse est applicable en vertu de l'art. 110 al. 1 LDIP (c. 5). La transmission télévisée d'une œuvre, via un satellite, est soumise au droit exclusif de diffusion de l'auteur (art. 10 al. 2 lit. d LDA); la jurisprudence relative au droit de diffusion rendue sous l'aLDA reste valable (c. 6.1). Fondées sur la théorie de l'État d'émission (au sujet de la théorie de l'État d'émission et de la théorie de la réception, voir: c. 6.2 et 6.3), la Directive 93/83/CEE du 27 septembre 1993 — certes pas applicable en Suisse en tant que telle — et la Convention européenne du 14 mai 1994 (Convention STCE 153) — dont la ratification est désormais jugée superflue par la Suisse (c. 6.2) — constituent des éléments permettant de cerner, en matière de radiodiffusion par satellite, le fait générateur du droit d'auteur selon la LDA (c. 6.4). En droit d'auteur suisse, il convient de considérer que c'est la théorie de l'État d'émission qui s'applique à la radiodiffusion par satellite. Ainsi, le droit exclusif de diffusion de l'auteur (art. 10 al. 2 lit. d LDA) porte uniquement sur l'injection des signaux satellite porteurs de l'œuvre dans la chaîne de communication; la réception n'est a priori pas un fait appréhendé par le droit d'auteur suisse, sauf éventuellement à recourir à la clause générale de l'art. 10 al. 1 LDA, question que le TF laisse ouverte (c. 6.4). Les interruptions de publicité jalonnant la diffusion d'œuvres audiovisuelles constituent des atteintes au droit à l'intégrité de l'œuvre (art. 11 al. 1 lit. a LDA), car elles affectent l'atmosphère créée par l'œuvre et le rythme de la narration. En revanche, le contenu des messages publicitaires — en particulier le fait que les publicités soient destinées aux consommateurs suisses plutôt qu'aux consommateurs français — est sans incidence sur le droit à l'intégrité de l'œuvre, a fortiori lorsque les messages publicitaires précèdent ou suivent la diffusion de l'œuvre (c. 6.5). Il n'y a aucun motif lié à la protection des auteurs qui commanderait de traiter différemment la diffusion avec des fenêtres publicitaires spécifiquement destinées au public suisse (signal « suisse ») et la diffusion avec des fenêtres publicitaires spécifiquement destinées au public français (signal « français ») en soumettant à autorisation, en vertu du droit suisse, la diffusion transfrontière d'œuvres par le signal « suisse » (c. 6.5 in fine). La LDA ne s'applique pas à la diffusion par satellite d'œuvres depuis la France, même si le signal contient également des publicités destinées aux téléspectateurs suisses, car une telle diffusion ne rentre pas dans les comportements qui, selon la LDA, nécessitent l'autorisation des auteurs des œuvres diffusées (c. 6.6 et 8). Sous l'angle de la concurrence déloyale, un preneur de licence a la qualité pour agir, car la violation de droits immatériels de tiers est un comportement qui peut contrevenir aux règles de la bonne foi et influer sur les rapports entre le preneur de licence et ses clients (c. 7.3). En l'absence de violation de la LDA ou de tout autre acte déloyal, une violation de la LCD n'entre pas en ligne de compte (c. 8).

07 août 2012

TF, 7 août 2012, 4A_128/2012 (f)

sic! 1/2013, p. 41-46, « Vogue » (Schlosser Ralph, Remarque) ; droits conférés par la marque, marque de haute renommée, droit applicable, bonne foi, sondage, principe de la spécialité, concurrence déloyale, comportement parasitaire, usage de la marque, action en constatation de la nullité d’une marque ; art. 97 al. 1 LTF, art. 12 al. 3 LPM, art. 15 al. 1 LPM, art. 2 LCD, art. 110 al. 1 LDIP, art. 136 al. 1 LDIP.

Bien que les intimées aient leur siège à l'étranger, le droit suisse s'applique tant en ce qui concerne la concurrence déloyale, car l'activité illicite prétendue s'est déployée sur le marché suisse (art. 136 al. 1 LDIP), que s'agissant du droit des marques, car la protection de la propriété intellectuelle a été revendiquée pour la Suisse (art. 110 al. 1 LDIP) (c. 2). Un acte de concurrence déloyale ne suppose ni mauvaise foi, ni faute de son auteur, mais uniquement une violation objective des règles de la bonne foi. Avec leur argumentation, qui vise à démontrer leur intention subjective, les recourants cherchent à rectifier l'état de fait sur un point qui ne peut pas influencer le sort de la cause, ce qui est exclu par l'art. 97 al. 1 LTF (c. 3). La notion de haute renommée (art. 15 LPM) ressortit au droit, contrairement à la question de savoir si une marque est connue d'un large public et bénéficie d'une image positive auprès des personnes qui la connaissent (c. 4.1.1). Les recourants n'ayant pas sollicité la mise en œuvre d'un sondage pour établir que la marque « Vogue » s'est imposée comme marque de haute renommée, l'approche de la cour cantonale — qui s'est référée à une enquête démoscopique réalisée à la requête des intimées — est conforme à la jurisprudence. La marque « Vogue » a été reconnue et associée à un magazine par une personne sur quatre. Il s'agit donc d'une marque de haute renommée au sens de l'art. 15 al. 1 LPM (c. 4.1.2). C'est à tort que la cour cantonale a jugé que la marque de haute renommée ne conférait à son titulaire une protection étendue qu'aux produits similaires à ceux pour lesquels la marque s'est imposée (c. 4.2). Les intimées sont en droit d'interdire l'utilisation de la marque « Vogue » pour toutes les catégories de biens et services et non seulement pour celles pour lesquelles leur marque est utilisée (c. 4.2.2). Il ne suffit pas d'alléguer le défaut d'usage pour en établir la vraisemblance. En l'espèce, les recourants auraient pu faire entendre des commerçants afin qu'ils puissent dire s'ils avaient déjà entendu parler de produits de la classe 14 portant les marques litigieuses (c. 5). Le recours est entièrement rejeté (c. 6). [JD]

05 janvier 2015

HG AG, 5 janvier 2015, HSU.2014.68/DP/mv (d) (mes. prov.)

sic! 7-8/2015, p. 449-455, « Totenkopf-Tatoo » ; mesures provisionnelles, droit international privé, vraisemblance, œuvre de service, montre, présomption de la qualité d’auteur, principe du créateur, risque de récidive, précision des conclusions, œuvre, double création, préjudice irréparable, urgence, péremption du droit d’agir, principe de la proportionnalité ; art. 2 ch. 1 CL, art. 60 ch. 1 CL, art. 332 al. 1 CO, art. 2 al. 1 LDA, art. 6 LDA, art. 8 LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 261 al. 1 CPC, art. 343 al. 1CPC, art. 10LDIP, art. 109 al. 2LDIP, art. 110 al. 1LDIP, art. 129 LDIP, art. 292 CP.

La CL prévoit une compétence internationale des tribunaux suisses pour prononcer des mesures provisionnelles. Au niveau national, la compétence locale se détermine d’après l’art. 10 LDIP, qui l’attribue soit aux tribunaux compétents au fond, soit aux tribunaux du lieu d’exécution de la mesure (c. 2.2). Comme l’intimée a son siège à Genève, il existe une compétence internationale des tribunaux suisses pour se prononcer sur le fond, d’après les art. 2 ch. 1 et 60 ch. 1 CL (c. 2.3). Au niveau national, les art. 109 al. 2 et 129 LDIP prévoient la compétence des tribunaux du lieu de l’acte ou du résultat. Comme le requérant a rendu vraisemblable que les montres litigieuses pouvaient être commandées à Wettingen et étaient livrées depuis là, la compétence des tribunaux argoviens est donnée (c. 2.4). Pour obtenir une interdiction par voie de mesures provisionnelles, le requérant doit rendre vraisemblable que les conditions de l’art. 261 al. 1 CPC sont remplies (c. 4). Une allégation est vraisemblable lorsque le juge n’est pas totalement convaincu de sa véracité, mais qu’il la considère comme globalement vraie, quand bien même tous les doutes ne peuvent être écartés. Certains éléments doivent parler pour les faits prétendus, même si le tribunal compte encore avec l’éventualité qu’ils puissent ne pas être réalisés (c. 5). D’après l’art. 110 al. 1 LDIP, les droits de la propriété intellectuelle sont régis par le droit de l'État pour lequel la protection de la propriété intellectuelle est revendiquée (c. 6.2.1). Le principe connu en droit anglais du « work for hire », selon lequel le droit d’auteur appartient originairement à l’employeur ou au mandant du créateur, n’est donc pas applicable en l’espèce (c. 6.2.2). L’art. 8 LDA prévoit une présomption légale de la qualité d’auteur et un renversement du fardeau de la preuve: celui qui est indiqué comme auteur sur l’exemplaire de l’œuvre ou au moment de sa publication bénéficie de la protection de la LDA, jusqu’à preuve du contraire. D’après le principe du créateur de l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre et l’art. 332 al. 1 CO n’est pas applicable (c. 6.3.1). Le requérant a ainsi la légitimation active (c. 6.3.3). Ses conclusions sont suffisamment précises et il faut retenir un risque de récidive, car il est rendu vraisemblable que l’intimée fabrique et commercialise les montres visées par l’interdiction (c. 6.4.2). Pour déterminer si la tête de mort dessinée par le requérant est protégée, il est décisif de savoir s’il s’agit d’une création de l’esprit humain ayant un caractère individuel. C’est l’individualité de l’œuvre qui est déterminante, pas celle de l’auteur (c. 6.5.2). L’intimée n’est pas parvenue à rendre vraisemblable qu’il existait d’autres créations semblables à celle du requérant, avant que celui-ci ne réalise la sienne. Cette dernière à la qualité d’œuvre au sens de l’art. 2 LDA (c. 6.5.3). Quant à lui, le requérant a rendu vraisemblable que sa tête de mort, sur les montres litigieuses, était reconnaissable dans son caractère individuel. L’allégation de l’intimée, selon laquelle elle se serait inspirée de crânes en sucre mexicains, sans connaître l’œuvre du requérant, n’est pas suffisamment motivée pour pouvoir juger d’une éventuelle double création (c. 6.6.3). Il est notoire que les actions en dommages-intérêts, dans le domaine de la propriété intellectuelle, sont souvent très coûteuses et difficiles à mener. De plus, il paraît vraisemblable qu’une menace de dilution du droit d’auteur pèse sur le requérant, en raison des actes illicites, ce qui pourrait aussi nuire à sa réputation. La condition du préjudice difficile à réparer est donc réalisée (c. 7.3 et 7.4). L’urgence existe lorsqu’un procès ordinaire durerait clairement plus longtemps qu’une procédure de mesures provisionnelles. Une éventuelle péremption du droit d’agir se juge d’après la durée du procès au fond (c. 8.2). En l’espèce, le requérant a attendu environ un an avant de demander des mesures provisionnelles. Cela est clairement inférieur au temps nécessaire pour obtenir un jugement au fond, si bien que la condition de l’urgence est réalisée (c. 8.3 et 8.4). L’interdiction provisionnelle doit toutefois satisfaire au principe de la proportionnalité: elle se limitera à ce qui est nécessaire (c. 9 et 9.1). L’interdiction de mettre en circulation les montres litigieuses et de les promouvoir est proportionnée, mais pas celle de les garder en stock (c. 9.3.2). Comme mesures d’exécution, la menace de la peine prévue à l’art. 292 CP et l’amende d’ordre selon l’art. 343 al. 1 lit. b CPC sont appropriées (c. 10). [VS]

CL (RS 0.275.12)

- Art. 60

-- ch. 1

- Art. 2

-- ch. 1

CO (RS 220)

- Art. 332

-- al. 1

CP (RS 311.0)

- Art. 292

CPC (RS 272)

- Art. 343

-- al. 1

- Art. 261

-- al. 1

LDA (RS 231.1)

- Art. 8

- Art. 6

- Art. 62

-- al. 1 lit. a

- Art. 2

-- al. 1

LDIP (RS 291)

- Art. 10

- Art. 109

-- al. 2

- Art. 129

- Art. 110

-- al. 1

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

28 octobre 2014

TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 (d)

sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie », mesures provisionnelles, mesures superprovisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, entrave à l’exécution, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 935 (TFB, 4 février 2015, S2014_008).

Les deux parties ayant leur siège aux États-Unis, les tribunaux suisses compétents pour prononcer des mesures provisoires sont les tribunaux ou les autorités suisses compétents au fond ou ceux du lieu d’exécution de la mesure au sens de l’art. 10 LDIP (c. 2.1). L’action au fond est une demande en cession selon l’art. 29 LBI de deux demandes de brevet suisses. Elle a été introduite devant le TFB le 25 septembre 2014. Les mesures provisoires requises visent à faire interdire tout acte de disposition éventuel des demandes de brevet en question et à faire porter la mention de la restriction du droit de disposer au registre des brevets. L’action en cession de l’art. 29 LBI est, aux côtés des actions portant sur la validité et l’inscription de droits de propriété intellectuelle, une action d’état au sens de l’art. 109 al. 1 LDIP qui se rapporte à l’existence du droit de propriété intellectuelle ou à son titulaire. En outre, la mesure doit être exécutée en Suisse puisque les autorités suisses qui tiennent le registre, soit l’IPI, sont requises d’y porter l’annotation d’une restriction du droit de disposer des demandes de brevet. La compétence du TFB à raison du lieu et à raison de la matière découle à la fois des art. 1, 10 et 109 al. 1 LDIP, ainsi que de l’art. 26 LTFB (c. 2.2). Le droit suisse est applicable selon l’art. 110 al. 1 LDIP (c. 2.3). Le TFB suit l’argumentaire de la demanderesse selon lequel un dommage difficilement réparable résulterait du fait que la défenderesse, en transférant les deux demandes de brevet à un tiers, rendrait plus difficile, si ce n’est absolument impossible, la mise en œuvre de l’action en cession. En cédant les demandes de brevet à un tiers, la défenderesse perdrait sa légitimité passive et l’introduction d’une nouvelle action en cession contre l’acquéreur des demandes de brevet s’imposerait, ce qui retarderait de manière importante la procédure et entraînerait une augmentation des coûts. Le TFB retient que l’octroi des mesures requises qu’il soit fait interdiction à la défenderesse de céder le droit à la délivrance des deux demandes de brevet litigieuses ou de leur apporter des modifications, est de nature à supprimer le risque d’entrave à l’exécution, en particulier en lien avec l’ordre supplémentaire donné à l’autorité qui tient le registre d’y porter cette restriction du droit de disposer. Le risque d’entrave à l’exécution ne peut être supprimé que par l’octroi de mesures provisionnelles immédiates sans audition préalable de la défenderesse, au sens de l’art. 265 al. 1 CPC. Pour le TFB, les mesures superprovisionnelles requises sont proportionnées et ne sont pas de nature à porter préjudice à la défenderesse si cette dernière ne peut pas momentanément transférer ou modifier les demandes de brevet déposées. La requête de mesures superprovisionnelles est ainsi admise et il est donné l’ordre à l’IPI, en vertu des art. 262 lit. c CPC et 105 al. 1 lit. d OBI de porter au registre les restrictions correspondantes au droit de disposer des demandes de brevet concernées (c. 4.2). Le TFB assortit, au titre de mesure d’exécution, l’interdiction de disposer des demandes de brevet, respectivement de les modifier, de la menace d’une amende d’ordre de CHF 5 000.- au sens de l’art. 236 al. 3 CPC en lien avec l’art. 343 al. 1 lit. b CPC. [NT]

04 février 2015

TFB, 4 février 2015, S2014_008 (d)

Mesures provisionnelles, for, droit international privé, action en cession d’une demande de brevet, action d’état, compétence matérielle, tribunal fédéral des brevets, droit applicable, droit de réplique inconditionnel, formalisme excessif préjudice difficilement réparable, transfert d’une demande de brevet, vraisemblance, restriction au droit de disposer ; art. 26 LTFB, art. 29 LBI, art. 105 al. 1 lit. d OBI, art. 236 al. 3 CPC, art. 261 al. 1 CPC, art. 262 lit. a CPC, art. 262 lit. c CPC, art. 265 al. 1 CPC, art. 343 al. 1 lit. b CPC, art. 1 LDIP, art. 10 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP ; cf. N 934 (TFB, 28 octobre 2014, S2014_008 ; sic! 6/2015, p. 398-399, « Kombinationstherapie »).

L’arrêt du TFB du 4 février 2015 rendu dans la même cause que celui du TFB du 28 octobre 2014 porte sur des mesures provisoires, alors que le précédent visait à l’obtention de mesures superprovisionnelles. Il est renvoyé au résumé de l’arrêt du 28 octobre 2014 (cf. N 934 c. 2.1-c. 2.3) pour les considérants se rapportant au for, au droit applicable, ainsi qu’à la compétence matérielle du TFB qui sont identiques. Le TFB admet que lorsque les allégués d’une requête de mesures provisoires seraient identiques à ceux de l’action au fond dont les mesures provisoires visent à garantir l’exécution et qui a été déposée simultanément, il serait contraire au principe de l’interdiction du formalisme excessif d’exiger que ces allégués soient reproduits dans la demande de mesures provisoires et de refuser un renvoi à ceux de la demande principale (c. 11). Le droit de réplique inconditionnel vaut aussi dans les procédures de mesures provisionnelles. Il n’est toutefois tenu compte dans ce cadre que des prises de position de la demanderesse suscitées par les allégations de la défenderesse. Les explications de la défenderesse qui iraient au-delà ne sont pas prises en considération (c. 11). [NT]

07 janvier 2015

TF, 7 janvier 2015, 4A_442/2014 (f)

sic! 4/2015, p. 255-259, « Mécanisme de déclenchement » ; droit à la délivrance du brevet, for, internationalité, brevet, montre, titularité du brevet, domicile du défendeur, lieu du domicile du défendeur, contrat tacite, interprétation du contrat, transfert du droit à la délivrance du brevet, réelle et commune intention des parties, territorialité ; art. 105 al. 2 LTF, art. 1 al. 2 CO, art. 18 al. 1 CO, art. 332 al. 1 CO, art. 3 LBI, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 14 al. 1 CPC, art. 2 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 al. 3 LDIP, art. 122 LDIP.

Lorsqu’une action tend seulement à faire contraindre le défendeur à accomplir des démarches juridiques destinées au transfert du brevet, le jugement le condamnant n’exerce qu’une influence médiate sur la titularité de ce bien immatériel et la contrainte ne résulte que de la menace d’une sanction pénale à infliger par les autorités suisses. Cette action n’est pas clairement exclue par l’art. 109 al. 1 LDIP. Elle n’est visée par aucune disposition spécifique de la loi, de sorte que les tribunaux suisses du lieu du domicile du défendeur sont compétents par l’effet de l’art. 2 LDIP (c. 2). Lorsque les deux parties ont leur siège ou domicile en Suisse et que le défendeur a fourni ses services dans ce pays, le droit suisse est applicable à leurs relations contractuelles conformément aux art. 110 al. 3 et 122 LDIP (c. 3). L’inventeur peut valablement transférer à une autre personne le droit d’introduire une demande de brevet, puis de devenir titulaire du brevet, avant même le dépôt d’une telle demande. Ce transfert n’est soumis à aucune condition de forme. Déjà avant l’achèvement de l’invention et la naissance du droit au brevet correspondant, l’inventeur peut convenir avec une autre personne que ce droit lui appartiendra d’emblée; c’est le régime ordinairement prévu par l’art. 332 al. 1 CO dans les relations entre travailleurs et employeurs. L’inventeur peut d’ailleurs aussi s’obliger valablement et par avance à exécuter, le moment venu, les actes éventuellement nécessaires à un transfert du droit au brevet (c. 4). En cas de litige sur la portée d’un accord intervenu entre l’inventeur et une autre personne revendiquant le droit au brevet, le juge doit au premier chef s’efforcer de déterminer conformément à l’art. 18 al. 1 CO leur réelle et commune intention, ce qui relève de la constatation des faits. Au stade des déductions à opérer sur la base d’indices, lesquelles relèvent elles aussi de la constatation des faits, le comportement que les cocontractants ont adopté dans l’exécution de leur accord peut éventuellement dénoter de quelle manière ils l’ont eux-mêmes compris et révéler ainsi leur réelle et commune intention (c. 4). Le comportement du défendeur, qui a personnellement concouru à ce que les droits de propriété intellectuelle afférents à la création au développement de laquelle il a collaboré soient acquis par la demanderesse – en souscrivant un acte de cession de ces droits, en répondant aux demandes d’instructions du mandataire de la demanderesse et en consentant ainsi de manière implicite au moins au fait que cette dernière dépose la demande de brevet correspondant à l’invention concernée – dénote avec certitude qu’il admettait, selon sa propre conception de la collaboration rémunérée par la demanderesse, que les droits de propriété intellectuelle se rapportant à la création à laquelle il avait collaboré, revenaient à cette dernière. Pour le TF, le défendeur a ainsi implicitement admis que le droit à la délivrance du brevet appartenait d’emblée à la demanderesse ou que, à défaut, en particulier pour les brevets américains, ils devaient lui être transférés avec son concours. Le TF procède d’office en application de l’art. 105 al. 2 LTF à cette constatation de fait qui pour lui s’impose (c. 5). L’acquisition de droits de propriété intellectuelle en contrepartie d’une rémunération peut faire l’objet d’un contrat tacitement, mais valablement conclu entre les parties, conformément à l’art. 1 al. 2 CO. Il importe peu que le lien entre la rémunération versée et l’invention considérée ne ressorte peut-être pas clairement du libellé des factures établies par le défendeur. Ce contrat englobe tous les brevets d’invention afférents au mécanisme concerné, y compris celui faisant l’objet du litige. Il autorise la demanderesse à exiger le transfert de ce brevet aussi, quelle que soit la qualification des relations contractuelles nouées entre les parties (c. 5). [NT]

CO (RS 220)

- Art. 1

-- al. 2

- Art. 332

-- al. 1

- Art. 18

-- al. 1

CPC (RS 272)

- Art. 14

-- al. 1

- Art. 5

-- al. 1 lit. a

LBI (RS 232.14)

- Art. 3

LDIP (RS 291)

- Art. 122

- Art. 2

- Art. 109

-- al. 1

-- al. 2

- Art. 110

-- al. 3

LTF (RS 173.110)

- Art. 105

-- al. 2

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

09 décembre 2011

TF, 9 décembre 2011, 4A_692/2011 (d)

Action, action en fourniture de renseignements, violation d’un brevet, cause à caractère pécuniaire, droit international privé, droit étranger, arbitraire, décision étrangère, contrat, prescription, délai, abus de droit ; art. 96 lit. b LTF, art. 2 al. 2 CC, art. 18 LDIP, art. 117 al. 2 et 3 LDIP, art. 148 LDIP, § 199 al. 1 dBGB.

En vertu des art. 117 al. 2 et 3 et 148 LDIP, le droit allemand est applicable à la demande de renseignements litigieuse (c. 2). D'après l'art. 96 lit. b LTF, dans une affaire pécuniaire, un recours ne peut être formé que pour application arbitraire (c. 2.2) du droit étranger désigné par le droit international privé suisse (c. 2.1). Les recourantes ont été condamnées en Allemagne, dans le cadre d'un jugement constatant la violation d'un brevet, à fournir à B. des renseignements portant sur la commercialisation de cartouches d'encre (c. A). Ne constitue pas une application arbitraire du § 199 al. 1 dBGB le fait de considérer que le délai de prescription (de 3 ans) — auquel est soumis le droit à des renseignements (au sujet d'informations auxquelles les recourantes n'avaient pas accès dans le cadre de leurs rapports contractuels avec l'intimée) litigieux (c. 3) — a commencé à courir le 31 décembre 2003, c'est-à-dire à la fin de l'année durant laquelle le jugement allemand a été rendu et durant laquelle les recourantes ont donc eu connaissance du fondement de leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée. N'y change rien le fait que B. n'ait (par écrit), que le 25 février 2008, invité les recourantes à faire valoir leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée (c. 3.1-3.2). En application de l'art. 18 LDIP et vu que la cause présente un lien suffisant avec la Suisse, c'est conformément au droit suisse (art. 2 al. 2 CC) que doit être jugée la question de savoir si l'exception de prescription est soulevée de manière abusive par l'intimée (c. 4.1). En l'occurrence, le comportement de l'intimée n'est pas constitutif d'un abus de droit (c. 4.2).

09 décembre 2011

TF, 9 décembre 2011, 4A_692/2011 (d)

Action, action en fourniture de renseignements, violation d’un brevet, cause à caractère pécuniaire, droit international privé, droit étranger, arbitraire, décision étrangère, contrat, prescription, délai, abus de droit ; art. 96 lit. b LTF, art. 2 al. 2 CC, art. 18 LDIP, art. 117 al. 2 et 3 LDIP, art. 148 LDIP, § 199 al. 1 dBGB.

En vertu des art. 117 al. 2 et 3 et 148 LDIP, le droit allemand est applicable à la demande de renseignements litigieuse (c. 2). D'après l'art. 96 lit. b LTF, dans une affaire pécuniaire, un recours ne peut être formé que pour application arbitraire (c. 2.2) du droit étranger désigné par le droit international privé suisse (c. 2.1). Les recourantes ont été condamnées en Allemagne, dans le cadre d'un jugement constatant la violation d'un brevet, à fournir à B. des renseignements portant sur la commercialisation de cartouches d'encre (c. A). Ne constitue pas une application arbitraire du § 199 al. 1 dBGB le fait de considérer que le délai de prescription (de 3 ans) — auquel est soumis le droit à des renseignements (au sujet d'informations auxquelles les recourantes n'avaient pas accès dans le cadre de leurs rapports contractuels avec l'intimée) litigieux (c. 3) — a commencé à courir le 31 décembre 2003, c'est-à-dire à la fin de l'année durant laquelle le jugement allemand a été rendu et durant laquelle les recourantes ont donc eu connaissance du fondement de leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée. N'y change rien le fait que B. n'ait (par écrit), que le 25 février 2008, invité les recourantes à faire valoir leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée (c. 3.1-3.2). En application de l'art. 18 LDIP et vu que la cause présente un lien suffisant avec la Suisse, c'est conformément au droit suisse (art. 2 al. 2 CC) que doit être jugée la question de savoir si l'exception de prescription est soulevée de manière abusive par l'intimée (c. 4.1). En l'occurrence, le comportement de l'intimée n'est pas constitutif d'un abus de droit (c. 4.2).

02 mai 2011

TF, 2 mai 2011, 4A_78/2011 (d)

sic! 9/2011, p. 504-509, « Le-Corbusier-Möbel III » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, meuble, individualité, Le Corbusier, imitation, contrat de vente, action en interdiction, action en cessation, abus de droit, conclusion, concurrence déloyale ; art. 2 al. 1 LDA, art. 2 al. 2 lit. f LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 62 al. 1 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 3 lit. e LCD, art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP.

À l'exception du remplacement de la condition de l'originalité par celle de l'individualité (c. 2.1), la définition de l'œuvre (art. 2 al. 1 LDA) n'a pas été modifiée par la LDA de 1992 (c. 2.4). Il n'y a pas de raison de revenir sur la décision du TF (ATF 113 II 190) selon laquelle le siège LC 1 ne présente pas un degré d'individualité suffisant (il est similaire à deux sièges créés antérieurement par des tiers) pour être qualifié d'œuvre (des arts appliqués [art. 2 al. 2 lit. f LDA]) et être protégé par la LDA (c. 2.4). Dans le cadre d'une action en interdiction (art. 62 al. 1 lit. a LDA) ou en cessation (art. 62 al. 1 lit. b LDA), le demandeur doit indiquer précisément ce qui doit être interdit au défendeur. Le juge est lié par les conclusions du demandeur (c. 3.2). En l'espèce, la vente, par les intimés (italiens), d'imitation de divers meubles « Le Corbusier » à des clients suisses est régie par le droit italien (art. 100 al. 1 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat déjà. Il ne peut donc pas être considéré que les intimés — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. 3.4). Doit dès lors être rejetée la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de vendre en Suisse (« in der Schweiz zu verkaufen ») ces imitations de meubles (c. 3.4-3.7). Est en revanche admise la conclusion de la recourante tendant à interdire aux intimés de proposer au public, en particulier à la vente via Internet, ces meubles en Suisse (c. 3.3). La LCD ne prohibe en principe pas l'imitation. Si elle interdit l'utilisation de prestations dans des circonstances particulières relevant de la concurrence, elle ne protège pas pour autant ces prestations en tant que telles (c. 4.1). Du fait que, dans leur publicité pour l'imitation du siège LC 1, ils ne se réfèrent pas à « Le Corbusier », ni n'utilisent son nom, ni ne font allusion à la série de meubles « LC », ni ne font usage des expressions « Original-Qualität » ou « klassische Ausführung », les intimés ne violent pas l'art. 3 lit. d et e LCD (c. 4.2).

02 décembre 2011

OG ZH, 2 décembre 2011, LK110002-0/U (d)

sic! 6/2012, p. 378-386, « Le-Corbusier-Möbel IV » ; œuvre, œuvre des arts appliqués, individualité, Le Corbusier, auteur, coauteur, imitation, contrat de vente, abus de droit, usage privé, droit de mise en circulation, publicité, dommage, remise du gain, concurrence déloyale ; art. 42 al. 2 CO, art. 10 al. 2 lit. b LDA, art. 3 lit. d LCD, art. 100 LDIP, art. 118 LDIP

Vu l'ATF 113 II 190, les modèles de meubles LC2, LC3 et LC4 sont protégés par la LDA ; tel n'est en revanche pas le cas du modèle LC1 (c. V.1.2-V.1.3). Par ailleurs, selon l'Obergericht ZH, les modèles LC6 (Fig. 2a) et LC7 (Fig. 2b) sont protégés par la LDA, car leurs éléments ne sont pas purement fonctionnels (c. V.1.4-V.1.5). Heidi Weber n'a ni la qualité d'auteur d'une œuvre indépendante ou dérivée (c. 2.1) ni la qualité de coauteur des meubles en cause, car elle n'a procédé (avec l'accord de « Le Corbusier ») sur ces meubles qu'à des modifications mineures (simplifications pour la production en série, modifications d'ordre pratique, choix de nouveaux matériaux) qui n'ont pratiquement pas d'incidence sur leur design (c. V.2.2-V.2.3). La vente, par les défendeurs (italiens), d'imitation de meubles « Le Corbusier » à des acheteurs suisses est régie par le droit italien (art. 100 LDIP, art. 118 LDIP) en vertu duquel l'acheteur devient propriétaire à la conclusion du contrat, avec la fabrication de la chose ou avec son acquisition par le vendeur. Il ne peut donc pas être considéré que les défendeurs — qui ne se chargent pas eux-mêmes du transport des meubles de l'Italie vers la Suisse, mais proposent les services d'un transporteur — vendent (art. 10 al. 2 lit. b LDA) des meubles en Suisse (et y violent des droits d'auteur). Il n'y a pas d'abus de droit, car le droit d'auteur italien n'offre pas de protection à ces meubles et n'interdit donc ni leur fabrication ni leur mise en circulation (c. V.3.2.1-V.3.2.2). Peut rester ouverte la question de savoir si un acquéreur de ces meubles (qui, selon la LDA, violent les droits de la demanderesse) peut, en Suisse, se prévaloir de l'exception d'usage privé (c. V.3.2.2 in fine). Bien que la vente elle-même ne constitue pas une violation de la LDA (c. V.3.3.3), les défendeurs violent l'art. 10 al. 2 lit. b LDA en proposant à la vente en Suisse (grâce, notamment, à l'envoi de prospectus avec des prix en francs suisses à des adresses en Suisse, ainsi qu'à l'utilisation d'un site Internet en allemand consultable en Suisse) ces imitations de meubles (LC2, LC3, LC4, LC6 et LC7) (c. V.3.3.2). Du fait qu'ils ne font pas de publicité avec le nom « Le Corbusier » (et parfois même sans l'abréviation LC), qu'ils ne laissent pas entendre que leurs produits sont ceux de la demanderesse et qu'ils ont les mêmes coûts de production et de publicité que la demanderesse, les défendeurs ne violent pas la LCD (c. VI.1), en particulier l'art. 3 lit. d LCD, en lien avec le modèle LC1 (c. VI.2). Le fait que le défendeur 1 ait détruit des pièces nécessaires au calcul du dommage doit être apprécié en sa défaveur au sens de l'art. 42 al. 2 CO (c. VII.2.1-VII.2.2). Dans la fixation du dommage (art. 42 al. 2 CO), il convient de prendre en compte un bénéfice net de 10 % du prix de vente final des meubles, ce qui prend en considération le fait que les défendeurs ont les mêmes coûts que la demanderesse et le fait que l'absence de frais de licence pour les défendeurs est compensée par les prix plus bas pratiqués par les défendeurs (c. VII.2.4.2). Vu que ce ne sont que les actes de publicité qui sont illicites et qu'ils touchent avant tout les acheteurs individuels (et non les revendeurs), il convient d'estimer à 62 % du bénéfice net le gain à restituer à la demanderesse et de réduire encore légèrement ce montant afin de tenir compte du fait que d'éventuelles ventes du modèle LC1 ne violent ni la LDA ni la LCD (c. VII.2.4.3).

Fig. 2a – Table LC6
Fig. 2a – Table LC6
Fig. 2b – Chaise LC7
Fig. 2b – Chaise LC7

07 janvier 2015

TF, 7 janvier 2015, 4A_442/2014 (f)

sic! 4/2015, p. 255-259, « Mécanisme de déclenchement » ; droit à la délivrance du brevet, for, internationalité, brevet, montre, titularité du brevet, domicile du défendeur, lieu du domicile du défendeur, contrat tacite, interprétation du contrat, transfert du droit à la délivrance du brevet, réelle et commune intention des parties, territorialité ; art. 105 al. 2 LTF, art. 1 al. 2 CO, art. 18 al. 1 CO, art. 332 al. 1 CO, art. 3 LBI, art. 5 al. 1 lit. a CPC, art. 14 al. 1 CPC, art. 2 LDIP, art. 109 al. 1 LDIP, art. 109 al. 2 LDIP, art. 110 al. 3 LDIP, art. 122 LDIP.

Lorsqu’une action tend seulement à faire contraindre le défendeur à accomplir des démarches juridiques destinées au transfert du brevet, le jugement le condamnant n’exerce qu’une influence médiate sur la titularité de ce bien immatériel et la contrainte ne résulte que de la menace d’une sanction pénale à infliger par les autorités suisses. Cette action n’est pas clairement exclue par l’art. 109 al. 1 LDIP. Elle n’est visée par aucune disposition spécifique de la loi, de sorte que les tribunaux suisses du lieu du domicile du défendeur sont compétents par l’effet de l’art. 2 LDIP (c. 2). Lorsque les deux parties ont leur siège ou domicile en Suisse et que le défendeur a fourni ses services dans ce pays, le droit suisse est applicable à leurs relations contractuelles conformément aux art. 110 al. 3 et 122 LDIP (c. 3). L’inventeur peut valablement transférer à une autre personne le droit d’introduire une demande de brevet, puis de devenir titulaire du brevet, avant même le dépôt d’une telle demande. Ce transfert n’est soumis à aucune condition de forme. Déjà avant l’achèvement de l’invention et la naissance du droit au brevet correspondant, l’inventeur peut convenir avec une autre personne que ce droit lui appartiendra d’emblée; c’est le régime ordinairement prévu par l’art. 332 al. 1 CO dans les relations entre travailleurs et employeurs. L’inventeur peut d’ailleurs aussi s’obliger valablement et par avance à exécuter, le moment venu, les actes éventuellement nécessaires à un transfert du droit au brevet (c. 4). En cas de litige sur la portée d’un accord intervenu entre l’inventeur et une autre personne revendiquant le droit au brevet, le juge doit au premier chef s’efforcer de déterminer conformément à l’art. 18 al. 1 CO leur réelle et commune intention, ce qui relève de la constatation des faits. Au stade des déductions à opérer sur la base d’indices, lesquelles relèvent elles aussi de la constatation des faits, le comportement que les cocontractants ont adopté dans l’exécution de leur accord peut éventuellement dénoter de quelle manière ils l’ont eux-mêmes compris et révéler ainsi leur réelle et commune intention (c. 4). Le comportement du défendeur, qui a personnellement concouru à ce que les droits de propriété intellectuelle afférents à la création au développement de laquelle il a collaboré soient acquis par la demanderesse – en souscrivant un acte de cession de ces droits, en répondant aux demandes d’instructions du mandataire de la demanderesse et en consentant ainsi de manière implicite au moins au fait que cette dernière dépose la demande de brevet correspondant à l’invention concernée – dénote avec certitude qu’il admettait, selon sa propre conception de la collaboration rémunérée par la demanderesse, que les droits de propriété intellectuelle se rapportant à la création à laquelle il avait collaboré, revenaient à cette dernière. Pour le TF, le défendeur a ainsi implicitement admis que le droit à la délivrance du brevet appartenait d’emblée à la demanderesse ou que, à défaut, en particulier pour les brevets américains, ils devaient lui être transférés avec son concours. Le TF procède d’office en application de l’art. 105 al. 2 LTF à cette constatation de fait qui pour lui s’impose (c. 5). L’acquisition de droits de propriété intellectuelle en contrepartie d’une rémunération peut faire l’objet d’un contrat tacitement, mais valablement conclu entre les parties, conformément à l’art. 1 al. 2 CO. Il importe peu que le lien entre la rémunération versée et l’invention considérée ne ressorte peut-être pas clairement du libellé des factures établies par le défendeur. Ce contrat englobe tous les brevets d’invention afférents au mécanisme concerné, y compris celui faisant l’objet du litige. Il autorise la demanderesse à exiger le transfert de ce brevet aussi, quelle que soit la qualification des relations contractuelles nouées entre les parties (c. 5). [NT]

CO (RS 220)

- Art. 1

-- al. 2

- Art. 332

-- al. 1

- Art. 18

-- al. 1

CPC (RS 272)

- Art. 14

-- al. 1

- Art. 5

-- al. 1 lit. a

LBI (RS 232.14)

- Art. 3

LDIP (RS 291)

- Art. 122

- Art. 2

- Art. 109

-- al. 1

-- al. 2

- Art. 110

-- al. 3

LTF (RS 173.110)

- Art. 105

-- al. 2

08 septembre 2014

TF, 8 septembre 2014, 4A_256/2014 (d)

ATF 140 III 473 ; sic! 1/2015, p. 57-59, « Recht von Hongkong » ; JdT 2015 II 202 ; for, capsule de café, droit applicable, action en cession d’une demande de brevet, internationalité, droit international privé, clause d’exception, contrat en matière de propriété intellectuelle, objet du contrat, contenu du droit applicable, preuve du contenu du droit étranger, Suisse, Hong Kong ; art. 106 al. 1 LTF, art. 1 al. 1 lit. b LDIP, art. 15 al. 1 LDIP, art. 16 al. 1 LDIP, art. 21 al. 4 LDIP, art. 110 al. 1 LDIP, art. 117 al. 1 LDIP, art. 122 al. 1 LDIP.

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours, ni par les considérants de l’autorité précédente. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité précédente (c. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP). L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un autre État que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (c. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP. S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu devra, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité précédente à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (c. 2.4). [NT]

05 janvier 2015

HG AG, 5 janvier 2015, HSU.2014.68/DP/mv (d) (mes. prov.)

sic! 7-8/2015, p. 449-455, « Totenkopf-Tatoo » ; mesures provisionnelles, droit international privé, vraisemblance, œuvre de service, montre, présomption de la qualité d’auteur, principe du créateur, risque de récidive, précision des conclusions, œuvre, double création, préjudice irréparable, urgence, péremption du droit d’agir, principe de la proportionnalité ; art. 2 ch. 1 CL, art. 60 ch. 1 CL, art. 332 al. 1 CO, art. 2 al. 1 LDA, art. 6 LDA, art. 8 LDA, art. 62 al. 1 lit. a LDA, art. 261 al. 1 CPC, art. 343 al. 1CPC, art. 10LDIP, art. 109 al. 2LDIP, art. 110 al. 1LDIP, art. 129 LDIP, art. 292 CP.

La CL prévoit une compétence internationale des tribunaux suisses pour prononcer des mesures provisionnelles. Au niveau national, la compétence locale se détermine d’après l’art. 10 LDIP, qui l’attribue soit aux tribunaux compétents au fond, soit aux tribunaux du lieu d’exécution de la mesure (c. 2.2). Comme l’intimée a son siège à Genève, il existe une compétence internationale des tribunaux suisses pour se prononcer sur le fond, d’après les art. 2 ch. 1 et 60 ch. 1 CL (c. 2.3). Au niveau national, les art. 109 al. 2 et 129 LDIP prévoient la compétence des tribunaux du lieu de l’acte ou du résultat. Comme le requérant a rendu vraisemblable que les montres litigieuses pouvaient être commandées à Wettingen et étaient livrées depuis là, la compétence des tribunaux argoviens est donnée (c. 2.4). Pour obtenir une interdiction par voie de mesures provisionnelles, le requérant doit rendre vraisemblable que les conditions de l’art. 261 al. 1 CPC sont remplies (c. 4). Une allégation est vraisemblable lorsque le juge n’est pas totalement convaincu de sa véracité, mais qu’il la considère comme globalement vraie, quand bien même tous les doutes ne peuvent être écartés. Certains éléments doivent parler pour les faits prétendus, même si le tribunal compte encore avec l’éventualité qu’ils puissent ne pas être réalisés (c. 5). D’après l’art. 110 al. 1 LDIP, les droits de la propriété intellectuelle sont régis par le droit de l'État pour lequel la protection de la propriété intellectuelle est revendiquée (c. 6.2.1). Le principe connu en droit anglais du « work for hire », selon lequel le droit d’auteur appartient originairement à l’employeur ou au mandant du créateur, n’est donc pas applicable en l’espèce (c. 6.2.2). L’art. 8 LDA prévoit une présomption légale de la qualité d’auteur et un renversement du fardeau de la preuve: celui qui est indiqué comme auteur sur l’exemplaire de l’œuvre ou au moment de sa publication bénéficie de la protection de la LDA, jusqu’à preuve du contraire. D’après le principe du créateur de l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre et l’art. 332 al. 1 CO n’est pas applicable (c. 6.3.1). Le requérant a ainsi la légitimation active (c. 6.3.3). Ses conclusions sont suffisamment précises et il faut retenir un risque de récidive, car il est rendu vraisemblable que l’intimée fabrique et commercialise les montres visées par l’interdiction (c. 6.4.2). Pour déterminer si la tête de mort dessinée par le requérant est protégée, il est décisif de savoir s’il s’agit d’une création de l’esprit humain ayant un caractère individuel. C’est l’individualité de l’œuvre qui est déterminante, pas celle de l’auteur (c. 6.5.2). L’intimée n’est pas parvenue à rendre vraisemblable qu’il existait d’autres créations semblables à celle du requérant, avant que celui-ci ne réalise la sienne. Cette dernière à la qualité d’œuvre au sens de l’art. 2 LDA (c. 6.5.3). Quant à lui, le requérant a rendu vraisemblable que sa tête de mort, sur les montres litigieuses, était reconnaissable dans son caractère individuel. L’allégation de l’intimée, selon laquelle elle se serait inspirée de crânes en sucre mexicains, sans connaître l’œuvre du requérant, n’est pas suffisamment motivée pour pouvoir juger d’une éventuelle double création (c. 6.6.3). Il est notoire que les actions en dommages-intérêts, dans le domaine de la propriété intellectuelle, sont souvent très coûteuses et difficiles à mener. De plus, il paraît vraisemblable qu’une menace de dilution du droit d’auteur pèse sur le requérant, en raison des actes illicites, ce qui pourrait aussi nuire à sa réputation. La condition du préjudice difficile à réparer est donc réalisée (c. 7.3 et 7.4). L’urgence existe lorsqu’un procès ordinaire durerait clairement plus longtemps qu’une procédure de mesures provisionnelles. Une éventuelle péremption du droit d’agir se juge d’après la durée du procès au fond (c. 8.2). En l’espèce, le requérant a attendu environ un an avant de demander des mesures provisionnelles. Cela est clairement inférieur au temps nécessaire pour obtenir un jugement au fond, si bien que la condition de l’urgence est réalisée (c. 8.3 et 8.4). L’interdiction provisionnelle doit toutefois satisfaire au principe de la proportionnalité: elle se limitera à ce qui est nécessaire (c. 9 et 9.1). L’interdiction de mettre en circulation les montres litigieuses et de les promouvoir est proportionnée, mais pas celle de les garder en stock (c. 9.3.2). Comme mesures d’exécution, la menace de la peine prévue à l’art. 292 CP et l’amende d’ordre selon l’art. 343 al. 1 lit. b CPC sont appropriées (c. 10). [VS]

CL (RS 0.275.12)

- Art. 60

-- ch. 1

- Art. 2

-- ch. 1

CO (RS 220)

- Art. 332

-- al. 1

CP (RS 311.0)

- Art. 292

CPC (RS 272)

- Art. 343

-- al. 1

- Art. 261

-- al. 1

LDA (RS 231.1)

- Art. 8

- Art. 6

- Art. 62

-- al. 1 lit. a

- Art. 2

-- al. 1

LDIP (RS 291)

- Art. 10

- Art. 109

-- al. 2

- Art. 129

- Art. 110

-- al. 1

04 mai 2009

KG GR, 4 mai 2009, ZFE 08 3 (d)

sic! 1/2010, p. 34-40, « stmoritz.com » ; motifs relatifs d’exclusion, signes similaires, nom géographique, nom de domaine, stmoritz.com, Suisse, force distinctive, droit au nom, risque de confusion, for, droit applicable ; art. 29 al. 2 CC, art. 3 al. 1 LPM, art. 13 al. 2 lit. e LPM, art. 129 al. 1 LDIP, art. 133 al. 2 LDIP.

Il suffit qu'un nom de domaine soit utilisé pour désigner un site Internet consultable, conformément à sa destination, depuis la Suisse pour fonder la compétence territoriale des tribunaux du lieu de résultat en Suisse. Comme le résultat se produit en Suisse, le droit suisse est applicable. Du fait de l'attente qu'il suscite chez l'internaute quant à l'offre d'informations, de services ou de marchandises sur le site qu'il désigne, un nom de domaine est, en tant que signe distinctif, comparable à un nom, une raison de commerce ou une marque. Sa fonction distinctive a pour conséquence qu'il doit se différencier suffisamment des signes distinctifs protégés appartenant à des tiers pour éviter tout risque de confusion. Le contenu du site Internet consultable sous le nom de domaine litigieux n'est pas de nature à exclure un éventuel risque de confusion, de même que les éléments techniques nécessaires à l'adressage sur Internet. La reprise du nom d'une commune sans aucune adjonction est de nature à provoquer un risque de confusion très élevé. L'utilisation pure du nom d'un État ou d'une commune comme nom de domaine suscite chez l'internaute l'attente d'une offre émanant de la collectivité publique en question.

25 mars 2010

HG SG, 25 mars 2010, HG.2008.137 (d)

sic! 11/2010, p. 789-794, « Refoderm » (KaiserMarkus, Anmerkung) ; action, action en interdiction, for, nom de domaine, refoderm.ch, Suisse, organe de fait, fondé de procuration, qualité pour défendre, intérêt pour agir, risque de récidive, risque de confusion, droits conférés par la marque, épuisement, importation parallèle, produits cosmétiques, produit périmé, frais et dépens ; art. 55 al. 3 CC, art. 13 al. 2 LPM, art. 55 al. 1 lit. a LPM, art. 3 lit. d LCD, art. 129 al. 2 a LDIP.

Au sens de l’art. 129 al. 2 aLDIP, le lieu du résultat de la violation du droit des marques par l’utilisation d’un nom de domaine se situe là où le site Internet correspondant est accessible (c. II.1). Il se situe en Suisse lorsque le nom de domaine (« www.refoderm.ch ») – enregistré en Suisse – permet d’accéder, en Suisse, à un site Internet offrant des produits au public suisse. Peu importe que l’intimée, titulaire du nom de domaine, ait autorisé un tiers à l’utiliser et ne l’ait pas utilisé elle-même (c. II.1). En tant qu’organe de fait, celui qui assume une tâche essentielle dans une société anonyme – en l’occurrence, un fondé de procuration – est personnellement responsable de ses fautes au sens de l’art. 55 al. 3 CC et a ainsi qualité pour défendre (c. III.1). Dans une action en interdiction (Unterlassungsbegehren) (art. 55 al. 1 lit. a LPM), un intérêt suffisant est donné lorsque le défendeur a déjà commis les actes litigieux par le passé et en conteste l’illicéité. Un danger de récidive ne peut être exclu que si le défendeur s’est formellement engagé à ne pas commettre les actes litigieux. Si les défendeurs se limitent à renoncer au nom de domaine « www.refoderm.ch » grâce auquel ils ont offert au public des produits « Refoderm » par le passé, le titulaire de la marque « Refoderm » garde un intérêt à agir contre eux (c. III.2). En vertu de l’art. 13 al. 2 LPM (et de l’art. 3 lit. d LCD), le titulaire de la marque « Refoderm » peut interdire aux défendeurs 1 et 2 d’utiliser cette marque comme nom de domaine pour commercialiser des produits « Refoderm ». La présence de la raison sociale de la défenderesse 1, en haut à droite du site Internet « www.refoderm.ch », ne suffit pas à écarter, à elle seule, un risque de confusion (c. III.3). Le principe de l’épuisement n’est pas absolu : il n’empêche pas le titulaire d’une marque d’interdire l’importation parallèle et la commercialisation en Suisse de ses produits cosmétiques originaux périmés (c. III.4). Du fait que les défendeurs 2 et 3 avaient clairement manifesté leur intention de monnayer le nom de domaine litigieux et qu’ils n’avaient ensuite pas informé le demandeur qu’ils avaient renoncé à ce nom de domaine, le demandeur ne peut pas être considéré, dans la répartition des frais, comme partie succombante en ce qui concerne la conclusion tendant au transfert du nom de domaine (c. IV).

04 mai 2009

KG GR, 4 mai 2009, ZFE 08 3 (d)

sic! 1/2010, p. 34-40, « stmoritz.com » ; motifs relatifs d’exclusion, signes similaires, nom géographique, nom de domaine, stmoritz.com, Suisse, force distinctive, droit au nom, risque de confusion, for, droit applicable ; art. 29 al. 2 CC, art. 3 al. 1 LPM, art. 13 al. 2 lit. e LPM, art. 129 al. 1 LDIP, art. 133 al. 2 LDIP.

Il suffit qu'un nom de domaine soit utilisé pour désigner un site Internet consultable, conformément à sa destination, depuis la Suisse pour fonder la compétence territoriale des tribunaux du lieu de résultat en Suisse. Comme le résultat se produit en Suisse, le droit suisse est applicable. Du fait de l'attente qu'il suscite chez l'internaute quant à l'offre d'informations, de services ou de marchandises sur le site qu'il désigne, un nom de domaine est, en tant que signe distinctif, comparable à un nom, une raison de commerce ou une marque. Sa fonction distinctive a pour conséquence qu'il doit se différencier suffisamment des signes distinctifs protégés appartenant à des tiers pour éviter tout risque de confusion. Le contenu du site Internet consultable sous le nom de domaine litigieux n'est pas de nature à exclure un éventuel risque de confusion, de même que les éléments techniques nécessaires à l'adressage sur Internet. La reprise du nom d'une commune sans aucune adjonction est de nature à provoquer un risque de confusion très élevé. L'utilisation pure du nom d'un État ou d'une commune comme nom de domaine suscite chez l'internaute l'attente d'une offre émanant de la collectivité publique en question.

11 mai 2010

TF, 11 mai 2010, 4A_616/2009 (d) (mes. prov.)

Mesures provisionnelles, décision incidente, recours, préjudice irréparable, motivation du recours, motivation de la décision, droit d’être entendu, arbitraire, droit à un procès équitable, interdiction de transfert, concurrence déloyale ; art. 9 Cst., art. 29 al. 1 et 2 Cst., art. 93 LTF, art. 98 LTF, art. 106 al. 2 LTF, art. 5 lit. a LCD, art. 136 LDIP ; cf. N 526 (arrêt du Kantonsgericht FR dans cette affaire).

Une décision (incidente) interdisant à la recourante, à titre de mesures provisionnelles, d’utiliser certaines inventions et procédés ou de mettre à disposition le savoir-faire correspondant peut faire l’objet d’un recours en matière civile, car elle est clairement susceptible de lui causer un préjudice irréparable au sens de l’art. 93 LTF (c. 1.2). Si des griefs ne sont, comme en l’espèce (le recours se limitant à faire des renvois à des notes de plaidoirie), pas suffisamment motivés, le TF n’entre pas en matière (art. 98 LTF, art. 106 al. 2 LTF) (c. 1.4-1.5). Il ne peut pas être reproché à l’autorité précédente de ne pas avoir pris en considération les arguments de la recourante, de ne pas avoir motivé sa décision (c. 2-2.2) ou de ne pas avoir pris en compte les moyens de preuve de la recourante (c. 3-3.3) et d’avoir ainsi violé le droit d’être entendu de la recourante (art. 29 al. 2 Cst. ; c. 2.1 et 3.1), son droit à la protection contre l’arbitraire (art. 9 Cst. ; c. 3.2) ou son droit à un procès équitable (art. 29 al. 1 Cst. ; c. 4). La recourante ne démontre pas en quoi l’application de l’art. 5 lit. a LCD par l’autorité précédente (c. 5-5.3) et l’octroi de mesures provisionnelles (c. 6-6.3) seraient arbitraires. Il n’est par ailleurs pas arbitraire de considérer que la décision prévoyant que « [d ]er X. SA [intimée] wird [. . . ] verboten, [. . . ] den Streitgegenstand [. . . ] an einen Dritten zu übertragen oder sonst wie ohne vorherige schriftliche Zustimmung der W. GmbH [recourante] darüber zu verfügen » interdit également dans les faits – et non seulement juridiquement – de rendre la technologie accessible (c. 6.3). La recourante ne démontre pas en quoi, au regard de l’art. 136 LDIP, il est arbitraire d’appliquer le droit suisse (LCD) (c. 7-7.2).

07 août 2012

TF, 7 août 2012, 4A_128/2012 (f)

sic! 1/2013, p. 41-46, « Vogue » (Schlosser Ralph, Remarque) ; droits conférés par la marque, marque de haute renommée, droit applicable, bonne foi, sondage, principe de la spécialité, concurrence déloyale, comportement parasitaire, usage de la marque, action en constatation de la nullité d’une marque ; art. 97 al. 1 LTF, art. 12 al. 3 LPM, art. 15 al. 1 LPM, art. 2 LCD, art. 110 al. 1 LDIP, art. 136 al. 1 LDIP.

Bien que les intimées aient leur siège à l'étranger, le droit suisse s'applique tant en ce qui concerne la concurrence déloyale, car l'activité illicite prétendue s'est déployée sur le marché suisse (art. 136 al. 1 LDIP), que s'agissant du droit des marques, car la protection de la propriété intellectuelle a été revendiquée pour la Suisse (art. 110 al. 1 LDIP) (c. 2). Un acte de concurrence déloyale ne suppose ni mauvaise foi, ni faute de son auteur, mais uniquement une violation objective des règles de la bonne foi. Avec leur argumentation, qui vise à démontrer leur intention subjective, les recourants cherchent à rectifier l'état de fait sur un point qui ne peut pas influencer le sort de la cause, ce qui est exclu par l'art. 97 al. 1 LTF (c. 3). La notion de haute renommée (art. 15 LPM) ressortit au droit, contrairement à la question de savoir si une marque est connue d'un large public et bénéficie d'une image positive auprès des personnes qui la connaissent (c. 4.1.1). Les recourants n'ayant pas sollicité la mise en œuvre d'un sondage pour établir que la marque « Vogue » s'est imposée comme marque de haute renommée, l'approche de la cour cantonale — qui s'est référée à une enquête démoscopique réalisée à la requête des intimées — est conforme à la jurisprudence. La marque « Vogue » a été reconnue et associée à un magazine par une personne sur quatre. Il s'agit donc d'une marque de haute renommée au sens de l'art. 15 al. 1 LPM (c. 4.1.2). C'est à tort que la cour cantonale a jugé que la marque de haute renommée ne conférait à son titulaire une protection étendue qu'aux produits similaires à ceux pour lesquels la marque s'est imposée (c. 4.2). Les intimées sont en droit d'interdire l'utilisation de la marque « Vogue » pour toutes les catégories de biens et services et non seulement pour celles pour lesquelles leur marque est utilisée (c. 4.2.2). Il ne suffit pas d'alléguer le défaut d'usage pour en établir la vraisemblance. En l'espèce, les recourants auraient pu faire entendre des commerçants afin qu'ils puissent dire s'ils avaient déjà entendu parler de produits de la classe 14 portant les marques litigieuses (c. 5). Le recours est entièrement rejeté (c. 6). [JD]

09 décembre 2011

TF, 9 décembre 2011, 4A_692/2011 (d)

Action, action en fourniture de renseignements, violation d’un brevet, cause à caractère pécuniaire, droit international privé, droit étranger, arbitraire, décision étrangère, contrat, prescription, délai, abus de droit ; art. 96 lit. b LTF, art. 2 al. 2 CC, art. 18 LDIP, art. 117 al. 2 et 3 LDIP, art. 148 LDIP, § 199 al. 1 dBGB.

En vertu des art. 117 al. 2 et 3 et 148 LDIP, le droit allemand est applicable à la demande de renseignements litigieuse (c. 2). D'après l'art. 96 lit. b LTF, dans une affaire pécuniaire, un recours ne peut être formé que pour application arbitraire (c. 2.2) du droit étranger désigné par le droit international privé suisse (c. 2.1). Les recourantes ont été condamnées en Allemagne, dans le cadre d'un jugement constatant la violation d'un brevet, à fournir à B. des renseignements portant sur la commercialisation de cartouches d'encre (c. A). Ne constitue pas une application arbitraire du § 199 al. 1 dBGB le fait de considérer que le délai de prescription (de 3 ans) — auquel est soumis le droit à des renseignements (au sujet d'informations auxquelles les recourantes n'avaient pas accès dans le cadre de leurs rapports contractuels avec l'intimée) litigieux (c. 3) — a commencé à courir le 31 décembre 2003, c'est-à-dire à la fin de l'année durant laquelle le jugement allemand a été rendu et durant laquelle les recourantes ont donc eu connaissance du fondement de leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée. N'y change rien le fait que B. n'ait (par écrit), que le 25 février 2008, invité les recourantes à faire valoir leur droit à des renseignements à l'encontre de l'intimée (c. 3.1-3.2). En application de l'art. 18 LDIP et vu que la cause présente un lien suffisant avec la Suisse, c'est conformément au droit suisse (art. 2 al. 2 CC) que doit être jugée la question de savoir si l'exception de prescription est soulevée de manière abusive par l'intimée (c. 4.1). En l'occurrence, le comportement de l'intimée n'est pas constitutif d'un abus de droit (c. 4.2).

07 novembre 2013

TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 (d)

sic! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II » ; for, compétence matérielle, droit transitoire, dispositions transitoires, entrée en vigueur, effet rétroactif, moyens de preuve, lieu de l’acte, lieu du résultat, action en fourniture de renseignements, produits érotiques, préservatif ; art. 109 al. 2 LDIP, art. 191 al. 1 LDIP, art. 197 al. 2 LDIP ; cf. N 415 (vol. 2007-2011 ; KG SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 ; sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter /Harry Popper (fig.) ») et N 902 (TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014 ; arrêt du TF dans cette affaire).

C’est à juste titre que l’autorité précédente a considéré que dans le cadre d’une action portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle, la détermination du lieu de l'acte ou du résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP ne concernait que la compétence de l’autorité et non le bien-fondé de l’action (c. 2.2). Cependant, c’est à tort que cette autorité a appliqué le régime de droit transitoire de l’art. 196 al. 1 LDIP à des questions de compétence au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP. L’art. 197 LDIP, qui établit le régime de droit transitoire relatif aux questions de compétence, prévoit que le nouveau droit s’applique dès son entrée en vigueur avec effet rétroactif. L’erreur de l’autorité de première instance l’a conduite à refuser, en violation du droit fédéral, une partie des moyens de preuves établissant les actes contrefaisants et leur résultat qui étaient soumis par la demanderesse, au motif qu’ils étaient antérieurs à l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP. Pour cette raison déjà, la décision attaquée doit être révoquée et l’affaire renvoyée à l’autorité précédente pour un nouvel examen (c. 2.3). L’autorité de première instance aurait dû examiner les moyens de preuve suggérant que des livraisons et des ventes avaient été réalisées dans le canton de Schwyz (après l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP), car la livraison et la vente de marchandises contrefaites peuvent constituer des actes ou un résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP (c. 2.4). [AC]

07 novembre 2013

TF, 7 novembre 2013, 4A_224/2013 (d)

sic! 3/2014, p. 162-163, « Harry Potter / Harry Popper (fig.) II » ; for, compétence matérielle, droit transitoire, dispositions transitoires, entrée en vigueur, effet rétroactif, moyens de preuve, lieu de l’acte, lieu du résultat, action en fourniture de renseignements, produits érotiques, préservatif ; art. 109 al. 2 LDIP, art. 191 al. 1 LDIP, art. 197 al. 2 LDIP ; cf. N 415 (vol. 2007-2011 ; KG SZ, 17 août 2010, ZK 2008 19 ; sic! 2/2011, p. 108-110, « Harry Potter /Harry Popper (fig.) ») et N 902 (TF, 26 janvier 2015, 4A_552/2014 ; arrêt du TF dans cette affaire).

C’est à juste titre que l’autorité précédente a considéré que dans le cadre d’une action portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle, la détermination du lieu de l'acte ou du résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP ne concernait que la compétence de l’autorité et non le bien-fondé de l’action (c. 2.2). Cependant, c’est à tort que cette autorité a appliqué le régime de droit transitoire de l’art. 196 al. 1 LDIP à des questions de compétence au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP. L’art. 197 LDIP, qui établit le régime de droit transitoire relatif aux questions de compétence, prévoit que le nouveau droit s’applique dès son entrée en vigueur avec effet rétroactif. L’erreur de l’autorité de première instance l’a conduite à refuser, en violation du droit fédéral, une partie des moyens de preuves établissant les actes contrefaisants et leur résultat qui étaient soumis par la demanderesse, au motif qu’ils étaient antérieurs à l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP. Pour cette raison déjà, la décision attaquée doit être révoquée et l’affaire renvoyée à l’autorité précédente pour un nouvel examen (c. 2.3). L’autorité de première instance aurait dû examiner les moyens de preuve suggérant que des livraisons et des ventes avaient été réalisées dans le canton de Schwyz (après l’entrée en vigueur du nouvel art. 109 al. 2 LDIP), car la livraison et la vente de marchandises contrefaites peuvent constituer des actes ou un résultat au sens de l’art. 109 al. 2 LDIP (c. 2.4). [AC]